Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BURIDAN

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 116).
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BURIDAN. Nom d’homme. buridan étoit un Docteur & Recteur de l’Université de Paris dans le XIVe siècle, & il passa pour un des plus habiles Philosophes de son temps. C’est de lui qu’est venu le proverbe que l’on dit à un homme irrésolu, qui ne sait à quoi se déterminer, qu’il ressemble à l’âne de Buridan. Ce proverbe est fondé sur ce que disent les Philosohes, & que disoit apparemment Buridan, qu’un agent qui n’est pas libre entre deux objets, qui ont une égale force pour le déterminer, ne se déterminera jamais à l’un plûtot qu’à l’autre. Par exemple, un âne au milieu de deux picotins d’avoine tout semblables, également distans, agissant sur lui avec une égale force, ne se déterminera jamais à l’un plutot qu’à l’autre, & mourra de faim entre les deux. Cela me fait appréhender qu’il ne t’arrive comme à l’âne de Buridan, qui mourut de faim entre deux picotins d’avoine, faute de se résoudre auquel il devoit alonger le cou, parce qu’ils étoient également distans de lui. Mascur, p. 25. Il paroît par les Annales de Bourgogne de Paradin, L. II, p. 172, qu’en Bourgogne on dit l’âne Burdin, au-lieu de l’âne de buridan, & il rapporte une autre origine de ce proverbe. Calixte II, dit-il, prit prisonnier un Espagnol nommé Burdin, qui avoit été fait Antipape contre Gelase II, par l’Empereur Henri. C’est celui qui prit le nom de Grégoire VIIIe, au commencement du XIIe siécle. Il n’étoit pas Espagnol, mais Limousin mêné en Espagne par Bernard, Archevêque de Tolède, & élevé ensuite à l’Evêché de Crême, on le revêtit d’une peau de chévre sanglante, les cornes élevées sur son front ; on le fit monter sur un chameau, le visage tourné du côté de la queue de la bête, qu’il tenoit de la main en forme de bride, & en cet état on le promena dans Rome. Quelques-uns disent, ajoute Paradin, que le proverbe de l’âne Burdin, fréquent en Bourgogne, prit de-là son origine.