De la Présence et de l’Action du Saint-Esprit dans l’Église/Chapitre 10

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CHAPITRE X.

DU CHAPITRE Xe DE M. WOLFF SUR L’ÉVANGÉLISTE.

Après avoir, dans l’intérêt de l’élection par les hommes et de la consécration, assimilé le pasteur à l’évêque, M. Wolff met sur le même rang et dans les mêmes conditions le pasteur et l’évangéliste, afin que l’élection et la consécration qu’il rapporte au premier soient indispensables au second. « Les charges d’évangéliste et de pasteur, dit M. Wolff, sont tellement de même nature..... qu’elles peuvent souvent se confondre, qu’on peut passer de l’une à l’autre, etc., p. 44. »

Les grands principes ayant été discutés je tâcherai d’être bref sur ce point.

L’auteur se trouve ici dans une confusion complète que je n’aurai qu’à signaler.

Premièrement M.Wolff veut que ceux que l’Esprit de Dieu appelle apôtres ne puissent être que des évêques ou des évangélistes.

Quel rapport y a-t-il entre un évêque et un apôtre ou envoyé ? c’est ce qui serait difficile de découvrir. Du reste cette assertion est purement gratuite. Je me permets de considérer ceux que la Parole de Dieu appelle apôtres comme étant apôtres, c’est-à-dire comme spécialement envoyés du Seigneur, quoiqu’ils ne le soient pas tous avec la même autorité.

M. Wolff confond secondement les envoyés des églises (2 Cor. VIII, 23) avec les envoyés de Christ. Les autres passages sont pour moi plus qu’incertains dans leur application. Quand saint Paul, dit « nous apôtres » ce n’est pas nécessairement Sylvain et Timothée qui étaient avec lui. Quand même il en serait ainsi, et je ne tiens pas à le contester, il n’est jamais dit que leur fonction fut celle d’évangéliste.

3° 1 Cor. XII, 28. Malgré l’assertion de M. Wolff l’évangéliste n’est pas nommé ici.

Enfin après avoir disposé de cette confusion, je reconnais que l’évangéliste était donné de Dieu selon Éph. IV, 11 .

Quant à la vocation que M. Wolff affirme que l’évangéliste reçoit des hommes, je m’arrête. Nous avons vu que tous selon leur pouvoir prêchaient ; et que le simple fait que saint Paul a voulu que Timothée l’accompagnât, ne dit pas qu’il fût appelé pour une charge spéciale d’évangéliste et dit encore moins , que tous les évangélistes reçussent une vocation des hommes.

Saint Paul dit à Timothée de faire l’œuvre d’un évangéliste ; ce qui me paraît plutôt combattre l’idée d’une vocation spéciale d’évangéliste existant déjà depuis longtemps. Timothée était dans ce moment là un délégué de l’apôtre pour un objet spécial ; et Paul l’exhorte à faire aussi l’œuvre d’un évangéliste ; cela était très-simple, mais s’accorde peu avec l’idée d’un évangéliste spécialement consacré à cela.

Nous avons déjà suffisamment considéré le cas de Paul et de Barnabas.

J’admets que tous ceux qui rendent témoignage selon leur capacité ne sont pas proprement dits des évangélistes. L’évangéliste est un don, Éph. IV, 11 ; mais il n’est jamais parlé de l’imposition des mains sur un évangéliste, ni comme nécessaire à son œuvre ni sous quelque rapport que ce soit. Nous retrouvons toujours chez l’auteur le désir de sanctionner l’ordre actuel à tout prix. Un évangéliste, selon lui, est tellement de même nature qu’un pasteur, qu’il peut se fixer après avoir rassemblé un troupeau ; mais, par le motif qu’il n’y a pas un mot de tout cela dans la Parole, je n’en dis rien. Si celui qui le fait a les deux dons, c’est très-bien ; s’il ne les a pas, c’est très-mal.

Pour comprendre la manière dont M. Wolff tire des conclusions de la Parole, j’invite aussi le lecteur à comparer les citations qu’il a faites de Actes XVIII, 26 ; 1 Cor. XVI, 19 ; et Rom. XVI, 3, dans le but de démontrer qu’Aquilas était tour à tour pasteur et évangéliste, ayant reçu, il faut le supposer, l’imposition des mains. Peut-être doit-on supposer qu’il l’a reçue deux fois ; car rien n’autorise à supposer que l’on conférât le ministère en gros, comme cela se pratique maintenant. On conférait une charge spéciale ; ceux qui recevaient la collation à la charge, étant solennellement reconnus par des autorités compétentes pour être appelés de Dieu à cela. Car autrement il ne s’agirait ni des ministères ni de vocation, mais du ministère en général sans charge spéciale. C’est ce qui se pratique de nos jours. L’un ayant été reconnu propre pour être évêque, va de son chef se présenter comme évangéliste ; l’autre, ayant été consacré comme évangéliste, va de son chef s’arroger la charge d’évêque dans une localité qui lui plaît. Il faut se souvenir que, selon le système Wolff, il ne s’agit pas du tout, dans le ministère, de l’exercice d’un don mais d’une charge qu’on reçoit seulement par l’imposition des mains. L’on évangélise sans don, l’on est évêque sans les qualités requises, l’on prêche sans don, et si quelqu’un avait été consacré évangéliste selon ce chapitre XMe il n’est plus question ni du choix des évêques par l’apôtre, ni de leur établissement par lui ou par son délégué ; tout cela s’en va. On reste dans l’endroit où l’on a évangélisé et l’on est évêque, « ayant subi, comme dit M. Wolff, je ne sais quelle transformation magique qui imprime un caractère indélébile, quelque chose de mystérieux, de sacramental. » Après cela, la charge importe peu ; peu importent les qualités voulues par la Parole. Pasteur et évangéliste sont des charges « tellement voisines, » que consacré pour l’une on peut se fixer dans l’autre.

Je ne sais comment cela frappe d’autres esprits ; mais il y a pour moi quelque chose de très-honteux dans cette adulation servile de ce qui existe. Qu’il y ait en cela assez d’adresse, qu’il y ait une certaine habileté, je l’admets ; mais en présence de la Parole et des immenses intérêts qui s’y trouvent, pouvoir ainsi employer de l’adresse pour flatter tout ce qui existe et devant la Parole de Dieu ce témoignage de son amour, que dirai-je ?.... chacun en jugera selon le prix qu’il attachera à cette Parole et à la grâce de celui qui l’a donnée.

Que l’église de Jérusalem fût un centre, qu’elle exerçât une certaine autorité et une certaine surveillance, cela est vrai, du moins en a-t-il été ainsi pendant un certain temps, les apôtres s’y trouvant ; mais que Barnabas eût mission d’évangéliste ou de pasteur, c’est ce qui ne se voit nulle part. Il était bien envoyé à Antioche par l’église qui s’intéressait à ce qui s’y passait ; et y étant arrivé il y exerçait son don, « il exhortait » ceux qui avaient déjà été évangélisés ; voilà ce qui se trouve en Actes XI, 23, dans le passage cité par M. Wolff, p. 44. Poussé par ce même intérêt et par les besoins, Barnabas cherche Saul. Il usait de sa liberté chrétienne en cela comme Paul quand il prenait Timothée avec lui.

Quand M. Wolff dit que les fonctions d’évangéliste sont décrites au long dans les lettres pastorales de saint Paul, je ne sais pas trop ce qu’il veut dire. Il n’est rien dit dans ses épîtres des fonctions d’un évangéliste. Il écrit comme apôtre, il ordonne comme apôtre ; il montre ce qu’il a été comme apôtre et spécialement comme apôtre. Est-ce que M. Wolff veut nier son apostolat ou rabaisser son apostolat au niveau de l’évangéliste, pour exalter l’autorité des évangélistes modernes, comme il a fait de sa prétendue consécration à la charge d’évangéliste à Antioche ? Je le répète je ne sais pas trop ce qu’il veut dire, si ce n’est pas cela ; car autrement l’apôtre ne parle jamais d’un évangéliste sauf pour nommer ce don. Éph. IV, ou exhorter Timothée à en faire l’œuvre, 2 Tim. IV, 5.

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