Dictionnaire de la Bible/Eusèbe

La bibliothèque libre.
Letouzey et Ané (Volume IIp. 2051-2052-2055-2056).
◄  EUROCLYDON
EUTHALIUS  ►

EUSÈBE, évêque de Césarée en Palestine, dit Eusèbe de Pamphile, naquit en 265. Palestinien d’origine, il vint tout jeune se fixer à Césarée, où il jouit longtemps des leçons du prêtre Pamphile, qui y avait ouvert une école théologique célèbre. Dans sa reconnaissance pour son maître, il voulut s’appeler Εὐσέβιος τοῦ Παμφίλου. Lorsque, pendant la persécution de Maximin, Pamphile fut emprisonné pour la foi, Eusèbe l’accompagna dans sa détention jusqu’en 309, date du martyre de Pamphile. Après la mort de son maître, Eusèbe quitta Césarée et s’enfuit à Tyr et en Égypte. Il fut pourtant arrêté et passa dans les fers un temps indéterminé. En 313, il fut élevé sur le siège de Césarée. Très lié avec l’empereur Constantin, il se montra assez faible dans la question de l’arianisme ; mais toutefois au concile de Nicée, en 325, il souscrivit à la formule de l’ὁμοούσιος. En 330, Eusèbe prit part au synode d’Antioche, et, en 335, à celui de Tyr. Il réapparaît ensuite dans les annales de l’histoire pour célébrer par un discours, cette même année 335, la fête du trentenaire de l’avènement de Constantin et, en 337, pour faire son oraison funèbre. Il mourut quelques années plus tard, probablement vers 340. — L’activité littéraire d’Eusèbe fut immense au témoignage de S. Jérôme, De vir. ill., 81, t. xxiii, col. 689. Nous n’avons à signaler ici que l’œuvre exégétique d’Eusèbe. On peut y distinguer ce qui se rapporte à l’exégèse générale et à l’exégèse spéciale.

I. Exégèse générale. — 1o On lit dans la Vie de Constantin écrite par Eusèbe, Vita Constantini, iv, 36, t. xix, col. 1185, que l’empereur demanda à son ami Eusèbe de faire écrire, à l’usage des églises de Constantinople, cinquante exemplaires de la Bible. Eusèbe, loc. cit., iv, 37, se rendit à ce désir et fit copier ces volumes en ternions (τρισσά) et quaternions (τετρασσά). M. Harnack, Geschichte der altchristlichen Litteratur, t. i, p. 572, ne croit pas qu’il se soit agi d’exemplaires complets de la Bible, et pour lui le sens des mots τρισσά et τετρασσά demeure douteux. Toutefois l’opinion de M. Harnack, qui pense qu’Eusèbe a composé pour Constantin une sorte de chrestomathie biblique, est contraire au texte formel de la Vita Constantini. Des érudits se sont livrés à des recherches pour retrouver quelqu’un des exemplaires d’Eusèbe dans les principaux manuscrits bibliques qui nous restent ; ces recherches n’ont pas abouti. Voir E. A. Frommann, De Codicibus sacris jussu Constantini magni adornatis, dans ses Opuscula philologica et historica, Cobourg, 1770, p. 303 ; Wieseler, Die Sinaitische Bibelhandschrift, dans les Theologische Studien und Kritiken, 1864, p. 409, 415, 418 ; Scrivener, A full Collation of the Codex Sinaiticus with the received Text of the New Testament, 1864, p. xxx-xxxvii ; id., Introduction to the Criticism of the New Testament, 4e édit., 1894, p. 118, n. 2 ; Burgon, Last twelve Verses of St. Mark, 1872, p. 293. — 2o En tête d’un grand nombre de manuscrits tant grecs et syriaques que latins de la Bible, on trouve dix tables de concordances des Évangiles qui portent le nom de sections et de canons. Ces tables sont précédées d’une lettre d’Eusèbe à Carpianus. Migne, Patr. gr., t. xxii, col. 1275-1291. On attribuait jadis ces sections à Ammonius, voilà pourquoi elles sont souvent indiquées par l’abréviation Amm. ; mais, en 1827, {{lang|en|Lloyd (Novum Testamentum græcum, Oxford, p. viii-xi ; cf. Burgon, Last Verses, p. 295 ; Tischendorf, Novum Testamentum græcum, Prolegomena de Gregory, Leipzig, 1886, part. i, p. 143-144 ; G. H. Gwilliam, The Ammonian sections, Oxford, 1890, p. 241-272) a démontré qu’elles aussi sont l’œuvre d’Eusèbe. Ammonius d’Alexandrie avait, vers 220, dressé une Concordance ou Diatessaron des Évangiles. Partant du texte de saint Matthieu, il avait placé sur une même ligne les passages qui dans cet Évangile concordent avec les textes parallèles des trois autres. Comme Eusèbe le déclare dans sa lettre à Carpianus, le travail d’Ammonius lui suggéra l’idée du sien ; mais il lui donna une forme personnelle. Ammonius ne donnait en lecture suivie que l’Évangile de saint Matthieu, la suite des autres Évangiles était interrompue. Eusèbe désira fournir le texte continu de tous les récits. Il divisa donc séparément les Évangiles en un certain nombre de sections, ἀριθμοί, 335 pour saint Matthieu, 236 pour saint Marc, 342 pour saint Luc, 232 pour saint Jean. En même temps, il dressait une table de dix canons, κανόνες, dont chacun contenait une liste de textes : le canon i, tous les passages (71) communs aux quatre évangélistes ; le canon ii, ceux (111) qui se trouvent à la fois dans saint Matthieu, saint Marc et saint Luc ; le canon iii indique les textes correspondants (22) de saint Matthieu, de saint Luc et de saint Jean ; le canon iv, ceux (26) qui se répondent dans saint Matthieu, saint Marc et saint Jean ; le canon v a les parallélismes (82) de saint Matthieu et de saint Luc ; le canon vi, ceux de saint Matthieu et de saint Marc (47). Le canon vi compare les Évangiles de saint Matthieu et de saint Jean (7 textes), le canon viii, ceux de saint Luc et de saint Marc (14 passages) ; dans le canon ix on a les passages correspondants (21) de saint Luc et de saint Jean ; enfin le canon x renferme les textes propres à chaque évangéliste, 62 pour saint Matthieu, 21 pour saint Marc, 71 pour saint Luc, 97 pour saint Jean. Dans le texte préparé pour l’usage des sections et des canons d’Eusèbe, chaque section est indiquée par un chiffre à l’encre noire ; sous ce chiffre est marqué un autre au vermillon, pour indiquer le canon auquel se rapporte la section. En consultant le canon ainsi désigné, le lecteur pouvait voir d’un coup d’œil à quel passage des autres évangélistes répondait le texte en question. Exemple : saint Matthieu, xiii, 54, était marqué , c’est-à-dire que la section 141e de saint Matthieu (ρμαʹ) appartient au canon 1 (αʹ). Or dans ce canon on trouve établie la concordance suivante :

ΜΤ ΜΡ Λ ΙΩ
ρμαʹ νʹ ιθʹ νθʹ

c’est-à-dire que la 141e section de saint Matthieu correspond à la 50e (νʹ) de saint Marc, à la 19e (ιθʹ) de saint Luc et à la 59e (νθʹ) de saint Jean. Dans les diverses versions de la Bible, le nombre des sections eusébiennes n’est pas partout le même. Ainsi dans le manuscrit syriaque de la bibliothèque de Médicis, à Florence, écrit en l’an 586, il y a pour saint Jean 270 sections au lieu de 232. M. Burgon, Last Verses, p. 310, a pensé que ce chiffre du manuscrit syriaque pouvait représenter la division primitive adoptée par Eusèbe. Cet avis n’est point partagé par Lightfoot, dans Smith, A Dictionary of Christian Biography, t. ii, p. 335. Du reste, le chiffre des sections, tel qu’il se trouve dans les manuscrits latins, et qui concorde avec le chiffre des manuscrits grecs, est attesté par saint Jérôme. On trouve de bonnes reproductions des canons d’Eusèbe dans le Catalogue of ancient MSS in the British Museum, part. ii, Londres, 1884, fol. 18, et surtout dans A. Valentini, Eusebio, Concordanze dei Vangeli Codice Queriniano, Brescia, 1887. Les canons d’Eusèbe ont été souvent publiés. — 3o Il faut signaler, au point de vue exégétique, la part prise par Eusèbe à la diffusion des travaux d’Origène sur la critique textuelle. Saint Jérôme dit, en effet, dans sa préface Ad Chromalium aux Paralipomènes : Alexandria et Ægyptus in LXX suis Hesychium laudat auctorem, Constantinopolis usque Antiochum Luciani martyris exemplaria probat, mediæ inter has provinciæ Palæstinos codices legunt, quos ab Origene elaboratos Eusebius et Pamphilus vulgaverunt. Sixte de Sienne, Bibliotheca sacra, édit. de Cologne, 1576, t. iv, p. 245, avait entendu par là qu’Eusèbe aurait fait une nouvelle recension des Hexaples d’Origène. Il ne s’agit point de cela, car les rubriques d’un certain nombre de manuscrits des Hexaples d’Origène font penser qu’Eusèbe exécuta seulement plusieurs copies soit complètes, soit abrégées de ce travail, en y ajoutant quelques notes et corrections. Voir Huet, Origeniana, III, xxiv, 8 ; Ehrhard, dans la Römische Quartalschrift, t. vi, 1891, p. 226-238 ; Harnack, Geschichte der altchristl. Litteratur, t. i, p. 337, 543, 574. — 4o On peut ranger parmi les travaux exégétiques d’Eusèbe de multiples essais sur la topographie des Lieux Saints. Quatre de ces œuvres sont connues ; mais les trois premières ne sont pas parvenues jusqu’à nous, seule la quatrième a survécu. Ces essais sont : 1° Une étude sur la terminologie ethnographique de la Bible hébraïque : Καὶ πρῶτα μέν τῶν ἀνὰ τὴν οἰκουμένην ἐθνῶν ἐπὶ τὴν Ἑλλάδα φωνὴν μεταβαλὼν τὰς ἐν τῇ θείᾳ γραφῇ κειμένας Ἑβραίοις ὀνόμασι προσρήσεις. — 2. Une chorographie de l’ancienne Judée, indiquant les frontières des pays occupés par les dix tribus : Τῆς πάλαι Ἰουδαίας ἀπὸ πάσης βίβλου καταγραφήν πεποιημένος καὶ τὰς ἐν αὐτῇ τῶν δώδεκα φυλῶν διαιρῶν κλήρους ; ce traité est peut-être celui qu’Ébed Jesu (Assemani, Bibl. or., t. iii, p. 18) appelle De figura mundi. — 3. Un plan de Jérusalem et du Temple : Ὡς ἐν γραφῆς τύπῳ τὴς πάλαι διαβοήτου μητροπόλεως αὐτῶν, λέγω δὴ τὴν Ἱερουσαλήμ, τοῦ τε ἐν αὐτῇ ἱεροῦ τὴν εἰκόνα διαχαράξας. Ce plan devait être accompagné de dissertations sur les diverses localités, μετὰ παραθέσεως τῶν εἰς τοὺς τόπους ὑπομνημάτων. C’est Eusèbe lui-même qui décrit, dans les termes que nous venons de citer, ces trois essais topographiques. D’après Lightfoot, A Dictionary of Christian Biography, t. ii, p. 336, ces trois écrits n’étaient peut-être que les parties d’un même ouvrage, du quatrième travail topographique d’Eusèbe, intitulé Περὶ τῶν τοπικῶν ὀνομάτων τῶν ἐν τῇ θείᾳ γραφῇ. Eusèbe dit qu’il a voulu donner la liste alphabétique des villes et des villages cités dans la Sainte Écriture en leur langue originale, πατρίῳ γλώττῃ. Les noms de lieux ne sont donc pas présentés sous la forme qu’ils ont dans la version des Septante, mais suivant une transcription de l’hébreu plus ou moins heureuse. L’ordre alphabétique a été suivi ; mais, sous chaque lettre, les divers mots arrivent d’après l’ordre des livres de la Bible. Ce traité fut de bonne heure traduit en un latin que saint Jérôme caractérise de la façon suivante : Quidam vix imbutus litteris… ausus est in latinam linguam non latine vertere. Patr. lat., t. xxiii, col. 860. Aussi saint Jérôme fit-il une nouvelle version ou plutôt une nouvelle recension, car il retranche plusieurs notices et en modifie d’autres. Les Topica d’Eusèbe ont été publiés pour la première fois en 1631, par Bonfrère ; les deux éditions les plus récentes et qui ne laissent rien à désirer au point de vue de la critique sont celles de Larsow et Parthey, Eusebii Pamphili episcopi Cesariensis Onomasticon, Berlin, 1862, et de Paul de Lagarde, Onomastica sacra, Gœttingue, 1870, p. 207 ; 2e édit., 1887, p. 232. — 5o Sous le titre de Ἐκ τῶν τοῦ Εὐσεβίου τοῦ Παμφίλου περὶ τῆς τοῦ βιβλίου τῶν προφητῶν ὀνομασίας, « Eusèbe a donné une courte notice sur les prophètes et le sujet de leurs prophéties, en commençant par les petits prophètes et en suivant l’ordre des Septante. Ce traité fut publié pour la première fois par T. Curterius, Procopii Sophistæ variarum in Isaiam prophetam commentationum epitome, Paris, 1560 ; puis par Migne, t. xxii, col. 1261-1272. Sur le manuscrit no 2125 du Vatican, qui a servi à cette édition, voir Mai, Nova Patrum blibliotheca, t. iv, p. 66. M. Harnack, op. cit., p. 575, n’est pas convaincu que cet ouvrage soit d’Eusèbe.

II. Exégèse spéciale. — 1o Montfaucon a publié d’Eusèbe Ἐξηγητικὰ εἰς τοὺς Ψαλμοὺς (Collectio nova Patrum, t. i) ; mais le manuscrit d’Évreux, dont il s’est servi, s’arrête au Psaume cxviii et a une lacune des Psaumes xlviii à lxxx. On peut combler cette lacune par le Codex Coislin no 12 de la Bibliothèque Nationale de Paris, qui renferme l’interprétation des Psaumes l-xcv, et le cardinal Mai, Nova Patrum blibliotheca, t. iv, 1, p. 65-107, a publié l’explication des Psaumes cxix-cl. Pitra, Analecta sacra, t. iii, 1887, p. 365, 520, a édité une recension différente d’un commentaire sur cent dix-huit Psaumes. L’ensemble est reproduit par Migne, t. xxiii, col. 65-1396 ; t. xxiv, col. 9-76. La plupart des éditeurs de ce commentaire en ont admis l’entière authenticité ; de même Lightfoot, A Dictionary of Christian Biography, t. ii, p. 336. Seul M. Harnack, op. cit., p. 575, conserve quelques doutes, et certes, quand on compare la recension publiée par Pitra avec celle qu’a donnée Montfaucon, la question mérite un nouvel examen, plus approfondi que celui qu’on en a fait jusqu’à ce jour. Lightfoot s’efforce, par certaines données du commentaire, de fixer exactement l’époque de sa composition entre les années 330 et 335. Au témoignage du même auteur, l’ouvrage d’Eusèbe a une réelle valeur, surtout par les extraits des Hexaples et d’autres indications curieuses sur le texte et l’histoire du Psautier. Eusèbe avait, pour faire ce travail, l’avantage de connaître l’hébreu ; sa philologie toutefois n’est point exempte d’erreurs parfois assez grossières. Ce commentaire sur les Psaumes a joui dans l’antiquité d’une grande réputation ; il fut traduit en latin par un homonyme, Eusèbe de Verceil ; cette version n’a pas été retrouvée. — 2o Ὑπομνήματα εἰς Ἡσαΐαν. Montfaucon, Collectio nova Patrum, t. ii, Migne, t. xxiv, col. 77-526. Ces commentaires se présentent en partie sous forme de dissertation continue et en partie sous forme d’extraits de Chaînes. D’après saint Jérôme, De vir. illustr., 81, t. xxiii, col. 689, ce traité aurait compris dix livres ; d’après un autre passage du même auteur, Comment. in Isaiam, t. xxiv, col. 21, il y en aurait eu quinze. M. Harnack, op. cit., p. 576, conserve des doutes sur l’authenticité de cette œuvre d’Eusèbe, du moins pour la forme sous laquelle nous la possédons aujourd’hui. — 3o Le cardinal Mai, Nova Patrum blibliotheca, t. iv, 1, p. 316 ; puis Migne, Patr. gr., t. xxiv, col. 75-78, ont publié des fragments sur les chapitres vii et viii du livre des Proverbes. M. Harnack, op. cit., p. 576, signale des suppléments à ce travail dans divers manuscrits d’Allemagne et d’Angleterre. — 4o Des fragments d’un commentaire sur Daniel ont été édités par Mai, Nova Patrum blibliotheca, t. iv, 1, p. 314-316, ainsi que dans Commentarii variorum in Danielem (Scriptorum veterum nova collectio, t. i, p. 39-56), et par Migne, t. xxiv, col. 525-528. — 5° On possède d’Eusèbe un commentaire sur l’Évangile de saint Luc. Il a été publié par Mai, Nova Patrum blibliotheca, t. iv, 1, p. 160-207 ; Script. vet. nova collectio, t. i, 1, p. 143-260, et par Migne, t. xxiv, col. 527-606. Ce commentaire a été extrait de diverses Chaînes. — 6° Du commentaire sur la première Épître aux Corinthiens, signalé par saint Jérôme, Epist. xlix, 3, ad Pammachium, t. xxii, col. 511, il ne reste que le fragment sur I Cor., iv, 5, publié par Crammer, Catenæ græcæ, Oxford, 1841, p. 75. — 7o Un fragment d’interprétation de Hebr., xii, 8, a été publié par Mai, Nova Patrum blibliotheca t. i, 1, p. 207 ; cf. Migne, t. xxiv, col. 605-606. On ignore toutefois si ce passage est vraiment tiré d’un commentaire complet d’Eusèbe sur l’Épître aux Hébreux, ou bien si c’est un simple extrait d’un autre de ses ouvrages. — 8o Dans le De Vir. illust., 81, saint Jérôme cite un ouvrage d’Eusèbe : Περὶ διαφωνίας εὐαγγελίων. Voir aussi Id., Comm. in Matth., i, 1, t. xxvii, col. 3. Dans le catalogue d’Ébed Jesu, Assemani, Biblioth. orient., t. iii, p. 18, traduit ce titre : [Liber] solutionis contradictionum quse sunt in Evangelio. Cet ouvrage était divisé en deux parties, et la seconde comprenait deux livres. La première partie (cf. Eusèbe, Demonst. evang., vii, 3, 18, t. xxii, col. 556), portait surtout sur les divergences que présentent les Évangiles dans le tableau de la généalogie du Christ ; la seconde partie s’occupait de certaines contradictions que semble accuser le récit de la résurrection. Un scholiaste de saint Marc (voir R. Simon, Histoire critique du Nouveau Testament, t. iii, Rotterdam, 1693, p. 89) cite d’Eusèbe un ouvrage sous ce titre : Περὶ τῆς δοκρύσνς ἐν τοῖς εὐαγγελίοις περὶ τῆς ἀναστάσεως διαφωνίας. Au xviie siècle, on crut avoir retrouvé cette œuvre d’Eusèbe en Sicile, d’après une lettre de Latino Latini à André Masius, Epistolæ, Wittemberg, 1667, t. ii, p. 116. Ce manuscrit n’a pas encore été retrouvé. C’est le cardinal Mai qui a le premier, en 1825, publié un abrégé de l’ouvrage d’Eusèbe (Script. vet. nova collectio, t. i, 1, p. 1-51) ; en 1847, il republia le même texte (Nova Patrum bibl., t. iv, p. 217-282), en y ajoutant, ibid., p. 268-271, 279-282, 283-303, des fragments de l’ouvrage complet tant en grec qu’en syriaque, extraits de Chaînes manuscrites et imprimées. Sur ce travail du cardinal Mai, on peut consulter Burgon, Last twelve Verses of St. Mark, p. 42. Migne, t. xxii, col. 878-1015, a reproduit ce traité d’Eusèbe. « On retrouve dans cet ouvrage, dit Lightfoot, op. cit., t. ii, p. 338, l’hésitation habituelle à Eusèbe, et cela sous une forme plus aggravée que de coutume. Des solutions contradictoires sont fréquemment présentées, sans qu’il se décide pour l’une plutôt que pour l’autre. Toutefois c’est un ouvrage suggestif et plein d’intérêt. Les harmonistes des Évangiles l’ont souvent pillé sans le citer, et en particulier saint Jérôme (par exemple, Epist. lix, 120) y fait de nombreux emprunts. » Mai a relevé ces emprunts de saint Jérôme et ceux de saint Ambroise. Nova Patrum bibl., t. iv, p. 304-309. — 9o Eusèbe a écrit un ouvrage intitulé Ἡ καθόλου στοιχειώδης εἰσαγωγή, ou « Introduction générale élémentaire ». Cet ouvrage comprenait dix livres, comme Eusèbe nous l’apprend lui-même. Patr. gr., t. xxii, col. 1271. De ces dix livres on n’a de complets que les livres vi-ix, connus sous le nom de Ἐκλογαὶ προφητικαί. Du commencement, Mai a publié quelques fragments, Script. vet. nova collectio, t. vii, p. 95, 100 ; Nova Patr. bibl., t. iv, 1, p. 316-317. Longtemps perdues, les Ἐκλογαὶ προφητικαί avaient été signalées par Lambecius, Comment. de bibl. Vindobonensi, t. i, p. 252 ; elles ont été publiées la première fois par Th. Gaisford, à Oxford, en 1842, et ensuite par Migne, Patr. gr., t. xxii, col. 1021-1262. On peut lire sur ce traité de bonnes notes critiques de Nolte, dans la Theologische Quartalschrift, t. xliii, 1861, p. 95-109, et de W. Selwyn, dans le Journal of Philology. t. IV, 1872, p. 275-280. Ce traité contient des extraits des prophéties de l’Ancien Testament relativement à la personne et à l’œuvre du Christ ; ces extraits sont accompagnés de commentaires explicatifs. Des quatre livres dont se compose l’ouvrage, le premier donne les prophéties messianiques des livres historiques de l’Ancien Testament, le second celles des Psaumes, le troisième celles des livres poétiques et des prophètes, à l’exception d’Isaïe, dont les prophéties font l’objet du livre iv. Le but principal de l’auteur est, comme il s’en explique, de montrer que les prophètes ont affirmé Jésus-Christ comme le Verbe préexistant, qui est la seconde cause de l’univers, qui est Dieu et Seigneur et a prédit son double avènement. C’est donc la personnalité du Verbe qui fait l’idée dominante du commentaire des prophéties composé par Eusèbe. — Telles sont les œuvres exégétiques d’Eusèbe connues et publiées jusqu’à ce jour. Les manuscrits renferment encore, au témoignage de M. Harnack, » op. cit., p. 577, des fragments sur les prophètes en général et les petits prophètes en particulier et un commentaire sur le Cantique des cantiques. Ce que Meursius a publié, Eusebii, Polychronii, Pselli in Canticum canticorum, Leyde, 1617, n’a rien à voir avec Eusèbe.

J. van den Gheyn.