Dictionnaire de théologie catholique/ANOMÉENS

La bibliothèque libre.
Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant et Eugène MangenotLetouzey et Ané (Tome 1.1 : AARON — APOLLINAIREp. 679-681).
◄  ?
?  ►

nauld et Nicole répondirent à cet ouvrage ; — Jansenius a thomistis gratiæ per seipsam efficads defensoribus condemnatus, in-4o, Paris, 1653 ; Noël de la Lane critiqua ce traité ; — Cavilli J ansenianorum contra latam in ipsos a Sede apostolica sententiam, in-4o, Paris, 1654. Il fut traduit en français et de la Lane l’attaqua. — Il serait trop long de citer tous les autres ouvrages publiés par le Père Annat en français, contre les jansénistes ; le plus considérable est La conduite de l’Église et du roi justifiée dans la condamnation de l’hérésie des jansénistes, in-4o, Paris, 1664. En 1661, il prit part à une polémique qui fut provoquée par une thèse sur l’infaillibilité du pape, soutenue le 12 décembre 1661 par le Père Jacques Coret, S. J., au collège des jésuites de Paris. Tous les tenants du gallicanisme s’élevèrent contre elle avec fureur. Le Père Annat ne put les convaincre par son Expositio theseos. Arnauld et Nicole se distinguèrent parmi ses adversaires. L’ouvrage le plus important laissé par le jésuite est Opuscida theologica ad gratiam speclantia, 3 vol. in-4o, Paris, 1666, où sont insérés quelques-uns des traités cités plus haut.

De Backer et Sommervogel, Bibl. de la C" de Jésus, t. I, col. 399-410 ; t. viii, col. 1658-1659.

C. Sommervogel.

2. ANNAT Pierre, né en 1638, mort en 1715, est le neveu du précédent. A l’exemple de son oncle, Pierre professa la philosophie à Toulouse, et s’adonna spécialement à l’étude de la théologie positive pour laquelle il composa une vaste introduction sous le nom d’Apparatus ad positivant theologiani methodicus, 2 vol. in-4o, Paris, 1700, 1705 ; Venise, 1717, 1725, 1744, 1766, 1775 ; Bamberg, 1755. Ces nombreuses éditions attestent suffisamment la valeur de l’ouvrage, bien que plusieurs de ses opinions quelque peu hasardées l’aient fait condamner par le Saint-Office le 31 janvier 1713 ; mais l’ouvrage corrigé fut autorisé par décret du 3 octobre 1714. Il se divise en 7 livres ainsi disposés : 1° nature propre de la théologie positive et de la théologie scolastique ; 2° Écriture sainte ; 3° tradition ; 4° principaux Pères de l’Église ; 5° conciles ; 6° constitutions papales et décisions de l’Église ; 7° hérésies, et, par manière d’épilogue, une dissertation détaillée sur le collège des cardinaux. L’auteur de V Apparatus était supérieur général de la congrégation de la doctrine chrétienne.

Feller, Biographie universelle, Paris, 18’15, t. III, p. Il ; Michaud, Biographie univers, anc. et mod., Paris, 1811, t. ii, p. 189 ; Glaire, Dicl. des sciences ecclésiast., Paris, 1868, t. i, p. 108 ; Hurler, Nomenclator Literarius, Inspruck, 1892 sq., t. ii, col. 710.

C. Toussaint.


ANNEGARN Joseph, né à Ostbevern, le 12 octobre 1794, professeur d’histoire ecclésiastique au lycée de Braunsberg, mort le 8 juillet 1 8 i 3. On a de lui, entre autres ouvrages, Handbuch der Patrologie, Munster, 1839.

Hurter, Nomenclator literarius, 3’édit., Inspruck, 1895, t. III, col. 1046.

A. Vacant.

ANNIBAL DES ANNIBALDI. Né à Borne, de la famille sénatoriale de ce nom. Entra dans l’ordre des frères prêcheurs, fut l’auditeur’de saint Thomas d’Aquin à Paris, y reçut la licence (1258) et la maîtrise en théologie. Peu après, maître du Sacré-Palais, cardinal du titre des Douze-Apôtres (décembre 1262), il mourut à Orviéto en 1272. Il fut lié d’une étroite amitié avec saint Thomas qui lui dédia les trois dernières parties de son exposition des quatre Évangiles d’après les Pères (Chaîne dorée). On a d’Annibal un commentaire sur les quatre livres des Sentences, longtemps attribué, à tort, à saint Thomas d’Aquin, parce qu’il est presque un résumé de l’ouvrage de ce dernier sur Pierre Lombard. Il a eu, grâce à cette confusion, un assez grand nombre d’éditions, et se trouve plusieurs fois parmi les œuvres complètes de saint Thomas. La première édition est de Bàle, 1192. Il est placé dans le t. xvii de l’édition romaine, 1570, et dans le t. xxx de l’édition Fretté, Paris, 1889.

Quétif-Echard, Scriptores ordinis prxdicatorum, t. i, p. 261 ; Hurter, Nomenclator literarius, t. iv, col. 255 ; Gregorovius, Geschichle der Stinlt Boni, Stuttgart, t. v (1865), p. 155 sq. ; Eubel, Hicrarcliia caiholica, t. i, p. 8 ; Potthast, Begesia pontiftcum romanorum, p. 1541, 1649.

P. MANDONNET.


ANNIBALE (d’) Joseph, cardinal, né le 22 septembre 1815 à Borbona, diocèse de Bieti, fut professeur au séminaire de Bieti et conquit dans cette charge, par son enseignement et ses publications, la réputation d’un théologien consommé. Il devint ensuite vicaire général de Bieti, mais ne resta que peu d’années dans ce nouveau poste. Il fut préconisé évêque titulaire de Cariste par Léon XIII, le 12 août 1881, et nommé en même temps assesseur de la S. C. du Saint-Office. Enlin, il fut créé cardinal-prêtre du titre des Saints-Boniface et Alexis, dans le consistoire du Il février 1889. Le souverain pontife, dans son allocution consistoriale, rendait au nouveau cardinal ce témoignage particulièrement élogieux : « Il est illustre par son intégrité, sa modestie et la richesse de sa doctrine. » Univers, 15 février 1889. Le cardinal d’Annibale fut préfet de la S. C. des Indulgences. Il mourut à Borbona, sa ville natale, le 18 juillet 1892. On a de lui une théologie morale publiée sous ce titre : Summula iheologise moralis, 3 vol. in-8o, Milan, 1881-1883. C’est un résumé substantiel des leçons que l’auteur professait au séminaire de Bieti. L’ouvrage est divisé en trois parties : 1° Prolégomènes ou traités généraux de la théologie morale ; — 2° Devoirs de droit naturel, communs à tous les hommes ; — 3° Devoirs particuliers aux chrétiens, touchant les choses saintes et religieuses, comme les sacrements, les fêtes, etc. Dans ce cadre, toutes les questions de morale ont trouvé place ; toutes ont une solution concise, mais nettement formulée et appuyée sur les meilleures autorités. Les notes occupent dans l’ouvrage plus de place que le texte et renferment, avec dés citations bien choisies, d’utiles références bibliographiques. Le cardinal d’Annibale écrivit aussi un Commentaire de la constitution « Apostolicse Sedis », Bieti, 1880. Ce commentaire est apprécié et a été mis à profit par la plupart des auteurs plus récents, théologiens et canonistes,

Hurter, Nomenclator literarius recentioris Iheologix catholicx, Inspruck, 1892 sq., t. iii, col. 1448.

A. Beuc.net.


ANOMEENS, secte d’ariens dont la caractéristique était le radicalisme et l’intransigeance de leurs assertions hérétiques ; aussi formèrent-ils comme l’extrême gauche du parti. Leur nom vient du mot grec àvôu.oioç, dissemblable, dont ils se servaient à l’égard de Dieu le Fils, par opposition à l’ôu-Doûa-toç des orthodoxes, à l’ipotoûs’ioç des semi-ariens, et même à l’6’u.oioç trop accentué de certains ariens plus politiques et moins intransigeants, comme Acace de Césarée et ses amis. On les appelait aussi aétiens et eunomiens, de leurs deux coryphées, Aétius et Eunomius. Les appellations d’exoucoutiens et d’hétérousiens, par lesquelles on les désigne encore, ne leur étaient pas propres, mais communes avec tous les partisans de l’arianisme strict, qui soutenaient que le Fils avait été tiré du néantt ï ovx ovtwv, et qu’il était d’une autre substance que le Père, éTepoo-jucoc. —
I. Histoire.
II. Doctrine.

I. Histoire.

Au début, les anoméens n’ont pas d’autre histoire que celle de leurs chefs, Aétius et Eunomius. Quand, sous l’empereur Constance, la division se mit parmi les adversaires de la foi de Nicée, ils firent cause commune avec les autres ariens, tant qu’il s’agit seulement d’affirmer la supériorité du Père sur le Fils ou de rejeter 1’ôu.oo-jtio ; et l’ô|j.oto’j(Ttoç, comme au troisième synode de Sirmium en 357 et au synode tenu à Anlioche l’année suivante, sous l’évêque arien Eudoxe.

Mais, en cette même année 358, les anoméens sont directement pris à partie par les semi-ariens réunis à Ancyre, puis à Sirmium ; Và’/61.o : o : est anathématisé. Aétius et Eunomius furent alors exilés avec un grand nombre de leurs partisans, mais l’exil dura peu. Les camps se tranchèrent davantage au synode de Séleucie, en 359. Acace de Césarée ayant proposé une formule arienne mitigée qui admettait vaguement le terme d’oixoio : , et rejetait l’àv<$|iotoç, Aétius et Eudoxe écrivirent de tous côtés pour soutenir la doctrine de l’hétérousie. Le triomphe des acaciens à la cour valut à Aétius un nouvel exil, tandis qu’Eunomius, soutenu par Eudoxe transféré du siège d’Antioche sur celui de Conslantinople, devint évêque de Cyzique en Mysie. Mais bientôt les difficultés qui s’élevèrent entre les deux évêques au sujet du rappel et de la réhabilitation d’Aétius, sans cesse ajournés par Eudoxe, firent qu’Eunomius se sépara de celui-ci et forma un groupe à part ; on distingua dès lors les « eunomiens ou anoméens « des « ariens oueudoxiens ». Théodoret, Hæret. fabul. compend., iv, 3, P. G., t. lxxxiii, col. 421. Eunomius fit des ordinations pour son parti, qui eut bientôt un évêque à Constantinople même. Philostorge, Hist. eccles. epitom., viii, 2 ; ix, 4, P. G., t. lxv, col. 555, 570. La secte fit de grands progrès sous Julien l’Apostat, qui la favorisa, sans doute pour faire mieux échec aux orthodoxes. Dans un synode d’Antioche, tenu en 362 sous Euzoius, quelques évêques prononcèrent la réhabilitation d’Aétius et affirmèrent nettement la doctrine anoméenne, en déclarant c le Fils totalement dissemblable d’avec le Père, xarà uoevra àvôp.oioç, aussi bien sous le rapport de la volonté que sous celui de la substance ». Socrate, Hist. eccles., ii, 45, P. G., t. lxvii, col. 360.

Les progrès des eunomiens continuèrent sous Valens, grâce à l’inlluence prépondérante d’Eudoxe et au caractère franchement arien de la politique religieuse de l’empereur ; mais, à sa mort, leur fortune sombra. Dans l’édit de tolérance, porté par Gratien, à la fin de l’année 378, les eunomien.. furent exclus du bénéfice commun. Socrate, v, 2, P. G., t. lxvii, col. 568. Souf Théodose, leur situation devint encore plus critique. Condamnés nommément au second concile œcuménique, tenu à Conslantinople en 381 ; enveloppés dans toutes les mesures répressives prises par l’empereur contre les ariens ou les hérétiques en général, ils furent encore l’objet de lois spéciales, ordonnant de rechercher soigneusement et d’exiler leurs clercs et leurs docteurs, ou de livrer leurs livres au feu, leur enlevant même les droits civils en matière de testament et d’héritage. Cod. Tlœodos., Bonn, 1842, l. XVI, tit. v, 31, 32, 34, 49, 58. La décadence du parti fut aussi favorisée par des divisions intestines. Vers 379, un Cappadocien, nommé Théophrone, prétendit qu’il y avait diversité et changement dans la connaissance divine, suivant qu’elle se rapporte au passé, au présent ou à l’avenir ; excommunié par les eunomiens, il forma une secte dont les partisans s’appelèrent eunomiothéophroniens. Sozomène, Hist. eccles., vii, 17, P. G., t. lxvii, col. 1464. Peu de temps après, un laïque de Constantinople, du nom d’Eutycbius, soutint que le Fils, « axant tout reçu du Père, » connaissait l’heure du dernier jugement. Désapprouvé par les autres eunomiens qui s’appuyaient sur Matth., xxiv, 37, et Marc, xiii, 32, il fit appel à Eunomius alors en exil, et celui-ci sanctionna sa doctrine ; mais après la mort de l’hérésiarque, vers 395, il fut excommunié par ses adversaires et forma la secte des eunomiculychiens, les mêmes assurément qui, dans Nicéphore Callisle, sont appelés eunomieupsychiens, Sozomène, loc. cit. ; Nicéphore Calliste, Hist. eccles., xii, 30, P. G., t. cxi.vi, col. 842. Une troisième scission eut lieu sous Théodore le jeune, vers 420. Lucien,

neveu d’Eunomius et d’abord chef des, m eus à Con stantinople, se rendit cou pal île d’à va ri ci’e1 d’autres vices ; craignant qu’on ne sévit contre lui, il se sépara de son

parti et se fit une clientèle facile. Philostorge, xii, 11, P. G., t. lxv, col. 620. Vers le milieu du ve siècle, la secte des anoméens se trouvait presque éteinte ; les rares adeptes qu’elle conservait encore en Orient étaient obligés de se cacher et de tenir leurs assemblées dans des endroits isolés ; ce qui leur lit donner le nom de troglites ou troglodytes. Théodoret, Hærct. fabul., iv, 3, P. G., t. lxxxiii, col. 422.

IL Doctrine. — La doctrine trinitaire des anoméens est, en substance, celle de l’arianisme primitif. Pour s’en convaincre, il suffit de comparer la profession de foi présentée par Arius à saint Alexandre, S. Athanase, De synodis, § 15, P. G., t. xxvi, col. 706-706, et l’ëxôeatç Ttiarew ; d’Eunomius, P. G., t. Lxxii, col. 950-951, ou bien encore le court résumé que le même Eunomius donne de son enseignement à la fin de sa première Apologie, P. G., t. xxx, col. 868. Des deux côtés on part d’un Dieu unique, non engendré et sans commencement, àY£wï]To ; , ôevap/o ; , lequel, en conséquence de son éternité et de son aséité, ne saurait communiquer sa propre substance ni engendrer un terme même consubstantiel. Dès lors, il ne saurait être question ni d’identité, ni de similitude quant à la substance entre le Père et le Fils ; celui-ci est un être tiré du néant par la volonté du Père, mais supérieur aux autres créatures, parce que seul il a été créé immédiatement par le Dieu suprême pour devenir son instrument dans la production et le gouvernement du monde.

Cette doctrine, purement arienne, reçoit chez les anoméens une forme plus systématique et si fortement imprégnée du dialecticisme aristotélicien, que Théodoret leur reproche d’avoir transformé la théologie en technologie, Hæret. fabul., iv, 3, P. G., t. lxxxiii, col. 420, et saint Grégoire de Nysse, de tout concevoir en Dieu d’après les catégories d’Aristote. Conlr. Eitnom., . XII, P. G., t. xlv, col. 906-907. Aétius et Eunomius insistaient particulièrement sur ràyEvvrjiTta, Y aséité, comme constitutive de l’essence divine absolument simple et indivisible, pour en conclure la diversité de substance entre le Père àyÉvvY)To ; et le Fils yevvyjTdî. Les quarante sept raisonnements d’Aétius, rapportés par saint Epiphane, Hier., lxxvi, P. G., t. xlii, col. 549 sq., tendent tous à prouver que Và.-ytw-i)<j’.<x. signifie formellement et uniquement la substance divine éminemment simple, que c’est l’essence même de Dieu, et que par suite, dans l’hypothèse d’une génération à tenue consubslantiel, la substance divine serait tout à la fois engendrée et non engendrée, contradiction suivie de plusieurs autres.

Relativement au composé théandiique, les anoméens partageaient encore une erreur commune aux ariens, en ne reconnaissant pas d’âme humaine dans le Christ. S. Epiphane, Ancoratus, xxxiii, P. G., t. xliii, col. 77 ; Théodoret, Hseret. fabul, v, 11, P. G., t. lxxxiii, col. 489 ; Gennade, De eccl. dogm., ii, P. L., t. lviii, col. 981 ; surtout S. Grégoire de Nysse, Contra Eunom., il, 13, P. G., t. xlv, col. 543-515, et De anima, ibid., col. 220. Les doutes émis sur ce point par quelques auteurs, comme Tillemont, Mémoires, t. vi, p. 514, n’ont d’autre fondement que la mauvaise traduction latine de I’k’xŒei ; m’a-Têo ) ; d’Eunomius dont ils se sont servis. En ce qui concerne le Saint-Esprit, ils formulaient explicitement les conséquences de la doctrine arienne, ne voyant en lui que le plus haut et le plus noble produit du Fils, destiné à être la source de l’illumination et de la sanctification dosâmes. Dans son Apologie, n. 25, Eunomius lui refuse en propres termes la puissance créatrice et la divinité.

Les anoméens s’écartaient pourtant sur deux points de la doctrine d’Arius. D’après cet hérésiarque, le Fils n’était parvenu à la dignité divine qu’en récompense de sa vertu ; les anoméens, au contraire, lui attribuaient celle dignité comme apanage de sa génération et de sa filiation unique. Eunomius distinguai ! entre l’essence divine, oùiria, indivisible et incommunicable, et la puissance d’agir ou l’activité, hzpyv.a, séparable et communicable. C’est ràvEpyeîa, et non pas l’o-Jc-t’a, qui est en Dieu le principe de la paternité, et c’est aussi la participation de l’ivepyda ou puissance créatrice qui constitue la divinité du Fils, car elle l’élève au-dessus du niveau ordinaire des créatures et lui confère vis-à-vis des choses qu’il a créées le rang qui revient au créateur.

L’autre point de divergence se rapporte à la connaissance de Dieu. Arius considérait l’être divin comme incompréhensible. S. Athanase, De synod., loc. cit. Les anoméens. au contraire, proclamaient hautement l’intelligibilité absolue de l’essence divine : « Dieu ne sait de son être rien de plus que nous ; son être n’est pas plus clair pour lui que pour nous. Tout ce que nous savons de lui, il le sait également, et tout ce qu’il sait de lai-même, nous le trouvons pareillement en nous sans différence aucune. » Ce sont les propres paroles d’Eunomius, d’après Socrate, Hisl. eccl., iv, 7, P. G., t. lxvii, col. 474. Et l’anoméen Philostorge compte expressément l’opinion contraire parmi les erreurs d’Arius et d’Eusèbe de Césarée, Hist. eccl., I, 1 ; il, 3 ; x, 2, P. G., t. lxv, col. 461, 468, 583. Quelle put être la genèse de celle doctrine, c’est une question qui demanderait un plus long exposé des idées d’Eunomius sur la manière dont nous connaissons Dieu et sur l’origine divine et la portée des noms appellatifs. Voir Eunomius. Il suffit de remarquer ici une étroite connexion entre cette doctrine et les principes des anoméens sur l’àyevvrtria ; en soutenant que ce mot seul exprimait, et exprimait parfaitement l’essence divine, conçue d’ailleurs avec un caractère de simplicité absolue excluant toute distinction même virtuelle, ils se trouvaient facilement amenés à conclure qu’ils comprenaient pleinement l’essence divine comme le terme même d’àyevvYi<j(a. Cf. S. Grégoire de Nvsse, Contra Eunom., l. XII, P. G., t. xlv, col. 918, 930, 938.

A ces diverses erreurs les anoméens en joignirent d’autres dans l’ordre pratique. Ils rebaptisaient les catholiques et même jusqu’aux ariens qui n’étaient pas de leur secte ; de plus, à la triple immersion alors en usage ils substituaient une seule immersion, en mémoire de la mort de Jésus-Christ. Philostorge, x, 4, P. G., t. lxv, col. 585 ; Sozomène, Hist. eccl., vi, 26, P. G., t. lxvii, col. 1362 sq. Saint Épiphane ajoute qu’ils changeaient aussi la formule traditionnelle, en baptisant au nom du Dieu incréé, et du Fils créé, et de l’Esprit sanctificateur et procréé par le Fils créé. Hæres., hxwi, 6, P. G., t. xlii, col. 657. L’administration du baptême aurait même dégénéré chez eux en pratiques ridicules ou inconvenantes. Théodoret, Hæret.fabul., iv, 3, P. G., t. lxxxiii, col. 420. On reproche encore aux anoméens leur attitude irrespectueuse et rationaliste à l’égard des saintes Ecritures, S. Épiphane, loc. cit., et leur aversion pour le culte des reliques et des saints. Astère d’Amasée, Homil, x, P. G., t. xl, col. 331 ; S. Jérôme, In Vigilant., c. VIII, P. L., t. XXIII, col. 347. Enfin, leurs principes de morale, opposés à l’ascétisme chrétien, auraient été fort larges, comme saint Grégoire de Nysse le dit assez nettement, en défiant les anoméens eux-mêmes de lui porter un démenti. Contra Eunom., l. I, P. G., t. xlv, col. 266, 282.

I. Sources anciennes : les Histoires ecclésiastiq ues de Socrate, Sozomène, Théodoret et Philostorge citées au cours de cet article, et les écrits des Pères qui ont lutté contre les anoméens : S.Basile, Contra Eunomium libri V, les deux derniers livres étant vraisemblablement l’œuvre d’Apollinaire de Laodicée, P. G-, t. xxix, col. 498 sq. ; S. Grégoirede Nazianze, Oral-, xxxm-xxxvi, P. G., t. xxxvi, col. 214 sq. ; S. Grégoire de Nysse, Contra Eunom. libri XII, P. G., t. xlv, col. 243 sq. ; S. Épiphane, Hxres., lxxvi, P. G., t. xlii, col. 516 sq. ; S. Jean Chrysost., Homil., De incomprehensibili, P. G-, t. XLHI, col. 701 sq.

II. Synthèses historiques ou dogmatiques : Tillemont, Mimoires, Paris, 1704, t. VI, p. 501-516 ; Klose, Geschichte und

Lehre des Eunomius, in-8o, Kiel, 1833, p. viii-68 ; Nemwan, The arians ofthe fourth century, c. iv, sect. iv, 4e édit., Londres, 1870 ; Hefele, Hist. des conciles, §77, trad. Leclercq, Paris, 1907, t. i, p. 880 ; Schwane, Dogmengeschichte (1er patristiclien Zeit, 1’eu t., Fribourg-en-Brisgau, 1895, p. 19-31, 128-129. Voir aussi les ouvrages cités aux articles Aétius et Eunomius.

X. Le Baciillet.

1. ANSALDI Chaste Innocent. Né à Plaisance, le 7 mai 1710, prend l’habit des frères prêcheurs à Parme, le 6 septembre 1726. Appelé à Rome en 1733 par le général de son ordre, il suit les études de la Minerve et se lie surtout avec le cardinal Orsi. En 1735, il va enseigner la philosophie à Naples dans le couvent de Sainte-Catherine de Formelo. Il obtient l’année d’après la chaire de métaphysique de l’université. Ses succès font créer en sa faveur, en 1737, par le roi de Naples, une chaire de théologie qu’il n’occupe qu’une année. Il publie en 1738 le premier de ses ouvrages dont la longue série devait lui faire une haute réputation. En 1745, il est nommé premier professeur de théologie dans le couvent de Brescia, et en 1748, professeur d’Écriture sainte. Il est appelé, en 1750, à la chaire de théologie de l’université de Ferrare, qu’il quitte, en 1756, pour occuper, sur la demande du roi de Sardaigne, celle de l’université de Turin. Il y enseigne 14 ans et meurt dans cette même ville, les premiers jours de mai 1780. La plupart des ouvrages d’Ansaldi sont empreints d’une grande érudition et visent d’ordinaire la critique rationaliste et la philosophie anti-chrétienne de son temps. La liste suivante contient ses principales publications : — 1° PatriarchseJosephi, jEgypti olini Proregis, Religioa criminationibus Basnagii vindicata, in-8o, Naples, 1738 ; rééditée sous ce titre : De veteri A£gyptiorum idolatriaac moribus dissertalio, in qua palriarch. Joseph, ab criminationibus Basnagii vindicatur. Eclitio altéra pi urimum emendata et aucta (dans la Raccolla d’opuscoli, du P. Calogerà, Venise, 1741, t. xxiii), in-8o, Brescia, 1747. — 2° De caussis inopiee veterum monumentorum pro copia martyrum dignoscenda, aduersus Dodmvellum dissertatio, 1 vol. in-8o, Milan, 1740 ; — 3° De prin cipiorum legis naturalis traditione libri III, 1 vol. in4°, Milan, 1742. — 4° De romana tutelarium deorum in oppugnationibus urbium evocatione liber singularis, in-8% Brescia, 1743 ; in-8o, Venise, 1753, 1761 ; Oxford, 1765. — 5° De marty ribus sine sanguine, altéra aduersus Dodvellum, in qua et romani martyrologii loca a criminationibus Bselii vindicanlw, 1 vol. in-8o, Milan, 1744 ; Venise, 1756, avec le De caussis inopiee. — 6° DeforensiJudseorum buccinacommentarius, l vol.in-8 », Brescia, 1745 ; Venise, 1763, dans le t. xxvii du Thésaurus antiquitatum sacrarum d’Ugolini. — 7° Herodiani infanticidii vindiciee. Accedit dissertatio de loco Joltannis aliter atque habet Vulgata a nomudlis Patribus lecto, 1 vol. in-4°, Brescia, 1746. — 8° De aulhenlicis sacrarum Scripturarum apud SS. Patres lectionibus libri duo, 1 vol. in-4o, Vérone, 1747. —9° De futuro sseculo ab Hebreeis ante captivitatem cognitn, adversus Johannem Clericumcommentarius, vol. in-8 ii, Milan, 1748.

— 10° De baptismale in Spiritu Sancto et Igni commentarius sacer philologico-criticus : cui accedunt orationes duee in Ferrariensi Atltenmo habitée, vol. in-4°, Milan, 1752. — 11° De sacro et publico apud Elhnicos tabularum pictarum cultu, lvol. in-4, Venise, 1753 ; Turin, 1768(édit. augmentée). — 12° Vindiciee Maupertuisanee ab animadversionibus viri Cl. Francisci M. Zanotti quibus quantum philosophiee morali stoicorum preestet religio ininfelicitate vitx minuenda demouslratur, 1 vol. in-4o, Venise, 1754. — Difesa del Signor di Mauperluis dalle censure del Signor dot tore Francesco Maria Zanolli, tradotla dal latinodel P. C. I. Ansaldi in linguaggio italiano da Lorenzo Dorighi Ferrarese, 1 vol. in-4o, Venise, 1756, et dans le t. i de Raccolla di traitait didiversi auluri, concernenii alla Religion naturale, cd allamorale filosofia de’cristiani, Venise, 1756.