Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/DÉRIVE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 250-251).
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DÉRIVE. s. f. Terme de Marine. Différence du rumb de vent où l’on va, à celui ou l’on veut aller ; biaisement d’un vaisseau qui ne porte pas à sa route, & qui le fait aller par un autre rumb de vent que celui par lequel on doit aller ; fausse route, ou détour forcé qu’on fait de son vrai chemin par la violence des vents, des courans, ou de la marée. Lorsque le vent pousse un vaisseau de côté, il le fait avancer sur un autre air de vent que celui auquel il présente la proue, ou l’avant, & cet écartement est ce qu’on appelle la dérive. Deflexio, declinatio. Lorsque l’angle d’incidence que le vent fait avec le vaisseau est du côté de la poupe ou de l’arrière, la dérive n’est pas grande mais, quand cet angle d’incidence est du côté de l’avant du vaisseau, la dérive est plus grande. L’angle au plus près du vent, qui est ordinairement de six quarts de vent, donne environ un quart de vent de dérive, quand on a les quatre grandes voiles majeures, & que la mer est belle ; mais on a davantage de dérive, lorsqu’on n’a que les basses voiles. L’angle de la dérive d’un vaisseau est le même que l’angle que fait sa trace derrière lui avec sa quille que l’on conçoit prolongée, cet angle se mesure facilement avec un compas de route. Plus les vaisseaux sont fabriqués à plates varanges, & plus ils ont de dérive. Bouguer. La dérive est la cause la plus ordinaire qui fait que les Pilotes se trompent dans leur estime. On dit, avoir un quart de dérive, c’est perdre un quart de vent sur la route que l’on fait. La dérive vaut la route, c’est-à-dire, que la dérive que fait le vaisseau, le porte sur la route que l’on veut faire. Combien y a-t-il de dérive ? c’est demander au Pilote la différence qu’il y a de la route que l’on fait, à celle qu’on semble faire. Que vaut la dérive ? On dit encore, il y a belle dérive, c’est à-dire, qu’on est assez éloigné des côtes pour n’avoir rien à craindre de la terre. En général, on dit d’une chose qui va au gré du vent & du courant, qu’elle va à la dérive.

On appelle encore dérive, la distance ou la quantité de brasses qu’il y a entre un lieu où l’on se trouve sur mer, & celui où l’on a jeté le plomb auparavant. Dérive est aussi un assemblage de planches que les navigateurs du Nord mettent à côté de leurs petits bâtimens pour empêcher qu’ils ne dérivent.