Description de l’Égypte (2nde édition)/Tome 1/Chapitre IV/Section I/Paragraphe 4

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§. IV. Du petit temple d’Ombos.

Le petit temple d’Ombos est situé au nord-ouest du précédent, à quarante mètres environ[1] ; son entrée est tournée au midi. L’axe du temple fait un angle de trente-cinq degrés à l’ouest avec le méridien magnétique. Ces trente-cinq degrés joints aux cinquante-cinq dont l’axe du grand temple décline à l’est, font quatre-vingt-dix degrés : ainsi les axes de ces deux temples sont exactement à angle droit. La longueur du temple est d’environ vingt-trois mètres[2] ; sa hauteur, de neuf mètres[3] ; sa plus grande largeur présumée est de dix-huit mètres environ[4].

La pierre dont ce temple est bâti, est de grès pareil à celui du grand temple ; la construction en paraît la même : mais il est dans un état de destruction beaucoup plus avancé ; il n’en reste guère que quatre colonnes, six portions de murailles et trois portes ; les murs extérieurs sont presque entièrement démolis ; enfin les plafonds sont à jour. Il ne faut pas douter que cette dégradation ne soit due au voisinage du fleuve, qui se porte de plus en plus à l’est, et qui a rongé les terres jusqu’aux murs du petit temple, soit que les eaux aient miné les fondemens, soit que des inondations extraordinaires aient pénétré sur le sol même de l’édifice.

Le portique n’avait de colonnes que celles de la façade, engagées, comme à l’ordinaire, dans des murs d’entre-colonnement. Il est suivi de deux salles oblongues, d’égales dimensions. Après, vient le sanctuaire, qui devait être accompagné de deux salles latérales. On a déjà fait remarquer que la grande porte du sud est dans l’axe de ce petit temple.

Le chapiteau des colonnes est formé de quatre têtes d’Isis, surmontées d’un massif qui a, en petit, la forme d’un temple. Ce chapiteau a déjà été décrit à Philæ fort en détail, et il ne fournit ici aucune observation nouvelle. Ce qu’il importe d’observer,’c’est qu’on trouve encore, dans les salles et sur les colonnes, des peintures bien conservées, qui annoncent que l’édifice était revêtu de couleurs, ainsi que le grand temple.

Nous ne décrirons pas ici les tableaux sculptés sur les murailles, consistant principalement dans des offrandes à Isis qui prouvent, ainsi que le chapiteau de la colonne, que ce temple lui était consacré. Un des attributs les plus fréquens dans les mains des figures d’hommes et de femmes, c’est une tige recourbée et armée de pointes semblables aux dents d’une scie[5]. La décoration de l’édifice renferme principalement des représentations relatives à Isis et à Horus[6] ; mais, dans une frise qui est sous le plafond de la dernière salle, on remarque une sorte de caricature qui est l’image de Typhon[7] ; on le reconnaît à son large visage, à son air riant et grotesque, à ses membres courts et ramassés. Un sujet assez gracieux se remarque parmi ces différentes sculptures : deux femmes assises soutiennent d’une main un siége qui sert de trône à Horus ; ce trône repose sur une tige que ces femmes paraissent tenir en équilibre au moyen de leurs pieds. Chacune des deux figures tient de l’autre main des lotus formant autour de cette tige des nœuds multipliés. Devant Horus, un sacrificateur armé d’une lance à deux pointes menace de tuer un serpent. Dans un autre tableau, l’on présente au même dieu une offrande consistant en trois oies.

Il est donc à présumer qu’Horus et Isis étaient les divinités du temple. Il serait aisé de faire voir que les attributs qu’on y voit se rapportent presque tous au phénomène de l’inondation ; et l’on sait qu’Horus était l’emblème du soleil au solstice d’été, solstice qui est l’époque de la crue du Nil : mais nous n’insisterons pas sur ces rapprochemens, qui seront mieux placés ailleurs[8].

  1. Vingt toises.
  2. Soixante-onze pieds.
  3. Vingt-huit pieds.
  4. Cinquante-six pieds.
  5. Voyez pl. 45, fig. 5. On en a déjà vu d’autres exemples dans les bas-reliefs de Philæ.
  6. Voyez pl. 45, fig. 1, 2, 5.
  7. Voyez ibid, fig. 4.
  8. Voyez la Description d’Edfoû, chap. V, §. v.