Court Traité/Seconde partie/Chapitre XXIII

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Traduction par Paul Janet.
Germer Baillière (p. 114).


CHAPITRE XXIII


DE L’IMMORTALITÉ DE L’ÂME.


Si nous considérons attentivement ce que c’est que l’âme, et d’où viennent en elle le changement et la durée, nous verrons facilement si l’âme est mortelle ou immortelle.

Nous disions que l’âme est une idée dans la chose pensante, correspondant à la réalité d’une chose qui est dans la nature. D’où il suit que, suivant que la chose dure ou change, l’esprit dure ou change également. Or, nous avons dit que l’âme peut être unie soit avec le corps dont elle est l’idée, soit avec Dieu, sans lequel elle ne peut ni exister ni être conçue. D’où l’on peut facilement tirer cette double conclusion :

1o  Quand l’âme n’est unie qu’avec le corps et que ce corps vient à périr, elle doit périr elle-même ; car, privée du corps qui est le fondement de son amour, elle doit périr aussi.

2o  Au contraire, quand elle s’unit à un objet immuable, elle continuera elle-même d’une manière immuable. En effet, comment pourrait-elle être détruite ? ce n’est pas par elle-même ; puisque ne se devant pas l’existence à elle-même, elle ne peut non plus se changer et se détruire elle-même. La cause de l’existence d’une chose peut seule, lorsqu’elle change ou périt elle-même, être la cause de la non-existence de cette chose.