Cours d’agriculture (Rozier)/CRAPAUDINE

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Hôtel Serpente (Tome troisièmep. 542-543).


CRAPAUDINE, Médecine Vétérinaire. C’est une espèce d’ulcère provenant d’une atteinte que le cheval se donne lui-même à l’extrémité du paturon, sur le milieu de cette partie, en passageant ou en chevalant.

Ce mal se traite de même que l’atteinte simple. (Voyez Atteinte)


Crapaudine Humorale, Médecine vétérinaire. Celle-ci naît le plus souvent de cause interne, & elle est infiniment plus dangereuse que celle que nous venons de définir ; elle est située, comme l’autre, sur le devant du paturon, directement au-dessus de la couronne ; elle se manifeste par une espèce de gale d’environ un pouce de diamètre ; le poil tombe, & la matière qui en découle est extrêmement puante, & elle est même quelquefois si corrosive, & tellement âcre, qu’elle sépare l’ongle, & qu’elle provoque la chute de l’ongle ou du sabot. (Voyez Sabot) On doit concevoir, par conséquent, combien il importe de remédier promptement à ce mal.

Traitement. On y parvient aisément par les remèdes suivans. On doit débuter par les remèdes généraux, & non par l’application des topiques dessicatifs, plutôt nuisibles dans le commencement, que salutaires : il faut en conséquence, pratiquer une saignée à la veine du col, donner à l’animal des lavemens émolliens pendant trois jours, & des lavages de même nature, afin de le disposer au breuvage purgatif, qu’on lui administrera le quatrième jour de la saignée, le matin à jeûn, & dans lequel on n’oubliera point de faire entrer l’aquila alba, ou mercure doux. Selon les progrès du mal, on réitérera le breuvage purgatif, qui sera toujours précédé par beaucoup des lavemens émolliens & des boissons de même nature, d’autant plus nécessaires dans cette circonstance, qu’ils préviennent les tranchées & les coliques dangereuses que l’usage des substances purgatives occasionne presque toujours dans le cheval & les animaux de la même espèce. L’animal suffisamment évacué, on le mettra à l’usage du safran des métaux, autrement dit, crocus metallorum, à la dose d’une once par jour, donnée chaque matin, dans une jointée de son, à laquelle on mêlera d’abord quarante grains d’æthiops minéral, que l’on augmentera chaque jour, de dix grains, jusqu’à la dose de cent : l’on continuera l’usage du crocus & de l’æthiops, à cette même dose de cent grains, encore sept ou huit jours, plus ou moins, selon les effets de ces médicamens, effets dont il sera aisé de juger, par l’inspection des parties sur lesquelles le mal a établi son siége. La tisane des bois sudorifiques est encore, dans ces sortes de cas, d’un très-grand secours. Pour cet effet, on fait bouillir de salse pareille, squine, sassafras, gayac, égale quantité, c’est-à-dire, trois onces de chaque, dans environ quatre pintes d’eau commune, jusqu’à réduction de moitié : on passe cette décoction ; on y ajoute deux onces crocus metallorum ; on remue & l’on agite le tout ; on humecte le son, que l’on présente le matin à l’animal, avec une chopine de cette tisane, qui doit être chargée plus ou moins proportionnément au besoin & à l’état de l’animal malade. Il peut arriver que l’animal refuse cet aliment ainsi détrempé : dans ce cas, il faut lui donner la tisane avec la corne.

Quant aux remèdes externes, l’hypiatre ne doit jamais en tenter l’usage, que lorsque le cheval a été suffisamment évacué, & qu’il aura été tenu quelques jours à celui du crocus metallorum, & au traitement ci-dessus indiqué. Il est rare, qu’après l’administration des remèdes internes, les symptômes se montrent tels qu’on les a vus ; l’inflammation est dissipée, la partie se dessèche d’elle-même, & il ne s’agit alors que de laver la plaie avec du vin chaud, & de la maintenir nette & propre, sans avoir recours aux emplâtres & onguens. On apperçoit quelquefois à l’endroit de la plaie un léger écoulement : dans cette circonstance, il s’agit de substituer au vin en lotion, de l’eau de vie & du savon, & si le flux est toujours considérable, il faudra bassiner la partie avec de l’eau dans laquelle on aura fait bouillir de la couperose blanche & de l’alun, ou bien avec de l’eau de chaux seconde, & l’on finira la cure par purger l’animal, qui parviendra à une guérison parfaite, sans le secours de cette foule de recettes & d’eaux, d’emplâtres & d’onguens, si inutilement employés par certains maréchaux des villes, & presque par tous ceux de la campagne. M. T.