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Correspondance de Voltaire/1771/Lettre 8308

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Correspondance : année 1771GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 47 (p. 451).
8308. — À MADAME LA PRINCESSE DE TALMONT[1].
À Ferney, 15 juin.

Madame, un vieillard aveugle et mourant a été instruit, par les yeux d’autrui, que votre cachet était à une lettre du 4 juin, non signée de vous. Le vieillard est fort éloigné d’oser se mêler des querelles de nations : vous lui avez rendu la vôtre[2] trop respectable ; elle a sauvé Vienne du joug des Ottomans, et peut-être un jour contribuera-t-elle à chasser de l’Europe ces usurpateurs barbares. Il y a longtemps qu’on en serait délivré si les princes chrétiens avaient pu préférer l’honneur et le salut public à ce qu’ils ont cru leur intérêt : les personnes de votre sexe et de votre naissance, qui triomphent aujourd’hui par terre et par mer de ces déprédateurs du genre humain, me paraissent sûres, du moins par ce côté, et dignes de votre estime.

Il n’appartient pas à un vieillard, obscur et mort au monde, de porter ses vues plus loin. Il se souvient avec reconnaissance de vos anciennes bontés, et vous est attaché, madame, avec beaucoup de respect.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. La Pologne.