Dictionnaire de l’administration française/AFFICHE

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AFFICHE. 1. Placard écrit, imprimé ou peint, que l’on expose en un lieu public pour répandre un avis quelconque.

On distingue deux genres d’affiches : celles de l’autorité et celles des particuliers.

2. Les affiches de l’autorité sont : 1o les affiches apposées par suite de prescriptions légales ou en vertu de jugements ; 2o celles apposées par ordre du Gouvernement et de l’administration.

3. Les affiches légales et judiciaires sont ordonnées par les lois dans une foule de cas ; par exemple, en matière civile, pour les publications de mariage, les séparations de biens, les rétablissements de communauté, les adoptions, les envois en possession de certaines successions, les ventes de propriétés appartenant à des absents, des mineurs, des interdits ; en matière commerciale, pour les actes constatant la formation des sociétés en nom collectif, en commandite, anonymes, pour les demandes en réhabilitation ; en matière criminelle, pour les arrêts qui prononcent la peine de mort, des travaux forcés à perpétuité ou à temps, la déportation, la détention, la réclusion, la dégradation civique et le bannissement.

4. Les affiches du Gouvernement et de l’administration, qu’on pourrait nommer aussi officielles, varient à l’infini, depuis les proclamations du Gouvernement jusqu’aux arrêtés pris par les maires des plus petites communes. Chaque administration publie les affiches pour les matières de son ressort ; soit, par exemple, lorsqu’il s’agit d’une enquête de commodo et incommodo ou simplement à l’occasion d’adjudications de travaux publics et de fournitures nécessaires aux différents services, de ventes opérées par le domaine ou les forêts, etc. D’autres reviennent périodiquement, comme les ordonnances de police concernant la sûreté, la salubrité, la circulation, la chasse. L’annonce d’un événement, d’une victoire, le programme d’une fête, d’une cérémonie publique, peuvent aussi donner lieu à la publication d’affiches de la part de l’autorité.

5. Les affiches de l’autorité sont imprimées sur papier blanc. (Loi 22-28 juillet 1791.) Mais il ne s’agit ici que de publications concernant un intérêt général, d’une prescription ou d’une autre manifestation autoritaire. En effet, selon l’instruction du 24 mars 1866, de la direction générale de l’enregistrement, les affiches concernant l’administration des biens, l’exécution des travaux ou de toute autre entreprise d’une société, d’un établissement public, d’une commune ou d’un département, doivent être sur papier de couleur et timbrées, quoique signées par un magistrat de l’ordre administratif. C’est que ces affiches répondent à un intérêt particulier. (Voy. plus loin les nos 15 et suivants.)

6. Les affiches électorales sont imprimées sur papier de couleur, mais ne sont pas assujetties au timbre. La loi du 11 mai 1868, art. 3, n’accorde cette juste et indispensable exemption qu’aux affiches émanées des candidats, mais après 1870 les affiches des Comités électoraux semblent avoir joui des mêmes immunités.

7. C’est le pouvoir municipal qui désigne les lieux destinés à recevoir les affiches de l’autorité, à moins que les lois n’aient indiqué des endroits spéciaux.

8. Il ne peut être affiché sur les édifices consacrés au culte que les annonces relatives aux cérémonies de ce culte. Toutefois, cette règle n’est pas sans exception ; aux termes des articles 6, 15, 21 de la loi du 3 mars 1841, les actes relatifs à l’expropriation pour cause d’utilité publique doivent être affichés à la principale porte de l’église. L’art. 6 du décret du 7 août 1848 prescrit, en outre, d’afficher sur la porte de l’église la liste des jurés pour chaque commune ; mais hors les cas prévus par les lois précitées, l’apposition des affiches sur les édifices consacrés au culte doit être interdite.

9. Ceux qui enlèvent ou déchirent méchamment les affiches apposées par ordre de l’autorité, sont punis d’une amende de 11 à 15 fr. inclusivement. (C. P., art. 479, no 9.)

10. En ce qui concerne les particuliers, le droit d’affichage n’a pas d’autres limites que celles qui lui sont assignées par les lois et règlements de police. Les restrictions apportées à ce droit sont de deux natures : les unes ont pour but d’empêcher tout ce qui pourrait porter atteinte à la morale, à l’ordre et à la tranquillité publique ; les autres sont purement fiscales.

11. Il est interdit à tout citoyen et à toute réunion de citoyens de faire afficher aucun acte sous le titre d’arrêté, de délibération ou sous toute autre forme impérative, à peine d’une amende de 100 fr. (L. 18-22 mai 1791.)

Aucun écrit manuscrit, imprimé, gravé ou lithographié, contenant des nouvelles politiques ou traitant d’objets politiques, ne peut être placardé dans les lieux publics. (L. 10 décembre 1830.)

12. Toute apposition, faite sciemment, d’affiches dans lesquelles ne se trouvent pas l’indication vraie des noms, profession et demeure de l’auteur et de l’imprimeur, est punie d’un emprisonnement de six jours à six mois. Cette disposition est réduite aux peines de simple police si on fait connaître l’imprimeur. (C. P., art. 283, 284.)

13. Si le contenu de l’affiche provoque à des crimes ou délits, s’il est contraire aux bonnes mœurs, les distributeurs, imprimeurs ou auteurs, sont passibles d’une amende de 16 à 500 fr. et d’un emprisonnement d’un mois à un an. Dans tous les cas, il y a confiscation des affiches saisies. (C. P., art. 285 et suiv.)

14. À Paris, le préfet de police, considérant que des affiches blessant la morale et les convenances publiques étaient chaque jour apposées sur les murs, a décidé, par une ordonnance du 18 mai 1853, que dans le ressort de la préfecture de police aucune affiche ne pourrait être apposée sur les murs ou les clôtures bordant la voie publique, sans avoir été préalablement autorisée. Sont exemptées de cette disposition : 1o les actes de l’autorité et les annonces judiciaires ; 2o les affiches des théâtres, bals et concerts autorisés. (Une circulaire du ministre de l’intérieur du mois de mai 1875, sur les affiches, encourage les maires à suivre cet exemple.)

15. Les affiches des particuliers ne peuvent être écrites ou imprimées que sur des papiers de couleur, sous peine d’une amende de 100 fr. à la charge de l’imprimeur. (L. 22-28 juillet 1791.)

16. Les affiches sont assujetties à un timbre spécial, dont le prix est de 5 centimes par 12 décimètres 1/2 carrés ; de 10 centimes pour des feuilles de 12 décimètres 1/2 à 25 décimètres ; de 15 centimes pour des feuilles de 25 à 50 décimètres, et de 20 centimes au delà de cette dimension. (Loi de fin. 18 juillet 1866.) Ces taxes sont augmentées du double décime.

Dans le cas où une affiche contiendrait plusieurs annonces distinctes, le maximum ci-dessus fixé sera toujours exigible. Le maximum sera doublé si l’affiche contient plus de cinq annonces.

Ceux qui veulent apposer des affiches doivent au préalable présenter les papiers ou les affiches à l’administration du timbre. Sont néanmoins maintenues les pénalités de l’art. 69 de la loi du 28 août 1816 et de l’art. 10 de la loi du 16 juin 1824.

17. Les affiches peintes ont été l’objet de dispositions particulières. La loi de finances du 8 juillet 1852, art. 30, dispose que toute affiche inscrite dans un lieu public, sur les murs, sur une construction quelconque, ou même sur une toile, au moyen de la peinture ou de tout autre procédé, donne lieu à un droit d’affichage fixé à 50 c. pour les affiches d’un mètre carré et au-dessous, et à 1 fr. pour celles d’une dimension supérieure.

18. Tout individu qui veut user de ce mode d’affichage doit en obtenir l’autorisation ; il est tenu d’acquitter le droit au bureau de l’enregistrement, dans l’arrondissement duquel se trouvent les communes où les affiches seront placées. Dans le département de la Seine, des bureaux sont désignés à cet effet. Le droit est perçu sur la présentation d’une déclaration contenant : 1o le texte de l’affiche ; 2o les noms, profession et domicile de ceux dans l’intérêt desquels l’affiche doit être inscrite, et de l’entrepreneur de l’affichage ; 3o la dimension de l’affiche ; 4o le nombre des exemplaires à inscrire ; 5o la désignation des rues et places où chaque exemplaire doit être inscrit.

Les contraventions à l’art. 30 de la loi du 8 juillet 1852 et aux dispositions du règlement du 25 août peuvent être punies d’une amende de 100 à 500 fr., ainsi que des peines portées à l’art. 464 du Code pén.

19. Aucun particulier ne peut apposer des affiches sur les monuments publics, ni aux endroits destinés à celles de l’autorité, à peine d’une amende de 100 fr. Il n’est pas permis non plus d’apposer des affiches sur les murs des particuliers, si le propriétaire y a fait inscrire les mots : défense d’afficher.

20. La destruction des affiches des particuliers ne peut donner lieu qu’à une action civile, c’est-à-dire à des dommages-intérêts, s’il en est résulté un préjudice.

bibliographie.

Code-manuel de la presse, contenant toutes les lois sur l’imprimerie, la presse périodique, l’affichage, etc., par M. Arnaud Ravelet ; 2e édition, in-8o. Paris, Firmin Didot frères, fils et Cie. 1872.

administration comparée.

La loi prussienne du 12 mai 1851, art. 9, est relative aux affiches privées. Ces affiches ne peuvent parler que de réunions licites, des réjouissances publiques, d’objets perdus, de vente, d’achats et de tout ce qui concerne les affaires commerciales.

La loi autrichienne sur la presse, du 17 déc. 1862, art. 23, renferme une disposition semblable et ajoute que les affiches ne peuvent être apposées qu’aux endroits à ce destinés. Le Code pénal, art. 315, punit l’arrachage des affiches de l’autorité.