Description du département de l’Oise/Romescamp

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P. Didot l’ainé (1p. 105-108).
ROMESCAMP.


Le sol de Romescamp est en général caillouteux. On est dans l’usage de semer du trefle dans les jacheres destinées à recevoir du bled : on semé le trefle au mois de mars ; on en fait deux récoltes, l’une en messidor, l’autre en vendémiaire : dès que cette récolte est enlevée on laboure la terre, on la herse, on y dépose le bled. Il y a dans le canton de Romescamp plus de dix-huit cents arpents de bois épars, provenants du duc de Penthievre, où l’on façonne des planches pour la marine. Ces bois n’ont point été vendus à des particuliers ; leur produit annuel peut être de 20,000 liv.

Les cidres de ce pays sont d’assez bonne qualité.

Dans le canton de Romescamp il y a beaucoup de charpentiers, de menuisiers, de charrons, de tailleurs, de sabotiers, de tisserands. On y voit une fabrique assez considérable et renommée de ce qu’on nomme serge d’Aumale.

On s’y plaint de la dégénération des mœurs, de la perte de l’amour filial, et du respect pour la vieillesse depuis la révolution.

On y voit peu de mendiants ; beaucoup de malheureux ont assez de force d’ame pour souffrir sans tendre la main.

Quincampoix est la dernière commune du département : c’est un pays Teculé[1], peu fréquenté, dont la culture est à-peu-près la même que celle de Romescamp.

Près de Quincampoix et de l’Aunoy-Cuillere on trouve des montagnes très escarpées où l’on mené paître les moutons.

On nourrit dans ce pays beaucoup de vaches, de porcs, de volailles de toute espèce.

Les comestibles sont le froment, le seigle, le mouton, le porc, le poisson de mer, le poisson d’eau douce, le beurre, le fromage, des légumes de toutes espèces, des fruits, pommes, poires, etc. La boisson ordinaire est le cidre, le poiré. On en récolte assez dans le pays pour la consommation des habitants ; il s’en exporte peu dans les pays voisins.

Deux fortes sources sortent, l’une de la vallée de Quincampoix, l’autre de celle de l’Aunoy-Cuillere : elles deviennent assez fortes pour faire tourner plusieurs moulins ; elles coulent sur la même direction, joignent une autre source du département de la Seine-Inférieure : toutes trois se réunissent aux portes de la ville d’Aumale, et forment la rivière de Braîne, qui se jette dans la mer près de Tréport.

Il y apeu d’endroits dans la France où on se soit moins senti de la révolution qu’à Quincampoix.

Après les différentes excursions faites dans les environs, et dont nous sommes dispensés de faire le récit en détail, parceque l’uniformité d’une grande plaine offre peu de points pittoresques, nous quittâmes Grandvilliers, accompagnés d’un cortège presque aussi nombreux que celui qui nous avoit accueilli avec tant d’amabilité et d’empressement à notre arrivée dans cette commune. Des jeunes gens à cheval voulurent, malgré nos instances et le mauvais temps, nous accompagner jusqu’au château d’Achy, un peu au-delà de Marseille. La route que nous traversâmes pour nous y rendre passe sur des terrains coupés de vallons, de monticules, et de jolis bois. Les villages sont peuplés de fileuses et d’hommes travaillant des bas au métier. J’ai fait dessiner le château, d’une structure si bizarre, appartenant à M. de Juigné, qu’on nomme Fontaine-la-Vaganne [2]. En approchant du château de Causan, défendu par quatre tourelles, au milieu des bois et des eaux, les sites deviennent très pittoresques. Rien de champêtre, decahoteux, de religieusement mystérieux comme les environs de Marseille.



  1. WS — Coquille typographique : probablement reculé
  2. Ce château fort ancien est flanqué d’une grosse tour, qu’on nomme la tour de Ganelon ; les murs ont sept pieds d’épaisseur. Il avoit tenu pour le parti d’Orléans, et fut pris par trois mille hommes, en 1419. Le sieur de Fontaine-Lavaganne fut un des généraux de Charles VII. Dans la commune de Fontaine-Lavaganne on fabrique beaucoup de bas de laine.