Des hommes sauvages nus féroces et anthropophages/Relation/13

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Traduction par Henri Ternaux.
Arthus Bertrand (p. 67-68).


CHAPITRE XIII.


Comment nous apprîmes dans quel pays sauvage nous avions fait naufrage.


Aussitôt que nous fûmes à terre, nous rendîmes grâce à Dieu, qui nous avait sauvé la vie ; mais d’un autre côté nous étions fort affligés, car nous ignorions où nous nous trouvions. Roman ne reconnaissait pas le pays, et ne savait pas si nous étions près ou loin de Saint-Vincent, et s’il y avait des sauvages à craindre, quand tout à coup un de nos compagnons, nommé Claudio, Français de nation, qui courait le long de la côte pour se réchauffer, aperçut un village derrière les bois, et dont les maisons étaient construites à l’européenne. Il y alla en toute hâte, et trouva qu’il était habité par des Portugais. On le nomme Ytenge Ehm, il n’est qu’à deux milles de Saint-Vincent. Claudio raconta notre naufrage, et dit que nous étions gelés et ne savions où aller. Aussitôt les habitants accoururent pour nous emmener dans leurs maisons, nous donnèrent des habits ; et nous y restâmes quelques jours pour nous refaire.

De là nous allâmes par terre à Saint-Vincent. Nous y fûmes très-bien reçus : on nous nourrit pendant quelque temps ; ensuite chacun se mit à gagner sa vie comme il put. Le commandant portugais, voyant que notre vaisseau était perdu, en fit partir un autre pour le port de Byasape, qui ramena le reste de nos gens.