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Dictionnaire administratif et historique des rues de Paris et de ses monuments/Dauphin (rue du)

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Dauphin (rue du).

Commence à la rue de Rivoli, nos 18 et 22 ; finit à la rue Saint-Honoré, nos 307 et 311. Le dernier impair est 11 ; le dernier pair, 16. Sa longueur est de 94 m. — 1er arrondissement, quartier des Tuileries.

Cette rue, dont l’existence ne date que du XVIIe siècle, a subi cependant plusieurs métamorphoses. En 1675, on la nommait rue Saint-Vincent. Elle conserva cette dénomination jusqu’au mois de novembre 1744. Vers cette époque le Dauphin avait pris l’habitude de traverser la rue Saint-Vincent, lorsqu’il allait entendre la messe à Saint-Roch. Un jour qu’il se rendait à cette église le peuple profita des instants que le prince employait à la prière pour enlever l’inscription de rue Saint-Vincent et lui substituer celle de rue du Dauphin.

Cette voie publique fut calme et silencieuse jusqu’à l’année 1795. La rue du Dauphin alors figura sur le plan de défense que le jeune Bonaparte improvisa pour sauver la Convention dans la journée du 13 vendémiaire.

Le parti royaliste après la mort de Robespierre avait repris courage. Il se réorganisa bientôt et acquit une telle puissance, que la Convention en dut être effrayée. La constitution de l’an III, soumise à la sanction du peuple, excita dans la capitale un grand tumulte. La section Le Peletier (autrefois des Filles-Saint-Thomas), se mit à la tête du mouvement, se déclara en permanence, puis appela aux armes tous les bourgeois de Paris. Pour augmenter le nombre de ses partisans, elle annonça dans ses proclamations que le pouvoir devait armer les terroristes pour rétablir le régime de Robespierre. La Convention menacée fit choix pour sa défense du général Menou, qui reçut l’ordre d’employer la force pour dissiper les attroupements. Ce général n’obéit qu’avec répugnance et pactisa même avec la révolte. Cette faiblesse accrut l’audace des insurgés qui fermèrent les barrières et s’emparèrent de la trésorerie nationale. La situation devenait critique ; l’assemblée délibérait en tumulte sans prendre un parti. Enfin, à quatre heures et demie du matin, le nom de Barras est prononcé par plusieurs représentants. On lui offre le commandement des troupes dont la Convention peut disposer. Barras accepte et demande pour second le général Bonaparte. Le jeune Napoléon est chargé du soin de la défense. Il expédie en toute hâte le chef d’escadron Murat avec trois cents chevaux à la plaine des Sablons pour en ramener quarante pièces d’artillerie.

L’armée conventionnelle ne se composait que de cinq mille hommes. Bonaparte les renforce de quinze cents volontaires organisés en trois bataillons, puis il fait porter des fusils dans le palais des Tuileries pour armer en cas de besoin les représentants eux-mêmes.

À deux heures après midi, les insurgés commandés par le comte de Maulevrier, un jeune émigré nommé Lafond et les généraux Danican et Duhoux commencent les hostilités. Ils forcent les troupes de la Convention, qui occupent le Pont-Neuf, à se replier sur le Louvre. En ce moment Danican somme la Convention de céder aux sectionnaires. Plusieurs députés proposent des mesures de conciliation. Aussitôt Marie-Joseph Chénier, frère de l’illustre poète, s’élance à la tribune : « Point de transaction, s’écrie le courageux représentant, la Convention nationale doit vaincre ou mourir. »

Il était quatre heures et demie. Les insurgés commencent une nouvelle attaque du côté de la rue Saint-Honoré. Un de leurs bataillons, placé sur les degrés de l’église Saint-Roch, engage une vive fusillade. Bonaparte, sans s’inquiéter du feu des révoltés, fait avancer des pièces de canon dans la rue du Dauphin, et couvre les insurgés de mitraille ; puis, sans leur donner le temps de se reconnaître, il débouche dans la rue Saint-Honoré et les disperse. À sept heures du soir le calme était rétabli. Vingt-et-un jours après le triomphe de la Convention, les représentants étaient réunis en séance extraordinaire ; à deux heures et demie, le président se lève et prononce au milieu du calme de l’assemblée la formule suivante : « La Convention nationale déclare que sa mission est remplie et que la session est terminée. »

Peu de temps après le 13 vendémiaire, la rue du Dauphin recevait le nom de rue de la Convention. — Une décision ministérielle du 7 mars 1807, signée Champagny, fixa la moindre largeur de cette voie publique à 10 m. Cette moindre largeur fut réduite à 8 m. par une autre décision du 18 décembre 1808, signée Cretet. En vertu d’un arrêté préfectoral du 27 avril 1814, cette voie publique reprit le nom de rue du Dauphin. Une ordonnance royale du 22 juin 1825 porte que la rue du Dauphin prendra à l’avenir le nom de Trocadéro ; que cette voie publique sera élargie au moyen de l’acquisition et de la démolition des propriétés situées sur le côté gauche de ladite rue dont la dimension est fixée à 11 m. 57 c. À la fin de l’année 1830, cette voie publique reprit le nom de rue du Dauphin. L’ordonnance royale précitée n’a reçu son exécution qu’en 1841. Les propriétés riveraines sont alignées à l’exception des maisons nos 6, 8 et 10, qui devront subir un léger redressement. — Égout. — Conduite d’eau depuis la rue Saint-Honoré jusqu’aux deux bornes-fontaines. — Éclairage au gaz (compe Anglaise).