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Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CHANOINESSE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 430-431).
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CHANOINESSE. s. f. Fille qui possède une prébende affectée à des filles par la fondation, sans qu’elles soient obligées de renoncer à leur bien, ni de faire aucun vœu. Canonica virgo, Canonica. On n’en voit guère qu’en Flandre, en Allemagne & en Lorraine. Les Chanoinesses de Remiremont. C’est aujourd’hui plutôt un Séminaire, & une retraite honnête de filles à marier, qu’un engagement pour le Service de Dieu. Le Concile d’Aix-la-Chapelle en 816, fit une règle pour les Chanoinesses, comprise en 28 articles. Elle est dans l’édition des Conciles du P. Labbe, T. VII, p. 1406. C’est le IIe Liv. du Concile d’Aix. Le premier est la règle des Chanoines.

Chanoinesse de S. Augustin, est une sorte de Religieuses qui suit la règle de S. Augustin, & qui est habillée de serge blanche, avec un surplis de toile fine sur sa robe, un voile noir sur sa tête, & quelques-unes une aumusse sur le bras. Canonica sancti Augustini regulæ addicta, mancipata. Les Chanoinesses de saint Augustin sont fondées, & plusieurs d’entr’elles ont des Abbesses.

Quant à l’origine des Chanoinesses Régulières, on ne peut dire que S. Augustin soit leur instituteur. A la vérité il établit des Religieuses à Hippone ; & elles purent s’appeler Chanoinesses, Canonicæ ; parce que c’étoit alors la coutume tant en Orient qu’en Occident, d’appeler Chanoines & Chanoinesses tous les Ecclésiastiques, Moines, Religieuses, Vierges, bas Officiers de l’Eglise, domestiques des Monastères, & généralement tous ceux qui étoient compris dans la matricule ou catalogue appelé canon. Le P. Le Large, Chanoine Régulier de France, avoue cet usage ; mais il soutient que depuis le VIe siècle, il y a eu en Occident des Chanoinesses différentes des Moniales, fondées sur l’établissement d’un Monastère fait par saint Fridolin à Seking, où il mit des Chanoinesses. Mais Baker, Moine de Seking, du Xe siècle, qui seul rapporte ce fait, ne semble pas à d’autres devoir être cru. Les Chanoinesses, disent-ils, étoient inconnues au commencement du VIIIe siècle. Le Concile tenu en Allemagne l’an 742, ordonna que tous les Religieux & les Religieuses suivroient la règle de S. Benoît. Le Capitulaire de Charlemagne de l’an 779 fit la même chose, sans faire aucune mention de Chanoinesses. Ce n’est qu’à la fin du même siècle qu’on en trouve quelques vestiges, Voyez le Concile de Francfort de l’an 794, canon 47, & l’Assemblée d’Aix-la-Chapelle en 802. Le Concile de Châlon-sur-Saône l’an 813 fit des règles pour les Chanoines & pour les Chanoinesses, aussi bien que celui d’Aix-la-Chapelle en 816. Par ces règles, il ne paroît point que ni les uns ni les autres passassent pour enfans de S. Augustin. Au contraire, celle des Chanoinesses est tirée de S. Jérôme, de S. Cyprien, de S. Athanase & de S. Césaire. Il n’y est point parlé de la règle de S. Augustin. Le Concile de Rome tenu en 1060, par Nicolas II, nous apprend que jusqu’à cette année l’Institut de ces sortes de Chanoinesses n’avoit été reçu dans aucun endroit d’Asie, d’Afrique, ni même d’Europe, excepté dans un petit coin de l’Allemagne ; & qu’avant Louis le Débonnaire toutes les Religieuses, quelque part qu’elles fussent, suivoient la règle de S. Benoît. Ainsi l’on voit & le temps & le lieu de leur institution.

Dès le temps de S. Basile le Grand, le nom de Chanoinesse étoit en usage. Il y avoit à Césarée de Cappadoce un Monastère de Vierges que ce Père appelle Chanoinesses ou Canoniques. Voyez l’Histoire Ecclésiastique de M. Fleury, Liv. XVII, n. 9.

On ne peut rien dire de certain touchant l’origine des Chanoinesses séculières. Il y a plusieurs Abbayes, où pour le moins l’Abbesse, avant que de recevoir la bénédiction Abbatiale, doit s’engager & s’engage en effet à la Règle de S. Benoît. Cette obligation des Abbesses, & de toutes celles qui occupent les premières dignités, porta le P. Hélyot à croire que les Chanoinesses ont été dans la même obligation, & qu’elles ne sont venues à cet état de liberté qu’elles ont présentement, que par le relâchement qui s’y est introduit peu à peu. Et en effet, il est sûr que les Chanoinesses de Remiremont, de Nivelles & d’Andennes étoient autrefois régulières ; préjugé bien fort pour les autres. C’est aussi le sentiment du P. Mabillon. On ne commença à reconnoître ces filles en France sous le nom de Chanoinesses, qu’au neuvième siècle. Le Concile d’Aix-la-Chapelle fit en 816 des réglemens pour des filles qui n’étoient pas soumises à la desappropriation, & que le P. Thomassin croit avoir été ces Chanoinesses que le Cardinal de Vitry dit être tombées en décadence. Sur quoi le P. Thomassin dit que si ces Chanoinesses eussent été de quelque institut régulier, ce Cardinal n’eût pas manqué cette circonstance. Mais ce n’est pas-là une preuve qu’elles fussent séculières, comme elles le sont aujourd’hui ; & les réglemens du Concile sont tels, qu’ils ne conviennent point à des séculiers. En 1549 le second Concile de Cologne fit aussi des réglemens pour elles. Boniface VIII en avoit aussi fait, mais en déclarant qu’il n’approuvoit point par-là leur institut. Clément V déclara la même chose, en les soumettant à la visite des Evêques, si elles ne sont pas exemtes. Honorius IV ayant appris que ces Chanoinesses séculières avoient été autrefois établies à Andennes par Guy, Comte de Flandre, à condition qu’on y feroit des preuves de noblesse, & que sept personnes nobles l’assureroient avec serment, il cassa ce Statut, comme donnant occasion à une infinité de parjures. Il paroît néanmoins par un titre qu’Aubert le Mire a donné, que ce fut Philippe, Marquis de Namur, qui, l’an 1207, ordonna qu’à l’avenir on ne recevroit à Andennes que des Chanoinesses nobles, & qui auront fait preuve de leur noblesse. P. Hélyot, Tom. VI, c. 50.

Les Chapitres des Chanoinesses sont ceux de Remireront, d’Epinal, de Poussay, de Bouxieres en Lorraine, de Saint-Pierre & de Sainte-Marie à Metz, de Cologne, de Lindaw ; de Buohaw en Allemagne, d’Odermunster, de Nidermunster à Ratisbonne, d’Essen, d’Andlaw, de Hombourg, de Saint-Etienne à Strasbourg, de Nivelle, de Mons, de Maubeuge, de Denain, d’Andennes, de Munster-Bellise aux Pays-Bas, de Gendersheim, de Quedlimbourg, de Herford & de Gerenrode en Allemagne. Ces quatre derniers Chapitres de Chanoinesses sont Protestans. Voyez le sixième tome du P. Hélyot, ch. 51, 55.