Sulpice (église Saint-).
L’époque de la fondation de Saint-Sulpice a donné lieu à de nombreuses discussions. Quelques écrivains en font remonter l’origine au commencement de la seconde race ; d’autres l’ont mise au rang des paroisses les plus modernes de Paris. Nous avons déjà constaté, dans le cours de cet ouvrage, l’ancienne habitude de bâtir des chapelles ou oratoires près des basiliques. Ainsi la chapelle Saint-Symphorien était située au midi et près de l’église Saint-Vincent, depuis Saint-Germain-des-Prés. — Une semblable chapelle, sous le nom de Saint-Pierre, existait au nord de cette basilique. Cet oratoire étant devenu trop petit pour la population qui s’augmentait chaque jour, on construisit une autre chapelle sous le vocable de Saint-Sulpice. Le premier acte qui la mentionne comme paroisse, est une sentence arbitrale du mois de janvier 1210. Au XVIe siècle, le faubourg Saint-Germain avait pris un tel développement, que Saint-Sulpice ne pouvait suffire au nombre toujours croissant de ses paroissiens.
Une nef fut ajoutée, sous le règne de François Ier, et six chapelles latérales en 1614. Ces additions ne donnèrent point encore à cette église les dimensions nécessaires. En 1643, il fut arrêté dans une assemblée de marguilliers qu’un nouvel édifice serait construit. Le 20 janvier 1646, Anne d’Autriche, régente du royaume, en posa la première pierre. La construction de cette église fut commencée sur les dessins de Christophe Gamart, qui fut bientôt remplacé par Louis Leveau. Ce dernier étant mort en 1670, la direction des travaux fut confiée à Daniel Gittard. Il acheva la chapelle de la Vierge, d’après le plan de son prédécesseur, construisit le chœur, les bas-côtés qui l’environnent, les deux croisées et le portail de gauche. Mais les dettes considérables contractées par la fabrique forcèrent, en 1678, d’interrompre tout à coup les travaux. En 1683, le curé et les marguilliers présentèrent au roi une requête pour demander des secours et la permission de réunir les paroissiens, pour aviser aux moyens de payer les dettes et d’achever les bâtiments de leur église. Les travaux ne purent être repris qu’en 1718, par les soins du curé de cette paroisse M. Languet de Gergy, qui déploya dans cette grande entreprise un zèle et une activité remarquables. Il ne possédait qu’une somme de 300 livres qu’il affecta à l’achat de quelques pierres, puis il annonça pompeusement la continuation des travaux. Son exemple, ses exhortations firent le reste. Il parvint à émouvoir ses nombreux et riches paroissiens. La piété de quelques uns, peut-être la vanité de plusieurs autres, surtout l’exemple si contagieux sur les hommes, lui ouvrirent toutes les bourses. Le roi ajouta, en 1721, le bénéfice d’une loterie. Ce monument fut d’abord continué sous la conduite de Gille-Marie Oppenord, directeur-général des bâtiments et jardins du duc d’Orléans. Cet architecte avait mis en usage ces ornements capricieux dont la profusion caractérise presque tous les ouvrages exécutés sous le règne de Louis XV. Les travaux de Saint-Sulpice se trouvèrent heureusement trop avancés pour qu’il en surchargeât davantage cet édifice.
Le portail, élevé sur les dessins de Servandoni, était presque terminé en 1745. Le 30 juin de cette année, l’église fut consacrée et dédiée sous l’invocation de la Sainte-Vierge, de Saint-Pierre et de Saint-Sulpice.
La beauté du portail, son caractère noble et imposant, l’harmonie qui règne dans toutes ses parties, attestent le goût et le génie de l’architecte. La longueur de ce portail est de 118 m. Il se compose de deux ordres, le dorique et l’ionique.
Aux deux extrémités, sont deux corps de bâtiments carrés qui servent de basé à deux tours ou campanilles qui ont 70 m. d’élévation, c’est-à-dire 3 m. de plus que les tours de l’église Notre-Dame.
Il paraît que Servandoni échoua dans la composition des tours. Elles étaient moins hautes qu’elles ne le sont aujourd’hui, et n’avaient qu’une ordonnance. Le curé et les marguilliers décidèrent qu’il fallait les reconstruire. Leur exécution fut confiée à un architecte médiocre, nommé Maclaurin, qui les éleva sur une double ordonnance ; la première était octogone et reposait sur un plan quadrangulaire, la seconde était de forme circulaire. Celle qui est située à l’angle méridional est de cet architecte.
En 1777, Chalgrin fut chargé de la reconstruction de ces deux tours, mais celle du nord a seule été rebâtie. Elle est composée de deux ordonnances : l’une sur un plan quadrangulaire et l’autre plus élevée sur un plan circulaire, quoique reposant sur un socle carré. Cette disposition est plus en harmonie avec l’architecture de la façade.
Entre les deux tours, Servandoni avait placé un fronton ; mais la foudre l’ayant dégradé en 1770, on le remplaça par une balustrade. Suivant l’opinion de plusieurs critiques, ces deux tours nuisent par leur aspect et leur isolement à l’effet général de l’édifice, et ressemblent assez aux jambages d’un meuble renversé.
À l’aplomb des tours sont deux chapelles : l’une est un baptistaire, et l’autre le sanctuaire du viatique. Elles sont ornées de statues allégoriques, sculptées par Boisot et Mouchi.
L’intérieur de Saint-Sulpice est d’un grand et noble effet. La longueur de l’édifice, depuis la première marche de la façade principale jusqu’à l’extrémité de la chapelle de la Vierge, est de 140 mètres. Sa hauteur, depuis le pavé jusqu’à la voûte, a 33 mètres. Les portes latérales offrent des niches extérieures où sont placées des statues de saints qui ont 3 mètres environ de proportion ; elles sont dues au ciseau de François Dumont.
Le chœur, entièrement construit sur les dessins de Gittard, est entouré de sept arcades dont les pieds droits sont ornés de pilastres corinthien ; cette ordonnance est aussi celle de la nef. En 1732 on posa solennellement la première pierre de l’autel principal.
La chapelle de la Vierge est remarquable entre toutes les autres par l’exécution de la statue et des groupes qui l’accompagnent, par son magnifique dôme et la manière ingénieuse dont il est éclairé.
Adroite, dans la chapelle de Saint-Maurice, sont des peintures à fresque exécutées par MM. Vinchon et de George.
On remarque également les bénitiers de cette église qui sont formés de deux coquilles dont la république de Venise fit présent à François Ier. On cite encore la chaire placée en 1789, comme une merveille de hardiesse et d’élégance, la tribune du buffet d’orgues qui est soutenue par des colonnes d’ordre composite. Ces orgues ont été fabriquées par Cliquot, célèbre facteur.
La ligne méridienne, établie au milieu de la croisée, est tracée sur le pavé avec les signes du zodiaque. À son extrémité septentrionale, elle se prolonge et s’élève sur un obélisque de 8 mètres de hauteur. Cette ligne méridienne fut établie en 1723, par Henri de Sully, pour fixer d’une manière certaine l’équinoxe du printemps et le dimanche de Pâques.
Cette église renfermait plusieurs monuments sépulcraux, parmi lesquels nous citons ceux de Barthélemy d’Herbelot, savant orientaliste, et de Jean Jouvenet, peintre.
En 1793, l’église Saint-Sulpice reçut le nom de Temple de la Victoire. Sous le Directoire Exécutif, les théophilanthropes y tinrent leurs séances, sous la présidence de La Réveillère-Lepaux, leur grand pontife. Le 15 brumaire an VIII (9 novembre 1799), on donna dans cet édifice un banquet au général Bonaparte ; enfin, en 1802, l’église Saint-Sulpice fut érigée en paroisse du 11e arrondissement. Elle a pour succursales Saint-Germain-des-Prés et Saint-Séverin.