Cours d’agriculture (Rozier)/HYDROCÉPHALE

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Hôtel Serpente (Tome cinquièmep. 594-595).


HYDROCÉPHALE. Médecine Rurale. L’hydrocéphale est un amas d’eau dans la tête. On en reconnoît deux espèces ; la première est extérieure, & intéresse le cuir chevelu de la tête ; quelques-uns l’ont appelée œdème du cuir chevelu ; la seconde a son siège dans les ventricules du cerveau. Nous n’admettrons que cette dernière, malgré certains auteurs qui en ont établi deux autres espèces ; c’est-à-dire, l’une entre le crâne & la dure-mère, & l’autre entre la dure & pie-mere. Il est probable que celle qui consiste dans l’augmentation, contre-nature, des eaux qui sont naturellement épanchées dans le cerveau, est la seule qui existe dans la nature, & qui soit prouvée par des observations positives ; cette maladie est familière aux enfans, les adultes y sont moins exposés ; les symptômes qui la caractérisent sont si sensibles, qu’il est impossible de la méconnoître. Les enfans attaqués d’hydrocéphale ont la tête monstrueuse en grosseur, & plus pesante que le reste du corps. Ils sont foibles, tristes, pâles & languissans ; ils se plaignent d’une douleur au sommet de la tête ou sur les yeux ; ils ne peuvent supporter la lumière, l’assoupissement se manifeste par degrés ; ils vomissent très souvent ; ils éprouvent des maux de cœur, leur pouls n’est jamais égal ; les pulsations qui en sont irrégulières, & quelquefois entrecoupées, diminuent de plus en plus & les jettent le plus ordinairement dans un état de langueur qui leur est toujours funeste. À tous ces signes joignez l’insomnie ; ils voyent presque toujours les objets doubles, ils délirent, les convulsions surviennent, la pupille se dilate, & la mort termine toutes leurs souffrances.

Tout ce qui peut blesser le cerveau ; peut produire l’hydrocéphale ; les coups, les chutes, des excroissances, un contre-coup, une forte commotion au cerveau, peuvent la déterminer ; elle peut venir à la suite d’un accouchement laborieux & très difficile, ou de l’enclavement de la tête dans le petit bassin ; cette maladie peut encore dépendre d’un vice écrouelles, ou vénérien, de la suppression des urines, ou de tout autre évacuation accoutumée ; elle se manifeste quelquefois après les fluxions de la tête, les douleurs de dents, les convulsions, & les affections vermineuses des enfans ; mais toutes ces causes sont peu efficaces, si on n’admet une disposition à contracter cette maladie, & une foiblesse & un relâchement naturel des fibres du cerveau.

L’hydrocéphale est une maladie incurable ; néanmoins on ne sauroit assez conseiller l’usage de certains remèdes qui ont quelquefois réussi ; je crois que les douches d’eaux thermales peuvent être de quelque utilité. On lit dans la Pratique de Boerhave, que Lantana a guéri des hydrocéphales par le moyen des bandages sur la tête, & les fomentations spiritueuses, sur-tout en excitant plusieurs évacuations révulsives par les cautères, les diurétiques & les purgatifs. Il rapporte la cure d’un enfant de six mois qui avoit la tête aussi grosse que celle d’un adulte, & qui fut guéri par les topiques spiritueux, les aromates & le sel de tartre. La ponction n’y convient point à cause du danger qu’il y a de piquer les méninges, d’ouvrir les ventricules du cerveau. M. Petit a observé que les malades chez qui elle avoit le mieux réussi, n’avoient pas vécu plus de quarante heures après ; il propose, & préfère à l’ouverture du crâne, qui ne réussit jamais, un bonnet de fer garni d’étoffes, pour qu’il ne blesse point, & qu’on puisse serrer à volonté, à proportion que la tête diminue de volume. Il conseille même d’y faire un trou dans lequel on adapteroit une canule qu’on déboucheroit de temps en temps pour donner issue à la quantité de liquide qui s’y seroit ramassée. On peut faire les scarifications en prenant bien garde de ne pas blesser le muscle crotaphite ; si elles ne réussissent pas, on appliquera une ou plusieurs couronnes de trépan, & on fera en même temps usage de topiques & de fortifians internes. M. AMI.