Cours d’agriculture (Rozier)/LIMONADE

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Hôtel Serpente (Tome sixièmep. 269-270).


LIMONADE. Liqueur préparée avec le suc de citron ou de limon, l’eau & le sucre. Un citron ordinaire suffit sur une livre d’eau & trois onces de sucre blanc ; ces doses varient suivant le goût des patronnes & suivant leurs besoins, en ajoutant plus de sucre & plus de suc de citron. La bonne limonade doit être modérément sucrée, & l’eau avoir une agréable acidité.

Coupez le citron par le milieu, exprimez-en le suc dans un linge net, placé sur un vase quelconque, afin que la pulpe & les pépins qui se détacheront, restent sur le filtre ; ajoutez ensuite l’eau & le sucre. Cette liqueur rafraîchit beaucoup plus que l’orangeat, que l’on prépare de la même manière ; elle est très-agréable & très-utile pendant les grandes chaleurs, dans les fièvres putrides, ardentes, ou inflammatoires, dans le scorbut, les ardeurs d’urine, l’abondance des humeurs & leur raréfaction. La limonade préparée avec le suc de citron est moins active que si on employé celui du limon.

Si on veut aromatiser & parfumer la limonade, on frotte avec des morceaux de sucre l’écorce du citron, & ils s’imprègnent de l’huile essentielle qu’elle contient ; plus il y a de cette huile essentielle, & plus la limonade devient échauffante.

La cupidité a fait imaginés de substituer de l’acide vitriolique au suc de citron, & même dans ce qu’on appelle tablettes de limonade ; cette préparation peut devenir très-nuisible lorsqu’il y a tension des fibres, striction des organes sécrétoires, & épaississement lymphatique. M. Marat, secrétaire perpétuel de l’académie de Dijon, & si connu par l’é-endue de ses travaux & de ses lumières, a fourni les moyens de démasquer la supercherie ; c’est lui qui va parler.

Le premier & le plus simple, est de verser dans de la limonade quelques gouttes de la dissolution du sel marin à base de terre pesante ; si la limonade ne contient que de l’acide citronnier, la liqueur restera limpide ; on verra sur-le-champ s’y former un précipité blanc & lourd, s’il y a de l’acide vitriolique, & la quantité du précipité indiquera celle de cet acide.

Le second est de faire tomber dans la limonade du vinaigre de Saturne ; la liqueur blanchira sur-le-champ, il y aura un précipité blanc ; mais en versant ensuite quelques gouttes d’acide nitreux, le précipité disparaîtra & la liqueur reprendra sa limpidité, sa diaphanéité, s’il n’y a point d’acide vitriolique : elle restera plus ou moins blanche & louche, s’il y en a, & il se formera un précipité blanc & insoluble, qui sera du vitriol de plomb.

Une remarque importante à faire est que, dans les limonades les plus pures, ces sels & ces acides, en séparant l’huile essentielle du citron, donneront un œil blanchâtre à ces liqueurs ; mais cette huile ne tardera pas à s’élever à leur surface, & la liqueur restera limpide & sans précipité.