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Cours d’agriculture (Rozier)/PLEURÉSIE

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Hôtel Serpente (Tome huitièmep. 41-53).


PLEURÉSIE, Médecine rurale. Maladie inflammatoire de la poitrine, qui est toujours accompagnée d’une fièvre aiguë, continue, d’une douleur pungitive dans le côté, de la toux, d’un crachement de sang, d’une lésion dans la respiration, d’une dureté, & d’une fréquence dans le pouls.

On distingue la pleurésie en vraie & en fausse, en essentielle ou en symptomatique, en humide & en sèche. Dans la pleurésie vraie ou essentielle, c’est presque toujours cette membrane qui tapisse intérieurement les côtes, & qui est connue sous le nom de plèvre, qui est affectée ; néanmoins Hofsman, Triller, & de Haller, ont cru qu’il n’y avoir que la face externe du poumon qui fût intéressée.

Morgagni a prouvé, par une infinité d’observations, que la plèvre n’est pas toujours le siége de cette maladie ; & Lieutaud dit que parmi un grand nombre de pleurétiques qu’il a eu occasion d’ouvrir après leur mort, il en a trouvé seulement deux atteints d’une vraie pleurésie. La pleurésie est appelée humide, quand l’expectoration des crachats se fait sans aucune gêne ; elle est au contraire sèche, lorsque les malades crachent peu, ou point du tout.

La pleurésie fausse a son siège dans les muscles intercostaux, ou dans les fausses côtes, & la douleur qui l’accompagne n’est jamais bien fixée au côté de la poitrine ; elle change de place très-souvent ; tantôt elle affecte une partie voisine, tantôt elle en intéresse une autre fort éloignée du poumon & de la plèvre.

On la distingue aisément de la vraie par la mollesse du pouls, par la douleur qui est toujours plus extérieure, & par l’absence des autres symptômes inflammatoires qui sont inséparables de la vraie pleurésie.

Les vieillards sont en général moins exposés à cette maladie que les jeunes gens ; pour l’ordinaire elle attaque les personnes maigres, dont le tempérament est bilieux ou pléthorique.

Les ouvriers, les journaliers, qui par état sont obligés de travailler en plein air, & les habitans de la campagne, sont presque toujours ceux sur lesquels elle exerce sa cruauté. Elle est toujours moins meurtrière pour les vieillards ; la sécheresse de leurs fibres prêtant moins à l’inflammation, fait qu’ils en réchappent plus facilement que les adultes.

Tout ce qui peut supprimer l’insensible transpiration, peut occasionner cette maladie. D’après ce principe, une trop longue exposition à un vent froid & humide, une boisson fraîche, prise immédiatement après un exercice violent & une sueur forte, le sommeil pris dans un lieu froid & humide, peuvent lui donner naissance.

Elle peut dépendre aussi de l’usage des liqueurs spiritueuses, de la supression de quelque évacuation habituelle, de la rentrée de quelque éruption cutanée ; de la guérison prématurée de quelque ulcère ; mais l’engorgement de la plèvre est la véritable cause prochaine de la pleurésie. Les exercices violens, les mouvemens long-temps continués, les passions vives de l’ame, les veilles & les travaux forcés, disposent à cette maladie. Verna croit que chez les personnes robustes, l’abstinence du coït poussé trop loin, peut disposer à la pleurésie.

On sait encore que la morsure du serpent à sonnettes, produit en Amérique une vraie pleurésie. M. de Rozière de la Chassagne, dans son nouveau Traité sur les maladies de la poitrine, regarde l’abus des corps baleinés, comme une cause assez fréquente de cette maladie, en diminuant la capacité de la poitrine, en occasionnant son resserrement, & en gênant les viscères qu’elle renferme.

Les méthodes de traitement sont relatives, 1°, à la résolution & à excrétion qu’on prépare, en donnant au mode inflammatoire une activité médiocre & salutaire ; 2°. à l’expectoration & autres évacuations au moyen desquelles la nature chasse le résidu de la coction qu’elle a opérée.

1°. La saignée est le premier & le plus sûr moyen pour diminuer l’ardeur du mode inflammatoire. Triller conseille de la faire copieuse au commencement. Il seroit néanmoins dangereux d’abattre les forces de la nature, jusqu’à procurer des défaillances.

Il peut arriver que l’inflammation soit portée à un point, qu’il soit utile d’ouvrir à la fois les deux veines du bras, comme l’a pratiqué Huxham. Les saignées brusques conviennent en général aux gens robustes, mais elles pourroient être dangereuses aux personnes énervées. Pour ne pas tomber dans un pareil inconvénient, il faut observer quel est l’effet de la première, ou de la dernière saignée, & si elle ruine les forces, cause des défaillances, & attire le froid aux extrémités, il faut alors en empêcher la répétition. Si la fluxion inflammatoire se renouvelle, on répétera la saignée. La présence de la couenne inflammatoire ne doit pas toujours engager à répéter la saignée ; elle mèneroit trop loin si l’on vouloit y faire attention ; mais il ne faut pas donner dans l’excès contraire. 2°. L’expectoration est l’excrétion la plus générale & la plus ordinaire que la nature affecte. Il ne faut pourtant pas la forcer lorsque la nature ne veut pas s’y soumettre ; & quoiqu’elle soit pour l’ordinaire avantageuse, elle n’est pas toujours critique ; elle est quelquefois symptomatique, ou colliquative ; il faut alors l’arrêter, & la soutenir au contraire si elle a un caractère vraiment critique, & se garder de l’intercepter par la saignée & autres remèdes.

Les boissons tièdes, nitrées, pectorales, sont de la plus grande utilité dans cette maladie. Le nitre donné à grande dose, convient mieux que les acides, à causse de la toux que ceux-ci peuvent augmenter. L’oximel scillitique, la décoction de bourrache avec le miel, le kermès minéral donné avec le sucre, à la dose d’un quart de grain délayé dans ce qu’il faut d’eau, ou combiné sous forme de loock avec le sirop de lierre terrestre, sont les véritables expectorans qu’il faut employer, & dont on obtient du succès.

On appliquera sur le côté, toutes les trois heures, de l’avoine frite dans de bon vinaigre, ou bien la moitié d’un pain arrosé, sur le feu, avec de l’eau-de-vie. J’ai toujours eu de bons effets d’avoir fait frotter plusieurs fois le jour le côté affecté, avec un liniment composé d’une once de baume de Fioraventi, d’autant d’huile douce, & de vingt gouttes de teinture anodine. Si, malgré les saignées répétées, & l’application des topiques dont on vient de parler, la douleur au côté subsiste après le troisième ou le quatrième jour ; il faut alors appliquer un vésicatoire sur la partie affectée, rarement ce remède manque son effet, sur-tout s’il est appliqué d’assez bonne heure.

L’indication des vésicatoires est encore relative à l’imitation des procédés de la nature, qui a procuré dans certaines épidémies la solution la plus heureuse, par la génération des abcès, & de diverses pustules. En général, il est plus avantageux d’attendre qu’il ait précédé une détente générale du spasme, & des évacuations sanguines.

L’émétique peut être bien placé dans le commencement de la pleurésie. Son usage, en général, est plus avantageux que celui des purgatifs. Arétée conseille des lavemens âcres, comme des révulsifs bien appropries ; il paroît qu’ils peuvent être plutôt nuisibles qu’avantageux, en ce qu’ils interrompent l’expectoration, excitent un sentiment de chaleur & d’ardeur ; & si le bas-ventre est météorisé, ils augmentent le météorisme, & hâtent la mort.

Baglivi a fort bien observé combien il étoit dangereux, dans l’état de la pleurésie, de purger de deux jours l’un, immédiatement après avoir fait précéder une ou deux saignées ; non-seulement on arrête l’expectoration, mais encore on produit d’autres symptômes bien plus funestes.

Cependant les purgatifs modérés, & donnés dans un temps & des circonstances favorables, peuvent changer en mieux la manière d’être du principe vital. Hippocrate conseille les purgatifs dans la pleurésie des côtes intérieures, qu’il appelle pleurésie basse. Galien est opposé à cette pratique. Il est cependant des cas où les purgatifs pourroient faire révulsion de la fluxion inflammatoire, en évacuant tout le corps ; ils peuvent de même débarrasser la poitrine, en emportant les humeurs qui s’y sont accumulées, sur-tout si c’est au déclin de la maladie ; enfin, les sudorifiques ne peuvent être administrés indifféremment à tout le monde. On doit craindre leurs effets dans les personnes d’un tempérament sec, aride, dans les vieillards, & dans tous ceux dont les humeurs sont déjà épuisées par des évacuations trop abondantes, par des sueurs copieuses. M AMI.

Pleurésie, Médecine vétérinaire. Ce nom vient de plèvre ou pleure ; la plèvre est une membrane qui est étendue sur toute la partie interne de la poitrine, sur la partie convexe du diaphragme & sur tous les poumons. Lorsque cette membrane est enflammée, on dit que l’animal est attaqué de la pleurésie vraie ; lorsque la matière morbifique ne comprime pas seulement la plèvre, mais qu’elle a principalement son siège dans les muscles intercostaux, il est atteint de la fausse pleurésie ; enfin, si l’inflammation affecte la portion de la plèvre qui recouvre le diaphragme du côté qui regarde la poitrine ; pour lors l’animal est atteint de la paraphrénesie. De là, nous diviserons les maladies de la plèvre en trois sections ; la première traitera de la vraie pleurésie ; la seconde, de la fausse ; & la troisième, de la paraphrénésie.

Section Première.

De la pleurésie vraie, ou inflammation de la plèvre.

On divise la vraie pleurésie en pleurésie humide & en pleurésie sèche. Dans la première, le bœuf, ainsi que les autres animaux, expectorent facilement ; dans la seconde, la toux est sèche, elle fatigue l’animal qui en est atteint, sans le soulager. Les bœufs y sont plus sujets que les vaches. Parmi les premiers, ceux qui sont le plus exposés à la pleurésie, sont les bœufs maigres & secs ; ceux dont le tempérament est bilieux, les pléthoriques sur-tout ; enfin ceux à qui la nature ou le travail a donné des fibres fortes ou élastiques.

Les animaux qui ont déjà essuyé cette maladie, contractent une disposition qui les y rend très-sujets par la suite, & il n’est pas douteux qu’elle ne soit pour eux des plus dangereuses. Le printemps est la saison dans laquelle on la voit le plus fréquemment…

Article Premier.

Causes de la pleurésie vraie.

La pleurésie peut être occasionnée par tout ce qui est capable de supprimer la transpiration ; en conséquence par les vents froids du nord, les boissons d’eau froide quand les animaux ont chaud ; ceux qui couchent & habitent dans des étables, ou des écuries humides, &c. sont exposés à cette maladie.

Les bœufs & les chevaux courent encore risque de la gagner, lorsqu’étant en sueur on les laisse exposes à l’air froid, ou qu’on les conduit dans de l’eau froide, ou que, pour les débarrasser de la boue & de l’écume dont ils se trouvent souvent couverts après leurs courses, on voit des cochers esclaves d’une routine meurtrière, mettre pied à terre, dépouiller leurs chevaux de leurs harnois, & jeter des seaux d’eau froide sous le ventre, sur les parties latérales de la poitrine, contre le poitrail & entre les jambes de devant, sur le dos, sur les reins, sur les flancs, entre les cuisses, & sur les quatre extrémités, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de boue, plus d’écume, & que l’eau qui en découle soit limpide.

Cette maladie peut aussi être causée par la suppression de quelque évacuation accoutumée, comme celle de vieux ulcères, de cautères, des eaux aux jambes, &c.

On a vu encore la rentrée subite de quelque éruption, telle que la gale, les gourmes, l’occasionner.

Les écuries & les étables trop chaudes, trop fermées, disposent encore singulièrement à cette maladie.

Enfin, la pleurésie peut être produite par les travaux excessifs, par les courses violentes qu’on fait faire aux animaux, & même par des coups sur la poitrine.

La seule conformation du corps de l’animal comme une poitrine trop étroite, & le peu de capacité des artères de la plèvre, rendent quelques animaux sujets à cette maladie ; de même, il n’est pas douteux que le cavalier qui profite du moment de l’expiration de son cheval pour le sangler, de toutes ses forces, ne diminue avec plus de facilité la capacité de la poitrine, que la sangle trop tendue n’en occasionne le resserrement, ne gêne les viscères qu’elle renferme, & ne soit une cause éloignée de la pleurésie.

Article II.

Symptômes de la pleurésie vraie.

La pleurésie, comme la plupart des autres fièvres, commence en général par le frisson & le tremblement, qui sont suivis de chaleur, de soif & d’insomnie. Le médecin vétérinaire s’assure de son existence en passant les mains à rebrousse-poil sur les vraies & fausses côtes ; il distingue par là si le siége du mal occupe le côté droit ou le gauche, il juge de sa violence par le plus ou le moins de sensibilité que l’animal éprouve lorsqu’il le touche. Quelquefois la douleur s’étend jusque vers l’épine du dos ; quelquefois jusque vers les épaules ; d’autres fois jusque vers le poitrail. Cette douleur est toujours plus aiguë dans le moment où l’animal fait le mouvement d’inspiration, & lorsqu’il tousse, il se porte avec peine sur ses extrémités antérieures, & se plaint plus vivement chaque fois qu’il change de place.

Le pouls dans cette maladie est pour l’ordinaire vite & dur ; les urines sont rougeâtres. Le sang, après être sorti de la veine, se couvre d’une croûte dure. L’écoulement qui se fait par les narines, n’a d’abord aucun caractère ; mais il s’épaissit bientôt, & présente souvent une couleur sanguinolente.

Article III.

Régime qui doit être employé pour les animaux qui sont attaqués d’une pleurésie vraie.

La nature tente ordinairement de se débarrasser de cette maladie, au moyen d’une hémorragie, par quelques-unes des parties du corps ; ou par une expectoration abondante ; ou par la sueur, des déjections séreuses, ou par des urines très chargées, &c.

La marche du médecin vétérinaire est de seconder les intentions de la nature, en modérant l’impétuosité de la circulation, en relâchant les vaisseaux, en délayant les humeurs, & favorisant l’expectoration.

En conséquence, le régime doit être léger, rafraîchissant & délayant.

La boisson sera une décoction d’orge, elle se fait de la manière suivante :

Prenez d’orge perlé, une demi-livre.

Faites bouillir dans six pintes d’eau, jusqu’à réduction d’un tiers ; passez, & si le miel étoit du goût de l’animal, ajoutez-en plus ou moins.

La décoction de figues, de raisins secs & d’orge, convient également dans la pleurésie.

Quelle que soit la boisson que l’animal préfère, il lui en faut donner peu à la fois ; il faut au contraire ne la lui faire boire que par gorgées, & cela continuellement, afin qu’il ait sans cesse la bouche & le gosier humectés. Les boissons qu’on lui fera boire doivent-être toujours un peu chaudes ; il seroit même à désirer que les alimens qu’ils prendroient le fussent aussi.

L’animal malade doit être dans une température modérée, & le plus à son aise possible, ayant toujours sur le dos une légère couverture, bonne litière, & son habitation tenue très-proprement.

On doit lui donner plusieurs lavemens par jour avec les décoctions de graine de lin, ou des racines de mauve, de guimauve. On pourra mettre dans chaque lavement un gros de sel de nitre.

Les bains de pieds produiroient de très-bon effets dans cette maladie, les chevaux les prennent fort aisément, & sans même qu’on ait besoin de les y tenir, les bœufs exigent un peu plus de peine.

Article IV.

Remèdes qu’il convient d’administrer dans la pleurésie vraie.

La pleurésie étant accompagnée d’une douleur violente, d’un pouls vif & dur, la saignée est nécessaire. Lorsque ces symptômes sont manifestes, plus on saigne promptement, mieux le malade s’en trouve.

Il faut que cette première saignée soit assez copieuse, pourvu toutefois que l’animal puisse soutenir. Une forte saignée dans le commencement d’une pleurésie, fait infiniment plus d’effet que de petites saignées répétées plusieurs fois dans le cours de la maladie.

On peut tirer à un animal formé trois à quatre livres de sang, dès qu’on s’est assuré qu’il est attaqué d’une pleurésie. On en tire moins, bien entendu, à un animal plus jeune ou plus délicat.

Si après la première saignée, la violence des symptômes continue, il faudra, au bout de douze, ou de dix-huit heures, tirer encore environ deux à trois livres de sang. Si après cette second saignée les symptômes ne diminuent pas encore, & que le sang se couvre de la couenne, ou de la croûte dure dont nous avons parlé, il faudra alors une troisième saignée, mais dès que la douleur diminue, que le pouls devient plus mollet, que l’animal commence à expectorer & à respirer plus librement, la saignée n’est plus nécessaire. Ce remède est rarement utile après le troisième ou quatrième jour de la maladie, & passé ce temps, il ne doit point être employé, à moins que des circonstances prenantes ne l’exigent.

Par exemple, quoiqu’il y ait déjà plusieurs jours que la maladie dure, lorsqu’on commence à la traiter, si la fièvre & la douleur de côté sont encore violentes, si la respiration est difficile, si l’animal n’expectore point, ou s’il n’a point eu d’évacuation sanguinolente, il faut, sans s’embarrasser du jour, faire une saignée.

Au reste, on peut diminuer la viscosité du sang par beaucoup de moyens, sans avoir recours aux saignées multipliées : on peut même, sans leur secours, alléger la douleur de côté par différens remèdes.

Ces remèdes sont les fomentations émollientes, que l’on applique sur la partie malade, après la première ou la seconde saignée. Ces fomentations se font de la manière suivante :

Prenez fleurs de sureau, de camomille, de mauve, de chaque deux poignées.

Faites bouillir ces plantes, ou toutes autres plantes adoucissantes dans une quantité suffisante d’eau.

Mettez ces plantes ainsi bouillies dans un sac de toile, & appliquez-les toutes chaudes sur le côté.

On trempe encore une serviette ou un essuie-main, dans la décoction de ces plantes ; on l’étend sur le sac & on contient tout ce topique à l’aide de la couverture qui doit être habituellement sur le corps de l’animal, & cette couverture y sera pareillement assujettie, à l’aide d’un surfaix. À mesure que ce remède se refroidit, on a soin de l’humecter avec la décoction des plantes adoucissantes, dont le degré chaleur sera aussi fort que les mains de la personne qui soignera l’animal pourront le supporter. Pendant que ce topique sera sur la partie douloureuse, on aura grand soin que l’animal ne prenne point de froid.

Les fomentations, non-seulement appairent les douleurs, mais encore elles relâchent les vaisseaux, & s’opposent à la stagnation du sang & des autres humeurs.

On peut encore frotter souvent dans la journée, le côté malade, avec un peu du liniment volatil suivant.

Prenez huile d’amandes douces ou d’olives, quatre onces ; d’esprit de corne de cerf, deux onces.

Mettez dans une bouteille, secouez vivement jusqu’à ce que ces deux substances soient parfaitement mêlées.

On en verse quelques gouttes sur le côté malade : on l’étend avec la main chauffée, & l’on frotte fortement jusqu’à ce qu’il ait entièrement pénétré. On verse & on frotte de nouveau, jusqu’à ce que l’on ait employé la valeur d’une demi-tasse à café de ce liniment. On recommence cette opération trois ou quatre fois par jour.

On peut, à la place de ce liniment, ou lorsqu’on ne pourra s’en procurer, employer à la même dose & de la même manière, la teinture de cantharides, qui produit le même effet & même plus promptement.

On retire souvent de grands avantages, dans la pleurésie, des saignées locales faites avec des ventouses, appliquées sur la partie affectée ; on peut même y appliquer un nombre convenable de sangsues ; lorsqu’elles sont gorgées, & qu’elles ne tirent plus de sang, pour rendre ces saignées locales plus copieuses, il est un moyen bien simple ; c’est de couper à ces sangsues le bout de la queue avec des ciseaux. Le sang dont elles sont pleines, s’échappe par cette ouverture ; & à mesure qu’elles se sentent débarrassées, elles se remplissent en suçant de nouveau les parties sur lesquelles elles sont appliquées.

On peut encore appliquer avec avantage sur le côté malade, les feuilles de jeunes choux, toutes chaudes : non-seulement elles relâchent les parties, mais encore elles excitent une douce moiteur & peuvent dispenser le malade de l’application du vésicatoire auquel il faut cependant recourir quand les autres moyens n’ont pas réussi.

Si la douleur du côté persiste après les saignées répétées, après les fomentations & les autres moyens recommandés à l’article du Régime & à celui des remèdes, il faut appliquer un vésicatoire sur la partie affectée, & l’y laisser pendant deux jours ; il excite non-seulement une évacuation dans cette partie, mais encore il en détruit le spasme, & par conséquent aide la nature à expulser la cause de la maladie.

Pour prévenir la strangurie à laquelle les vésicatoires donnent lieu dans certains sujets, on fera boire abondamment au malade de l’émulsion de gomme arabique suivante.

Prenez, d’amandes douces, quatre onces ; mettez-les dans de l’eau chaude, pour pouvoir en ôter les enveloppes ; pilez-les fortement dans un mortier avec une égale quantité de sucre ; ayez quatre pintes de décoction d’orge chaude, à laquelle vous ajouterez, de gomme arabique, une once.

Remuez pour la faire dissoudre ; laissez refroidir ; versez cette liqueur peu à peu sur les amandes & le sucre triturés ensemble, ayant soin de remuer continuellement, jusqu’à ce que la liqueur devienne également blanche ou laiteuse ; pressez ; faites-en boire de deux en deux heures une pinte à l’animal malade.

Si l’animal est constipé, on lui donnera chaque jour deux lavemens composés d’une décoction de mauve ou de graine de lin, ou de toute autre plante émolliente, en ajoutant à chaque lavement deux gros de sel de nitre. Ces lavemens non-seulement évacueront les intestins, mais encore produiront l’effet des fomentations chaudes, appliquées aux viscères du bas-ventre, & causeront par là une dérivation des humeurs de la poitrine.

Il n’y a pas de médicamens plus utiles dans les maladies fiévreuses, que les lavemens, sur-tout si les urines ne sont pas abondantes, ou si elles sont rouges, & si la fièvre est forte : dans tous ces cas, les lavemens soulagent ordinairement plus que si l’on faisoit boire quatre ou cinq fois la même quantité de liquide ; il faut en donner, quand même l’animal ne seroit pas constipé ; mais il faut les supprimer, passé le cinquième jour, parce que des évacuations abondantes empêcheroient l’expectoration.

Pour exciter l’expectoration on donnera des remèdes incisifs, huileux & mucilagineux, tels que le suivant.

Prenez d’oximel ou de vinaigre scillitique, deux onces, que vous mêlerez dans la décoction suivante.

Prenez, d’orge mondé, & lavé quatre onces ; faites bouillir dans cinq pintes d’eau, jusqu’à ce qu’il soit crevé & que l’eau soit réduite à quatre pintes ; retirez du feu, ajoutez, aussi-tôt, de réglisse ratissée & coupée menue ; de racine de guimauve, dont vous aurez ôté le cœur ligneux, & coupée menue ; de feuilles de capillaire de Canada, demi-once ; de fleurs de coquelicot, demi-once ; de fleurs de tussillage, une once ; laissez infuser le tout pendant quatre heures ; passez ; faites-en boire à l’animal un quart de bouteille toutes les deux heures.

S’il s’agit, dans la pleurésie, de tempérer la chaleur du sang, prenez d’orge perlé, quatre onces ; faites bouillir dans cinq pintes d’eau ; ajoutez de raisins secs, de figues sèches, de chaque quatre onces, de reglisse épluchée une once.

Continuez de faire bouillir jusqu’à réduction de moitié. On peut ajouter, deux ou trois gros de nitre. Administrez cette tisane au malade, à la même dose que la précédente.

Les émulsions huileuses conviennent dans la pleurésie.

Prenez d’eau distillée douze onces ; d’esprit volatil aromatique demi-once ; d’huile d’olive de Provence, deux onces.

Mêlez le tout ensemble ; ajoutez de sirop commun une once, faites-la avaler à l’animal par-demi tasses, à deux heures de distance l’une de l’autre.

L’électuaire huileux produit aussi de bons effets.

Prenez d’huile d’amandes douces ou d’olive, de sirop de violette, de chaque demi livre.

Mêlez ; ajoutez autant de sucre candi qu’il sera nécessaire pour faire un électuaire qui ait la consistance du miel. On le fera avaler à l’animal chaque fois deux onces, sur-tout lorsqu’il sera fatigué de la toux.

On peut encore lui donner une dissolution de gomme-ammoniac dans de l’eau d’orge.

Voici la manière dont elle se fait.

Prenez de gomme ammoniac, une once ; triturez parfaitement dans un mortier ; versez peu à peu, en remuant toujours, deux pintes de décoction d’orge, jusqu’à ce que la gomme soit entièrement dissoute. On peut ajouter sept à huit onces d’eau distillée simple de pouliot. On en fera prendre au malade trois ou quatre fois par jour, une demi-tasse chaque fois.

Si l’animal attaqué de la pleurésie, ne transpire point, si, au contraire, une chaleur brûlante se fait sentir à la peau, & s’il urine très-peu, on donnera quelques petites doses de nitre purifié & de camphre, combinés de la manière suivante.

Prenez de nitre purifié une once ; de camphre, dix-sept à dix-huit grains ; triturez dans un mortier ces deux substances ; mêlez parfaitement ; divisez en six doses égales ; faites prendre à l’animal une de ces doses toutes les cinq à six heures, dans une tasse de sa tisane, ou de quelques unes de ses boissons.

Enfin la décoction de fénéka produit les meilleurs effets dans la pleurésie, outre celui que cette racine produit contre la morsure du sergent à sonnettes.

Prenez racines de fénéka, deux onces ; faites bouillir dans trois pintes d’eau, jusqu’à réduction de deux pintes ; laissez reposer ; passez. La dose est d’un quart de pinte, trois ou quatre fois par jour, ou même plus souvent.

Cette tisane ne doit-être employée qu’après avoir fait les saignées convenables, & avoir pourvu aux autres évacuations.

Si ce remède fatigue le malade, il faudra mêler à cette décoction quatre à cinq onces d’eau de canelle simple, ou le donner à plus petite dose.

Comme cette décoction favorise la transpiration, excite les urines & lâche le ventre, elle est capable de remplir la plupart des indications, dans la cure de la pleurésie & des autres maladies inflammatoires de la poitrine.

On ne s’imaginera pas, sans doutes qu’il faille faire usage de tous ces remèdes à la fois. Si nous en recommandons plusieurs, c’est afin que l’on puisse choisir, & que si l’on ne peut se procurer celui pour lequel on s’est décidé, on puisse lui en substituer d’autres ; d’ailleurs, les différentes périodes d’une maladie demandent différens remèdes ; & quand l’un n’a pas le succès qu’on en attend, il faut recourir à un autre ; car les remèdes les plus puissans ne réussissent que par l’application convenable qu’on en fait.

L’instant le plus avancé d’une maladie aiguë, que l’on appelle crise, est quelquefois accompagné d’une difficulté très-grande de respirer ; d’un pouls vif, irrégulier, de mouvemens convulsifs, &c. symptômes qui sont fort sujets à effrayer les assistans, & qui les portent souvent à faire des choses très-contraires au malade, comme de le saigner, de lui donner des remèdes forts & irritans, &c.

Cependant tous ces symptômes ne sont produits que par les efforts de la nature, pour vaincre la maladie, efforts qu’il faut seconder par d’abondantes boissons délayantes, qui alors sont singulièrement nécessaires. Toutefois, si les forces du malade étoient fort épuisées par la maladie, on pourroit à cette période le soutenir avec une pinte de petit lait dans laquelle on auroit mêlé eau de canelle simple, quatre onces.

Lorsque les douleurs de la fièvre auront disparu, & que l’animal aura recouvré un peu ses forces, on lui donnera quelques doux purgatifs.

Dans la convalescence, la diète sera toujours légère, & de facile digestion.


Section II.

De la pleurésie fausse ou bâtarde.

On donne le nom de pleurésie fausse, ou de pleurésie bâtarde, à celle dont le siège de la douleur est plus externe que dans la pleurésie vraie, sèche, ou humide, dont nous venons de parler. Ainsi, dans la pleurésie fausse, la douleur se fait sentir principalement dans les muscles intercostaux.

Les animaux qui sont sujets aux deux autres pleurésies, sont également sujets à celle-ci. Elle n’a rien d’inflammatoire ; mais elle peut en acquérir le caractère si elle est mal traitée, en se jetant sur la plèvre ou le poumon, & même sur le foie, ainsi qu’on ne sauroit douter que cela puisse arriver, d’après l’ouverture d’un grand nombre de cadavres. La durée de la pleurésie fausse est assez incertaine ; elle ne va guère au-delà du septième jour, & se termine souvent plutôt ; mais elle est sujette à des retours auxquels on ne s’attend pas ; elle a communément sa source dans la cause commune des fluxions, mais la rentrée de la gale ou du roux vieux, peuvent aussi y donner, lieu. Cependant elle n’est pas dangereuse lorsqu’elle ne se jette point sur les parties internes ; la douleur qui change de place rassure contre cet accident.


Article Premier.

Symptômes de la pleurésie fausse.

Elle se manifeste par une toux sèche, un pouls vif, & une difficulté de se coucher sur le côté affecté ; symptôme qui mérite d’autant plus d’être remarqué, qu’il ne se rencontre pas toujours dans la pleurésie vraie. Si la pleurésie fausse est produite par des flatuosités, elle excite des douleurs plus vives, & gêne même la respiration, ainsi que le pouls qui est alors lent & concentré. Elle attaque principalement les animaux qui sont peu d’exercice, & elle se dissipe ordinairement dans peu de temps & sans remèdes, il suffit de tenir chaudement les animaux qui en sont atteints, & de leur appliquer les topiques prescrits à l’article IV pour le traitement de la pleurésie vraie. Elle peut encore être produite par des vers ; celle-ci regarde principalement les jeunes animaux ; la puanteur de leur bouche, & la fièvre irrégulière, pour ne pas faire mention des autres signes qui annoncent les vers, la décèlent.


Article II.

Traitement de la pleurésie fausse.

Elle se guérit en tenant chaudement les animaux qui en sont atteints, en leur faisant prendre abondamment des boissons délayantes, & qui portent un peu à la peau ; telle est l’infusion de fleurs de sureau ; la saignée, les purgatifs, ne doivent être employés, que lorsque la violence de la douleur, le degré de la fièvre, & l’état des premières voies, demandent ces sortes de secours.

Si cependant cette maladie devient opiniâtre, il faut avoir recours à la saignée, aux vésicatoires, aux ventouses, & aux scarifications de la partie affectée ; ces remèdes & l’usage des boissons nitrées & rafraîchissantes, manquent rarement de guérir la fausse pleurésie.


Section III.

De la paraphrénisie, ou inflammation du diaphragme.

La paraphrénésie, ou inflammation du diaphragme, approche de si près de la pleurésie, & quant aux symptômes & quant au traitement, qu’il est à peine nécessaire de la considérer somme une maladie différente.


Article Premier.

Symptômes particuliers à la paraphrénésie.

Cette maladie est accompagnée, d’une fièvre très-aiguë, d’une douleur violente dans la partie affectée, qui en général augmente lorsque l’animal tousse, lorsqu’il respire, lorsqu’il rend ses excrémens & qu’il urine ; aussi a-t-il la respiration courte, fort haute, fréquente, étouffée, qui se fait par la seule action du thorax, pendant, que le bas-ventre est en repos ; on : connoît encore ce mal par un délire perpétuel, par la révulsion des hypocondres, qui se jettent vers le diaphragme, par les convulsions, la fureur, les espèces de grimaces, &. la gangrène.

Elle a les mêmes suites que la pleurésie ; mais le mouvement continuel de la partie, la nécessité dont elle est pour la vie, la tension de ses membranes nerveuses, tout cela rend les progrès de la paraphrénésie plus rapides & plus funestes, & produit l’ascite purulente.


Article II.

Traitement de la paraphrénéfie.

Dans ce cas on doit tout employer pour prévenir la suppuration du diaphragme ; parce que si ce malheur arrive, il est impossible de sauver l’animal.

Le régime & les remèdes sont les mêmes que nous ayons prescrits pour la pleurésie.

Nous ajouterons seulement que dans la paraphrénésie, les lavemens. émolliens, sont singulièrement utiles, parce qu’en relâchant les intestins, ils détournent l’humeur de la partie affectée.

Mais si le diaphragme vient à suppurer, l’abcès se rompt la cavité de l’abdomen est inondée de pus, qui venant à se putréfier, à s’amasser & s’accumuler de plus en plus, ronge les viscères, produit une consomption & la mort. M. BRA.