Correspondance de Voltaire/1768/Lettre 7329

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Correspondance : année 1768GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 46 (p. 113-114).
7329. — À MADAME DE HORN[1].
Au château de Ferney, 12 septembre.

Madame, j’irai bientôt rejoindre le héros votre père, et je lui apprendrai avec indignation l’état où est sa fille. J’ai eu l’honneur de vivre beaucoup avec lui ; il daignait avoir de la bonté pour moi. C’est un des malheurs qui m’accablent dans ma vieillesse, de voir que la fille du héros de la France n’est pas heureuse en France. Si j’étais à votre place, j’irais me présenter à Mme la duchesse de Choiseul. Mon nom me ferait ouvrir les portes à deux battants, et Mme la duchesse de Choiseul, dont l’âme est juste, noble et bienfaisante, ne laisserait pas passer une telle occasion de faire du bien. C’est le meilleur conseil que je puisse vous donner, et je suis sûr du succès quand vous parlerez. Vous m’avez fait sans doute trop d’honneur, madame, quand vous avez pensé qu’un vieillard moribond, persécuté et retiré du monde, serait assez heureux pour servir la fille de M. le maréchal de Saxe. Mais vous m’avez rendu justice en ne doutant pas du vif intérêt que je dois prendre à la fille d’un si grand homme.

J’ai l’honneur d’être avec respect, madame, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

Voltaire,
gentilhomme ordinaire de la chambre du roi.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François. — Voyez la lettre 7319.