Dictionnaire de théologie catholique/Aaron

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Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant et Eugène MangenotLetouzey et Ané (Tome 1.1 : AARON — APOLLINAIREp. 1-2-10).

AARON (héb., ’Ahâron, nom dont la signification est inconnue), fils d’Amram et de Jochabed, de la tribu de Lévi, frère aîné de Moïse. Exod., VI, 20 ; VII, 7. Nous ne le considérerons qu’à deux points de vue : 1° comme premier grand-prêtre de l’ancienne loi ; 2° et à ce titre, comme figure de Jésus-Christ, le premier et souverain prêtre de la loi nouvelle.

I. Aaron premier grand prêtre de la loi juive.

Sa préparation. —

Avant de devenir l’intermédiaire attitré entre Dieu et son peuple, Aaron fut l’interprète de son frère. Moïse éprouvait de la difficulté de parler ; sa langue était lourde et embarrassée. Ce défaut lui paraissait être un grave obstacle à l’accomplissement de la mission que Dieu lui confiait ; il ne se sentait pas apte à tirer les Israélites de la servitude d’Égypte. Aaron avait de la facilité de parole ; il était éloquent. Dieu l’adjoignit à son frère. « Il sera ta bouche, dit-il à Moïse, et toi, tu seras comme son Dieu. » Exod., IV, 10-16. Aaron devait être le prophète de Moïse, c’est-à-dire son interprète et l’organe de ses lèvres. Exod., VII, 1-2. Moïse mettra dans la bouche les discours à tenir au peuple et à Pharaon, et Dieu assistera les deux frères. Constit. apost., l. II, c. xxix, P. G., t. I, col. 670-077 ; Tbéodoret, Quæst. in Exod., q. vii, P. G., t. lxxx, col. 244 ; Cosmas de Jérusalem, Ad carmina S. Gregorii, P. G., t. xxxviii, col. 369. En conséquence, Aaron reçut du Seigneur l’ordre d’aller au-devant de Moïse vers la montagne d’Horeb. Il accepta résolument le ministère dont il était chargé et obéit promptement. S. Grégoire de Nazianze, Orat., ii, P. G., t. xxxv, col. 512. Dès qu’il rencontra son frère, il l’embrassa et Moïse le mit au courant des desseins du Seigneur. Us se rendirent tous deux dans la terre de Gessen, assemblèrent les anciens d’Israël et Aaron leur exposa les paroles que Dieu avait dites à Moïse. Il opéra des prodiges pour justifier sa mission et le peuple crut à ses discours. Exod., iv, 27-31. Il remplit le même ministère auprès du roi d’Égypte. Il parla au nom de Jéhovah et de Moïse et par la vertu de sa verge il fit tomber sur les Égyptiens les premières plaies. Sa prière concourut avec celle de Moïse à obtenir la cessation de ces fléaux, et Pharaon discuta avec lui les conditions du départ des Israélites. Exod., v, 1-21 ; vi, 43, 26-28 ; vii, 6, 8-12, 19-21 ; viii, 5-6, 8, 12, 16-17, 25 ; ix, 8-10, 27-28 ; x, 3, 8, 16-17, 24 ; xi, 10 ; xii, 1, 28, 31, 43, 50. Cf. Ps. civ, 26-27. Dans le désert, le peuple considérait Aaron comme un de ses chefs et murmurait contre lui ; pour réprimer ces plaintes, Aaron annonça île la part de Dieu la venue des cailles et la chute de la manne. Exod., xvi, 2, 6-10. Par ordre de Moïse, il recueillit dans un vase la contenance d’un goinor de cette nourriture miraculeuse, afin qu’elle fût placée devant le Seigneur comme un perpétuel mémorial. Exod., xvi, 33-3L Durant le combat contre les Amalécites, il soutint avec Hur les bras suppliants de Moïse, et contribua ainsi à assurer aux Juifs une victoire complète. Exod., xvii, 10-12. Il fut invité avec ses fils à manger devant le Seigneur une partie des victimes immolées par le prêtre Jéthro. Exod., xviii, 12. Lors de la promulgation du Décalogue et des premières lois sociales de la nation juive, il se trouvait avec Moïse sur le Sinaï. Exod., xix, 24. Tandis que pour recevoir les derniers préceptes divins, Moïse gravit seul le sommet, Aaron et ses fils, avec les anciens d’Israël, s’arrêtèrent à distance sur le penchant de la montagne et fuient honorés de la vision de Dieu. Exod., xxiv, 1-2, 9-14. La faute d’Aaron dans la fabrication du veau d’or, Exod., xxxii, 1-6, n’empêcha pas la réalisation des desseins de Dieu sur lui. Moïse intercéda en sa faveur et écarta de sa tête le châtiment qu’il méritait. Deut., IX, 20.

Sa vocation et sa consécration. —

Quand Dieu eut décrit à Moïse sur le Sinaï tous les objets nécessaires au nouveau culte, il institua un sacerdoce. Il fixa son choix sur Aaron et ses fils. Ils devaient placer dans le tabernacle une lampe qui brûlerait constamment en l’honneur du Seigneur et veiller à son entretien perpétuel. Exod., xxvii, 21. La vocation directe suivit de près cette première indication. Dieu ajouta aussitôt à Moïse : « Appelle aussi à toi Aaron ton frère, avec ses fils, du milieu des enfants d’Israël, afin qu’ils remplissent pour moi les fonctions du sacerdoce. » Exod., xxviii, 1. Ainsi, de par la volonté divine, Aaron et ses fils furent séparés des autres Israélites, députés au ministère sacerdotal et chargés d’en accomplir les fonctions. Les prêtres juifs, distingués des laïques, auront des vêtements spéciaux, saints et consacrés, qui les honoreront aux yeux de tous et les orneront durant le service divin. Moïse lui-même les en revêtira, consacrera leurs mains et les sanctifiera eux-mêmes pour qu’ils puissent ensuite exercer leurs fonctions sacerdotales. Exod., xxviii, 2-3, 35, 41. Dieu régla toutes les cérémonies de la consécration. Moïse devait préparer des oblations et des victimes, puis placer Aaron et ses fils à l’entrée du tabernacle, à part et en vue de tous. Après leur avoir fait prendre un bain de purification, il les revêtirait de leurs ornements sacerdotaux et consacrerait leurs mains par une onction sainte. Ils imposeraient ensuite leurs mains sur les animaux destinés à être immolés. Moïse marquerait du sang du bélier de consécration l’extrémité de leur oreille droite et les pouces de leur main et de leur pied droits, il en aspergerait aussi leurs personnes et leurs vêtements. La consécration ainsi achevée, les nouveaux prêtres offriront eux-mêmes des oblations et des victimes comme prémices de leur sacerdoce. Ils mangeront une partie de la chair du bélier de consécration, et toutes ces cérémonies seront répétées pendant sept jours consécutifs. Exod., XXIX. Les fonctions particulières du grand-prêtre à la fête de l’Expiation sont décrites. Exod., xxx.

Quand les instruments du culte et les vêtements sacerdotaux eurent été confectionnés par les ouvriers choisis de Dieu et remplis de son esprit, Exod., xxxvi-xxxix, Moïse érigea le tabernacle, Exod., xl, promulgua les prescriptions relatives aux sacrifices, Levit., i-vn, puis consacra Aaron et ses fils conformément aux ordres qu’il avait reçus de Dieu. Levit., viii, 1-36. Cf. Eccli., xlv, 7-21. Un psalmiste, Ps. cxxxii, 2, a célébré l’onction sacerdotale d’Aaron par Moïse comme le gracieux symbole de l’union fraternelle. L’huile parfumée, répandue sur la tête du grand-prêtre, découla naturellement sur sa barbe et sur le bord de ses vêtements. Cet écoulement signifiait que les pouvoirs et les grâces du sacerdoce dérivaient du grand-prêtre sur les simples prêtres. S. Thomas, Sum. theol., I a II æ, q. en, a. 5, ad8um et9um. Il signifiait aussi, d’après le psalmiste, les bénédictions divines se répandant par le sacerdoce sur tous les fils d’Israël. 3° Son exercice des fonctions sacerdotales. — Les fêtes de la consécration terminées, Aaron offrit pour la première fois des victimes pour le péché, des holocaustes et des offrandes pacifiques. Puis, il bénit le peuple et la gloire du Seigneur se manifesta à la multitude, afin d’approuver et d’autoriser ostensiblement le nouveau sacerdoce. Levit., ix, 1-24. Le même jour, un feu, allumé par la colère divine, dévora les fils d’Aaron, Nadab et Abiu, qui avaient mis dans leurs encensoirs un feu profane et étranger. Cette terrible punition montrait à tous que Dieu exigeait des prêtres l’observation la plus exacte des moindres prescriptions du culte. Aaron le comprit et se tut. Moïse lui défendit de porter le deuil de ses fils ; il ne le blâma pas cependant, quand il sut que la douleur l’avait empêché de manger les restes du sacrifice pour le péché. Levit., x, 1-3, 6, 16-20. Aaron célébra la fête de l’Expiation. Levit., xvi, 1-34. Les préceptes relatifs aux sacrifices et à la pureté des sacrificateurs, lui furent transmis par Dieu lui-même. Levit., xvii. XXI, xxii. Aaron fit avec Moïse le dénombrement des tribus, Num., i, 44 ; il reçut directement de Dieu des ordres pour les campements et les marches, Num., Il, 1, et pour le service des lévites. Num., iv, 1. Il plaça dans le Saint le chandelier d’or, Num., VIII, 1-4 ; il présenta les lévites au jour de leur consécration. Num., viii, 11. 19-22. Les Israélites impurs le consultèrent avec Moïse pour la célébration de la Pâque au Sinaï. Num., ix, 0. Quand avec Marie, sa sœur, il murmura contre Moïse, et discuta sa supériorité au sujet des dons divins, le Seigneur lui répondit que Moïse en avait reçu plus que lui. Num., xii, 1-9. Ses pouvoirs sacerdotaux furent discutés i l’instigation de Coi’ : Les séditieux réclamaient légalité spirituelle de tous les Juifs et méconnaissaient la hiérarchie établie par Dieu ; le Seigneur manifesta clairement sa volonté et fit périr les lévites révoltés. Num., xvi, 3-40. Cf. l’s. CV, 16-18 ; Eccli., xi.v, 22-27 ; Sap., xviii, 2(1-25. I.e peuple, qui murmurait le lendemain contre Moïse et Aaron, fut frappé par Dieu d’un mal dévastateur. Aaron mit du feu de l’autel dans un encensoir, jeta de l’encens dessus et courut au milieu de la foule qui périssait. Debout entre les vivants et les morts, il offrit de l’encens, pria pour les coupables et, grâce à son intercession, le fléau cessa. Num., xvi, 41-50. Cette double intervention divine prouvait clairement que Dieu avait choisi et désigné lui-même Aaron pour le chef de son sacerdoce. Afin d’empêcher toute contestation nouvelle, le Seigneur voulut encore confirmer par un miracle le sacerdoce aaronique. La verge d’Aaron, placée dans le tabernacle avec celles des chefs des autres tribus, lleurit seule et se couvrit de fruits. Une branche, détachée du tronc et desséchée, ne pouvait produire naturellement des fleurs et des fruits. Dieu, en lui rendant la sève et la verdeur, montrait qu’il avait communiqué à son possesseur les droits et les pouvoirs sacerdotaux avec l’efficacité divine d’en produire les riches et bienfaisants effets. Num., xvii, 1-13 ; S. Nil, Pcristeria, sect. xi, c. x, P. G., t. lxxix, col. 917. Dieu la fit mettre dans le tabernacle en souvenir perpétuel de l’événement. Ilebr., ix, 4. Les lois de pureté furent encore données à Aaron. Num., xviii, 1 ; xix, 1. Pour avoir manqué d’une absolue confiance en Dieu, Aaron ne verra pas la terre promise, Num., XX, 12, 24 ; en conséquence, il mourut sur le mont Horeb, après avoir été dépouillé de ses vêtements de grand-prêtre. Num., xx, 25-30.

II. Aaron figure de Jésus-Christ, le souverain prêtre de LA LOI nouvelle. —

D’après saint Paul. —

Étant donné le caractère figuratif de l’ancienne loi, l’analogie des situations eût suffi à justifier la comparaison d’Aaron, le premier grand-prêtre des Juifs, avec Jésus-Christ, le souverain prêtre de la loi nouvelle. Mais saint Paul, sous l’inspiration du Saint-Esprit, a esquissé cette comparaison et indiqué deux points de rapprochement entre le sacerdoce personnel d’Aaron et celui de Jésus. — 1° Au point de vue de la rocaJion.-Aucun homme n’a le droit de s’arroger l’honneur du sacerdoce ; pour en porter le titre, il faut y avoir été appelé par Dieu comme Aaron. C’est pourquoi le Christ ne s’est pas élevé de lui-même à la dignité de pontife ; Dieu l’a glorifié et l’a constitué prêtre éternel selon l’ordre de Melchisédech. Hebr., v, 4-6. Ainsi donc, malgré la différence de leur ordre, Aaron et le Christ ont eu besoin de la vocation divine pour être honorés du sacerdoce. — 2° Au point de vue de l’ef/icacile et de la perpétuité. -Lesacerdoce aaronique est inférieur sous ce rapport au sacerdoce de Jésus-Christ. Si, en effet, il avait pu rendre les hommes parfaits et leur donner la justice qui rend agréable à Dieu, il n’eût pas été nécessaire qu’il s’élevât un prêtre d’un ordre différent. La translation des pouvoirs sacerdotaux à un membre de la. tribu de Juda a donc abrogé le sacerdoce lévitique, et Jésus-Christ a succédé à Aaron. Hebr., vii, 11-12. Cf. S. Jean Chrysostome, In epist. ad Heb., homil. xiii, n. 1, P. G., t. lxiii, col. 101-103.

D’après les Pères. —

Les Pères et le6 écrivains ecclésiastiques devaient logiquement, semble-t-il, partir des données de saint Paul pour développer davantage le caractère figuratif du sacerdoce d’Aaron. Seul, à notre connaissance du moins, saint Cyrille d’Alexandrie, De adoratione in spiritu et veritate, l. XI, P. G., t. lxviii, . col. 725-732, l’a fait. Il rappelle la vocation divine d’Aaron, cite saint Paul et conclut qu’Aaron était le type de Jésus-Christ et de son sacerdoce qui est un sacerdoce en esprit et en vérité. Dieu a ordonné â Moïse de s’adjoindre Aaron ; c’est une préfiguration de l’infirmité et de l’imperfection de la loi ancienne, si elle est séparée du Christ. Que les Juifs qui aiment encore l’ombre et la lettre des institutions mosaïques, sachent donc que leur culte et leur religion seront vains et inutiles, s’ils ne s’adjoignent au prêtre Jésus-Christ. Aaron éloquent, qui est donné par Dieu à Moïse pour l’aider dans sa mission de sauver Israël, est encore le type de Jésus-Christ, qui peut facilement tout parfaire. Israël n’aurait pas pu être délivré, si le Christ, représenté par Aaron, n’avait été adjoint à Moïse dont la voix était grêle et impuissante. Remar quons que, pour fortifier dans le Christ l’infirmité de la loi, Dieu a élevé Aaron au ministère sacerdotal, afin de l’associer utilement à l’œuvre rédemptrice de Moïse. La loi est trop faible pour sauver et sanctifier les hommes ; le Christ avec la coopération des prêtres est le salut et la sanctification du monde. Dieu enfin a revêtu Aaron d’ornements sacerdotaux variés, afin de marquer par ces figures la gloire de notre Sauveur. L’évêque d’Alexandrie développe ensuite assez longuement le symbolisme mystique des vêtements sacerdotaux d’Aaron. Saint Cyrille de Jérusalem, Cal., x, P. G., t. xxxii, col. 676, se borne à affirmer le caractère figuratif d’Aaron. Jésus-Christ, dit-il en substance, a deux noms ; il est appelé Jésus, parce qu’il est Sauveur, et Christ, parce qu’il remplit les fonctions du sacerdoce. Or, pour représenter les deux pouvoirs, royal et sacerdotal, réunis dans la personne de Jésus-Christ, Moïse a donné au fils de Navé, son successeur, le nom de Jésus, et à son frère Aaron celui de Christ. Le Christ, en effet, est comme Aaron souverain pontife. Plus loin, Cat., xii, col. 761, il compare la virginale maternité de Marie à la verge fleurie d’Aaron et il fait ce raisonnement : « Celui qui, en raison d’un souverain pontife figuratif, Sià -rôv tUTttxôv àpytepéa, a fait porter des Heurs et des fruits à une branche sèche et décortiquée, n’accordera-t-il pas à une vierge d’enfanter, en raison du véritable grand-prêtre, 81à tôv à/Y|81vôv àpytspéa ? » L’auteur des Constitutions apostoliques, l. II, c. XXX, P. G., t. I, col. 677, a considéré Aaron comme la figure des diacres. A ses yeux, Moïse représentait l’évêque, et comme Aaron était le prophète et l’interprète de Moïse, il en conclut que le diacre est le prophète de l’évêque et ne doit rien faire sans son ordre et sa direction. Les Pères latins ont indiqué d’autres rapprochements entre les deux prêtres, Aaron et Jésus-Christ. Saint Ambroise a décrit plusieurs fois le caractère figuratif de cette belle scène biblique d’Aaron, debout entre les vivants et les morts et arrêtant par son intercession la marche du lléau dévastateur. Aaron représentait alors le Christ Jésus. « N’est-ce pas la principale fonction du Christ d’être auprès du Père l’avocat des peuples, d’offrir sa mort pour tous, de chasser la mort et de rendre la vie à ceux qui l’ont perdue ? » In Ps. xxxix enarrat., n. 8, P. L., t. xiv, col. 4060. Le grand-prêtre juif figurait dans cette circonstance le Christ, prêtre éternel selon l’ordre de Melchisédech, venant au milieu des hommes pour apaiser Dieu. De xlii mansionibus filioruni Israël, P. L., t. xvii, col. 25. De même qu’Aaron empêchait la mort de passer du corps des victimes à ceux qui étaient encore vivants ; ainsi le Verbe, présent invisiblement en chacun de nous, y sépare les vertus du cadavre des passions et des pensées pest-ilentielles. Il se tient debout comme s’il était venu en ce monde pour émousser l’aiguillon de la mort, fermer le gouffre béant prêt à nous dévorer, donner l’éternité de la grâce aux vivants et accorder la résurrection aux morts. Epist., iv, n. 5, P. L., t. xvi, col. 890. Les douze pierres précieuses du vêlement d’Aaron, qui est la figure du Christ, sont insérées dans le vêtement de tout véritable prêtre. De fide, l. II, prolog., n. 4, P. L., t. xvi, col. 560. La verge desséchée d’Aaron, qui pousse et fleurit, représente la chair du Christ ; elle était sèche et elle a refleuri, puisque morte elle est ressuscitée. De xlii mansionibus, P. L., t. xvii, col. 25. Cette verge, déposée dans le tabernacle, yest l’insigne de la grâce sacerdotale. Elle avait été desséchée, mais elle a refleuri dans le Christ. Epist., iv, n. 4, P. L., t. xvi, col. 890. Celle verge qui fleurit seule au milieu des verges des autres tribus, nous montre que chez les prêtres la grâce divine fait plus que les talents humains ; elle montre aussi que la grâce sacerdotale ne dépérit jamais et que dans sa faiblesse elle est capable de produire les fleurs des pouvoirs qu’elle a charge d’exercer. Ce miracle s’est produit au déclin de la vie d’Aaron pour signifier que le peuple juif, vieilli par la longue infidélité de ses prêtres, refleurirait par la foi et la dévotion et revivrait par la grâce, après des siècles de mort. Epist., i.xiii, n.58, col. 1204. La verge d’Aaron signifie encore, que l’autorité sacerdotale doit être droite et doit persuader ce qui est utile plutôt que ce qui est agréable. Les préceptes des prêtres peuvent bien paraître amers pour un temps â plusieurs, et n’être pas entendus de leurs oreilles, mais enfin comme la verge d’Aaron, ils refleurissent alors qu’on les croyait desséchés, Epist., xli, n. 2 et 3, col. 1113. L’auteur du Liber de promissionibus et prsedictinnibus Dei, l. ii, c. x, P. L., t. li, col. 779-780, reconnaît dans la verge fleurie d’Araon Jésus-Christ prêtre et dans ses fruits le monde et l’Église. Saint Grégoire le Grand, Hom. in Evang., . II, homil. xxxiv, n.8, P.L., t. lxxvi, col. 1244, traduit le nom d’Aaron par « montagne de force » et il reconnaît dans cette forte montagne notre rédempteur. Quand Aaron soutenait avec Hur sur la montagne les mains de Moïse, il figurait le médiateur établi entre Dieu et les hommes, qui est venu alléger, en les spiritualisant, les lourds fardeaux de la loi ancienne que la chair ne pouvait porter. Saint Isidore de Séville, Allegorise quaidam Scripturse sacrée, n. 60, P. L., t. lxxxiii, col. 109, a considéré dans Aaron le sacrificateur. Lorsqu’en répandant le sang des victimes il expiait les péchés du peuple, il représentait Jésus-Christ qui a effacé les péchés du monde par l’effusion de son sang. Alcuin, InPs. cxxxit, 2, jP. L., t. c, col. 637, a vii, dans Aaron, le Christ qui pénétra seul dans le Saint des Saints, non avec un sang étranger, mais avec le sien propre, afin d’intercéder pour nous auprès du Père. L’huile parfumée, qui découle de la tête du Christ, c’est le Saint-Esprit, qui se répand sur tous ceux qui ont victorieusement combattu pour lui, les apôtres, les martyrs et les fidèles sanctifiés, aussi bien que sur l’Église, qui est un vêtement teint dans le sang du Sauveur. Aux yeux de saint Pierre Damien, Collectanea in Velus Testamentum, In Num., c. i, jP. L., t. cxlv, col. 1034-1035, Aaron et ses fils représentent les pontifes de la loi nouvelle, et les lévites, les clercs. Ceux-ci sont séparés des laïques et destinés au ministère sacré, quand ils sont offerts â leurs pontifes pour l’ordination. Pour Richard de Saint-Victor, Adnotatio in Ps.xcvui, P. L., t. exevi, col. 331, Aaron, dont les principales fonctions étaient de rendre Dieu propice par la prière et le sacrifice, représente le nouveau sacerdoce qui doit pleinement apaiser le Seigneur. Philippe de Harveng, De dignitate clericorum, c. ii, P. L., t. cem, col. 669, retrouvait dans Aaron et ses fils toute la hiérarchie catholique, Aaron figurait les évêques, ses fils les prêtres et les lévites les simples clercs. Tous étaient choisis parmi le peuple chrétien ; une fois qu’ils en avaient été séparés, ils devaient mener une vie sainte. Rupert, Comment, in Matlh., l. III, P. L., t. clxviii, col. 1368-1369, avait découvert un aspect nouveau. Avant de remplir les fonctions sacerdotales, Aaron était obligé de se purifier et de prendre ses ornements sacrés. Il était ainsi la figure du souverain et véritable prêtre, Jésus-Christ, qui au début de son ministère avait voulu être baptisé par saint Jean-Baptiste.

Dans l’iconographie chrétienne. —

Nous ne connaissons pas d’images antiques reproduisant le caractère typique d’Aaron. Signalons seulement qu’à Rome, au xvie siècle, on a représenté symboliquement le sacerdoce chrétien par la verge d’Aaron qui fleurit au milieu de verges desséchées. En 1610, L. Gauthier gravait, pour le frontispice de la Royale Prestrise de Pierre de Besse, les deux sacerdoces de l’ancienne et de la nouvelle loi, Aaron, avec l’encensoir, regale sacerdotium, et un pape, tenant d’une main l’ostensoir et de l’autre la croix à triple croisillon. Mgr  X. Barbier de Montault, Traité d’iconographie chrétienne, in-8o Paris, 1890, t. I, p. 325 ; t. ii, p. 47.

C’est ainsi que s’est toujours conservé et que s’est développé dans des directions un peu divergentes le caractère figuratif du sacerdoce d’Aaron. Le grand-prêtre Juif dans diverses circonstances de sa vie et de son ministère a représenté tantôt directement le souverain prêtre de la loi nouvelle, Jésus-Christ, tantôt les différents ministres du sacerdoce chrétien qui participent tous aux pouvoirs et aux grâces du Verbe incarné, tout-puissant médiateur entre Dieu et les hommes.

E. Mangenot.