Des théorèmes mécaniques (trad. Reinach)/Lemmes

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Traduction par Théodore Reinach.
Texte établi par Théodore ReinachArmand Colin (p. 24-27).


(Lemmes[1]).

I. Si l’on [retranche une grandeur a d’une autre grandeur A n’ayant pas le même centre de gravité, le centre de gravité de la grandeur restante b sera situé sur la droite qui joint les deux autres centres, prolongée dans le sens du centre de A ; et l’on obtiendra la distance du centre de b au centre de A] en prenant une longueur qui soit par rapport à la distance des centres de A et de a, comme le poids de a est au poids de b[2].

II. Si les centres de gravité d’un nombre quelconque de grandeurs sont situés sur une même droite, le centre de gravité du système total sera également situé sur cette droite[3].

III. Toute droite a pour centre de gravité le point qui la divise en deux parties égales[4].

IV. Tout triangle a pour centre de gravité le point de rencontre de ses médianes[5].

V. Tout parallélogramme a pour centre de gravité le point de rencontre de ses diagonales[6].

VI. Le cercle a pour centre de gravité son centre de figure.

VII. Tout cylindre a pour centre de gravité le point milieu de son axe.

VIII. Tout cône a pour centre de gravité [un point situé sur la droite menée du sommet au centre de la base et qui la divise en deux segments dont celui qui part du sommet est] triple [de l’autre][7]. [Les propositions] ci-dessus [ont été précédemment] démontrées ; [on y joindra la suivante dont la démonstration est facile] :

IX. [Étant données deux séries de grandeurs AA1A2A3, BB1B2B3 en même nombre et telles que le rapport de deux grandeurs de même rang soit constant A/B = A1/B1 = A2/B2], si tout ou partie des grandeurs A sont dans des rapports quelconques avec des grandeurs CC1C2 et si les grandeurs B de rang correspondant sont respectivement dans les mêmes rapports avec d’autres grandeurs DD1D2, la somme des grandeurs A sera à la somme des grandeurs C considérées, comme la somme des grandeurs B à celle des grandeurs D correspondantes[8] :

[ΣA/ΣC = ΣB/ΣD].

  1. Les propositions qui suivent, données sans autre explication, sont presque toutes des théorèmes de Mécanique élémentaire ; plusieurs sont démontrées dans le Traité d’Archimède qui nous est parvenu sous le titre « Équilibres des plans ou centres de gravité des plans, livre I » (Ἐπιπέδων ἰσορροπίαι ἢ κέντρα βαρῶν ἐπιπέδων, αʹ), dans l’édition de Heiberg, II, 142 suiv. Nous le citerons ainsi : « Centres de gravité, I ». Cet ouvrage (mais non le livre II du même Traité) est sûrement antérieur au présent Traité. Il est possible qu’il faille l’identifier avec l’ouvrage cité ailleurs (Quadr. parab. 6) sous le titre de Μηχανιχά ou sous celui de Στοιχεῖα τῶν μηχανικῶν (ainsi cité dans le texte nouvellement découvert des Corps fottants).
  2. Ce théorème (Centres de gravité, I, 8 = II, 161 Heib.) est une conséquence nécessaire du principe fondamental (ibid., Figure 1 : Position du centre de gravité d’un système matériel composé de deux corps (d’après Archimède, Équilibre des figures planes, I, 6-7).
    Fig. 1.
    I, 6-7) que, lorsque deux grandeurs se composent en une grandeur totale, les trois centres de gravité sont sur une même droite, que le centre de la grandeur composée divise en segments inversement proportionnels aux poids des composantes. Dès lors (fig. 1), si de la grandeur ΑΒ (centre Γ) on retranche la grandeur ΑΔ (centre Ε), le centre Ζ de la grandeur restante ΔΒ est placé de telle sorte qu’on ait :
    ΖΓ/ΓΕ = poids ΑΔ/poids ΔΒ.
  3. Cf. Centres de gravité, I, 5 et corollaires (II, 149 et suiv. Heiberg).
  4. Centres de gravité, I, 4 (II, 146).
  5. Mot à mot : « le point où se rencontrent les droites menées des sommets du triangle au milieu des côtés opposés. » Centres de gravité, I, 44 (II, 183). La démonstration (I, 13) repose sur la décomposition du triangle en une somme de rectangles.
  6. Centres de gravité, I, 10 (II, 164).
  7. Nous ne possédons pas de démonstration par Archimède de cette proposition. Il est probable qu’elle s’établissait : 1o en déterminant le centre de gravité d’une pyramide triangulaire ; 2o en passant de là à une pyramide polygonale ; 3o en considérant le cône comme la limite vers laquelle tend une pyramide inscrite quand on augmente indéfiniment le nombre des côtés.
  8. Ce lemme est la proposition initiale du Traité dit Des conoïdes et sphéroïdes (I, 290, Heib.).

    Puisque C/A = D/B, ou C/D = A/B = m, et de même C1/D1 = A1/B1 = m, etc., on a évidemment : ΣC/ΣD = ΣA/ΣB, d’où ΣA/ΣC = ΣB/ΣD.

    Notre lemme peut être appliqué (et l’était sans doute dans le texte intégral des derniers théorèmes) pour passer de la constatation de l’équilibre des sections AA1A2 CC1C2 déterminées par des plans équidistants dans un volume V et dans un volume auxiliaire W, à l’équilibre de ces volumes eux-mêmes. Considérons, en effet, les sections A comme les bases de prismes élémentaires BB1B2 dont la somme enveloppe le volume V ; et de même les sections C comme les bases de prismes élémentaires DD1D2 dont la somme enveloppe le volume W. Si m est l’équidistance (c’est-à-dire la hauteur des prismes), on a évidemment :

    B/D = mA/mC = A/C, B1/D1 = A1/C1, etc. ; donc : ΣB/ΣD = ΣA/ΣC.

    Reste à passer des corps enveloppants (ΣΒ, ΣD) aux volumes V, W eux-mêmes : c’est ce que fait Archimède en s’appuyant sur le postulat d’Eudoxe cité plus haut, p. 915, note 5. [Le contenu de la note qu’on vient de lire m’a été suggéré par M. R. Prévost.]