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Démoniana ou Nouveau choix d’anecdotes/La Tête de Saint-Jean

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LA TÊTE DE SAINT-JEAN.

ANECDOTE.[1]

Le trait qu’on va lire prouve, comme le précédent, que les devins et les prétendus opérateurs de prodiges ne doivent qu’à l’adresse et à la supercherie l’étonnement qu’ils font naître chez les gens crédules.

Un devin s’était rendu fameux dans le 17e. siècle, par la manière dont il rendait ses oracles. On entrait dans une chambre éclairée par quelques flambeaux ; et l’on voyait sur une table, qui se trouvait au milieu de cette chambre, une tête de Saint Jean-Baptiste dans un plat.

Le devin affectait de faire quelques cérémonies magiques, pour en imposer à ceux qui venaient le consulter sur leurs affaires et sur leur avenir. Il conjurait ensuite cette tête de Saint Jean de répondre sur ce que l’on voulait savoir ; et la tête répondait d’une voix intelligible, et quelquefois avec une certaine exactitude…

Or, voici la clé de ce mystère : la table, qui se trouvait au milieu de la chambre, était soutenue de cinq colonnes, une à chaque coin et une dans le milieu. Celle du milieu était un gros tuyau de carton peint en bois. La tête de Saint Jean était aussi de gros carton peint au naturel. De plus, elle était creuse, avait la bouche ouverte et répondait, par un trou pratiqué dans le plat et dans la table, à la cavité du tuyau de carton.

Dans la chambre qui se trouvait au-dessous du cabinet où tout cet attirail était dressé, il y avait un porte-voix qui passait à travers le plancher, et qui aboutissait au cou de la tête de Saint Jean ; de manière qu’une personne placée dans la chambre d’en bas, en parlant par l’organe de ce porte-voix, se faisait entendre distinctement dans le cabinet par la bouche de cette tête.

Le prétendu devin proposait les questions qu’on venait lui faire d’une voix assez haute pour être entendu d’en bas ; et la personne qui devait faire la réponse par le porte-voix, était instruite à peu près de ce qu’elle devait dire.

  1. Tirée du même ouvrage que l’anecdote précédente.