Correspondance de Voltaire/1765/Lettre 6201

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Correspondance : année 1765GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 44 (p. 152).

6201. — À M. THIERIOT.
28 décembre.

Mon ancien ami, vous allez donc être physiquement grand-père ; je ne le suis que moralement. Nous élevons tout doucement la marmotte que Mme Dupuits nous a faite.

Je n’aime que les anciennes lois romaines qui favorisent la liberté de l’adoption. J’ai été heureux bien tard dans ce monde ; mais enfin je l’ai été, et peu de gens en diront autant d’eux.

Voici ma réponse à votre belle dame qui s’amuse à faire des romans. Je ne la cachette point avec un petit pain, parce qu’on dit que cela n’est pas honnête pour la première fois ; je ne la cachette point avec de la cire, parce qu’un cachet sous l’enveloppe de frère Damilaville serait tâté par les doigts de messieurs de la poste, inconvénient qu’il faut toujours éviter. Ayez donc la bonté de cacheter la lettre à Mme de La Martinière-Benoist[1], et de la faire rendre.

Il faut que le chocolat soit une bonne chose, s’il vous a rendu des yeux, des oreilles, et un estomac ; moi, qui n’ai plus rien de tout cela, je vais donc prendre du chocolat aussi ; mais comme je suis plus vieux de quatre ans que vous, je doute que le chocolat me fasse le même bien. Achevons doucement notre carrière, en foulant aux pieds les préjugés, en riant des sots, et en fuyant les fanatiques.

  1. Cette lettre manque.