Correspondance de Voltaire/1765/Lettre 5972

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Correspondance : année 1765GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 43 (p. 515-516).

5972. — À M.  DEBRUS[1].
2 avril.

M, Debrus est probablement informé que le 21 mars toutes les chambres du parlement de Toulouse s’assemblèrent, et qu’on nomma des commissaires pour faire des remontrances au roi ; ils doivent demander : 1° que Sa Majesté n’accorde plus si facilement des évocations ; 2° si elle en accorde, que ce ne soit que d’un parlement à un autre ; 3° que le roi n’ait point égard au jugement des requêtes de l’hôtel eu faveur des Calas ; 4° que le roi approuve et conserve à jamais la procession du 17 mai, par laquelle on remercie Dieu solennellement d’avoir répandu le sang de ses frères. Enfin le parlement a défendu, sous des peines corporelles, d’afficher l’arrêt qui justifie la famille Calas.

Ce nouvel excès va indigner l’Europe, mais je ne sais encore si Versailles ne ménagera pas le parlement de Toulouse. Ces nouvelles me fortifient dans l’idée où j’ai toujours été que Mme  Calas ne devait faire aucune démarche touchant la prise à partie, sans avoir auparavant fait consulter monsieur le vice-chancelier et monsieur le contrôleur général[2].

Je prie M. Debrus d’envoyer ce billet à Mme  Calas, après l’avoir communiqué à M. de Végobre et à ses amis. Je mourrai content si je peux contribuer à bannir de la terre le fanatisme et l’intolérance.

Je souhaite à M. Debrus une santé meilleure que la mienne.

  1. Cette pièce clot la série des lettres à Debrus ; elle a été lue à la Convention nationale par Bézard, et insérée au Moniteur ; elle était déjà tombée dans le domaine de la publicité lorsqu’elle a paru dans le recueil de Cayrol et François. (A. C.)
  2. Le vice-chancelier Maupeou, consulté à ce sujet, évita de répondre. Le contrôleur général de Laverdy ne paraît pas avoir été interrogé. La prise à partie des premiers juges, c’est-à-dire la revendication de dommages et intérêts contre le parlement et les capitouls, n’eut pas lieu, quoique Voltaire l’ait vivement désiré. (A. C.)