Cours d’agriculture (Rozier)/ÉCLATS

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ÉCLATS. (Jard.) On appelle ainsi des parties séparées des souches mères, et qui ont une organisation semblable, mais qui n’ont pas de racines particulières ; ce sont de véritables bourgeons qui, au lieu de croître sur des branches, viennent sur le corps des racines. Il est plusieurs végétaux, soit parmi les herbacés, soit parmi les ligneux, qui se multiplient par la voie des éclats de leurs racines, tels que plusieurs ombellifères vivaces à grosses racines solides ; des câpriers, des figuiers, et des palmiers même. Ce qui sera dit sur la manière de séparer les œilletons, de les faire reprendre et de les cultiver, est absolument la même chose pour les éclats, et nous y renvoyons. On doit observer seulement de ne pas arroser les éclats avant qu’ils ne poussent ; de les tenir plus sèchement, et d’exciter leur végétation par une douce chaleur, particulièrement pour les espèces des climats chauds. À défaut d’éclats tirés des racines, on éclate quelquefois des tiges dans la longueur de plusieurs pieds, et avec les racines qui se trouvent correspondre à la portion éclatée. Ce moyen ne réussit pas toujours ; on l’emploie pour quelques végétaux rares, et, avec des soins, il donne souvent des résultats satisfaisans. Voici le moyen employé : Veut-on multiplier un jeune arbre de deux à trois pieds de haut, dont la tige a environ deux pouces de diamètre par bas ? on l’enlève de terre avec toutes les racines ; on lui coupe la tête horizontalement avant la naissance des branches, ensuite on le fend en deux ou même en quatre parties dans toute sa longueur, et on laisse à chaque quartier de l’individu, la portion de racines qui lui appartient ; on la rogne un peu par l’extrémité, et on supprime toutes les parties qui ont pu être déchirées par l’opération.

On plante chaque quartier séparément dans une terre meuble et substantielle, soit en pleine terre ou en pots. Il convient ensuite d’envelopper de mousse fraîche, fixée avec de la ficelle, toute la partie de la tige qui se trouve hors de terre, et de la couvrir par-dessus la mousse d’une légère enveloppe de paille longue. Celle opération a pour but d’abriter la plaie, dans toute sa longueur, du contact de l’air, et de l’entretenir humide et fraîche. Ce moyen de multiplication est plus extraordinaire qu’utile ; il compromet l’existence d’un arbre qu’on auroit pu multiplier plus sûrement de marcotes, de greffes ou même de boutures. Nous l’avons vu pratiquer à Gênes sur de jeunes orangers, des citronniers, ainsi que des souches de câpriers ; mais nous n’en avons pas constaté la réussite. Il est assez curieux de savoir ce que devient la moelle dans ces arbres, et les vaisseaux qui communiquent de ce conduit médullaire entre l’aubier et l’écorce, pour y déposer le cambium qui, suivant l’opinion de Daubenton, sert à fournir les couches ligneuses. Des expériences suivies avec soin sur cette partie, pourroient jeter beaucoup de jour sur un point de physique végétale très-intéressant. On multiplie les ognons écailleux, tels que le martagon du Canada, (lilium superbum L.) et autres, en séparant les écailles les unes des autres. Ces écailles, après avoir été exposées à l’air pendant quelques heures à l’ombre, sont plantées dans des caisses ou des terrines remplies de terreau de bruyère, et placées à l’exposition du levant. Il ne leur faut que de très légers bassinages pendant la fin de l’automne, temps le plus favorable à leur plantation, encore moins pendant l’hiver, et un peu davantage au printemps. Ces écailles poussent, dès le premier printemps, de petites bulbes qui ne produisent qu’une feuille, cette première année ; mais, les années suivantes, elles en produisent davantage, et sont en état de fleurir la cinquième année. Les hivers, il convient de couvrir ces jeunes bulbes de litière, ou de les rentrer pendant les fortes gelées dans une serre froide ; enfin, on fend quelquefois eu deux ou en quatre parties, des ognons qu’on veut multiplier, et cette opération réussit très-souvent : c’est le jour de la plantation qu’elle s’exécute, peu d’heures auparavant. Les parties d’ognons sont plantées dans des pots avec du terreau de bruyère plus sec qu’humide, et on ne les arrose que lorsqu’ils commencent à pousser. (T.)