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Correspondance de Voltaire/1769/Lettre 7648

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Correspondance : année 1769GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 46 (p. 428-429).


7648. — À MADAME LA COMTESSE DE ROCHEFORT.
Ferney, 31 auguste.

J’ai reçu la vôtre, qui m’a fait une grande joie : car, quoique vous n’ayez pas dix-huit ans, cependant vous raisonnez comme une femme de quarante, et outre cela vous avez un très-bon petit cœur, ce qui vous attirera toujours beaucoup d’amis. Un homme qui vous a vue dans votre province nous disait l’autre jour en famille : « Cette Mme Clotier est très-belle, mais elle pourrait se passer de beauté. »

Nous sommes toujours très-attachés, ainsi que monsieur votre époux, à M. l’abbé Bigot[1] et à M. d’Ermide[2]. MM. de Bruguières[3], nos ennemis, nous accuseraient en vain de vendre de la contrebande ; nous n’en vendons point. Toutes nos marchandises sont du cru de France ; et pourvu qu’on ne nous desserve pas auprès de M. Le Prieur[4], nous nous moquons de MM. de Bruguières et des financiers. Nous souhaitons seulement que vous n’ayez plus la Peste[5] et nous espérons toujours que M. Bigot sera votre médecin ; qu’il conservera toujours sa bonne réputation, malgré la tante[6], qui est, je crois, une bonne femme.

Notre manufacture va toujours son petit train, et nous comptons dans quelques semaines pouvoir vous envoyer des échantillons. Nous reçûmes, il y a un mois, un maroquin rouge fort propre : nous ne savions d’où il venait ; mais enfin nous avons jugé qu’il vient de votre boutique, car vous n’avez que du beau et du bon : c’est une justice qu’on rend à Mme Clotier et à monsieur son cher époux.

Je suis, madame Clotier, avec un profond respect, votre très-humble servante et commère.

Girafou.

  1. Le duc de Choiseul.
  2. Le prince de Beauvau.
  3. Gens du parlement.
  4. Louis XV
  5. Le duc de Villeroi.
  6. Mme Du Barry.