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Dictionnaire apologétique de la foi catholique/Monuments antiques (Destruction des)

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Dictionnaire apologétique de la foi catholique
Texte établi par Adhémar d’AlèsGabriel Beauchesne (Tome 3 – de « Loi ecclésiastique » à « Pentateuque et Hexateuque »p. 471-473).

MONUMENTS ANTIQUES (Destruction des). — On a longtemps voulu rendre l’Eglise responsable de la destruction des monuments antiques. Le reproche lui en est fait dès le xv » siècle par Ghîberti, au siècle suivant par Vasari, au xviu' par Gibbon ; il passe de là dans la langue courante, et nous l’entendons répéter au xix" par les orateurs et les historiens. Cependant l'étude des faits a montré sa fausseté. Dès le siècle dernier, Carlo Fea, dans les notes jointes à sa traduction de l’Histoire de l’Art de Winckelmann, revendiquait pour les chrétiens de Rome l’honneur d’avoir conservé intactes, pendant plusieurs siècles, les œuvres d’art qui décoraient leur ville. De nos jours, de Rossi a donné à cette assertion le poids de son expérience et de son autorité en de nombreuses pages de son lUilletin d’archéologie chrétienne ou de sa Lioma sotterranea. En 1887, dans le Journal des Savants, M. Eugène MÛNTz rendait sur ce point justice aux chrétiens, en la tempérant à peine de quelques réserves. L’opinion qu’une étude plus approfondie de l’archéologie et de l’histoire démontre aujourd’hui aux esprits non prévenus, a été ainsi résumée, en 187g, par le directeur de l’Ecole française de Rome, Gf.ffroy :

« Les empereurs, après avoir abjuré le paganisme, 

se sont abstenus, surtout dans Rome, de mesures violentes contre les monuments et les statues de l’antiquité. Le christianisme comprit très vite que les monuments de Rome païenne faisaient partie d’une gloire qu’il ne lui convenait pas de renier, puisqu’elle avait servi, selon les secrets desseins de la Providence, à grouper les nations et les préparer à recevoir l'Évangile. »

Tome III.

A défaut même d’une idée plus haute, l’intérêt aurait sulli à persuader aux empereurs d’agir de la sorle, à une époque où le paganisme comptait encore de nombreux adhérents. Constantin, en donnant au christianisme la prépondérance politique, n’essaya pas d’une réaction violente. Il proclama, au contraire, la liberté de conscience, se bornant à mettre, ofliciellement, la religion chrétienne sur le pied d'égalité avec les autres cultes, et à lui prodiguer, personnellement, les marques de sa faveur. Mais il n’abdiqua pas la dignité de grand pontife, qui mettait dans sa main la police des cultes païens : aussi laissa-t-il leurs temples ouverts. Cela résulte d’une loi de 319 (Code Théodosien, IX, xvi, 2), d’un édit rapporté par EvsKBE(Vita Constantini, l, XLiiLx), d’un discours prononcé par l’empereur dans les dernières années de sa vie (Oratio ad sanctorum coetum, xi). Certaines paroles d’Eusèbe ou d’historiens postérieurs, Tiiéodoret, Socratb, Sozo.mk.ve, Ouosr, d’où l’on a déduit l’opinion contraire, ne peuvent s’entendre que de cas exceptionnels : ainsi, les temples d’E^culapc à Egée, de Vénus à Héliopolis et à Aphaque, furent renversés parce qu’ils abritaient des scènes de débauche ou de malsaines jongleries.

Les fils de Constantin s'éloignèrent à certains égards de sa politique, puisque, par des lois souvent inexécutées, ils prescrivirent la fermeture des temples : mais toujours ils les laissèrent debout. « Quoique toute superstition doive entièrement disparaître, dit un rescrit adressé au préfet de Rome en 346, cependantnous voulonsquelestemplessitués aux environs delà ville soient cou serves intacts et sans souillure. » (Code Théodosien, XVI, x, 3) En 356, CoNstanck visita Rome pour la première fois ; non seulement il ne prit pas de mesures contre les monuments du paganisme, mais il parut sensible à leur beauté. <( Il considéra les sanctuaires d’un œil tranquille, lut les noms des dieux inscrits sur leurs frontons, s’informa de l’origine de ces édifices, et témoigna de son admiration pour ceux qui les avaient construits. » (SYMMA(iUE, lip., X, Lxi) Un écrivain païen ajoute :

« Le temple de Jupiter Tarpéien lui parut l’emporter

sur le reste autant que les choses divines l’emportent sur les choses humaines. » (Ammien Marcellin, XVI, x) Aussi, dans son éphémère tentative de restauration du paganisme, Julien n’eut-il pas à reconstruire les temples : il lui sulBt de les rouvrir. Après la chute de Julien, les monuments continuèrent d'être respectés. Une inscription montre Valentinifn restaurant le Capitole deThamugas, enNumidie(C.I.L., t. VIII, 2388). La liberté du culte païen paraît même avoir été complète sous ce prince (saint Augustin, De Civitate Dei, H, iv, 26). Gratien, le premier empereur qui ait refusé les insignes du souverain pontificat, le fervent chrétien qui fit ôter de la curie la statue de la Victoire, ne toucha pas aux temples ; mais, en 382, il en confisqua les immeubles. Parmi ces biens confisqués, paraît avoir été le domaine de la confrérie des Arvales, près de Rome, qui fut donné à l’Eglise, déjà propriétaire, en ce lieu, d’une catacombe : les édifices qui couvraient le domaine arvalique furent conservés, et des dessins exécutés douze cents ans après Gratien les montrent encore intacts (de Rossi, lioma sotterranea, t. III, p. 689-697 ; C. db LA Beiic.e, art. Arvales, dans le Dictionnaire des Antiquités, l.l, p. 450). En SgS, le païen Symmaque, préfet de Rome, fut chargé par un rescrit impérial de faire le procès des fanatiques ou des malfaiteurs qui dégraderaient les murailles des temples (de Rossi, /. c, p. 694).

Sous Tiiéodose même, qui abolit définitivement le paganisme, les temples restèrent debout. En Egypte

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seulement, après l’émeute suscitée par les païens retranchés dans leSérapeion d’Alexandrie, ce magnifique sanctuaire l’ut démoli, et avec lui périrent d’autres temples de la province ; cependant, au viîe siècle, le Tycheon, ou temple de la Fortune, existait encore à Alexandrie, avec les statues qui le décoraient (ïuÉoi’iiYLACTE, cité par Lumbroso, l.’Esitto ul tempo ilei Grecie dei Romani, p. 134). La seule mesure officielle dont les temples aient été l’objet dans le reste de l’empire, l’ut l’ordre, tant de fois déjà donné et transgressé, de les lermcr délinitivement (Co</e Théndosien, XVI, x, lo, 1 1). Toutporte à croire que, sous la forte main de Théodose, il fut cette fois exécuté, i Marnas pleure enfermé dans son templedeGaza », écrit saint Jérôme (fy ;. cvii). Cependant cette fermeture même souffrit des exceptions, autorisées par l’empereur. Ainsi, le principal temple d’Edesse, remarquable par la beauté de son architecture comme par ses vastes proportions, était devenu le lieu de réunion des liabilants, une sorte de musée et de promenoir public : Théodose, sur la demande du préfet de l’Osrhoène, en autorisa la réouverture ; les statues qui le décorent seront conservées, dit-il, à cause de leur valeur artistique, non comme objet de culte (Code Théodosieii, XVI, x, 8).

S’il y eut (en dehors de l’Egypte) des temples renversés sous "Théodose, ce fut sans son aveu, par le zèle des particuliers : révèi|ue d’.A.pamée, saint Marcel, se crut obligé de détruire les temples de sa ville et de la campagne environnante, en pui il voyait le principal obstacle à la conversion des habitants, et fut pour ce fait égorgé par les païens (Sozo.mknk, /L£., VII, xvi). Même après la révolte de l’usurpateur Eugène, fomentée par le parti païen, aucune représaille ne fut exercée svir les anciens sanctuaires. Les fils de Théodose, Honorius et Arcadios, mirent de nouveau les temples sous la protection des lois.

« Plus de sacrifices, écrit Honorius, mais que les monuments

soient respectés. » (Code Tkéodosien, XVI, X, 15.) « Que personne n’essaie de renverser les temples, désormais vides de toute superstition. Nous ordonnons que ces édilices demeurent intacts, u (Ibid., 18.) Ces deux lois sont de 3gy. La fermeture des temples, la conservation de leurs œuvres d’art, c’était la réalisation du vœu prophétique mis par un poète contemporain de Théodose dans la bouche du martyr saint Laurent : « Je vois dans l’avenir un prince serviteur de Dieu : il ne permettra pas que Rome soit souillée de l’ordure des sacrifices ; il fermera les portes des temples, il en clora les battants d’ivoire, il en condamnera les seuils impurs, il en tirera les verrous d’airain. Alors les marbres resplendiront, purs de tout sang versé ; alors les statues de bronze, adorées aujourd’hui, resteront debout, désormais innocentes. » (Prudence, Péri Stephiinon, II, 4^3-484.) Il sullit de lire les descriptions de Rome parles poètes païens du commencement du V siècle, Claudien (fle VI consulalu Honorii, 35-51), Rutilius Namatianos (Itinerarinm, I, gS), ou les statistiques dressées par les topographes de ce temps (Jordan, Topographie der Stadl Rom im Altertham, t. II, p. 54 1-5^4), pour reconnaître qu’après Théodose tous les temples et toutes les statues étaient encore debout dans la capitale de l’Empire.

Cependant, si les monuments païens des villes furent ainsi respectés, les sanctuaires idolâtriques des campagnes, qui n’avaient pour la plupart aucun droil au titre de monuments, n’obtinrent point les mêmes égards. Il sulfil de rappeler ici les destructions qui accompagnèrent l’apostolat de saint Martin et descs disciples dans les campagnes du centre de la Gaule, encore couvertes des ténèbres les plus épaisses. Les dieux vaincus s’y étaient réfugiés et

avec leur culte y régnaient en maîtresses la superstition et les mauvaises mœurs. Paysan, paganus était devenu le synonyme d’idolâtre. La destruction des rustiques chapelles des idoles par les missionnaires du iv « et du V’siècle fut un service rendu à la civilisation. L’art, généralement, n’y perdit rien. On en jugera par la description d’un sanctuaire de campagne, dans un pays cependant plus ouvert que nos contrées d’Occident aux iniluences helléniques :

« C’est un parallélogramme de quinze pas de long

sur dix de large, construit sur un tertre peu élevé, au milieu des arbres. Le pourtour est formé par des pierres d’un mèlre et demi de long et de cinquante centimètres de haut. Cette chapelle était seulement une enceinte qui ne paraît pas jamais avoir été couverte. La table qui porte l’inscription occupait une des extrémités. On ne trouve aucun vestige d’ornement d’aucune sorte ; le sol était pavé de briques. Ces ruines permettent de se figurer ce qu’était un sanctuaire rustique dans les campagnes de la Thrace gréco-romaine. » (Albert Ddmont, dans les Archives des missions scientifiques, 1876, p. 184.) Aussi comprend-on aisément les termes d’une pétition adressée aux empereurs, en Sgg, par le concile de Carthage : « Ordonnez de renverser tous les temples qui, étant situés dans les lieux écartés ou dans les champs, ne contribuent pas à l’ornement public. » (Haroouin, Concilia, t. I, p. 898.) La même pensée inspira la loi rendue, cette année même, , par Arcanius et Honorius : <i Que les temples des campagnes soient détruits, mais que cela se fasse sans combat et sans tumulte. Quand ils auront été ruinés de fond en comble, la superstition n’aura plus d’aliments. » (Code Théodosien, XVI, x, 16.) Le protestant Jacques GoDEFROY, savant commentateur du Code Théodosien au xviie siècle, a écrit cette » hrase. qui résume tout ce que nous venons de dire : « On dut songer à démolir les temples situés hors des murs ; mais, pour les temples situés dans l’enceinte des villes, la question ne se posa pas : car en eux résidait la principale beauté de celles-ci. » (T. V, p. 203, de son édition du Code Théodosien.)

A quels usages, cependant, furent destinés ces édifices, après avoir été purifiés du culte des idoles ? Nous avons dit qu’il y en eut de rouverts, parce que les objets d’art dont ils étaient remplis en avaient fait de véritables musées. D’autres furent transformés en églises, comme l’Augusteumd’Ancyre, le temple de Jupiter à Dodone, le Tycheon d’Antioclie, le Théseion, l’Erechtheion et le Parthénon d’Athènes, le temple d’Isis à Philé, plusieurs temples de Sicile, enfin le Panthéon de Rome (voir P. Allard, L’art païen sous les empereurs chrétiens, ch. xi). Les temples transformés en églises furent cependant, à Rome, beaucoup moins nombreux qu’on ne l’a cru souvent ; non par aucun scrupule religieux, mais par les difficultés d’appropriation que présentèrent souvent des édifices construits en vue d’un culte tout diŒrent (voir Duchbsne, iVotes sur la topographie de Rome au Moyen Age, II, p. 4 0- J^" province, certains temples reçurent une destination civile, et furent affectés à des services administratifs : des lois de 4 12 et 429 ordonnent de verser au Capitole de Carthage les contributions de l’Afrique (Code Théodosien, XI, I, 32-34).

On voit combien il serait injuste d’imputer la ruine des monuments antiques soit aux empereurs, qui firent tant pour les protéger, soit à l’Eglise qui, dans un de ses conciles, refusait le titre de martyr au chrétien tué pour avoir renversé une idole (conc. d’Elvirc, can. 60). Beaucoup d’édifices païens furent détruits par les Barbares : en Orient, lors des invasions musulmanes ; en Afrique, par les Vandales d’abord, les 933

MORISQUES (EXPULSION DES)

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Musulmans ensuite ; en Europe, par les envahisseurs de race geriuanique ou slave qui la ravagèrent à tant de reprises. Dès le milieu du m" siècle, les Alenians ont anéanti par le feu le plus bel édifice des Gaules, le temple élevé par les Arvernes à Mercure Duniias surlel’iiy-de-Dùme(GRKr.oiHisDii Touns, Uisl. Franc,

1, xxx).

On se figure le sort des monuments de Rome en se rappelant que, do l’an 410 à la lin du vi" siècle, la mallieureuse capitale fut six fois prise par les Barliares et reprise par les soldats de l’empire. En 455, ses temples et ses églises sont indifïéremmeiit dévastés par les Vandales, durant quatorze jours et ((uatorze nuits. En 538, les soldats qui défendent contre les Gotlis le mausolée d’Hadrien transformé en forteresse sont obligés, pour se défendre, de jeter sur les assiégeants du haut des murs les admirables statues qui le décoraient. Des ravages exerces i)ar les Gotlis aux environs de Tibur en 546, date la décadence d’un autre monument du même empereur, la villa d’iladrien : « A partir de ce moment, la ruine commença pour elle ; ses grandes salles s’elîondrèrent. u (Hoissier, Promenades archéulogiijues, p. 181.) En 452, le Nord de la péninsule italienne avait été parcouru par les Huns d’Attila ; Altinum, Padoue, Aquilée, JuUa Concordia, étaient réduites en cendres ; le cimetière chrétien, qui servit ensuite à la sépulture des rares habitants demeurés sur le territoire de cette dernière ville après sa ruine, est rempli de tombeaux construits avec des fragments d’architraves, d’autels, de statues, de monuments de toute sorte renversés par le passage du Fléau de V)ien{HiiUettin<) di archeologia cristiana, 18’ ; 4, p.’331 44)- La peur des Barbares amène d’autres destruclions : menacées par eux, les villes ouvertes sont obligées de s’enfermer ; pour construire à la hâte leurs remparts, elles font main basse sur d’anciens édifices : en Gaule, en Italie, en Mésie, en Asie Mineure, on trouve encastrés dans les murailles des villes, dès le m" siècle, des tronçons de colonnes, des fragments de corniches, des dalles tumulaires, des marbres ornés d’inscriptions (Pekhot, De Galatia jirovincia romana, p. 165 ; DuRUV, Histoire des liomtiins, t. VI, 387-444).

Un exemple saisissant fera comprendre et l’avidité des Barbares et le sort des villes qui avaient le malheur de se trouver sur leur route. A partir de l’invasion de Genséric, en l^bô, la grande cité commerciale d’Oslie, à l’embouchure du Tibre, est le chemin naturel de tous les hardis pirates que tentent les richesses accumulées aux environs de Rome. Saccagée à plusieurs reprises, les habitants Unissent par l’abandonner. « Les pillards entraient dans les maisons désertes et se chargeaient en toute hâte de ce qui leur semblait précieux et pouvait s’emporter aisément. Quelquefois ils violaient lessépultures quand ils esprraient y faire un riche butin. Sur la voie qui menait de Rome à Ostie, la large dalle qui recouvrait une des plus belles tombes a été brutalement soulevée par un levier et jetée au milieu de la route, où on l’a retrouvée. Les temples surtout les attiraient. Dans celui de Cybèle, on voit, le long des murs, des revêtements de marbre en éclats et des crampons de fer tordus. Au dessous, des iuscri|)lions nous apprennent (pie d’opulents dévots avaient consacré, en cetendroit, des statues en argent qui représentaient des empereurs ou des dieux. Les inscriptions y sont encore, mais les statues ont disparu, et ce fer tordu ainsi que ce marbre brisé nous indiquent avec quelle brusquerie et quelle violence l’opération s’est accomplie. Mais si Ion prenait les statues d’argent, on laissait celles de marbre, dont on ne soupçonnait pas lu valeur, et qui auraient été trop embarrassantes. On

ne pouvait pas non plus emporter les maisons. Voilà comment, malgré tant de ravages, il subsiste encore tant de débris de la vieille Ostie. Quand il n’y resta rien de ce qui pouvait tenter les pillards, ils n’y revinrent plus, et laissèrent la ville périr de vieillesse. Peu à peu les murailles se sont clfondrées, les colonnes de brique et de pierre sont tombées l’une sur l’autre, s’écrasant mutuellement dans leur chute ; puis, avec le temps, une couche de terre a tout recouvert et l’herbe a poussé sur les ruines. » (BoissiEU, Promenades archéologiques, p. zïji-^S^.)

Les Barbares sont donc les princi|)aux auteurs de la destruction des monuments antiques ; mais des causes secondaires la continuèrent après eux. Quand la tempête des invasions eut cessé, les ressources matérielles manquaient pour entretenir ou réparer des édilices dont l’usage ne répondait plus aux besoins d un monde renouvelé : on les laissa s’écrouler peu à peu, trop souvent on leur emprunta des matériaux pour d’autres constructions. Les hommes du moyen âge, excusables de ne plus comprendre toute la beauté des œuvres classiques, n’ont pas été seuls à agir de la sorte : ceux de la Renaissance, artistes, humanistes, érudits, ont causé peut-être plus de dégâts encore. Ce sont eux qui, soit pour chercher des statues, des mosaïques, des peintures, soit pour élever des monuments nouveaux, achevèrent <le démolir les édifices antiques. Beaucoup de ces édilices, qui avaient traversé intact le moyen âge, périrent à l’aurore des temps modernes. De là, le dicton célèbre : Qiiod non fecerunl Barbari, fecerunt Barberiiii. Les papes eux-mêmes se laissèrent entraîner par l’esprit de l’époque. La nouvelle Rome s’éleva en partie aux dépens de l’ancienne.

En résumé, la ruine des monuments de l’antiquité doit être attribuée aux Barbares, à l’action naturelle du temps, à l’ignorance ou à l’incurie des hommes du moyen âge, à l’indiscrète émulation de ceux de la Renaissance : Constantin et ses successeurs, l’Eglise chrétienne du iv" et du v" siècle, n’y eurent presque aucune part.

Paul Allard.