Correspondance de Voltaire/1764/Lettre 5759

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Correspondance : année 1764GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 43 (p. 315-316).
5759. — À DE MADAME LA MARQUISE DU DEFFANT[1].
Paris, 10 septembre 1764.

M. d’Argenson arriva ici le 12 de juillet, à demi mort, une fièvre lente, la poitrine affectée ; son état empirait tous les jours, mais insensiblement : le 22 du mois dernier, on s’aperçut qu’il était à l’extrémité : on envoya chercher le curé, qui resta avec lui jusqu’à cinq heures du soir qu’il mourut. De toutes les pratiques accoutumées, il ne fut question que de l’extrême-onction ; on n’a pu savoir ce qu’il pensait, n’ayant point parlé ; ainsi on en peut porter tel jugement que l’on voudra. Le président de Montesquieu fit tout ce qu’on a coutume de faire, et dit tout ce qu’on voulut lui faire dire. Je trouve que la manière dont on meurt ne prouve pas grand’chose, et ne peut être une autorité ni pour ni contre ; un tour d’imagination en décide, et bien sot est celui qui se contraint dans ses derniers moments. N’écrivez-vous point au président ? M. d’Argenson lui a laissé un manuscrit des lettres de Henri IV ; il a reçu des compliments de tout le monde.

Vous n’aurez que cela de moi aujourd’hui ; un autre jour nous philosopherons.

  1. Correspondance complète, édition Lescure, 1765.