Dictionnaire administratif et historique des rues de Paris et de ses monuments/Médecine (rue de l’École-de-)

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Médecine (rue de l’École-de-).

Commence aux rues Racine, no 2, et de la Harpe, no 78 ; finit au carrefour de l’Odéon, no 1, et à la rue de l’Ancienne-Comédie, no 1. Le dernier impair est 43 ; le dernier pair, 38. Sa longueur est de 342 m. — 11e arrondissement, quartier de l’École-de-Médecine.

C’était, en 1300, la rue des Cordèles (Cordeliers). Le couvent de ces religieux était situé dans cette rue. En 1304, c’était la rue Saint-Côme et Saint-Damien, en raison de l’église ainsi appelée qu’on voyait au coin de la rue de la Harpe. Jusqu’en 1672, on la désigna sous la dénomination de rue Saint-Germain ; elle conduisait à la porte de ce nom. De 1672 à 1790, c’était la rue des Cordeliers. Elle prit alors le nom de rue de l’École-de-Médecine, qu’elle conserva jusqu’en 1793.

« Séance du 25 juillet 1793. — Une députation de la section du théâtre Français (Odéon) demande que la rue des Cordeliers soit appelée maintenant du nom de Marat. Elle annonce, en outre, l’offre du citoyen Palloi de plusieurs pierres de la Bastille pour l’exécution de ce projet. Le conseil adopte à l’unanimité cette demande, et arrête en conséquence que la rue nommée des Cordeliers, s’appellera rue Marat, et la rue de l’Observance place de l’Ami du Peuple. Signé Pache et Dorat-Cubières. » (Registre de la Commune, tome 19, page 88.) — Marat demeurait dans cette rue au no 18. — Depuis le 9 thermidor, époque de la chute de Robespierre jusqu’au 1er floréal an IV, elle prit le nom de rue de l’École de Santé. Une lettre émanée du bureau central du canton de Paris, constate néanmoins qu’à cette époque cette rue portait encore le nom de Marat. Elle prit peu de temps après le nom de rue de l’École-de-Médecine. — Une décision ministérielle du 24 messidor an V, signée Benezech, fixa la largeur de cette voie publique à 9 m. En vertu d’un arrêté préfectoral du 15 septembre 1836, le numérotage de cette voie publique a été régularisé. — Une ordonnance royale du 27 du même mois, a porté la moindre largeur de cette rue à 10 m. Propriété no 1, alignée ; de 3 à 13, retranch. 2 m. 05 c. à 2 m. 80 c. ; 15 et 17, alignées ; 19, ret. 4 m. 40 c. à 5 m. 50 c. ; 21, ret. réduit 4 m. ; 23, ret. réduit 3 m. 40 c. ; 25, ret. réduit 2 m. 40 c. ; 27, 29, 31, alignées ; 33, ret. 2 m. ; 35 et 37, ret. 1 m. 30 à 1 m. 90 c. ; 39, ret. réduit 1 m. 20 c. ; 41 et 43 doivent être supprimées pour l’exécution de l’alignement du carrefour de l’Odéon ; de 2 à 6, alignées ; 8, ret. 2 m. ; 10, ret. réduit 1 m. 70 c. ; École de Médecine, alignée ; 12 et 14, ret. réduit 30 c. ; 16, ret. réduit 50 c. ; 18, ret. réduit 1 m. 40 c. ; 20, ret. 1 m. 90 c. à 2 m. 40 c. ; de 22 à 34, ret. 1 m. à 2 m. 20 c. ; 36 et 38, ret. 1 m. — Égout entre la place et le carrefour de l’Odéon. — Conduite d’eau depuis la rue Hautefeuille jusqu’à la place. — Éclairage au gaz (compe Parisienne).

À l’angle de la rue de l’École-de-Médecine et de celle de la Harpe était située l’église Saint-Côme et Saint-Damien dont nous rappelons ici l’origine. La nouvelle enceinte de Paris dont Philippe-Auguste avait ordonné la construction, morcelait les propriétés et les terres seigneuriales. Des différends s’élevèrent entre l’évêque de Paris et l’abbé de Saint-Germain-des-Prés. Ces contestations furent terminées par une sentence arbitrale, rendue au mois de janvier de l’an 1210, par laquelle il fut dit que la juridiction spirituelle appartiendrait à l’évêque de Paris, dans l’étendue du territoire qui venait d’être compris dans la nouvelle enceinte, mais que l’abbé de Saint-Germain-des-Prés, par compensation, y pourrait faire bâtir deux églises ; l’une fut celle de Saint-André-des-Arts et l’autre devint l’église Saint-Côme et Saint-Damien.

En vertu d’un arrêt du parlement, à l’année 1343, l’Université nommait à la cure de Saint-Côme. Quoique les dépendances de cette église fussent peu étendues, on y voyait cependant un cimetière, des charniers, ainsi qu’un petit bâtiment construit en 1561. Le lundi de chaque semaine, les chirurgiens y venaient visiter les pauvres blessés auxquels ils donnaient des consultations gratuites.

« En 1255 fut érigée, dit Sauval, la confrérie de Saint-Côme et de Saint-Damien, patrons des chirurgiens. » En 1555, Nicolas Langlois, prévôt des chirurgiens, affecta une rente de cinquante livres à cet utile établissement. Un mémorial en caractères gothiques, rappelant cette pieuse fondation, était placé sous les charniers. Ces chirurgiens avaient succédé aux chanoines qui exerçaient cet office charitable à l’entrée de la cathédrale.

Parmi les personnages célèbres enterrés dans cette église, on remarquait le tombeau d’Omer Talon, avocat au parlement, auteur de mémoires très curieux, mort en 1652, et celui de La Peyronie, créateur de l’Académie de chirurgie, mort en 1747. — On voyait aussi dans cette église une épitaphe assez curieuse que nous citons d’après Saint-Foix :

« Dans ce petit endroit, à part,
Gît un très singulier cornard ;
Car il l’étoit sans avoir femme ;
Passants, priez Dieu pour son âme !

» Le malheureux que l’on avait ainsi bafoué, ajoute le même historien, était un pauvre diable que les gens du maréchal de Beaumanoir lui avaient amené pendant qu’il chassait dans une forêt du Maine, en 1599. Ils l’avaient rencontré endormi dans un buisson, et trouvant sa figure fort singulière, ils l’avaient conduit au maréchal. En effet, il avait au haut du front deux cornes faites et placées comme celles d’un bélier ; il était fort chauve, et avait au bas du menton une barbe rousse et par flocons, comme on peint celle des satyres. Le maréchal le présenta à Henri IV, qui le donna, dit Pierre l’Estoile, à un de ses valets pour en tirer profit. L’infortuné Trouillac, promené de foire en foire, en conçut tant de chagrin, qu’il mourut au bout de trois mois. »

L’église Saint-Côme et Saint-Damien supprimée en 1790, devint propriété nationale, et fut vendue, ainsi que son cimetière, le 12 nivôse an V. La clause suivante est insérée dans l’acte : « L’acquéreur sera tenu de donner le terrain nécessaire pour l’ouverture d’une nouvelle rue projetée, sans pouvoir exiger aucune indemnité ni diminution sur le prix de la présente vente. » — Jusqu’en 1836, l’église fut occupée par un atelier de menuiserie. À cette

époque, on la détruisit pour faciliter le prolongement de la rue Racine. Sur ses dépendances ont été bâties les maisons portant aujourd’hui les nos 1, 3 et 5 de la rue de l’École-de-Médecine.

Au no  4 était situé le collége de Daimville. Il fut fondé, en 1380, par Michel de Daimville, archidiacre de l’église d’Arras, clerc ou chapelain de Charles V, pour douze écoliers ; six du diocèse d’Arras et six de celui de Noyon. En 1762, il fut réuni à l’Université. Devenus propriétés nationales, les bâtiments et dépendances de ce collége furent vendus le 28 prairial an X ; démolis en 1820, ils ont été remplacés par une maison particulière.

La porte Saint-Germain, nommée successivement porte des Cordèles, des Frères Mineurs, était située un peu au-dessus de la rue du Paon, où se trouve maintenant une fontaine. Cette porte faisait partie de l’enceinte de Philippe-Auguste. On voit dans les registres de la ville qu’en 1586, on ordonna de la fermer, et d’ouvrir celle de Buci. Elle ne fut abattue néanmoins qu’en 1672.