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Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/DOUAIRE

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Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 441-442).
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DOUAIRE. s. m. Biens que le mari assigne à sa femme en se mariant, pour en jouir par usufruit pendant sa viduité, & en laisser la propriété à ses enfans. Usufruit d’une certaine portion des biens du mari, que la femme doit prendre quand elle survit. Usus fructus certæ cujusdam partis bonorum mariti quæ superstiti uxori conceditur. Cet avantage n’est point fait à la femme, par le mari pour la récompenser, comme quelques-uns le disent, des biens qu’elle lui a apportés en dot, puisque le douaire est accordé à celle qui n’a rien apporté en mariage, ou qui n’a point réellement apporté en dot ce qu’elle, ou une autre personne, avoit promis d’apporter au mari. Ferr.

☞ Le douaire n’est pas non plus fondé sur la raison qu’en donne Cujas, ut præmium habeat defloratæ virginitatis ; puisque les femmes veuves, qui se remarient, ont un douaire, aussi-bien que celles qui contractent leur premier mariage.

☞ D’ailleurs la consommation du mariage n’est pas nécessaire pour le gain du douaire, excepté dans quelques Coutumes, qui portent expressément qu’au coucher la femme gagne son douaire.

☞ On peut dire, avec plus de raison, que cet avantage est fait par le mari à la femme, afin que celle qui contracte mariage soit sûre d’avoir des alimens sur les biens de son mari, pour la récompenser des soins & des peines qu’elle prend pour son ménage, pour élever ses enfans, & pour l’augmentation & la conservation des biens communs.

Le douaire préfix, est celui qui consiste en une certaine rente, ou somme d’argent, ou en quelque terre : ou héritage affecté au douaire. Douaire coutumier, est la moitié de tous les biens qu’a le mari le jour de son mariage, lequel a lieu quand on n’a point stipulé de douaire préfix. En Normandie c’est le tiers en usufruit. Chez les Gots le douaire n’étoit que la dixième partie des biens du mari ; chez les Lombards, la quatrième ; chez les Romains & Siciliens, la troisiéme. Le douaire est si privilégié, qu’un décret ne le purge pas, & son hypothèque demeure toujours. On dit, en proverbe, Jamais mari ne paya douaire, c’est-à-dire, que la mort civile du mari ne donne pas lieu à la demande du douaire. Louet. Ce proverbe n’est pas vrai en Normandie, où la mort civile donne ouverture au douaire. Il y a des femmes qui font du mariage un commerce d’intérêt, qui ne se marient que pour gagner des douaires, & pour s’enrichir de la dépouille de leurs maris. Mol. Avant Philippe-Auguste, il y en avoit en France un douaire ; mais la femme ne le pouvoit prétendre à moins qu’il n’eût été promis : ce Prince voulut que, sans convention, le douaire fût réglé à la moitié des propres du mari.

Douaire sans retour, Est le droit de propriété du douaire qu’a la femme quand il est stipulé sans retour en sa faveur ; en cas qu’elle survive à son mari.

Ce mot vient du Latin dotarium.