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Correspondance de Voltaire/1773/Lettre 8798

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Correspondance : année 1773GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 48 (p. 334-335).
8798. — À M. LE COMTE DE ROCHEFORT.
À Ferney, mars.

Mon cher Christin m’a montré, monsieur, la lettre que vous lui avez écrite ; vous lui avez fait une belle peur, et à moi encore davantage. Je ne serais pas étonné qu’en effet il y eût de ces incidents singuliers dans les mauvaises pièces qu’on joue aujourd’hui sur votre théâtre. Vous dites à Christin que vous m’avez écrit sous l’enveloppe de M. Marin ; je n’ai point reçu cette lettre. Il faut que quelque malin enchanteur ait escamoté ce que vous m’écriviez : cela redouble encore mes inquiétudes. Je suis un peu comme Atticus, attaché à César et à Pompée, et par conséquent fort embarrassé. Je trouve la comparaison d’Atticus fort bonne, car cet Atticus était malingre comme moi ; mais, ne pouvant plus supporter la vie, il se tua, et je ne me tue point ; je suis seulement confondu de ce que César, qui vous croit probablement ami de Pompée, vous ait défendu de rire devant lui[1]. . Je vous envoie un neuvième[2] dont plusieurs endroits vous feront rire quand vous n’aurez rien de mieux à faire. Pour Mme Dixneufans, on dit qu’elle n’a été occupée que de danser chez madame la dauphine. Tâchez tous deux de venir voir cet été madame votre mère, et de faire chez nous une longue pause.

Embrassez tous deux pour moi mon cher d’Alembert, quand vous le verrez. L’oncle et la nièce vous font les plus tendres compliments.

  1. Dans Beuchot, la lettre entière à Rochefort du 3 mars se trouve cousue à cet alinéa.
  2. Neuvième tome des Questions. Ces deux derniers alinéas ont dû faire partie d’une autre lettre. (G. A.)