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Correspondance de Voltaire/1770/Lettre 7821

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Correspondance : année 1770GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 47 (p. 15-16).
7821. — À M. LE COMTE DE ROCHEFORT.
Ferney, 12 mars.

Vous avez bien raison, monsieur, de demander ma bénédiction ; car enfin je suis capucin ; j’ai reçu mes patentes de notre général qui réside à Rome. J’ai le droit de porter le cordon de saint François, et j’aurais baptisé mademoiselle votre fille très-proprement, et tout aussi bien qu’un curé, si j’avais été à Paris. J’ai prié Dieu avec ferveur pour la santé de l’accouchée, et pour la prospérité de toute la famille.

J’ai vu avec horreur mes voisins les Genevois s’égorger. L’Église abhorre le sang ! nous avons beaucoup d’émigrants dans le pays de Gex ; cela peuplera la colonie de M. le duc de Choiseul. On aligne aujourd’hui les rues de la ville qu’il fait bâtir. Je n’aurai pas la satisfaction de voir cette ville ; je suis dans toute la faiblesse de la décrépitude, et malade au lit ; mais mon cœur bat très-fortement pour vous, et sera à vous deux tant qu’il battra.

Le paquet que je vous avais envoyé il y a trois mois n’est pas le seul qui ait été perdu. Dieu soit béni !

Recevez la bénédiction du frère François.