Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BRIDE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 69-70).
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BRIDE. s. f. Assortiment de bandes de cuir & de pièces de fer, propre à tenir la tête d’un cheval sujette & à le conduite. Frenum, habena. La bride est composée de deux rênes, d’une têtière, & d’un mors. On dit, en termes de manège, tenir, rendre, lâcher, donner la bride, & plus élégamment, tenir, rendre, donner la main.

Bride, se prend quelquefois pour les rênes seules, & dans ce sens on dit, qu’un cheval a rompu sa bride lorsqu’il a rompu ses rênes.

Ménage dérive ce mot du latin brida, qui a été fait du grec ζύω, qui signifie traho, je tire. Il est bien plus naturel de le dériver avec Icquez de la langue saxone, & de celle des Francs, où l’on trouve les mots bridel, brydel, dans le même sens. Le P. Pezron dérive le grec Βρυτήρ, & le françois bride, qui signifient la même chose, du celtique brid.

Boire la bride ou le mors, se dit quand le mors remonte trop haut, & se déplace de dessus les barres où se fait l’appui. Se tenir à la bride, c’est s’y attacher comme on fait aux crins. La main de la bride, c’est la main gauche du Cavalier. On appelle coup de bride, l’espèce de châtiment que le Cavalier donne à son cheval en secouant une rêne, lorsque le cheval ne veut point tourner. On appelle effet de la bride, le degré de sensibilité que le mors cause aux barres du cheval, par la main du Cavalier, & l’on dit que le cheval commence à goûter la bride, quand il commence à s’accoutumer aux impressions du mors.

On dit courir à bride abattue, ou à toute bride ; pour dire, courir de toute la vîtesse du cheval. Immissis, laxatis habenis accurrere. Ablanc. Il gagna la ville, où il se retira à toute bride. Dans le figuré, courir à bride abattue après les plaisirs, c’est les recherche ardemment, s’y livrer aveuglément & sans retenue. Courir à bride abattue à sa perte, s’y porter ardemment & inconsidérément. On dit aussi, pousser un cheval à toute bride. Vaug. Voyez sur les Opérations de la bride au Manège, la Méthode de dresser les chevaux par le Comte de Newcastle, pag. 182 & suiv. de la traduction fançoise, & pag. 190 & suiv. p. 322 & suiv. pag. 378 & suiv.

Bride à abréver ou abreuver. Vous pouvez mettre au poulin pour quelques jours la bride à abréver, sans rènes, après quoi vous lui mettrez le mors. Newc. Il n’y a rien de si utile à la santé des chevaux que de les tenir avec la bride à abréver trois ou quatre heures avant que de les monter, & autant de tems après, jusqu’à ce qu’ils soient bien refroidis. Id.

Bride, se dit figurément de tout ce qui arrête, ou qui borne la puissance de quelqu’un ; qui le retient dans son devoir. Freni. Les Ephores de Sparte étoient établis pour tenir en bride la puissance royale. Les loix tiennent en bride les peuples. Il faut tenir la bride haute aux jeunes gens qui sont trop fougueux, pour dire les traiter avec sévérité, de peur qu’ils ne s’échappent. Notre esprit assez souvent n’a pas moins besoin de bride que d’éperon. Boil. On dit aussi, qu’un homme a lâché la bride à ses passions, lorsqu’il s’y abandonne entièrement. Il faut user de toutes choses avec modération, & ne lâcher jamais la bride à nos sens ; quelque innocens qu’en soient les objets. Nicol. Lâcher la bride à quelqu’un, l’abandonner à lui-même, à sa propre volonté, ne le plus retenir. On dit aussi, qu’une citadelle, une place forte, tient en bride toute une ville, toute une Province ; pour dire, qu’elle la tient dans la sujettion, dans l’obéissance.

On appelle proverbialement des brides à veaux, les raisons qui persuadent les sorts, & dont se moquent les gens éclairés. Je ne sauroir souffrir qu’on se moque de vous, & je vois que tout ce qu’il vous dit là, sont des brides à veaux. R.

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Qu’on appelle bride à veaux. Masc.

On dit aussi qu’il faut aller bride en main en quelque affaire ; pour dire, qu’il faut agir lentement, & après une mûre délibération. On dit aussi, mettre la bride sur le cou à quelqu’un, lorsqu’on l’abandonne à lui-même. On dit aussi, qu’on a hoché la bride à quelqu’un ; pour dire, qu’on a fondé ses intentions, pour savoir s’il voudroit faire quelque chose qu’on ne lui a pas demandée ouvertement.

Bride, se dit aussi de ce qui serre, qui arrête & qui attache une chose à une autre. Retinaculum. Il faut refaire des brides à cette dentelle. Les boutonnières ont besoin de brides pour les arrêter. On met des brides aux beguins des enfans pour les attacher.

Bride, chez les Arquebusiers, est un morceau de fer plat, assujetti en dedans par des vis au corps de platine, servant pour soutenir la noix, & empêcher que le chien n’ approche trop près du corps de platine en dehors.

Bride, chez les charrons, est une bande de fer, plate, pliée en trois, carrément, dont les deux branches sont percées de plusieurs trous vis-à-vis les uns des autres pour y placer une cheville de fer qui va répondre d’un trou dans un autre. Elle sert aux charrons pour assujettir plusieurs pièces de leurs ouvrages ensemble. Encyc. Les charrons se servent encore d’un autre outil assez semblable, qu’ils appellent Bride de brancard, dont l’usage est de maintenir le brancard, quand ils le montent & l’assemblent.

☞ Chez les fondeurs de cloches, on appelle brides, de grands anneaux de fer, servant à suspendre la cloche au mouton par le moyen des barreaux de fer qui traversent les anses de la cloche & les barreaux de bois & de fer posés en travers sur le mouton.