Cours d’agriculture (Rozier)/VORACE

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Libairie d’éducation et des sciences et des arts (Tome dixièmep. 422-423).


VORACE. On entend par plantes voraces non seulement celles qui semblent vivre entièrement aux dépens de celles qui les supportent, comme le gui, les mousses, les lichens ; mais encore tous les végétaux, dont les racines et les branches s’étendent au loin, eu égard à la grosseur et à la hauteur de leurs tiges. Ainsi les chien-dents sont des plantes voraces relativement au blé, à la luzerne, au trèfle, etc., comme le chêne, le noyer, l’orme, l’ypréau, sont des plantes voraces non seulement par rapport au blé, etc., mais aussi par rapport à la vigne, aux différentes variétés de l’osier, et généralement à tous les végétaux dont la grandeur naturelle est inférieure à celle de ces arbres : ceux-ci abritent les petits, et, par leur ombrage, les privent de l’influence de l’air et de l’humidité, indispensables à leur accroissement ; en outre, les racines des grands arbres, toujours fortes et très-multipliées, aspirent avec avidité les matériaux de la sève dont ils sont entourés, et ne laissent rien ou presque rien à ceux qui les avoisinent. C’est donc manquer essentiellement d’intelligence que d’ensemencer un champ dont les herbes voraces n’ont pas été soigneusement détruites, de même que de semer ou de planter sur les lisières des forêts, des bois, et en général aux environs des végétaux qui occupent depuis un certain temps le terrain qui les a reçus.

On appelle encore plantes voraces certains végétaux des jardins qui parviennent, par leur nature, à une grosseur ou à un poids qui indique la grande quantité de nourriture qu’ils absorbent : tels sont les choux, les navets, les artichauts, les citrouilles, les cardons, et bien d’autres. C’est donc une grande faute que de ne pas laisser de l’un de ces végétaux à l’autre, au moment de la plantation ou à l’époque de les éclaircir, une distance telle qu’ils ne puissent se nuire mutuellement dans le cours de leur végétation.