Dictionnaire apologétique de la foi catholique/Sémitiques (Les religions)

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Dictionnaire apologétique de la foi catholique
Texte établi par Adhémar d’AlèsG. Beauchesne (Tome 4 – de « Persécutions » à « Zoroastre »p. 652-661).

SÉMITIQUES (LES RELIGIONS). — I. Considérations générales. — 11. Les dieux. — III. I.e pur et l’impur. — IV. Choses, lieux et temps sacrés. — V. Personnes sacrées. — VI. Culte, sacrifices. — VII. les morts. — VIII. Diffusion <t influences étrangères. Syncrétisme.

I. Considérations générales.

1" Définition. — Cette étude a pour objet d’exposer, au moyen des documents dont les travaux des spécialistes 1e cessent d’augmenter rapidement le nombre, les idées que les Sémites se faisaient de la divinité, leur culte, l’influence que pouvait avoir la religion sur leur vie et sur leurs mœurs. La race sémitique est celle qui occupe le territoire compris SÉMITIQUES (LES RELIGIONS)

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entre la Méditerranée, le Taurns et l’Amanus, le cours supérieur de l’Euphrate et les montagnes da

Kurdistan, les chaînes de collines « jui bordent la vallée du Tigre, le golfe Persiqne, l’Océan, la Mer Rouge, le désert qui sépare la Palestine de l’Egypte ; elle a de là essaimé sur tout le pourtour de la Médi terranée. Ses diverses gr >upes sont les Assyro-Bahyloniens, les Araméens, les Arabes, les Hébreux, les Cananéen*, les Phénicien- ; la religion des Assyro-Babyloniens et la religion révélée ayanl été traitées dans de précédents articles, ce travail se borne à étudier la religion des Arai ; ien. des Arabes, des Cananéens et des Phéniciens ; il n’essaye ni de résoudre 1 i question de l’origine de la religion, ni même de résumer les n imbreux systèmes qui ont entrepris de le faire, il ne recourt pas non plus à la révélation primitive, l’Ecriture, qui nous l’enseigne, nous apprenant qu’elle a été oblitérée. Nous nous bornerons à constater que les institutions et les pratiques sont l’élément principal des religions antiques. « Les usages et les rites en sont proprement la tête et le corps, et la piété n’est point dans lyance en des dogmes révélés, mais dans l’accomplissement d’actes ou de gestes traditionnels. » (Victor Bkrard, De l’origine des cultes arcadiens). La religion fait partie de l’ordre social. Au moins jusqu’aux approches de notre ère, on ne choisit pas sa religion, bien qu’on puisse, s’adresser à un dieu comme à un protecteur particulier ; on appartient aux formes de la religion, comme on appartient aux lois de la cité, aux usages de la tribu, aux traditions de la famille, et Ion pourrait même aller jusqu’à dire qu’il existe une solidarité quasi-familiale entre les dieux et leurs adorateurs. On s’acquitte de ses devoirs religieux comme de ses devoirs du sang. 2° Documents. — Ils sont de deux sortes : A. Ecrits ; B. Monuments.

A. Les Ecrits, sacrés ou profanes, nous renseignent soit directement, soit par voie d’allusion. A côté de la Bible, document de premier ordre, les ren-’ignements nous sont fournis par des historiens, des philosophes, des écrivains ecclésiastiques : Hérodote, voyageant en Orient, recueille tout ce qui lui semble intéressant ; Pausanias s’attache plus spécialement aux choses de la religion ; il est à même de constater en Grèce nombre de pratiques cultuelles ayanl une origine sémitique ; PaiLON de Bybi.os nous a légué une cosmogonie phénicienne ;

is a recopié Pbilon et d’autres documents anciens ; plusieurs Pères de l’Eglise nous ont décrit les les i ! j àtriques qu’ils combattent dans leur I

B. Les Monuments sont épigrapbiques ou anépigraphiques. Les premiers sont des inscriptions religieuses ou funéraires, découvertes en presque tous les lieux où les Sémites s’étaient établis ou avaient fondé des comptoirs, jusqu’en la lointaine Espagne. La plupart ont été publiées par le Corpus Inscriplibnuin Semiticarum. La plus ancienne date du xiii* siècle : le tombeau d.Vhiram à Byblos. La corresponde Tell-el-Amarna, en cunéiformes, remonte

an xiv c. Les autres sont des ruines de hauts lieux, de temples, des sépultures, des colonnes ou « les , des statues.

H. — Les dieux.

El. — « Pour les Sémites primitifs, El était le nom propre de Dieu et, si ce nom est devenu appellatif, c’est par ! a multiplication des personnes aux -> on attribuait ses propriétés transcendantes.). (Lai.h.vnc.k, Etudes sur les religions sein tiques,

i. Ce nom propre est attesté par plusieurs hisoriens (Diodore, Damascius, Servius), par l’épi i graphie (inscription d’Oumm-el-Arvamid « nu Seigneur, à Kl »), par la numismatique (monnaies de Byblos représentant ce dieu sous la forme d’un homme debout avec trois paires d’ailes), par l’onomastique. — La déesse Elàts ou Elot avait des collèges de prêtres à Cartilage et un sanctuaire en Sardaigne ; on la représentai : montée sur un taureau. Dans l’inscription de Iladad (vm siècle av. J.-C), trouvée à Sindjirli, El est nommé quatre fois après Iladad et il entre dans la composition de noms tîiéo : hores araméens. depuis le temps de Bathuel, père du Syrien Laban, jusqu’aux derniers jours de la monarchie nabatéenne. Au Safà, en pays arabe, « le dieu Et tient de beaucoup la première place » (Dussaud et Maclkr, Voyage archéologique nu Safà, p. 23). Les inscriptions du Sud de L’Arabie offrent un nombre considérable de noms propres formés avec El et des formules comme : « prêtre ou servi teur de El et de Athtar ». Enlin certains noms propres éthiopiens comportent cet élément.

Mais d’autre part, en pays phénicien et punique, il apparaît comme appellatif. Elim (comme Elohim en hébreu) est employé avec le singulier, même féminin, pour signifier ia divinité. En aramoen, niait ou ni’.lut est le nom courant avec son féminin et son pluriel. Dans l’Arabie du Sud, El était incontestablement avec ilâh le nom appellatif de Dieu, et le dernier de ces noms se personnifie par l’adjonction de l’article pour signifier soit, comme dans le Safà, un des dieux, soit Dieu, Allah.

Le phénomène qui s’est produit chez les Hébreux, où à El ont succédé Iahvé comme nom propre et Elohim comme nom commun, se constate partout :

« El appartient au plus ancien fond des langues sémitiques.

Il se retrouve partout, ou coinme nom propre ou comme appellatif, souvent accompagné d’un autre nom purement appellatif, qui ne se retrouve pas toujours et qui n’a pas partout les mêmes lettres. » (Lagrange, loc. laud., p. 77).

De ces observations, il semble qu’on peut tirer cette conséquence que ce nom renferme une idée de plénitude divine, et que la nature divine était au principe considérée comme unique, sans être toutefois déterminée par une personnalité nettement accusée, tandis qu’il est difficile de conclure à un polydémo-Tiisme primitif. Si l’on considère l’étymologie, El est le but des désirs, celui vers lequel on va pour lui rendre un culte, dont on recherche la protection, auquel on tend par la prière. On l’invoque avec confiance et même affection. Ce nom n’est appliqué qu’à la divinité ou aux êtres qui participent à sa puissance. Il y a là marque d’eue réelle supériorité des conceptions religieuses chez les Sémites primitifs.

2 n Bâal. — Ce litre appartient aux hommes comme aux dieux : il indique une domination réelle, une possession légitime, acquise, incontestée. Normalement, en Canaan, le baal est déterminé par un nom de lieu, ordinairement de ville, mais souvent aussi du montagne ; il l’est encore par des épilhètes ou d’autres termes : Baal Marqod peut bien être !e dieu qui préside aux danses sacrées, etBaal Zcbouh celui qui chasse les mouches ; le punique Baal Khammôn semble être le Baal brûlant, le dieu-soleil à qui est consacré’e pilier khammân. A Palinyre, on trouve, à côté de la forme Baal, lesdeux formes : Bol et Bel, celle-ci assyrienne et conservant moins que celle-là une valeur appellative. Ces Palmyréniens sont les seuls Sémites qui invoquent une divinité, sans s’adressera elle autrement que par des épilhètes extrêmement vagues. Chez eux, Bel est plutôt un dieu suprême qu’un dieu solaire. Le vrai dieu solaire est Melek-bel, à côté de qui e-.t Invoqué larkhi-bol, qui était primitivement un dieu-lune. Enfin le soleil y

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est encore adoré sous son nom commun : Scliamascli, devenu nom propre comme en Babylonie. Baal ligure dansles inscriptions minéennes et sabéennes avec toutes les nuances de l’usage cananéen : il est donc proto-sémitique ; mais chez ces Arabes du Sud, jamais il n’est devenu un synonyme pur et simple de la divinité.

En pays cananéen et araméen, Baal vaut comme nom commun, et la Bible parle très justement des Baalim ; ce sont des êtres complètement distincts, ayant chacun sa nature propre et son nom particulier, mais qui est rarement connu ; si nous savons que le baal d’Arvad est Dagon, celui de Kharran le iiou Lune ; le nom du baal de Tyr, qui est Melqart, ne signifie pas autre chose que « roi de la cité ».

Cependant les noms propres phéniciens nous indiquent que ce nom est unnompropre ; les Egyptiens parlent simplement du Baal qu’ils nomment Soutkou et qu’ils assimilent à leur dieu Set, le Typhon des Grecs, et pour la Bible, Baal est bien une personnalité particulière. Or, aux lettres d’El-Amarna, cet’dément n’est jamais écrit dans les noms de personnes, il est toujours remplacé par celui de Hadad et chacun sait que la divinité suprême des Syriens Damascèues est Hadad, qui reçoit d’écrivains tardifs le titre de roi des dieux. Il tient en mains la hache et la foudre, il porte la couronne royale ornée de cornes, ou bien il est représenté comme un jeune vi>au surmonté du symbole de l’éclair. Hadad, qui parait dans des documents bien antérieurs à l’invasion araméenne et à l’influence qu’elle exerça, est un dieu cananéen. Les Assyriens le désignent par l’idiogramme IM qui est celui du dieu Rammàn, le Tonitruant, et son nom pourrait être de la même racine que l’arabe had da=zmugir. C’est donc un dieu du ciel, représenté et adoré sous la forme d’un taureau, seigneur de l’orage et seigneur du ciel, Baal Chamem, Baal descieux, ou Baal par excellence. Si d’après certaines inscriptions il est le Baal propre d’une cité particulière, aux derniers temps il semble absorber tous les autres. Ce grand Baal, qui est pour les philosophes aussi le dieu-soleil, serait le pendant du Bel babylonien.

Aux derniers jours, ce Baal « Seigneur du ciel » de Palmyre ressemble bien à l’Allah des Arabes, avant Mahomet. Ne serait-ce pas que les antiques baals, maitres des cités, des endroits particuliers, des montagnes, n’étaient pas seulement des génies du sol, de simples forces de la nature, mais qu’ils marquaient déjàles influences d’en haut, que c’était en leur qualité de maîtres de l’air ou du ciel qu’ils protégeaient ces lieux ?

3 « MLK. — Les Massorètesont ponctué ce nom sur le thème « bochetli, objet infâme » et les Septante l’ont transformé en Moloch. La prononciation du nom commun « roi » est méleck ; les Phéniciens prononçaient Milk. Melek apparaît souvent comme un nom appellatif et il n’y a pasd’a-guments valables pour le prendre dans un sens diirérent, quand il est appliqué à lahvé ; c’est ce que permettent de constater les noms théophores portés par des Hébreux anciens (Buchanan Ghay, Studies in hebrew prnprr names). Au xvin » siècle il figure bien dans ces noms comme une divinité particulière ; mais c’est une divinité étrangère, à qui est inséparablement liée l’idée de sacrifices humains ignés.

C’est un dieu adoré parles Cananéens (plusieurs personnages des lettres d’El-Amarna lui sont dévots, Milkuru, Abmilki), par les Ammonites (la Bible nomme leur dieu Milkom, avec la nounation Bnale), par les Paltnyréniens, par les Phéniciens. Il règne à Byblos, à Tyr où il est Melqart, que les Crées assimilent à Héraclès, tandis que les inscriptionscyprio tes et puniques l’assimilent à Baal-Khammôn. Melek est identifié par les auteurs classiques au dieu des Grecs Kronos (xptfruv, dominer, régner), qui sacrilie son fils. Les sacrifices humains, que les Phéniciens et lesCarthaginoisofïrirent à ce dieu jusque sous notre ère, nous donnent à penser qu’ilest le roi du monde infernal, dont la mort remplit le domaine. Toutefois, on a pu aussi vouloir, dans des circonstances graves, offrir au dieu de la ville des victimes de choix, les premiers-nés ou les fils des grands. Il faut encore signaler que ce nom, api>ellatif à l’origine, l’est demeuré assez tardivement et a pu marquer seulement qu’on reconnaissait à la divinité les attributs de la royauté.

/i" A r oms appellatifs. — A côté de ces trois grands noms, tantôt appellatifset tantôt personnels, certains noms donnés à la divinité sont purement appellatifs et impliquent des relations de parenté, « père, frère, oncle ou parent ». Un peuple est désigné sous le nom de fils et filles de tel dieu, ou un homme se nomme : « fils de X. (dieu) » ou « X. (dieu) est père », ou encore un de ces termes de parenté suppose pour un nom divin dans un nom théophore.

Ces termes de parents sont-ils de simples titres honorifiques, ou impliquent-ils une parenté considérée comme réelle, et dans ce cas ab « père » signifie-t-il la lignée des ancêtres divinisés, ou faut-il recourir à une explication par le totémisme, ou enfin ces noms impliquent-ils simplement une parenté métaphorique ? Il semble à la véritéque cette explication suffit et qu’elle est même le mieux en harmonie avec le génie sémitique. Si, à la vérité, nous lisons des expressions comme fils et filles de Camos, pour indiquer tout un peuple, c’est une relation du dieu à l’individuqu’exprimentles nombreux noms théophores. Dieu, qui est maître et roi, est aussi père ou oncle, c’est-à-dire protecteur.

5" Astarté. — Très ancienne et la plus grande parmi les déesses sémitiques, Astarté, que les Massorètes ponctuent achtoveth et dont les Grecs ont fait Aphrodite, nous apparaît comme la déesse de la fécondité. Les bosquets sacrés lui appartiennent, son culte s’accompagne de prostitutions ; un grand nombre de figurineset de terres cuites la représentent nue et se tenant les seins. Elle est nommée tantôt Astarté de tel lieu, tantôt Astarté Chem Baal ou Pen Baal « du nom ou de la face de Baal », et est alors considérée comme déesse parèdre. Son nom a fini par devenir un nom commun et la Bible parle des Achtoreth comme des Baalim. Quoi qu’il en soit des temps de syncréti.-me et quelle que soit l’opinion la plus répandue, Astarté n’est pas une déesse lunaire, — la lune étant un dieu pour les Sémites,

— mais la planète Vénus.

Cette déesse, qui reçoit le surnom de « la grande » ou de « la dame » ou de « la reine des cieux », les Araméens l’ont connue sous le nom d’Atar, que Strabon identifie avec Atargatis ou Dercélo, déessepoisson d’Ascalon : une Aphrodite-Uranie, nous dit Hérodote. — C’est elle la « déesse syrienne », rendue célèbre par le traité de Lucien qui porte ce nom.

Pour les Arabes, celle divinité, la première de toutes, est un dieu qui porte le nom d’Athtar. C’est l’astre du matin, non plus 1 enfant de Sin, comme l’Ichtar babylonienne, mais son père, adoré encore au temps de Julien l’Apostat dans le monde grécoromain sous le dédoublement d’Azizos et de Munimos. Il semble que cette forme masculine du nom soit primitive, et c’est ce qui expliquerait le caractère guerrier tout autant que voluptueux qu’Icutar possède en Babylonie, et qu’elle a conservé de son origine arabe. 1297

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Quant à Achéra, la déesse cananéenne nommée par la Bible et dont les découvertes épigraphiques confirment l’existence, son nom est le féminin d’Achir « dieu bon » et n’est guère usité que comme épithète de la grande déesse cananéenne.

6° Autres dieux. — * Il faul renoncer à l’idée d’une religion phénicienne unique commune à tout le pays. Chaque ville, chaque canton avait son culte, qui souvent ne différait des cultes voisins que par les mots. Mais ces mots avaient leur importance ; nulle part il ne fut plus nécessaire qu’ici de redire l’axiome : Nomiiia, numina. » (Rbnais’, Mission de Phénicie, p. a36). Et M. Clkrmont-Gannkau ajoute : « Le panthéon sémitique fait à première vue l’effet d’un panthéon de dieux uniques : à vrai dire, ce sont des dieux seuls. » (/.* Dieu Satrape, p. 45). Ces dieux seuls se confondirent souvent les uns avec les autres ; il arrive qu’il soit difficile de les distinguer, chacun revendiquant le titre de dieu suprême, et « le syncréiisme des derniers temps ayant opéré une œuvre néfaste en recouvrant tous les dieux du caractère solaire ». (Dussaud, le Ptiutliéun Phénicien, p. loi).

Nous ne prétendons pas dresser ici une liste des dieux sémitiques : mais en citer quelques-uns, mieux connus que les autres.

Chez les Cananéens, Camos, dieu des Moabites ; Dagon, dieu de Gaza et de plusieurs villes de la côte philistine, vraisemblablement dieu-poisson, quoique l’étymologie de son nom (da^ ; = froment) l’ait fait déjà rattacher à l’agriculture par Philon de Byblos ; à l’époque hellénistique, on adore à Gaza un dieu Marnas, dieu de la pluie et de la fertilité, qui n’est peut-être que Dagon. Dercéto, dont le temple d’Ascalon avec ses colombes et ses poissons sacrés était célèbre, n’est autre qu’Astarté.

Chez les Phéniciens et les Puniques, outre les dieux dont nous avons déjà parle, Echmoun, dieu de Sidon, dont le sacerdoce était exercé par la famille royale, dieu d s forces fécondes de la nature, de la vie renouvelée dans le changement des saisons ; plus tard guérisseur, assimilé à Asclépios, ou plutôt esprit de la végétation, à qui le serpent appartient parce qu’il se trouve en relation avec le monde inférieur, dieu vital, dieu de la santé qui est aussi l’air nécessaire à la santé et dont le culte se confond avec celui d’Adonis.

Adonis, (de Adon, Seigneur), le dieu auquel la Syrie offrait des fêtes splendides, au mois de Tammouz, divinité du grain dont on pleure la mort au temps de la moisson.

Tanit (déesse africaine), le Kapxït&cviav Seu’fiav (Pobybe), l&Virgo Cælestis, le numen Cæleste, identifiée à Astarté, à Artémis, à Athènè, à Juno, à qui sont dédiées un très grand nombre de stèles portant un si^ne particulier, semble être une déesse berbère, plutôt que punique.

Les Araméens avaient pour dieu suprême Iladad ou Rimmon, dieu de l’orage. Les inscriptions nous livrent divers autres noms de dieux arabes, comme Uekoub-El. Chez les Arabes du Nord et du Sud. à côté du dieu principal, qui est un dieu lunaire Sin, Schahar, Ilah, nous trouvons une divinité solaire féminine, Schains, liât et un dieu-Vénus, Attar, comme aussi Chaï-al-Qaouin, le dieu bon et rémunérateur qui ne boit pas de vin et Wadd, l’amour. Chez les Nabatéens, comme chez les Sémites du Nord, le soleil est le dieu principal à forme masculine, Douchara, l’Orotal d’Hérodote, Identifié à Dionysos et dont le nom signifie Seigneur au pays du Chàra. Partoutaussi est vénérée la triade : Al-Làt, Al-Uzza et Manât. Les rois nabatéens, qui sont mis dans les inscriptions à peu près sur le ang des dieux, reçoivent par leur mort une consécra tion définitive ; Obodas, enterré à Oboda (aujourd’hui Al/deh), y est adoré comme un dieu. Les Palmyréniens donnèrent aussi le titre de dieu aux empereurs. Quant au dieu Oqeisir des Arabes, il semble que ce ne soit que le César’oKa.ïaap ; de même que le dieu ÇLM ne serait que l’effigie (salant) ollicielle des rois. Gad et Meni, cités par la Bible, sont deux dieux de la fortune.

Dans le traité entre les Carthaginois et Philippe de Macédoine, cité par Polybe, les dieux puniques invo.qués sont groupés trois par trois ; à l’époque classique, nous rencontrons en beaucoup d’endroits des triades, etpeut-être faut-il trouver la raison de ce groupement dans la conception théogonique des Sémites, pour qui l’un et le bon règne au ciel, sur la terre et dans lesenfers. La seconde personne deces triadesest quelquefois, mais non toujours, une déesse, pen, faciès, du dieu, et la troisième un dieu-fils, ministre et ange, dont l’action est plus manifeste et dont l’éclat éclipse parfois celui de ses parents. Quelquefois, comme nous l’avons noté pour Palmyre.ces trois dieux ne sont que les trois faces d’un dieu solaire ; d’après Julien, Helios a pour parèdres Azizos, le fort, et Monimos, l’unique (traduction de Adad = unus).

III.

Le pur et l’impur.

Certaine école prétend que les primitifs ne distinguent que fort difficilement le naturel du surnaturel, l’animé de l’inanimé. Quoi qu’il en soit de cette confusion assez conjecturale, il est certain que les primitifs, les Sémites en particulier, distinguent très nettement ce qui est profane et libre (halâl pour les Arabes), et ce qui ne l’est pas, ce qui est réservé (harâm), interdit soit comme saint et sacré — aujourd’hui encore l’enceinte du temple de Jérusalem porte le nom de harâm, — soit comme impur, comme rendant impropre au culte ; ainsi certains aliments, les impuretés sexuelles, le contact d’un mort.

L’idée de sainteté est exprimée par la racine qdch, commune à tous les Sémites, Arabes, Babyloniens, Araméens, Cananéens, Ethiopiens ; elle n’a été usitée que par les troig derniers peuples ; elle renferme l’idée de couper, de séparer, et n’a été employée que dans le domaine religieux.

Les deux notions de sainteté et d’impureté sont corrélatives : on craint, en se servant de choses sacrées comme si elles étaient profanes, d’user d’un droit réservé à la divinité et d’attirer par là sa colère, aussi bien que si l’on se présente devant elle dans un état qui ne convient pas ; de même en touchanteertains objets, en mangeant certains aliments, en s’approchant de certaines personnes, on craint d’encourir un danger d’ordre physique ou moral ou d’irriter certaines puissances. Avant de reprendre les exercices de la vie ordinaire, il faut, dans l’un et l’autre cas, pour éviter la contagion du sacré aussi bien que de l’impur, se livrer à des ablutions, changer de vêtements ; les Juifs, pour exprimer la sainteté de leurs livres religieux, disaient qu’ils souillent les mains.

Toutefois, si la même idée de séparation de l’usage commun, d’interdiction, gît sous les deux notions, il ne semble pas qu’on puisse leur désigner une même origine. Sous celle d’impureté, nous retrouvons, avec ce sentiment religieux qui imprègne toute la vie antique, le souci de se préserver d’un danger, de la contagion du cadavre et peut-être aussi de l’esprit du mort ; sous celle de sainteté, nous reconnaissons la peur d’offenser la divinité, en usant de certaines choses qui lui appartiennent, soit parce qu’elles les a créées, soit parce qu’elles servent à 1299

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son culle, ou qu’elles lui ont été spécialement consacrées par le vœu de l’homme. De là naît l’usage des prémices ; la moisson n’a pas germé du seul travail humain : elle appartient aux déesses dont les forces l’ont produite ; on leur consacrera une partie, pour pouvoir employer Le reste à l’usage profane de la nourriture.

IV. — Choses, lieux et temps sacrés.

i° Les eaux. — Parmi les choses à qui on reconnaît facilement un caractère sacré, il faut en premier. lieu citer les eaux. Dans le traité de Philippe avec les Carthaginois, les rivières et les eaux prennent rang parmi les divinités puniques ; dans l’Yéiuen, Atlitar porte le titre de dieu des sources. Dans tous les pays sémitiques, d’où il a passé en Grèce, on retrouve ce culte des eaux. En Phénicie, à Afca, entre Iliérapolis et Byblos, aux sources du fleuve Adonis qui porte le nom du dieu de Byblos, il y avait un bassin sacré où l’on jetait des présents ; près de Sidon, fief d’Echmoun, au témoignage d’Antonio Martyr, un (leuve s’appelait Asclépios, de l’un des noms du dieu. Mais à dire vrai, à la différence de la Grèce, les fleuves n’ont ni prêtres, ni autels, ni sacrifices sanglants ;

« les bassins sacrés d’Ascalon et d’Hiérapolis

étaient plutôt l’accessoire obligé des temples que leur raison d’être » (Laukange, loc. cit., p. 165). L’eau, indispensable à la vie, est le bienfait d’une puissance supérieure, à qui on rend hommage ; cependant toute eau, sauf en Babylonic, n’est pas sainte.

La mer eut aussi des dieux ; ceux d’Arvad, de Baryte, d’Ascalon, cités maritimes, sont iehthyomorphes ; mais ce fut plutôt à litre de partie du monde qn’k cause de son utilité qu’on lui rendit un culle.

a° Les arbres. — De même que les eaux, les arbres sont rattachés au culle des dieux et vénérés, mais d’après W. R. Smitu (Religion oj the Sémites, p. 187),

« il n’y a pas lieu de penser qu’un seul des grands

cultes sémitiques se soit développé de l’adoration des arbres » ; le plus sage est de considérer les arbres, ainsi que les eaux, comme des accessoires des lieux du culte, le dieu Rimmon n’étant pas un dieu-grenade, mais le dieu de l’orage, et le dieu arabe Tàlab g’interprétant mieux, en fonction des autres dieux sidéraux, comme capricorne du zodiaque que comme la plante tàlab. Lorsque les prophètes reprochent aux Israélites comme un acte d’idolâtrie de sacrifier sous les arbres verdoyants, ils ne font jamais allusion au culte des arbres eux-mêmes, mais aux désordres des cultes païens ou à l’illégitimité du culte en dehors du Temple. On ne peut tirer aucun argument de ce fait que les termes de êldh, élon ou àltùn aient désigné certains arbres ; quand même ils se rattacheraient à la même racine que el dieu, et que cette racine exprimerait l’idée de force, ils n’impliquent pas nécessairement, en s’atlac.hunl aux arbres, un sens divin.

Une espèce d’arbres se trouve en relations avec une divinité déterminée. Etant donné le nom biblique de llaal Tamar, le palmier semble consacre à Baal ; mais Baudissin a remarqué qu’en Phénicie les arbres sont surtout attachés nu culte des déesses. Le grenadier, symbole de fécondité, est l’arbre d’Astarté, mais aussi le cyprès, le myrte et le palmier. N’est-ce point que ces derniers arbres, verts en toute saison, étaient plus que d’autres propres à former les bosquets sacres qui entouraient les temples ? Quant à la déesse Béroutlia, elle n’est pas la déesse cyprès 1 beroutha en araméen), mais la dame de Beirouth, ville qui tire son nom de ses puits.

Des représentations figurées nous montrent des cyprès près des temples et des autels et nous connaissons comme accessoires du culle Vachéra que

les Septante, suivis par la Vulgale, interprétaient comme un bois sacré, mais nous l’entendons plus justement d’un tronc ou un pieu placé vers oh sous le bois sacre, tout pics de l’autel, sinon sur l’autel même, et associé aux idoles, aux stèles ou aux piliers khammanin. Que représentait cet arbre’.' La déesse Aebéra. Gomme nous savons que cette déesse n’est pas une déesse arbre, mais Astarté, divinité sidérale, le plus vraisemblable est que ces pieux étaient des xoana, encore plus grossiers que ceux des Grées.

Z" U enceinte sacrée. Le haut-lieu.— Certains lieux sont sacrés, soit une enceinte dans une ville, soit un sommet, soil toute vue montagne, comme t’H< rmon, dont le nom même indique la sainteté, ou leCarmcl, nom d’une montagne et d’un dieu qui n’a ni images ni temples, ciit Tacite, ou toute une vallée, comme celle du Nahr Ibrahim, « sorte de terre sainte d’Adonis » (llBNAN).En Afrique on a trouvé plusieurs de ces

« enceintes sacrées à ciel ouvert, soit isolées dans la

campagne, soit formant l’annexe d’un temple qui reste à découvrir » (Flulletin archéologique, i ! SKg, p. 208). « Partout où les Phéniciens ont pénétré, on retrouve leur sanctuaire à ciel ouvert > (Lagbangr, loc. cit., p. 183), sans qu’ils aientun nom spécial pour le désigner. Les Xaba éens le nomment luiram et l’on en a reconnu plusieurs à l’éira. Au désert arabique cette enceinte se dilate, elle-e nomme hima ; peut-être aussi Chara, le nom de la région de Pétra, aurait-il le même sens (Wellhausbn).

Cette enceinte est réservée et n’admet pas certains actes impurs ; inviolable, elle comporte le droit d’asile pour tousles crimes. C’est le lieu que l’homme a destiné aux cérémonies religieuses, qu’il lui ait été désigné ou non par une disposition naturelle, et où l’action divine se fait plus spécialement sentir. Baudissin a remarqué que le culte des hauteurs n’est pas spécifiquement sémitique. Au haut-lieu est souvent associée une caverne sacrée, « simple cachette pour les richesses du dieu, lieu saint aménagé pour des initiations occultes, ou pour les manifestations divines au moyen d’oracles et de théophanies plus ou moins simplistes, temples de divinités chtoniennes. » (Vincent, Canaan, p. lao ;). Ces cavernes furent peut-être les temples primitifs : « la vieille Syrie ne connut guère d’autres temples que des hauts-lieux informes ou des trous dans le rocher. » (Rbnan, Mission de /’Lénifie, p. 881).

En cette enceinte, on trouve à la fois et l’autel taillé, sur lequel étaient consommés les holocaustes, et l’autel qui sert à 1 immolation de la victime du sacrifice : celui-ci est toujours, dans l’usage des Sémites, un bloc de rocher brut, non équarri par le fer.

Avant qu’eût pénétré dans ces pays l’influence grecque, les enceintes sacrées ne contenaient guère de représentations anthropomorphiques de la divinité, et ce n’est qu’au moment où les pierres consacrées à la divinité en devinrent le symbole et la représentèrent sous une forme humaine, que l’on construisit des maisons pour les dieux, des temples. A Palmyre, on ne trouve pas de haut-lieu, mais un grand temple. Le temple fut divinisé chez les Sémites occidentaux ; on connaît un ancien dieu. Bait-il. Le bétyle (fJamJ.Oî, ^ettriiitov) dont le culte lit fureur à l’époque gréco-romaine, et qui signifie alors une pierre censée venue du ciel et se mourant d’ellemême, devait être à l’origine une pierre contenant la divinité.

4° Pierres sacrées. — Il faut, parmi les pierres sacrées qui étaient placées dans les enceintes sacrées, distinguer deux catégories.

Les premières contiennent ou symbolisent la divinité, on ne peut dire : représentent, car elles ne 2

lisent point à avoir mie figure déterminée ; ce sont de très grossières idoles, connue Cachera dont nous avons parlé ; la Mecque garde encore aujourd’hui précieusement une pierre noire, fichée dai.s la Caaba. Beaucoup de ces pierres sont coniques ; niais l’iilée phallique ne saurait seide tout expliquer, car plusieurs sont attribuées à mie déesse. Biles témoignent d’une présence sensilile du dieu et permettent d’arriver jusqu’à lui. En Arabie, on fait couler le sang des victimes sur ces pierres, pour le faire parvenir plus sûrement au dieu ; chez les Arabes, la pierre sur laquelle on verse le sang devient l’autel, le meuble par excellence de la divinité, la table ou elle prend ses repas sous forme de sacrilice, son trône ; elle se div ::on trouve un Zeus-Madbachos ou Zeus aulel, un Zeus-Bômos (Ci.ermont-Ganiveau, Recueil, tome VI). Chez les Cananéens, la pierre figura toujours à côté de l’autel et conserva sa forme conique : il semble bien qu’elle s » ï t une réduction de la zi : iijqttrat babylonienne, et Baudissin, après Robertson Smith, regarde la pierre sacrée comme le signe qui sert à commémore » l’endroit qu’on regarde comme l’habitation d’un Numen, qu’il soit céleste ou terrestre.

Les autres pierres qui servent au culte et occupent une place dans le sanctuaire, sans avoir un caractère symbolique, sont votives. Les stèles ou les cippes avec ou sans représentations, îles ex-voto, au pied desquels on disposait une t ;.b’.e à libation ou des vases contenant des ossements de victimes incinérées. Mais de même qu’on en plaçait sur les tombeaux pour perpétuer le souvenir du mort, — tel est le népluc’. t araraéen, « àme personne », — on en élevait dans les enceintes sacrées ; « ce sont comme des sanctuaires en raccourci où l’adorateur est censé présent ; ils sont comme un perpétuel cri de reconnaissance ou une prière toujours active » (Lagrange, loc. cit., p. 210) et qui portent en araméen le nom de mesdjii a dont nous avons fait mosquée. En Arabie, on les frotte du sang du sacrilice pour y faire participer celui au nom duquel ils sont élevés.

— Quant aux grandes colonnes luxueuses élevées à l’entrée du liiéron ou aux portes du naos, elles av. lient aussi un caractère commémoratif ou votif.

Les fouilles nous ont livré des images de divinités q li ont dû avoir un usage privé et représenter les gardiennes du logis ou servir d’amulettes. Ce furent doue d’abord de petites pierres informes que ces téraphim : peu à peu elles prirent une ressemblance humaine eL subirent des influences venues du dehors ; au pays de Canaan, où l’Egypte plusque l’Assyrie marque son empreinte, « aucune série d’idoles ne peut rivaliser en nombre et en précision avec les représentations d’Aslarté » (Vincent, loc. cit., p. 1 56). Baal ne paraît pas, à moins qu’il ne soit symbolisé par les emblèmes phalliques trouvés eu assez grand nombre et qui parfois alfectent des formes de poisson et parfois s’agrémentent de cornes de bélier. Les serpents en bronze, fournis aussi par les fouilles, paraissent avoir surtout une valeur prophylactique.

ô" I’emps sacrés. — « Le mot de fête est devenu pour nous synonyme de jour de réjouissance. Il n’en était point ainsi dans l’antiquité. Un jour de fête est un jour consacré à un dieu » (Lagrangk. lue. cit., | '>), jour de repos pour clore une période de travail joure itier réservé au dieu avec le sacrifice, ses pompes, les chants, les invocations, les processions.

Ces fêtes reviennent à certains jours du mois, eomiue les cérémonies, ou à certaines époques de l’année.

Chez les nomades, ces fêles ont le caractère de pèlerinage, aux sanctuaires des dieux : elles sont ac compagnées de trêves sacrées et donnent ouverture à de> foires. Le mot de h a dj, consacré encore aujourd’hui pour le pèlerinage de la Mecque, exprime l’idée de faire le tour d’un objet avec solennité : à la fete des Tabernacles, les Israélites port aient en procession des branches d’arbres. Ce.-, processions et ce tour de l’autel étaient le rite central de la solennité. Au printemps, les Arabes avaient une fête des prémices, appliquée aux fruits de leurs troupeaux, et qui durait un mois ; on ne voit pas qu’ils y aient immolé les premiers-nés. Du commencement de juillet à la fin d’août, ils avaient une grande, fête pèlerinage-foire. La fête pentaéti rioue qu’ils célébraient aussi doit être d’importation grecque.

Chez les Phéniciens, la plus célèbre des fêtes était celle des Adonies au sanctuaire d’Afca, qui se célébrait au mois de juillet avec une pompe nettement funèbre, on expiait ainsi le sacrilège commis parla moisson qui blessait le dieu des céréales, Tammouz-Adonis. A Tyr, la fête fameuse d’Héraclès était acconipagnéetous lesquatre ans de jeux quinquennaux, Les fêtes de la déesse gardèrent, en terre punique aussi bien qu’en Phénicie, leur caractère obscène, alors même qu’elles eurent perdu leur caractère sanglant.

La plus grande fêle des Araméens avait lieu à Hiérapolis au printemps ; on y brûlait des victimes hautes.

Aucune de ces fêles n’a un caractère commémoratif ou historique, on leuren donne parfois un mythique, mais elles sont surtout en relations avec le cours de la nature.

V. — Personnes consacrées.

, o Personnel du culte. — Les Arabes civilisés du sud ont des prêtres qui sont sacrificateurs, et le grand prêtre est éponyme pour le calcul des années ; mais les Arabes nomades n’ont qu’un gardien de sanctuaire (sddiii) ; gardien aussi de la tradition, il a charge de trancher les questions douteuses d’ordre public ou privé.

Chez les Araméens, le prêtre est konier (sans doute de kamar, s’enflammer, s’échauffer) de tel ou tel dieu.

L’inscription phénicienne de Gitium, sorte de tarif des salaires dus aux employés du temple, nous renseigne sur ce personnel : en tête les sacrifiants, puis ceux qui demeurent dans le temple pour l’œuvre saine du jour, puis les barbiers, un collège de scribes, des jeunes filles, des ielabim et autres hiérodules.

3° Consécrations personnelles. — A. La circoncision fait partie d’un ensemble « d’institutions qui sont les rites de la consécration des jeunes gens au moment de la puberté, et c’est précisément parce qu’elle avait un caractère hygiénique et modéré, qu’elle s’est étendue si universellement et a prévalu sur d’autres pratiques pi us barbares. » (I.agiungk, loc. cj’(., p. 242). L’effusion du sang semble être ici un rite d’initiation : elle unit au dieu l’organe par lequel se transmettra la vie. Inconnue des Assyro-Babylonien s, elle élail pratiquée par les Arabes, lesEdomites, les Ammonites, les Moabites (Jérémie, ix, afi-aô) ; l’usage en était fort instable chez les Phéniciens.

il. Il existait d’autres consécrations personnelles, les vœux. On se rasait les tempes en l’honneur des dieux, et les barbiers des temples pouvaient être employés à cet office. On se vouait aussi comme esclave, abd, au service d’une divinité (Clkrmont-GahnhaO, Recueil, IV, p. 322) ; de la une grande partie des noms tbéophores formés avec cet élément.

VI. — Culte. Sacrifices.

De tout temps, l’homme a cru que le don d’une chose qui lui appartenait était le moyen le meilleur et le plus ellicace de témoigner son affection et sa soumission. L’individu ou la communauté ont donc fait des offrandes à la divinité. « On ne croit pas, en général, dit Guyau (L’Irréligion de l’avenir, p. 44) «  qu’elles répondent à un besoin réel des dieux ; on pense qu’elles seront plutôt agréées par eux qu’acceptées avec avidité. » Pour mieux manifester ses sentiments, l’homme donnera ce qui a pour lui le plus de prix et ce qu’il croira, d’après les concepts qu’il se fait de la sainteté, devoir être le plus agréable aux dieux ; il s’efforcera aussi de s’en dépouiller le plus complètement possible. De là le sacrilice :

« ce procédé consiste à établir une communication

entre le monde sacré et le monde profane, par l’intermédiaire d’une victime, c’est-à-dire d’une chose détruite au cours de la cérémonie. » (Huiiiirt et Mauss, Essai sur la ntiture et la notion du sacrifice. Année sociologique, 1899). Il semble bien que ce soit là l’idée la plus simple et la plus primitive du sacrifice, celle à laquelle peuvent se ramener toutes les oblations : un don plus ou moins parfait, ayant pour lin d’unir l’homme à la divinité.

Suivant W. Robrrtson Smith, les Sémites ont distingué entre : i° les oblations animales (zebakh) et végétales (minkha) ; 2° ce qui est offert sur une table sacrée et ce qui est consommé par le l’eu ; 3° les sacrifices entièrement pour le dieu et les sacrifices partagés entre le dieu et l’adorateur.

io II est évident que les oblations animales varient avec l’état social des peuples, selon qu’ils sont nomades ou agriculteurs.

Chez les Arabes, figurent le bœuf, le chameau, la brebis que l’on remplace en fraude par la gazelle. Aujourd’hui encore, toute immolation est sainte et l’on ne tue pas un mouton sans invoquer le nom d’Allah. Pour la minkha, on offre surtout du vin et de l’huile ; on offre aussi de la farine à Oqaisir, et les offrandes de farine azyme ou fermentée étaient d’un usage journalier dans le monde sémitique.

Les Cananéens immolent bœufs, veaux ou cerfs, béliers ou bovins, brebis ou chèvres, agneaux ou chevreaux ou faons, oiseaux ; ils offrent des céréales, de l’huile, des libations mélangées, du lait, de la graisse et un mélange humide où l’on croit reconnaître du vin aromatisé. Nous connaissons surtout ces offrandes par le tarif de Marseille (C.L. s’., I, 165), la pierre appartient au littoral africain, le culte qu’elle suppose a été transporté de la mèrr-patrieà Car t nage ou à Marseille.

« La position intermédiaire des Araméens entre

les Arabes et les Cananéensest assez bien représentée par le rituel hébreu. » (Lagrangb, loc. cit., p. a(>5).

2° Ce qui est offert sur la table sacrée, ce sont les oblations végétales, les libations. Au tarif de Cartilage (6’.L.s., i, iGG), on voiténumérer des branches, de beaux fruits, du pain, de l’encens, du miel. Deux cents enfants mentionnés par le même texte seraient-ils des victimes humaines ou sont-ils simplement offerts aux dieux ? Les offrandes animales sont consumées par le feu entièrement ou en partie. Pour les Arabes, nomades et peu munis de bois, nous ne possédons guère de documents constatant l’existence ou l’usage du foyer sacré, mais la philologie permet de considérer comme venant d’un même thème deux racines qui signilient « rôtir » et a prier » ; le mot employé par les inscriptions minéennes pour signifier le sacrifice — le mot prêtre appartenant au même radical, — ne peut être rapporté qu’à l’arabe avec le

sens de brûler. Les Arabes ont donc connu et pratiqué la combustion de la victime dès les origines les plus reculées, bien que pour eux le sacrifiie consiste surtout dans l’effusion du sang au pied de l’autel et l’onction des pierres sacrées avec ce sang.

3° Lequel est le primitif, du sacrilice entièrement pour le dieu ou du sacrifice partagé ? C’est là une question qu’il est à peu près impossible de résoudre, sinon par des systèmes a priori sur l’origine du sacrilice. Le sacrifice entièrement pour le dieu, l’holocauste calil, où la victime est tout entière consumée par le feu, représentet-il la nourriture du dieu réduite en fumée pour mieux s’élever, jusqu’à lui, ou le don parfait et absolu ? Les sacrilices partagés sont des sacrilices de communion qui permettent aux prêtres ou aux fidèles, en s’asseyant à la table du dieu, de s’unir à lui par le rite du banquet, rite qui chez les anciens a toujours été un symbole de fraternité ; ils se divisent en sacrilice pacifique, chelem, où le prêtre prélève une partie de la chair, mais ne laisse rien à l’offrant, et en sacrifice satvat, le sacrifice pru peccato, où le prêtre et l’offrant partageaient la partie de la victime « qui ne montait pas sur l’autel » : il a pour but chez tous, aussi bien chez les Sabéens que chez les Phéniciens, d’effacer certaines impuretés morales ou rituelles.

Chez les Arabes, la coutume avait rendu le sacrifice obligatoire dans trois cas : i° prémices ; 2° préciput du butin ; 3° moment où l’on coupe pour la première fois les cheveux de l’enfant ; pour cette taille des cheveux ou >q qa, on frottait la tête rasée de l’enfant avec le sang du mouton sacrifié ; c’est un acte de consécration. Au printemps, chacun devait sacrifier au moins une brebis.

Parmi les sacrifices offerts par les Sémites, le plus solennel était le sacrilice humain, qui s’est perpétué à Carthage longtemps après le commencement de notre ère et en Syrie jusqu’aux premiers temps de l’Islam. Le récit de Saint Nil (P. G., LXXIX, col. 680) nous prouve qu’il n’était pas inconnu des Arabes ; les Araméens le connaissaient ; la Bible, les inscriptions, les récits des historiens nouslemontrentensanglantant la Syrie, la Phénicie et ses colonies qui le pratiquaient avec fureur, s’introduisant en Grèce avec les cultes barbares. Il était offert dans des circonstances tragiques, dans celles où la vie du royaume ou de la cité était en péril, et surtout au dieu Melek-Cronos-Saturne, dont la statue d’airain à Carthage, nous dit Diodork, étendait ses mains la paume en haut et penchées vers la terre, de sorte que l’enfant qu’on y mettait roulait et tombait dans un abîme rempli de feu. L’idole devait se confondre en terre avec une sorte de four. On l’offrait cependant aussi à d’autres divinités, connue Tanit, et il semble qu’en Syrie on faisait à Aslarté le sacrifice d’une jeune fille.

On y recourait encore dans d’autres occasions bien déterminées. En Canaan, « il est attesté avec la plus sinistre précision, sous la double forme d’immolation de nouveaux-nés », des premiers-nés peut-être doit-on dire, et des sacrifices de fondation » (Vim < nt, Canaan, p. 188). Les petits cadavres étaient introduits dans des jarres et une inscription célèbre l’apothéose du jeune Néteiros, déifié dans le lébbs, ou urne funéraire (Clkrmoxt-Gannbau, Recueil, II, p. 78). Mais le feu n’intervenait qu’accidentellement et aucune trace d’immolation proprement dite n’a été relevée. Pour les sacrilices de fondation, les cadavres ont été trouvés à la base d’un mur, généralement sous un seuil de porte (Cf. Josué, vi, 28 ; I Sam., xvi, 34) ; mais aussi au milieu d’un appartement, emmurés ou enfouis dans des vases En même temps que cet usage, nous en voyons, dès le 1305

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xv siècle, pratiquer un autre : celui du dépôt symbolique, qui remplace la victime humaine et « que l’usage religieux consacrera pour de longs siècles jusqu’au terme de la monarchie Israélite : c’est une lampe placée entre deux coupes ou deux bols renversés l’un sur l’autre. » (Vincent, Canaan, p. 198).

VII. - Les morts.

L’homme s’est toujours occupé des morts, il s’est toujours cru d’une certaine manière en relations avec eux ; il a rendu des honneurs à leur dépouille funèbre ; à leur occasion, il a offert des prières et des sacrifices. Est-ce pour les apaiser et les honorer, comme on apaise et on honore les dieux et les démons ; est-ce au contraire pour les secourir et les nourrir, comme on secourt et on nourrit les pauvres et les allâmes ?

Que les rois aient été adorés comme dieux après leur mort, que leurs noms soient entrés comme éléments divins dans des noms théophores formés sur le modèle ulid — tel dieu, c’est un fait prouvé par le récit d’L’iiA.Nics, cité par Etienne de Byzance, et par les inscriptions arabes et palmyréniennes. Mais ce sont là des faits récents, en dehors de la Chaldée, et la mort ne fait qu’achever une apothéose commencée du vivant même du monarque. Les autres hommes n’arrivent pas par le seul fait de leur mort aux honneurs divins. Leur joie est d’avoir un lit de repos avec les llephaïm (Inscription d’Echmounazar C. I. V., I, 3) ; il reste d’eux quelque chose de vivant, car Panammou demande qu’en sacrifiant à Hadad on mentionne son nom, alin que son âme puisse boire et manger avec le dieu.

Si l’incinération est attestée chez les Carthaginois par des inscriptions néopuniques, la règle générale chez les Sémites est l’ensevelissement ; et « l’idée primitive des peuples chananéens (Hébreux et Phéni ciens) fut que le tombeau devait être dans une caverne ». (Renan, Mission de Pkénicie, p. 382). Les fouilles permettent de constater qu’en Canaan les premiers envahisseurs sémitiques inaugurèrent l’inhumation après un stage de crémation. Là, dans les hypogées, cavités naturelles plus ou moins aménagées par la main de l’homme, les cadavres sont rangés ou empilés dans une pièce sépulcrale ou logés dans des loculi, les genoux repliés ou ramenés jusque sous le menton, dans la dernière position de l’enfant dans le sein maternel, ou peut-être simplement dans cel le île l’homme endormi ; quelquefois on comprime dans une urne un squelette entier, ou on y entasse les os désagrégés. Les hypogées sont rouverts aussi souvent que 1 exigent de nouveaux décès. Ces coutumes sont en opposition avec celles des Phéniciens et des Arainéeiis, chez qui domine un souci inquiet de prévenir toute ouverture de la tombe et qui, par des inscriptions gravées sur les sarcophages ou sur des stèles, proclament qu’aucun objet précieux n’a été enfoui avec le mort et menacent de la colère des dieux ceux qui violeraient la tombe.

Les morts n’étaient point ensevelis sans qu’on leur fournit les objets usuels nécessaires à la vie courante, ustensiles, armes, aliments, en nature ou sous une représentation symbolique ; la vaisselle sera toujours représentée ; on trouve aussi des lampes et des figurines : idoles ; figures humaines, quelquefois en formes de vases ; figures, pleines ou creuses, d’animaux qui sont peut-être des symboles d’approvisionnement, le tout plus ou moins mutilé et comme réduit à l’état de mort pour servir au défunt dans son nouvel état, si mystérieux pour l’esprit humain. Tout n’est point fini avec l’ensevelissement. Le mort demeure dans sa tombe et, quoique le contact de ses ossements rende impur, les vivants conservent

avec lui une certaine communion. Au moment même de la mort, des offrandes ou des sacrifices ont été faits ; des repas funèbres sont servis, comme chez tous les peuples. Cet usage va durer ; les textes bibliques nous l’attestent, en condamnant les dons en aliments faits aux morts et les festins funèbres. Etaient-ce là des sacrilices faits aux morts ? Il ne le semble pas. Le texte de 1 inscription de Hadad indique au contraire nettement que le sacrilice est fait au dieu Hadad ; sans doute la nephech de Panammou désire ce sacrifice pour boire et pour manger ; mais ce n’est pas à lui qu’on l’offre. Il se contentera de communier au sacrifice, comme ferait un vivant ; ce n’est pas lui, niais les dieux qui enverront aux vivants des bénédictions et des malédictions, bes libations faiies sur les tombeaux peuvent avoir pour but de rassasier leurs habitants ; les sacrifices sont offerts aux dieux que le défunt doit honorer ; le mort a besoin de prier, aussi bien que de se nourrir, et ne peut plus le faire par lui-même. Le tombeau, demeure d’éternité, est le lieu où habite le mort, où son âme peut retrouver son corps et, par son intermédiaire, pénétrer dans le royaume inférieur, un des trois qui divisent le inonde, celui où il doit désormais reposer en paix et d’où il ne sortira plus pour troubler les vivants, s’il jouit de tout ce dont il a besoin. La pratique des tabellæ devotionis montre que, par le tombeau, les vivants ne communiquent pas seulement avec les morts, mais que par là ils expédient leur courrier jusqu’aux enfers.

VIII. — Diffusion et influences étrangères. Syncrétisme.

Les Sémites ont toujours été de grands trafiquants, habiles à transmettre et à recevoir tout ce qui peut s’échanger. Installés entre les deux grands empiresd’Egyple etde Chaldée, établis sur les bords de la mer, ils font le commerce des caravanes à travers tout l’Orient et sillonnent de leurs navires la Méditerranée qu’ils explorent jusqu’en ses plus lointains rivages, marchands et banquiers, fabricants d’ustensiles communs et d’objets de luxe, prompts à rendre serviceelà s’insinuer partout. Quelleque soit l’origine de l’alphabet, c’est sans doute par les Phéniciens qu’il a été transmis au monde civilisé, et ce sont eux qui établissent en pays grec des sanctuaires où l’on pratique des rites barbares : le culte de Cronos, les sacrifices humains, les prostitutions sacrées sont d’origine nettement sémitique. L’Egypte, elle aussi, avait été envahie par les cultes syriens, qui à la suite des marchands et des soldats pénétrèrent le Delta et parvinrent jusqu’à Thèbes. Mais elle réagit rapidement : sur la stèle de Yehawmelek, la célèbre déesse de Byblos porte le costume d’Hathor. Cette déesse, confondue par les Egyptiens eux-mêmes avec Isis, lui céda bientôt la place ; Osiris suivit Isis, on l’assimila à Adonis et on l’associa à El, l’antique dieu de Byblos. Bon nombre de statuettes religieuses trouvées au pays deCanaan sont de style égyptien. L’art chaldéen se manifesta sur le même terrain ; la lune, dieu d’Our et de Kharran en Basse Chaldée, verra à son tour son culte se répandre dans tout l’Orient ; ce sera sous une forme féminine, au commencement de notre ère, à l’époque où les Araméens se font les propagateurs du culte de Bel, sous les traits de qui le Soleil sera représenté à Palmyre, dont l’empire s’étendait jusqu’en Occident.

Les Grecs, de leur côté, avaient travaillé dans le sens du syncrétisme. Ils cherchent à assimiler leurs divinités à celles des peuples avec qui ils sont en contact et chez qui pénètre l’hellénisme. Les Romains, à leur tour, veulent donner droit de cité aux dieux des nations vaincues, dontles images sont portéesàRome, 1307

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pendant que leurs cultes, aux cérémonies mystiques ou licencieuses, séduisent les esprits épris d’idéal ou perdus de rêveries, et fiévreux du désir d'éprouver des sensations nouvelles. Tanit, pour ne citer qu’un exemple, que nous avons vu identilier à Artéuiis et à Atliènè, Virgo Cælestis, devient surtout Junii, mais reste Diane aussi et Vénus. Un mouvement général de concentration se fait dans l’Empire. Si les cuites syncrétisés dlsis et dOsiris dominent dans les anciens pays sémitiques de l’Asie antérieure, Aurélien, qui cherche à donner comme clé de voûte à l’unité politique de l’Empire l’unité religieuse, établit au-dessus de tous les cultes, mais saus les détruire, celui du Soleil, et partout règne le Dominas Itnperii Romani, le maître des cieux, le grand Zeus, Bel adoré à Héliopolis.

Tous ces rapprochement, toutes ces confusions soit populaires, soit savantes, n’ont point été sans rendre fort dillicile une étude approfondie des religions sémitiques.

iiimoins, on est parvenu à découvrir sous leur déguisement h » physionomie propre d’un ceriain nombre de dieux et, sous le syncrétisme, à déterminer le caractère primitif des religion.-, sémitiques. Elles étaient et « c’est, dit le P.Lac.ii.ixuh (loc. cit., p. 438), une conclusion à laquelle personne aujourd’hui ne peut rei’user son assentiment, des religions polythéistes, mêlées de naturisme et d’animisme, comme on dit aujourd’hui. Les Sémites ont adoré les astres, les pierres, les sources, les arbres ou p.utot les maîtres, les seigneurs de ces objets ». Ces maîtres s./nt connue des ho. urnes, d’essence plus durable et plus fine que les autres, mais pourvus de leurs instincts et agités de leurs passions ; résidant d’abord dans les choses, ils s’en isolent par la suite, s’aventurent dans le domaine les uns des autres ; on réunit la plupart d’entre eux au firmament ; on les pare des attributs de leurs rivaux ; un seul linit par les dominer tous, comme un seul homme domine l’Empire. Mais ce n’est point là du monothéisme. Le sentiment religieux n’aboutit, pas plus que la politique, à l'établir. « Ils (les Sémites) admettent volontiers que l’idul de leur choix l’emportait de beaucoup sur les autres, mais ils ne songeaient pas à proclamer qu’elle les avait absorbées toutes en soi et qu’elle demeurait seule vis-à-vis du monde, sa création. » (Maspkro, Histoire ancienne, tome I, p. 6'i’i). L'évhétnérisuie « naturel aux Sémites » (Rknan) ne réussit pas mieux. On montrait les tombeaux de certains dieux, l’histoire conservait le souvenir des exploits des rois divinisés, les philosophes considéraient les dieux comme les fondateurs îles villes et les invendes arts, m. ùs une fureur de superstitions et de magie dominait la Syrie, le culte des pierres et des animaux connaissait une vogue qu’il n’avait jamais eue. Menacés par le judaïsme et le catholicisme, ces cultes, devenus l’apanage de quelques pesectes, continuèrent à végéter en Arabie ; sous l’influence du monothéisme, ambiant, on en était é à dire « le dieu », a Allah », pour Dieu, mais on pratiquait des sortilèges et on adorait des idoles que Mahomet dut briser. Seul L'évhémérisme tel qu’il paraît dans la Bible et qui, lui aussi, nie l’existence des dieux, les considère comme des esprits mauvais ou des forces naturelles ou des hommes divinisés, est animé du plus pur esprit monothéiste. Le profit moral ne fut pas plus grand que le proiit religieux. N'étant jamais parvenus comme les dieux des Grecs et des Romains à descendre au foyer, à se mêler à la vie Individuelle et familiale, malgré toutes les ingéniosités de la dévotion privée, les dieux continuèrent jusqu’au dernier jour à exiger ce service dur et cruel. Si les sacrilices hu mains diminuèrent de fréquence aux approches de notre ère, ce fut sous l’influence générale des mœurs et non par un sentiment religieux. La licence des cérémonies religieuses continue à souiller les parvis des temples.

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Raymond Louis, O. P.