Cours d’agriculture (Rozier)/VESCERON

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Libairie d’éducation et des sciences et des arts (Tome dixièmep. 80-81).


VESCERON. Vicia segetum parva. On le nomme dans quelques endroits jardeau. Il est sans doute une variété des vesces, puisqu’il en a la propriété et tous les caractères. Sa graine se conserve plusieurs années dans les champs ; mais lorsque la fin du printems est humide, son germe se développe et croît avec une rapidité telle que la plante devient un véritable fléau.

Elle saisit le blé avec ses vrilles, le surpasse bientôt en hauteur, et le couvrant de ses nombreuses tiges, elle l’accable de son poids et le contraint de verser avec elle. Le blé, privé des bienfaits du soleil, ne croît plus, il languit et finit par pourrir.

Quel moyen peut-on employer pour détruire le vesceron qui s’empare d’une pièce de blé ? On n’en connoît point. Dès que cette plante est parvenue à une certaine élévation, il n’est plus possible de pénétrer dans le champ pour sarcler : et si on veut commencer ce travail plutôt, en supposant que la terre soit assez sèche pour le permettre, (ce qui est fort rare) le vesceron est alors si petit que le plus grand nombre des individus échappent à l’œil de l’ouvrier. Le plus certain c’est de s’opposer à son développement. Pour y parvenir, il faut semer de bonne heure, c’est-à-dire, immédiatement après la moisson. Plus les semailles sont hâtives, moins il faut employer de semences, parce qu’alors chaque pied de blé a le tems de prendre assez de force pour résister aux froids et à l’humidité de l’hiver : et que le blé ayant talé et couvrant lui-même toute la surface de la terre, il est un obstacle à la germination et à l’accroissement des plantes nuisibles.

Nous ne voyons point un champ dont les herbes nuisibles se sont emparées, que nous ne donnions de nouveaux regrets à la destruction des pigeons. Outre l’avantage qu’on en retiroit, comme abondant, sain et agréable comestible, ils nous fournissoient le plus actif des engrais ; ils détruisoient les semences des plantes les plus nuisibles à nos récoltes. Un tems viendra où leur utilité sera mieux connue ; il faudra, disoit un cultivateur éclairé, dès 1792, il faudra accorder des primes pour encourager à reconstruire des colombiers et à élever des pigeons : des peines seront prononcées contre les meurtriers d’un oiseau qui n’auroit pas dû cesser d’être inviolable.