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Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/ANGÉLIQUE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 350-351).

ANGÉLIQUE. adj. m. & f. Qui tient de l’Ange, qui a rapport, qui appartient à l’Ange. Angelicus. La Salutation Angélique, c’est l’Ave Maria, que l’Ange dit à la Sainte Vierge, lorsqu’il lui annonça le mystère de l’Incarnation, avec quelques mots pris d’ailleurs, & ajoutés par l’Eglise. Voyez Ave, Esprits Angéliques.

Angélique, se dit figurément des qualités excellentes d’une chose. Mirificus, mirabilis, egregius. Une vie angélique. Un esprit angélique. Un visage angélique. Une chère angélique. On appelle en Théologie Saint Thomas, le Docteur Angélique, & l’école des Thomistes, l’Ecole Angélique, parce qu’ils se glorifient de suivre la doctrine de S. Thomas. Vous vous proposez de concilier S. Augustin avec S. Thomas & avec l’école angélique. Mém. de Tr. On a quelquefois appelé le Saint Siége, Siége Angélique, comme on l’appelle, Siége Apostolique. Voyez le Concile de Calcedoine, art. 3.

On appelle habit angélique, l’habit de certains Moines Grecs de S. Basile. On distingue deux sortes de Moines : ceux qui font profession d’une vie parfaite, sont appelés les Moines du grand & angélique habit ; les autres, qu’on nomme du petit habit, sont d’un rang inférieur, & ne menent pas une vie si parfaite. Allat. de cons. Eccl. Occid. & Or. l. 3, c. 8. Ce mot d’habit angélique a été aussi en usage chez les Moines Latins. Voyez Du Cange, dans son Glossaire latin.

La Couronne angélique, c’est la Couronne de Hongrie, qu’on appelle aussi le Royaume apostolique. La Hongrie pouvoit-elle mieux & plus heureusement déférer la couronne angélique qu’à votre auguste Maison archiducale ?… Elle n’aura pas à craindre que sous elle le Royaume Apostolique & la couronne angélique soient jamais dévolus à un autre qu’à un chef de la Religion Catholique Romaine. Ce sont les termes de la harangue des Etats de Hongrie, à l’Empereur, en 1722.

ANGÉLIQUES. Bernard Justiniani, au chap. III, de son Histoire Chronologique de l’origine de tous les Ordres de Chevalerie, parle d’un Ordre institué, à ce qu’il prétend, en 313 par Constantin, dont les Chevaliers furent appelés Angéliques, & Dorés de la Croix de Constantin, Angelici & aureati della Croce di Constantino. Angéliques, dit-il, à cause de l’Ange qui apparut à Constantin avec le signe de la Croix ; & qui lui dit, in hoc signo vinces ; Dorés, aureati, à cause du collier d’or qu’ils portoient. Cet Ordre fut mis sous la protection de S. Georges ; & si l’on en croit M. Justiniani, c’est de ces Chevaliers qu’il faut entendre une Médaille de Majorien, au revers de laquelle il y a une Croix, avec une légende, Gloria Cæsarum Georgianorum ; c’est-à-dire, la gloire des Césars Géorgiens. Je doute que tous les Antiquaires soient de son sentiment. Il distingue trois ordres de Chevaliers sous le Grand-Maître. Le premier, sont les Grands-Croix, qui s’appellent Torquati, à cause du collier qu’ils portent : ils sont au nombre de cinquante, en mémoire des cinquante Guerriers que Constantin destina à la garde du Labarum imperiale : ils portent au cou une croix placée entre plusieurs Labarums ; c’est-à-dire, plusieurs monogrames de Jésus-Christ représentés sur les mailles qui forment le grand collier, auquel pend par-devant l’image de saint Georges à cheval, tuant de sa lance un dragon qui est sous les pieds de son cheval. Le second ordre sont les Chevaliers de justice, qui son ecclésiastiques. Ils portent au cou une croix d’or émaillée de gueules. Ces deux premiers Ordres portent au côté gauche la Croix de velours fleurdelisée, marquée d’un I en haut, d’un S en bas, d’un V renversé à droite, & d’un H renversé à gauche, & d’un monograme de Jésus-Christ, avec un Α à droite, & un Ω à gauche, que cet Auteur appelle Labarum. Les Chapelains la portent au côté droit, & non pas de velours, mais de drap cramoisi. Ils prouvent quatre quartiers. Le troisième ordre sont les Chevaliers servans, qui portent la Croix rouge, mais coupée & non fleurdelisée par en haut, & sans autres lettres que celles du Labarum, qui se voit au centre. Il prétend que S. Léon parle de cet Ordre dans la lettre qu’il écrivit l’an 456, à l’Empereur Marcien, & au Prince Alexius Angelus Flavius, alors Grand-Maître de cet Ordre. L’Empereur Léon I, lui accorda de grands priviléges en 489. Cet Ordre rendit des services signalés, selon le même Auteur, en 615, contre des hérétiques qui ravagerent la Perse ; ensuite dans les Croisades de la Terre-Sainte, & contre les Albigeois. Enfin en 1191, Isacius Angelus Flavius Commenus, Empereur de Constantinople, le rétablit ; il falloit dire l’institua. Car que Constantin l’ait institué, ou même qu’en ce temps l’on connût ce que nous appelons des Ordres militaires ; c’est une fable. Michel Paléologue le confirma en 1293 & 1294, & Paul III en 1540 & 1545, aussi-bien que plusieurs de ses successeurs, qui lui ont accordés différens priviléges, que cet Auteur rapporte. Voyez le ch. III de la seconde édition, qui est in-fol à Venise en 1692.

Angéliques. Saint Epiphane & Saint Augustin font mention de certains Hérétiques appelés Angéliques, parce qu’ils rendoient aux Anges un culte excessif & qui tendoit à l’idolâtrie. S. Epiphane néanmoins dit qu’on leur donna ce nom, parce qu’ils croyoient que le monde avoit été créé par les Anges.

Angéliques. Nom de Religieuses fondées en Italie par Louise Torelli, Comtesse de Guastalla, ce qui leur a fait donner le nom de Guastallines. Voyez ce mot. Angelica, Guastallina monialis.

Angélique. s. f. Instrument de musique à cordes, qui est composé du luth, & du théorbe.

Angélique. s. f. C’étoit le nom d’une danse des anciens Grecs, qui se dansoit dans les festins. Elle étoit ainsi appelée du mot grec ἄγγελος, Nuntius, Messager, parce que ceux qui la dansoient, étoient habillés en Messagers, comme Pollux nous l’apprend, Liv. IV, ch. 14. Voyez aussi Hésychius au mot ἀγγελὸν, où il faut corriger ἀγγελιϰὴ, selon la remarque de Meursius, Angelica saltatio.

Angélique de Bohème. Imperatoria sativa. Inst. R. Herb. Sa racine est épaisse d’un pouce & demi, ou de deux pouces, divisée en quelques branches garnies de fibres chevelues ; son écorce est brune, ridée. Sa substance intérieure est blanche, molle, piquante au goût, âcre, un peu amère & fort aromatique. Ses feuilles sont fort amples, & comme composées de plusieurs petites feuilles rangées sur une côte branchue terminée par une seule feuille, crénelées sur les bords, molles, vert gai en dessus, plus pâles en dessous, & d’une odeur & d’un goût un peu forts & ambrés. Ces feuilles sont portées par des pédicules branchus, teints d’un peu de pourpre. La tige qui s’élève d’entre ces pédicules est haute de cinq à six pieds, creuse, légère, noueuse, branchue, cannelée, rouge à sa naissance, d’un vert pâle & cendré à son extrémité, & garnie de quelques feuilles beaucoup moindres que celles du bas : elle se termine en des ombelles de fleurs blanchâtres. Ses semences sont aplaties, presque ovales, légérement rayées sur le dos, & comme bordées par une aile très-mince. Ses feuilles, ses tiges & ses semences, ont une odeur fort agréable. On confit les pédicules de ses feuilles & de ses tiges ; elles sont stomachiques & alexitères ; ses racines entrent dans plusieurs compositions alexipharmaques. L’Angélique de Bohème est rangée parmi les impératoires, à cause que ses semences sont semblables à celles de l’impératoire ordinaire. On cultive l’angélique de Bohème, & elle périt aussitôt après qu’elle a donné des graines.

Angélique proprement dite, suivant M. Tournefort, est un genre de plante ombellifère, dont les semences sont longues, étroites, arrondies, & cannelées sur leur dos. Elle a comme l’impératoire, ses feuilles assez grandes, rangées sur une côte branchue, terminée par une seule feuille. Il y a plusieurs plantes qui se rangent sous ce genre, quoiqu’elles n’aient ni l’odeur de l’angélique de Bohème, ni même tout le port.

L’angélique a été ainsi appelée à cause des grandes propriétés qu’on lui attribuoit. C’est pour la même raison qu’on l’appelle encore Racine du Saint Esprit. La forme de ses fleurs s’appelle Ombelle. Umbella. Les Anglois usent des feuilles & de la racine d’angélique dans leurs sauces, parce qu’elle corrige les humeurs grossières, & l’haleine puante, & qu’elle aide beaucoup à la digestion.

Il y a une angélique d’Acadie nouvellement décrite dans les Mémoires de l’Académie des Sciences, qui a la fleur jaune, la racine noire & touffue, plusieurs tiges creuses, anguleuses, & hautes d’un pied & demi, avec des branches qui naissent des aisselles des feuilles. Chaque branche porte en son extrémité une petite ombelle composée de plusieurs bouquets de fleurs jaunes très-petites qui ont cinq feuilles, qui naissent d’un péricarde vert, gros comme la tête d’une épingle. Sa graine est brune, cannelée & semblable à celle du carvi. Cette plante est âcre, amère & aromatique, & a l’odeur fort différente de l’angélique ordinaire.

Eau d’angélique. C’est une essence qui se fait en prenant demi-once d’angélique, autant de cannelle, un quart d’once de girofle, autant de mastic, de coriandre & d’anis vert, & demi-once de bois de cèdre. On concasse tout cela dans un mortier. On le fait infuser pendant une nuit dans un pot d’eau de vie ; on la distille ensuite au bain-marie, & l’on met de cette essence sur un pot d’eau de vie, depuis une jusqu’à deux ou trois once ; on y met aussi de l’ambre, du musc & de la civette. Chom.

Angélique. s. f. Sorte d’anémone blanche à peluche gris de lin.

Angélique. Espèce de figue. L’angélique est violette & longue, peu grosse, la chair rouge, & passablement bonne. La Quint.