Cours d’agriculture (Rozier)/MOULES

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Hôtel Serpente (Tome sixièmep. 619-620).
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MOULES. On donne ce nom à plusieurs espèces de coquilles bivalves, dont quelques-unes se trouvent dans la mer, & d’autres dans l’eau douce. La moule de mer est un animal mol, oblong, blanchâtre, & dont les bords sont frangés ; il est logé dans une coquille composée de deux pièces assez minces, oblongues, convexes & bleuâtres à l’extérieur, concaves & blanches dans leur face interne. Ces animaux se fixent sur différens corps, au moyen d’un grand nombre de fils, à-peu-près de la grosseur d’un cheveu, & qu’ils collent autour d’eux : les cuisiniers ont soin d’arracher ces fils avant de faire cuire les moules.

M. Mercier du Paty a donné la description des bouchots à moules dans les mémoires de l’académie de la Rochelle : ce sont des espèces de parcs formés par des pieux avec des perches entrelacées, qui forment une espèce de clayonnage très-solide ; les moules s’y attachent par paquets pour y déposer leur frai, elles y croissent promptement, s’y engraissent & deviennent meilleures & plus saines que les autres moules ; il ne faut qu’une année, ou à-peu près, pour peupler un bouchot. On prend les moules depuis le mois de juillet jusqu’au mois d’octobre, en exceptant cependant les temps des fortes chaleurs & celui du frai ; on n’enlève pas toutes les coquilles du parc, mais on y en laisse au moins le dixième.

On se sert beaucoup des moules dépouillées de leurs coquilles, pour garnir des haims pour prendre différentes espèces de poissons. On a observé que les moules devenoient quelquefois un aliment mal sain, ce qui doit être attribué à un petit crustacés qui est renfermé dans la même coquille, & qu’on mange avec la moule ; on éprouve alors des malaises, des anxiétés, & même des convulsions, souvent accompagnées d’éruptions cutanées : les vomitifs sont très-bons dans ce cas.

La poudre des coquilles ou écailles de moules passe pour diurétique ; les vétérinaires l’employant contre les taies & les onglets qui viennent sur les yeux des chevaux on souffle la poudre sèche sur les parties malades.

Au rapport de Lister, les moules sont si communes dans la province de Lancastre, que plusieurs cultivateurs les ramassent pour les jeter sur leurs terres en guise de fumier.

La moule d’eau douce, qu’on trouve dans les rivières, dans les ruisseaux & sur-tout dans les étangs, est très-différente de celle de mer ; les coquilles de la première sont beaucoup plus larges que celles des moules de mer. On mange celle d’eau douce, mais l’animal est coriace, & d’un goût inférieur à celui qui se trouve dans la mer. Les moules d’eau douce fournissent d’assez belles perles ; on en trouve de telles dans les lacs d’Écosse, de Bavière, de la Valogne en Lorraine, de Saint-Savinien, & sur-tout de la Chine ; les perles sont toujours formées dans ces coquilles, comme dans toutes celles qui en fournissent, sur l’endroit qui a été piqué par un insecte. Les Chinois imitent en cela la nature ; ils percent les coquilles avec un morceau de fil de laiton, ou bien ils introduisent dans la coquille un petit morceau d’une autre coquille, qui gêne l’animal, & le détermine à l’enduire de la matière des perles. A. B.