Correspondance de Voltaire/1764/Lettre 5748

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Correspondance : année 1764GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 43 (p. 304-305).

5748. — À M.  BERTRAND.
Ferney, 28 auguste.

Dans le fond de mon ermitage,
Loin de l’illusion des cours,
Réduit, helas ! à vivre en sage,
Ne l’ayant pas été toujours,
Et ne l’étant qu’en mon vieux âge,
La retraite est mon seul recours,
Je ne ferai plus de voyage.

Que la Gloire avec les Amours
Couronnent, devers Cracovie,
Un prince aimé de sa patrie[1],
Qui lui promet de si beaux jours ;
Trop éloigné de sa personne,
Je me borne à former des vœux :
On lui décerne une couronne,
Et je voudrais qu’il en eût deux.

Voilà, mon cher philosophe, les prédictions du Nostradamus de Ferney, que vous pouvez montrer à M. le comte de Mnizek, à qui je présente mes respects.

J’ai déjà lu avec grand plaisir quelque chose de votre Logique[2] ; je me flatte que bientôt il en paraîtra dans la Gazette littéraire un extrait dont vous ne serez pas mécontent.

Conservez toujours un peu de bonté pour ce vieux malade qui est obligé de dicter vers et prose.

  1. Stanislas-Auguste Poniatowski, l’un des amants de Catherine II, fut par son influence élu roi de Pologne, le 7 septembre 1764. (B.) — Vojez tome XXI, page 405.
  2. Essai sur l’art de former l’esprit, ou Premiers Éléments de la logique ; Lyon, 1764, in-12.