Correspondance de Voltaire/1768/Lettre 7337

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Correspondance : année 1768GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 46 (p. 121-122).
7337. — À M. BORDES.
16 septembre.

Mon cher correspondant, si les ouvrages gais guérissent les vapeurs, il faut vous dire : Médecin, guèris-toi toi-même[1] ; vous êtes à la source des remèdes. Qui fait, quand il le veut, des choses plus gaies, plus agréables, plus spirituelles que vous ?

Il est très-vrai que Jean-Jacques a mis tous ses petits bâtards à l’hôpital. Je suis fort aise qu’il fasse une fin, et que la sorcière termine ses amours en épousant son sorcier. Je ne croyais pas qu’il y eût dans le monde quelqu’un qui fût fait pour Jean-Jacques.

Il est bien vrai que j’avais promis[2], il y a trois mois, à l’électeur palatin, d’aller lui faire ma cour ; mais ma détestable santé m’a privé de cet honneur et de ce plaisir.

Je n’ai point entendu parler des prétendues faveurs du parlement de Paris. J’ai un neveu actuellement conseiller à la Tournelle, qui ne m’aurait pas laissé ignorer tant de bontés. On ne fait pas toujours tout ce dont on serait capable.

Je vous embrasse de tout mon cœur, mon cher ami ; portez-vous bien. J’espère recevoir encore quelques amusettes pour vous.

  1. Luc, iv, 23.
  2. La lettre où Voltaire avait fait cette promesse manque ; à moins pourtant que Voltaire ne veuille ici faire allusion à la lettre qu’il écrivait à Colini le 29 mai 1768 (n° 7269), dans laquelle il lui promet, « mort ou vif », de l’embrasser à la fin de juillet.