Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CENTON
CENTON. s. m. Ouvrage composé de plusieurs vers ou passages empruntés d’un ou de plusieurs Auteurs. Cento. Proba Falconia a écrit la vie de J. C. en centons tirés de Virgile. Etienne de Pleurre, Chanoine régulier de Saint Victor de Paris, a fait la même chose. Son ouvrage est approuvé par deux Docteurs de la Faculté de Théologie de Paris, qui disent que cet Auteur a fait des couronnes à J. C. & aux saints Martyrs, de l’or de l’Idole de Moloch. Voici un exemple de ces centons sur l’adoration des Rois.
6 æ. 255 | Ecce autem primi sub lumine folis & ortus, | |
2 æ. 694 | Stella facem ducens multa cum luce cucurrit. | |
5 æ. 526 | Signavitque viam* cœli in regione serena | 8 æ. 528 (1) Magi. 1 g. 415 |
8 æ. 330 | Tum(1) Reges* (credo quia sit divinitùs illis | |
1 g. 416 | Ingenium, & rerum fato prudentia major)
| |
7 æ. 98 | Externiveniant,* quæ cuique est copia læti | 5 æ. 100 |
11 æ. 333 | Munera portantes : * molles sua thura Sabæi, | 1 g. 57 |
3 æ. 464 | Dona dehinc auro gravia, * myrtâque madentes | 12 æ. 100 |
9 æ. 659 | Agnovere Deum * Regem regumque parentem. | 6 æ. 548 |
1 g. 418 | Mutavere vias, * perfectis ordine votis | 3 æ. 548 |
6 æ. 16 | Insuetum per item, * spatia in sua quisque recessit. | 12 æ. 126 |
Ausone a prescrit des règles pour composer des centons : il faut prendre, dit-il, des morceaux détachés du même Poëte, ou de plusieurs : on peut partager un vers, & en lier la moitié à une autre moitié prise ailleurs, ou employer le vers tout entier ; mais il n’est pas permis d’insérer deux vers suivis, & pris dans le même endroit. Il a fait un infâme centon, tiré de Virgile. Lélio Capiluppi a fait plusieurs Poëmes latins en centons.
☞ On dit un centon d’Homère, de Virgile, pour dire ; composé des vers de ces Poëtes : & le centon d’Ausone ; pour dire, dont Ausone est l’auteur.
On appelle aussi, par extension, centon, un ouvrage rempli de morceaux dérobés. Les politiques de Lipse ne sont que des centons, où il n’a ajoûté que les conjonctions & les particules.
Ce mot vient du latin cento, qui signifie un manteau rapetassé, fait de pièces rapportées, & celui-ci vient du grec κεντόνιον. Les soldats Romains se servoient de ces centons ou vieilles étoffes ramassées, pour se garantir des traits des ennemis.