Correspondance de Voltaire/1765/Lettre 6065

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Correspondance : année 1765GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 44 (p. 25-26).

6065. — À MADEMOISELLE CLAIRON.
Aux Délices, 12 juillet.

Il n’y a, mademoiselle, que le plaisir de vous voir et de vous entendre qui puisse me ranimer : vous serez ma fontaine de Jouvence. J’ai auprès de moi à présent toute ma famille ; je vous l’amènerai ; nous passerons les monts pour vous admirer. Tout ce qu’on me dit de vous me ferait courir au bout du monde pour vous seule. Je vous connaissais déjà les plus grands talents ; vous les avez poussés depuis quelques années à cette perfection à laquelle il est si rare d’arriver. Il n’y a personne qu’on vous compare. Serais-je assez heureux encore pour faire quelque chose que vous daignassiez embellir ? Il faut que je me hâte, car malheureusement je baisse autant que vous vous élevez. Il ne vous faut ni de vieux soupirants, ni de vieux poëtes. Je ne sais pas encore dans quel temps vous serez à Lyon ; mais j’écris à Lyon pour m’en informer, dans la crainte que ma réponse ne vous trouve plus à Marseille.

M. le duc de Villars m’a fait l’honneur de me mander qu’il était enchanté de vous. Vraiment je le crois bien. J’espère que M. Tronchin me mettra bientôt en état d’être au nombre de ceux que vous étonnerez à Lyon, et à qui vous arracherez des larmes. Comptez que personne ne s’intéresse plus que moi à vos succès, à votre gloire, et à votre bonheur. C’est avec ces sentiments que je serai toute ma vie, mademoiselle, votre, etc.