Correspondance de Voltaire/1768/Lettre 7179

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Correspondance : année 1768GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 45 (p. 530-531).
7179. — À M. MAIGROT.
À Ferney, 12 février.

Je vous remercie, monsieur, de toutes vos bontés. La lettre de Louis XIV m’était absolument nécessaire : elle fait voir avec évidence qu’il en voulait personnellement à l’archevêque de Cambrai[1]. Je trouve que, dans cette affaire, ce monarque se conduisit plus en homme piqué qu’en roi ; et que le cardinal de Bouillon concilia noblement son devoir d’ambassadeur avec celui d’un ami.

J’ai déjà donné la bataille de Steinkerque. J’ai dit simplement que la France regretta le prince de Turenne, qui donnait l’espérance d’égaler un jour son grand-oncle[2].

J’ai retrouvé heureusement la lettre de Louis XIV au cardinal de La Trimouille[3], écrite en 1710, contre le cardinal de Bouillon. Il dit, dans cette lettre, qu’il est à craindre que ce doyen du sacré-collége ne devienne un jour pape. Cette anecdote est curieuse, et mérite de passer à la postérité. Le temps est venu où la vérité doit paraître ; et, quand on la dit sans blesser les bienséances, on ne doit déplaire à personne.

Je vous supplie, monsieur, de vouloir bien présenter mon respect et mes remerciements à monseigneur le duc de Bouillon. Je ne suis point étonné qu’un homme de votre mérite soit auprès de lui. On ne peut-être plus reconnaissant que je le suis des lumières que vous m’avez communiquées.

J’ai l’honneur d’être avec tous les sentiments d’un cœur pénétré de vos bontés, monsieur, votre, etc.

  1. Voyez tome XV, page 73.
  2. Voyez tome XIV, page 315.
  3. Voyez tome XV, page 75.