Deux voyages sur le Saint-Maurice/02/11

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P.V. Ayotte (p. 236-245).

UN PÈLERINAGE
Aux Vieilles Forges Saint-Maurice

Maintenant, amis lecteurs, en avant ! Suivez-moi, et ne craignez pas de vous égarer. Passons au-dessus de ce petit courant d’eau, une seule planche y sert de pont : eh bien ! c’est la rivière des Forges qui vient ici se jeter dans le Saint-Maurice. Et si vous concevez du mépris pour la puissance ou l’utilité de ce courant d’eau, je vous avertis que vous êtes dans l’illusion. Nous reviendrons sur ce point.

À côté de la rivière et sur le bord du Saint-Maurice on connaissait depuis longtemps un puits dont l’eau bouillonnait toujours, bien qu’elle fut assez froide, c’est-à-dire qu’il y a là une de ces sources de gaz si nombreuses dans la vallée du Saint-Laurent ; on a mis dernièrement un baril sur ce puits, afin de recueillir le gaz, et on a fait arriver un tube en plomb dans le haut de ce baril. Vous avez une allumette ; allons, faites prendre, et mettez le feu à l’extrémité du tube. Voyez, quelle belle flamme ! Si l’on avait ici un gazomètre et ensuite un système de tuyaux, on pourrait chauffer et éclairer tout le village des Forges.

Montons par ce chemin de charrette : il n’est pas très battu, mais la pente en est assez douce, n’est-ce pas ? Nous voilà au moulin à farine du Dr Beauchemin. Ce moulin est en brique et à deux étages ; c’était d’abord une boutique de menuisiers, élevée par M. Henri Stuart pour l’utilité des Forges. Un petit moulin dont on voit encore les fondations se trouvait à quelques pas d’ici : M. Onésime Héroux devenu propriétaire des deux bâtiments transporta les moulanges dans la boutique, et en fit le moulin actuel qui est beaucoup plus confortable. Trois moulanges y sont en activité.

Le pouvoir d’eau est largement suffisant pour faire marcher le moulin, et je crois sincèrement que l’on a ici le type des pouvoirs d’eau. Pas besoin de batardeau coûteux pour barrer la rivière, pas besoin d’étang pour amasser de l’eau, un simple canal en bois de quelques pieds suffit pour tous les besoins. La quantité d’eau fournie par ce canal est toujours à peu près la même : elle ne diminue pas sensiblement dans les sécheresses de l’été, elle n’augmente presque pas au printemps, de sorte que le moulin marche toujours avec une régularité parfaite.

Et comment se fait-il que la rivière qui coupe le terrain des Forges en deux parties garde le même niveau toute l’année ? N’allez pas avoir recours à de forts calculs pour expliquer cela, car c’est une chose toute simple. 1o La rivière ne prend sa source qu’à trois milles, tout au plus, de son embouchure, de sorte qu’elle n’a pas le temps de rencontrer un grand nombre de ruisseaux qui puissent gonfler son cours. 2o Elle coule au milieu d’un terrain sablonneux qui boit l’eau de la pluie et ne permet pas, le plus souvent, qu’il en arrive une seule goutte jusqu’à elle. 3o Elle prend sa source dans une savane, réservoir inépuisable sur lequel les sécheresses de l’été et la fonte des neiges au printemps ne peuvent pas produire d’effets bien sensibles.

La source étant à peu près toujours la même, il n’est pas surprenant que la rivière qui en découle reste aussi toujours la même.

On avait cru que le déboisement changerait cet état de choses, mais l’expérience prouve inexorablement qu’il n’en est rien.

On se sert dans le moulin d’un ancien poêle que l’on distinguerait immédiatement des poêles actuels par l’épaisseur de ses plaques ; les vieillards se souviennent de l’avoir vu autrefois dans la chapelle ; il ne remonte cependant pas au temps des Français, car il porte les armes de l’Angleterre.

Continuons maintenant à remonter la côte : nous voilà en face de la jolie maison du meunier : des arbres nous protègent contre les ardeurs du soleil, des fleurs nous réjouissent par la variété de leurs couleurs. Si la demeure du meunier Sans-Souci était semblable à celle que nous voyons, il pouvait bien refuser de la vendre au roi de Prusse.

Entrons ici, car M. Fortin, le meunier, est notre ami. C’est le maître-chantre de la chapelle des Forges, et les habitants des Trois-Rivières aiment certes bien à l’entendre, eux aussi, quand il va prendre sa place au chœur de la Cathédrale. M. Fortin va maintenant être notre guide dans la visite que nous allons faire des parties les plus intéressantes du village.

Dirigeons-nous immédiatement vers la chapelle, car la maison de Dieu doit toujours avoir nos préférences. En passant, remarquez cette maison longue, à plusieurs logements, c’est la dernière de cette forme qui reste de l’ancien village, tel qu’il était dans les temps de prospérité. Traversons maintenant la rivière ; à côté du pont, qui peut avoir une vingtaine de pieds, à notre gauche, voyez cette petite cascade artificielle : c’est là que les charretiers venaient laver la mine de fer, avant de la transporter au fourneau.

Nous passons devant une maison à deux portes, où se fait maintenant l’école, et sur une petite élévation, la face au chemin, nous trouvons la chapelle. C’est une maison en bois, de 50 pieds sur 30, qui fut élevée dans le temps que Mrs Stuart et Porter étaient propriétaires des Forges. La croix à fleurs de lis surmonte le clocher est la croix de l’ancienne chapelle qui se trouvait à quelques arpents d’ici ; elle est de fonte, et on conserve encore le modèle en bois qui servit pour en faire le moule.

Pendant longtemps cette chapelle servit en même temps d’école : une cloison volante séparait au besoin le chœur de la nef, et la nef devenait alors une maison d’école très confortable. Un monsieur Doucet, deux demoiselles Dugal, y ont instruit bien des enfants.

L’intérieur n’est pas riche, mais il est tout propret. Nous trouvons un harmonium près de la porte : c’est presque du luxe, dans une si petite mission. À droite de l’autel il y a une jolie statue de la Sainte Vierge devant laquelle les bons habitants des Forges viennent prier chaque soir du mois de Marie. C’est un exercice qui se fait toujours avec une piété vraiment édifiante. Une image de la Sainte Face domine le tabernacle : n’allez pas, je vous prie, y jeter seulement un regard distrait, car c’est ici l’expression d’une pensée toute sainte.

Les Vieilles Forges étaient autrefois un poste où les voyageurs du Saint-Maurice s’arrêtaient pour boire et blasphémer d’une manière horrible. Celui qui voudrait aujourd’hui rapporter les paroles qui ont été prononcées par ces redoutables passants, serait nécessairement regardé comme un calomniateur, car il y a dans leurs blasphèmes quelque chose d’incroyable. Connaissant cette pénible histoire, M. l’abbé Caisse voulut que la chapelle qui s’élève au milieu des Forges devint la chapelle de la Réparation, et il résolut de la consacrer au culte de la Sainte Face.

Mais il fallait faire encore davantage : Avant que la Sainte Face ne prit possession de son temple, il fallait la porter en triomphe dans toutes les parties du village, affirmer la victoire de Jésus et rendre les chants de bénédiction et de louange plus retentissants et plus solennels que les blasphèmes ne l’avaient jamais été. On organisa donc une grande fête pour le 15 juillet 1883. Tout le peuple contribuait aux préparatifs avec un véritable enthousiasme. « On fit si bien, dit le missionnaire lui-même, qu’au jour venu le modeste sanctuaire des Forges se trouva tout à fait transformé. Le voilà devenu beau, on le reconnaît à peine ! Et cependant, qu’y a-t-il ? Verdure de la forêt, fleurs du jardin, modestes draperies rassemblées au hasard, voilà nos précieuses parures, nos délicieux parfums, nos riches et brillantes tentures !… Et tandis qu’à l’autel le prêtre, assisté de ses diacres, offre le très saint Sacrifice, tandis que des voix pieuses font entendre des chants de l’âme, des cris du cœur, la foule pressée au dedans et au dehors du saint lieu trop petit pour la contenir, attentive et recueillie, contemple, en priant, l’auguste Face de Notre-Seigneur, les yeux mouillés de larmes.

« À l’issue de l’office divin, la procession se met en marche, la croix pour unique bannière. Tout le décor du modeste cortége a été mis dans les mains pures et innocentes des petits enfants. Huit d’entre eux, costumés pour la fête, portent l’image vénérée de la sainte Face ; les autres tiennent à la main de petites oriflammes, et s’avancent graves et recueillis comme des anges à la suite du Roi des cieux.

« En un moment, l’ordre le plus parfait s’établit dans les rangs, chacun a pris sa place sans tumulte et sans bruit. Entre les deux haies de balises qui bordent le chemin, on voit défiler lentement deux rangées de vieillards, d’hommes, de femmes et d’enfants, tous dans le plus profond recueillement, et se communiquant l’un à l’autre une émotion visible et croissant à chaque pas.

« Après avoir traversé toute la partie habitée des Vieilles-Forges, la procession vint s’agenouiller aux pieds d’un magnifique reposoir élevé sur le seuil de la dernière demeure, auprès de laquelle coulent, en murmurant à travers un rocher, les eaux de la rivière Saint-Maurice, si longtemps témoin des scandales dont il a été parlé plus haut.

« C’est là, sur une estrade élevée, en présence de la sainte Face déposée sur un autel préparé à l’avance, que le prédicateur va faire entendre sa voix, et protester au nom de tous contre les blasphèmes et les scandales dont ces lieux ont été si souvent le théâtre. C’est là aussi que la foule pieuse va laisser libre cours à des larmes depuis trop longtemps dissimulées sous une paupière attendrie, à des soupirs jusque là comprimés au fond de leurs cœurs gonflés par l’émotion la plus vive. La parole éloquente du prêtre n’eut pas de peine à rompre cette digue, et bientôt l’orateur lui-même puisa son émotion dans l’auditoire en larmes. Le prédicateur distingué de la circonstance, M. l’abbé A. Biron, du séminaire des Trois-Rivières, peut se féliciter, à la gloire de la sainte Face, d’avoir jeté une semence précieuse dans une terre fertile et bien préparée.

« Le sermon terminé, toute la foule en pleurs s’inclina respectueusement devant la douloureuse Face de Notre-Seigneur, puis s’en retourna, dans le même ordre et avec un recueillement encore plus grand, vers le sanctuaire béni, où la sainte effigie fut déposée par le célébrant et ses ministres au-dessus du tabernacle de l’autel principal. Après le chant du Te Deum, l’assistance se prosterna de nouveau devant l’image vénérée de la sainte Face ; et se dispersa, comblée de joie, chacun racontant partout le bonheur inattendu et les émotions vives de cette belle journée.

« Désormais, la pauvre chapelle des Vieilles-Forges Saint-Maurice sera un sanctuaire de grâces et de bénédictions spéciales, dans lequel les amis de Dieu recevront des faveurs plus promptes et plus abondantes. On viendra prier dans l’Oratoire de la Sainte Face, et l’on obtiendra des prodiges, selon cette promesse de Notre-Seigneur Jésus-Christ à la sœur Saint-Pierre : « Par ma sainte Face, vous ferez des prodiges. »

« Notre-Seigneur a dit encore de sa Face adorable qu’« Elle doit être le signe sensible de la Réparation. » Comme nos péchés sont la cause des refus ou des retards que nous éprouvons dans nos prières, nous irons au pied de l’autel de la sainte Face faire de solennelles réparations pour nos péchés, et nos vœux parviendront ainsi sans entrave jusqu’au trône de Dieu.

« Déjà la dévotion à la Face de Jésus a opéré des prodiges au Canada, des guérisons étonnantes, des conversions vraiment miraculeuses, des grâces de toutes sortes qui ont imprimé dans les âmes une confiance qui ne s’effacera plus. Notre-Seigneur a dit : « Vous obtiendrez par ma sainte Face le salut de beaucoup de pécheurs ; par cette offrande rien ne vous sera refusé. » Allons donc au pied de l’autel de la divine Face, et là, prosternés, nous nous écrierons avec le psalmiste : « J’ai supplié votre Face de tout mon cœur ; ayez pitié de moi, selon votre promesse. » Deprecatus sum Faciem tuam in toto corde meo ; miserere mei, secundum eloquium tuum. » (Ps. 118, v. 58.)

Le Dieu du Calvaire a accompli ses promesses : de grandes faveurs spirituelles sont venues récompenser la piété des habitants des Forges. Dans l’oratoire de la sainte Face on obtient même des faveurs de l’ordre purement temporel. En voici une, entr’autres, dont le souvenir ne passera pas. M. Raphaël Bourassa s’était cassé une jambe et cette blessure ne guérissait pas ; l’enflure menaçait même de monter jusqu’au corps, par conséquent une mort prochaine semblait inévitable. M. Bourassa, qui est un homme de stature colossale, se traîna péniblement pendant neuf jours de suite Jusqu’à l’oratoire de la sainte Face ; il y pria avec une foi robuste, et il y fit prier, surtout par ceux de sa famille qui le soutenaient pendant ses pèlerinages. À la neuvième journée il se sentit tellement mieux qu’il laissa ses béquilles dans la chapelle, où on les voit encore suspendues à une poutre devant la sainte Face. La guérison a continué, et au bout de quelque temps elle était devenue parfaite.

Rendez gloire à Jésus, ô habitants des Forges, soyez dévots à la sainte Face, car les anciens que vous remplacez n’ont pas été irréprochables sous le rapport du blasphème, et dans votre village Dieu a souvent été insulté par d’autres que ces passants dont parle votre missionnaire.

Le petit sanctuaire des Forges a reçu dernièrement une nouvelle et importante faveur. Dans un voyage à Rome, en 1887, M. l’abbé J. R. Caisse a en effet obtenu qu’on pût y gagner l’indulgence du Saint-Pardon ou de la Portioncule.

Qu’est-ce que l’indulgence de la Portioncule ? Le père Maurel va nous l’apprendre. « Ce fut, dit-il, en année 1221, vers le mois d’octobre, que saint François (d’Assise), dans une apparition de Jésus-Christ, de la sainte Vierge, et d’une multitude d’esprits célestes, osa demander à Notre-Seigneur lui-même, par l’entremise de Marie, une indulgence plénière pour quiconque, contrit et confessé, visiterait l’église de Sainte-Marie-des-Anges, ou de la Portioncule. Le Fils de Dieu exauça la prière de son fidèle serviteur, à condition toutefois que François obtiendrait du Pape alors régnant, Honorius III, la confirmation de cette indulgence qu’il lui accordait. Honorius la confirma, en effet, la même année ; mais ce ne fut que deux ans après, en 1223, qu’il l’accorda à perpétuité, la fixant selon la volonté de Jésus-Christ manifestée à saint François dans une seconde vision, au 2 août, à commencer aux premières Vêpres, c’est-à-dire vers le déclin du jour où l’apôtre saint Pierre se trouva délivré de ses liens.

« Elle fut publiée solennellement à Sainte-Marie-des-Anges, le 1er août de cette année 1223, par ordre du Souverain Pontife, et par les évêques d’Assise, de Pérouse, de Todi, de Spolette, de Foligni, de Nocera et de Gubbio. La publication de l’indulgence fut précédée d’un discours plein de ferveur par saint François lui-même.

« Ce grand privilége, nommé l’Indulgence du Saint-Pardon ou de la Portioncule, fut ensuite étendu à toutes les églises des trois Ordres de Saint-François par plusieurs Papes, et notamment par Grégoire XV, lequel, à la confession déjà prescrite pour gagner l’Indulgence, ajouta la communion. Et Innocent XI, par un bref du vingt-deux janvier 1689, la rendit applicable aux défunts.

« Ce que l’Indulgence du Saint-Pardon a de particulier, c’est qu’on peut la gagner toties quoties, c’est-à-dire plusieurs fois le même jour, ou autant de fois que, dans le dessein de participer à l’Indulgence, on visite l’église de la Portioncule, ou toute autre église qui jouit du privilége, depuis l’heure des premières Vêpres jusqu’au soir du 2 août. On doit à la visite et aux prières faites aux intentions du Souverain Pontife ajouter la confession et la communion. Rappelons-nous d’appliquer surtout ces Indulgences aux saintes âmes du Purgatoire. »

Vous comprenez maintenant, mes chers lecteurs, que c’est un grand privilége qui a été accordé à la chapelle des Forges, aucune des églises du diocèse des Trois-Rivières n’en a été dotée jusqu’à ce jour, aussi, le 2 août 1888, le modeste temple était beaucoup trop petit pour la foule qui voulait y trouver place. Un fils de saint François, le père Frédéric Ghiveld, commissaire de Terre Sainte au Canada, adressa la parole au peuple, et l’on crut entendre saint François lui-même renouvelant son discours de Sainte-Marie-des-Anges. Après cette suave exhortation, les fidèles firent jusqu’au soir une ample moisson d’indulgences en faveur des âmes du Purgatoire.

Ô petit temple, j’ai dû rappeler sans retard ces évènements si honorables pour toi, et maintenant je te dis adieu : j’ai prié avec foi devant ton humble autel, et je sais que j’aurai désormais plus d’ardeur à pratiquer et à prêcher la dévotion à la sainte Face de Jésus.

Dirigeons nos pas vers cette maison qui s’élève sur un coteau, droit en face de la chapelle. C’est la demeure du seigneur de l’endroit, de M. le docteur Beauchemin. Entrons sans crainte, tout le monde ici a le cœur sur la main, et puis le respect du prêtre est de tradition dans cette famille. Madame Beauchemin a toutes les bonnes manières de la haute société ; le docteur est un ancien ami pour moi, car jadis, ne vous déplaise, j’ai été missionnaire des Forges ; la réception ne peut donc manquer d’être tout à fait cordiale.

C’est ici la maison des prêtres, le missionnaire s’y trouve comme dans son presbytère ; mais en même temps c’est une maison canadienne, elle est donc pleine d’enfants. J’ajoute qu’elle est pleine de beaux enfants, bien mis et bien élevés. Quels égards tout ce petit monde n’a-t-il pas pour le missionnaire ! Il faut l’avoir éprouvé pour le croire.

Pendant que je suis à m’entretenir bien amicalement avec l’excellente famille Beauchemin, j’entends que M. Fortin se munit de permissions et des clefs pour visiter la Grande Maison. Oui, il faut y songer, nous devons renoncer au charme de la conversation et continuer notre pèlerinage à travers les Vieilles Forges. Adieu belle et noble famille, cœurs vraiment chrétiens ; quand vous priez dans l’oratoire de la Sainte-Face, accordez quelquefois un petit souvenir au plus humble de vos anciens missionnaires.

Nous retournons un peu sur nos pas. Après avoir traversé le pont, et passé les deux maisons habitées qui l’avoisinent, nous entrons dans un champ. Une ruine de maçonnerie s’élève triste et solitaire : ce sont les Forges Saint-Maurice, il n’en reste que cela. Pourtant, en bas de la côte, je reconnais encore la forge du gros marteau ; mais le bâtiment est en ruine et le gros marteau est disparu. C’est donc ici qu’il y a eu tant de mouvement autrefois, et maintenant c’est la solitude. Les dépendances des Forges, les maisons qui contenaient tant de personnes, tout a disparu. Les ruines dans un jeune pays sont comme des cheveux de neige sur une tête de quinze ans, cela serre péniblement le cœur.

Mes amis, j’ai pu recueillir quelques notes qui vous intéresseront : asseyons-nous sur l’herbe, en face de ces ruines, je vais vous raconter succinctement l’histoire des Forges.