Dictionnaire de théologie catholique/CLAUDE DE TURIN

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Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant et Eugène MangenotLetouzey et Ané (Tome 3.1 : CLARKE - CONSTANTINOPLEp. 14-18).

2. CLAUDE DE TURIN. - I Vie. II. Doctrine 1. y, l :. _ Claude de Turin a été confondu à tort avec Claude Clément l’Écossais par Trithème, De scriptoribus ecclesiast., c. cclviii, dans.1. A. Fabricius, Bibliot clesiast., III" partie, Hambourg, 1718, p. 70 ; liellarmin et Labbe, De scriptoribus ecclesiast., Veni » , p <>71 ete Cf. N. Antonio. Bibliot. Itisi>ana vêtus, Madrid, 1788. t. i, p. 459-461 ; D. L., t. av, col. 612-010. Il lut sûrement d’origine espagnole. Cf..lonas, évêque d’Orléans, De cultu imaginum, præf. et I. 1. P. L., t. cvi. col. 300-308. Il naquit au viir siècle ; il n’est pas possible de préciser la date. 5a jeunesse ne nous est pas connue. Jonas d’Orléans, ibid., col. 309 ; cl’. Du le reclus, Responsa contra perrersas Claudii Taurincrisis episcopi sententias, prol., P. L., t. cv. col. en fait un disciple de Félix d’Urgel, et cela ab ineunte asiate. Claude, hi libros inforniatioman littermet rj iritus super Leviticum, pnsI., P. L., t civ. col. 646 claie qu’il est inhabile à écrire. 7111a nec sxcular teraturæ didici studium nec aliquando exinde magistrum habui. Du vivant de Charlemagne, nous le trouvons à la cour de Louis le Débonnaire, alors roi d’Aquitaine ; il remplit l’office de chapelain et. semhlet-il. enseigne l’Écriture sainte. Il écrit un commentaire sur la Genèse, vers 811, in Cassinologio palatio, natali Ludovici régis loco. Cf. F. Dûmmler, Montais. Gt nia hist. Epist., t. iv. Karnlini aswi, t. a, Berlin, lî p. 590-598, et. pour l’identification de l uni,

Ul, Chevalier, Répertoire des sources - du

moyen âge. Topo-bibliographie, col. 600. VerBIS ; dan’t qu’il est dans le palais royal d’I Livuil en Auv. a d la lettre dédicatoire de VEnarratio in EpisloUmx D. Paul, ad Galalas, P. L., t. civ, col. 841, Dructeran, peut-être ahbé de SamVChaflri I’-1>"

il a dédie son commentaire de la (’.en.-.’, le presse d’entreprendre « un travail fructueux sur les l.pitres de

saint Paul. Louis le Débonnaire étant devenu empereur par la mort de Charlemagne (814), Claude le suit à Aixla-Chapelle, où il explique l’Écriture aux clercs de l’école palatine. Il y rencontre Juste, abbé du monastère de Charroux (diocèse de Poitiers), qui lui demande, pour ses moines, une exposition de l’Évangile de saint Matthieu ; Claude la compose en 815 ou 816. De tous ses écrits c’est celui qui nous a été conservé par le plus grand nombre de manuscrits ; E. Dùmmler, dans Sitzungsberichte der K. preus. Akademie der WUsenschaften, Berlin, 1895, p. 430, mentionne neuf manuscrits. Vers la même date Claude dédie à Dructeran son commentaire de la lettre aux Calâtes. Louis le Débonnaire le nomme évêque de Turin, vers la fin de 817 ou en 818. Cf. F. Savio, Gli anticlii vescovi di Torino, Turin, 1889, p. 38-40 ; E. Comba, 1 nostri protestante, t. i, Avanti la Rifortua, Florence, 1895, p. 121-123.

C’est le temps où avait éclaté la révolte de Bernard, roi d’Italie, contre l’empereur, son oncle. F. Savio regarde comme probable que Louis le Débonnaire préposa Claude à l’Église de Turin pour avoir, dans ce poste important, un homme énergique et dévoué, ce qui était d’autant plus utile que Bernard avait compté des partisans dans le clergé italien ; il explique, op. cit., p. 42, 50-51, 55, par les services rendus, la faveur dont Claude jouit à la cour impériale et l’indulgence qu’il y trouva jusqu’à la fin de sa vie. Claude fut-il promu malgré lui, comme il l’affirme ? C’est là, observe.lonas d’Orléans, P. L., t. cvi, col. 315, une chose qu’il faut laisser au jugement de Dieu. Du reste, Jonas, ibid., col. 310, dit qu’il fut choisi par l’empereur ut aliornm utilitatt, doctrina prœdicationis cvangelicse, quse illi admodnm inesse videbatur, consulerct, et que, de fait, Claude s’appliqua au ministère de la prédication pro viribus. Tout absorbé qu’il fût par les soucis de la charge pastorale et par des préoccupations d’ordre profane (il dut combattre les Sarrasins), Claude n’abandonna pas ses études sur l’Écriture. Après les commentaires sur les lettres aux Éphésiens et aux Philippiens, dédiés à Louis le Débonnaire et qui sont à peu prés de la même date que la nomination au siège de Turin, il rédigea des commentaires sur les autres Epitres de saint Paul, sur le reste du Pentateuque, sur Josué, les Juges, Buth, les Bois. Un de ses compatriotes, Théodemir, abbé du monastère de Psalinody (diocèse de Nimes), était son meilleur ami et le principal excitateur de ses travaux ; la plupart lui furent dédiés.

Or, le commentaire sur la lettre aux Corinthiens (vers 820) ayant effarouché l’orthodoxie de Théodemir, celui-ci envoya ce commentaire à la cour d’Aix-la-Chapelle, pour en obtenir la condamnation. Claude l’apprit (vers 822) par une lettre venue de l’entourage de l’empereur. Il composait alors, pour Théodemir, son commentaire sur les Rois ; il le continua, non sans ouvrir une parenthèse dans laquelle il adressait dos reproches à Théodemir et lui disait qu’à Aix-la-Chapelle, loin de condamner son ouvrage, on lui avait fait un accueil flatteur. Cf. /’. L., t. civ, col. 811. Théodemir répliqua par inir lettre où il pressait Claude d’abandonner ses

opinions hétérodoxes..Nous savons par ailleurs, cf. P. L., t. cv, col. iflO, 165 ; t. cvi, col. 311, que, dés son arrivée dans son diocèse, Claude avait combattu absolument le culte des images, et ordonné de détruire toutes celles

— et elles étaient nombreuses — qu’il y avait dans les églises ; < ! < là beaucoup d’agitation parmi les fidèles. Le pape Pascal I" 1 infligea à Claude un blâme, demeuré platonique. La lettre de Théodemir n’eul pas plus de succès. Cl. mile répondit (vers 825) par V Apologeticum ati/ue rescriplum Claudii epwcopi adrersus Theodemiruni abbatem ; il reprenail ses idées favorites, s’il ne lis accentuait encore.’n 825 se tint, à Paris, un s

ode qui, d’une pari, protesta contre le culte des images, mais, ii, mire part, défendit de les détruire et

déclara que c’est une injustice de comparer les images à la croix. Cf. Hefele, Histoire des conciles, trad. Delarc, Paris, 1870, t. v, p. 23C-2’12. Ces deux derniers points contredisent l’enseignement de Claude, et il semble que Dungal ait en vue ce svnode quand il dit, 7’. L., t. cv, col. 529-530, cf. col. 468^ que Claude refusa de s’y rendre, l’appelant une « assemblée d’ânes » , et que les évêques trop patients eurent le tort de l’épargner. Cf. Savio, op. cit., p. 47-48. En tout cas, les doctrines de Claude furent condamnées par l’empereur et « les hommes très prudents de son palais » . Cf. Jonas, P. L., t. evi, col. 306. Louis le Débonnaire envoya des extraits de V Apologeticum à Jonas d’Orléans, qu’il invita à en écrire la réfutation. Peut-cire fit-il la même demande à d’autres personnages. L’hypothèse est vraisemblable en ce qui concerne Dungal le reclus, lequel, dans ses Responsa contre Claude (vers 827), reproduit et réfute ces fragments. Ouanl à Éginhard, a-t-il écrit à la demande de l’empereur son traité De adoranda cruce, et même ce traité, qui est des environs de 830, fut-il dirigé contre Claude ? Le peu que nous savons de cet ouvrage, par Servat Loup de Ferrières, Epist., iv, P. L., t. exix, col. 415, ne permet pas de répondre à ces questions. Claude, d’humeur combative et d’une grande ténacité de caractère, ne se laissa pas amener à d’autres idées que celles qu’il avait soutenues. D’ailleurs, Louis le Débonnaire et son fils Lothaire, roi d’Italie, ne le troublèrent pas dans la libre possession de son évêché, en dépit des exhortations de Dungal, P. L., t. cv, col. 466-467, à le châtier rigoureusement. Claude demeura fidèle jusqu’au bout aux doctrines qui lui avaient valu la contradiction ; Walafrid Slrabon, De rébus ecclesiast., c. viii, P. L., t. exiv, col. 929, dit que sico judicio damnatus inleriit, ce qui est la formule usitée par les auteurs ecclésiastiques pour indiquer l’obstination finale dans l’erreur. Cf. Savio, op. cit., p. 50. Sur des légendes ultérieures relatives à sa mort, cf. E. Comba, / nostri protestanli, t. i, p. 148. Il mourut certainement avant le 22 janvier 832, date où son successeur Vitgaire figure dans un acte de partage de biens de l’abbaye de Saint-Denis, cf. Mabillon, De re diplomatica, 2e édit., Paris, 1799, p. 519, et p. 450, table 53 — et probablement vers 827, car, si Dungal acheva vers cette date, et du vivant de Claude, ses Responsa, Jonas d’Orléans, qui avait entrepris, vers le même temps que Dungal, de réfuter l’évêque de Turin, arrêta la rédaction de son traité’en apprenant la mort de Claude. Plus tard, après la mort de Louis le Débonnaire (810), donc entre 810 et 843, année où il mourut lui-même, Jonas reprit la plume et termina l’œuvre interrompue, car ilavaii été avisé que les erreurs de Claude revivaient dans ses disciples, /’. L., t. CVI, col. 307 ; il offrit son traité à Charles le Chauve.

IL Doctrines. — 1° Doctrines certaine* de Claude de Turin. — 1. Claude comprenait les exigences de la foi catholique. Dans la préface de son commentaire sur les Hois, P. L., t. civ, col. 634, il dit qu’il n’y a qu’une chose qu’on doive examiner dans celui qui s’occupe de l’Ecriture, utrumne vera et catholica an falsa et Itssretica sini (/ ! < « ’scribit. Dans son Apologeticum, P. L., I. CV, col. 459, il déclare tenir à l’unité : ego enini non sectam doceoqui unitatem teneoei veritatem proclama. Il est vrai qu’il ajoute qu’il a toujours combattu et qu’il ne cesse pas de combattre de son mieux o les séries, les schismes et les superstitions » , c’est-à-dire le culte des images. On sait — qu’il suffise de se rappeler les livres carolins, voir t. ii, col. 1792-1799, le concile de Francfort (794), le synode de Paris (825), cf. Mabillon, Acta sanctorum ont. S. Benedicti, sœc. iv, part. II. Paris. 1677, p. xi-xxix — les idées assez généralement admises dans l’Église franque sur les images ; si l’on protestai ! qu’il ne faut pas les détruire, on leur déniait toute espèce de culte, même de dulie, même relatif. L’adversaire do 1.

CLAUDE DE TURIN

10

Claude, lonai ci’Orl n P. L., t. cvi, col’d’accord avec lui poui rejetei a principe que l’Éi catholique a fini pai

n’eal qu on i" ni i’i 11 5’quelqui

di m dani uni

honneur pour celui qu’elli repi Cl P< tau, Dog atione, I. XV, c xvt.n. 5-6, édit. i.un i vu. p -Jiii 265. Que, du ri

dans le diocèse de I urin, li culte di en pratiqui i vraiment supi ratitii uses, i est très possible et mi ble. Ji mas, /’. L., t. cvi, col. 306, <lii que

ce peuple i lail devi nu él i Evangile. Déjà le

plus illustre des prédécesseurs de Claude sur le de Turin, saint Maxime, avail reproché à son peuple des superstitions qu’il taxai ! d’idolâtrie ; Claude lit un i usage des homélies de saint Maxime, et dul y trouver une Borte de confirmation et peut-être le poinl de départ de quelques-unes de ses idées personm Cf. il. liofiiio, Atti délia r. accademia délie tcien Torino, Turin. 1898, t. xxxiii, p. 275-276. Il ne se conlenta pas de contenir le cnltr des images dans certaines limites, ni même de s’opposera ce qu’on les vénérât ; il ordonna leur destruction. Les raisons par lesquelles il motive sa manière de voir et Je faire sont les suivantes : Quitter le culte des démons pour vénérer les images îles saints, ce n’est pas quitter les ulules mais changer leurs noms, el c’est toujours la même erreur ; s’il ne faut pas adorer les ouvrages îles mains de Dieu, à plus forte raison eaux des I ommes ; se prosterner devant les images c’est courber i.n corps que Dieu a fait droit et qui doit se relever et regarder en haut vers i, . ciel et vers Dieu ; et qu’on ne dise pas que l’honneur rendu aux images s’adresse aux saints qu’elles représentent, car les saints non plus n’ont droit à aucun culte. Cf. Apologet., P. /.., t. cv. col. 16l : Quæstiones x.xx super libros Regum, 1. IV, c. xxx, col. 825-827. — 2. De la négation du culte des images Claude passe, en effet, à celle du culte des saints et des anges. Dans son commentaire sur le Lévitique (823), il avait touché à cette question, P. L., t. CIV, col. 618-620. Il y revient plus fortement dans I Apologet., P. L., t. cv, col. 461, 164. Que personne ne doive s’imaginer que l’intercession des saints dispense, pour le salut, des vertus que les saints ont pratiquées, c’est ce qu’il affirme, et non pas plus clairement que l’Église, .Mais il ne sait pas voir qu’on peut prier un saint et respecter les droits de Dieu qui sauve, et il avance que, si le culte des saints est légitime, il l’était bien plus de leur vivant, quand ils étaient l’image de Dieu, qu’après leur mort, lorsqu’ils ressemblent à des pierres ou à des morceaux de bois privés de sensibilité et de raison. — 3. C’est dire que le culte des reliques à son tour est condamnable. Claude ne manque pas de le proscrire ; il s’en prend surtout au culte des reliques de l’apôtre saint Pierre et, par la même occasion, aux pèlerinages qui se font à son tombeau et aux basiliques des martyrs. Cf. Apologet., P. L., t. cv, col. 463 ; Dungal, /’. /.., t. cv, col. 165. Il croit pouvoir mettre l’origine de la pratique du pèlerinage de liome dans une intelligence grossière et, pour ainsi dire, matérialiste du Tu es Petrus… et tibi daboclaves. Cf..louas, 1. III, P. /.., t. i : vi, col. : i( ;.")- : 17 (.). — 4. Claude est l’cnnemide la croix autant et plus encore que des images. Il en parle sur un Ion sarcaslique. Honorer la croix à cause du souvenir du Sauveur, c’est aimer en.b sus-Christ ce qui a plu aux impies, c’est-à-dire l’opprobre de la passion et la moquerie de la mort ; c’est, comme les Juifs et les païens, ne pas croire à la résurrection. S’il faut adorer la croix parce que Jésus-Christ v a été attaché, il faut adorer bien d’autres choses : il faut adorer puellm virgines quia virgo peperit Christum, les crèches puisqu’il est né dans une crèche, les vieux linges,

VetereS panai, puisqu’il a été enveloppé, à sa naissance.

dans de vieux linges, les ânes puisqu’il est venu à Jérusa’, 1. 102. — 5. 1

demir avait dit

dont ion ami avait ! i objet de la part du seigneur

il’i,

col. i< iq Ue qui

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e apostolique, autant vaut du

blâmé, a manqui, neur

, aient été proi u moyen

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nnent ta plao et n point

l emploi. il applique la,

phai isient a--,

qu’ils disent, mais non ce qu’ils font, i Donc on doit, en gomme, obéir. — 6. Il i encore bs lignes qui terminent la préface du commentaire de la ici 1 1 nthiens. /’. /.., t. ci

! f -S. A Théûdemir, qui lui demandait p

une exhortation pieuse, Claude répondit qu’il n’avait

rien de maux a lui offrir que la lettre de saint Paul aux

I mer, la i

tollal, unde maxime nunc monachi gloi tiam Dei commendat. ITait-ce là une pure boutade, ou une idée sérii usement exprimée ? I.t faut-il adntu avec E. Comba, / nos tri protettanli, t. i. p. 135, que ce

fut là l’étincelle qui alluma l’incendie, la parole qui détermina Théodemir a dénoncer Claude/ Il est difficile de le dire. lui moins, il ne fut pas question du m et de la grâce dans la suite du débat, et l’apolo^i Claude, dans la partie qui nous est connue, n’aul, pas à croire qu.’Théodomir l’ait contredit sur ce point.

2° / ou faussement at ! >

Claude <lr Puni. — 1. Jonas, /’. L., t. cvi. col. 307accuse Claude d’arianisme ; l’évêque de Turin aurait ressuscité l’hérésie arienne par’-, - prédications et par des écrits qu’il aurait laissés dans les archives épiscopales. U est difficile de croire que cette imputation soit fondée. „ Il se peut faire, obsi rve Richard Simon, Critiquede la Bibliothèque de » auteurs ecclésiastiques et des prolégomt Bible publiés par E. Du Pin,

Paris, 1700. t. i. p. iSii. que ce bruit de l’arianisme de Claude ait été répandu après s, , mort pour rendi mémoire plus infâme. » Jonas. en effet, écrit après la mort de Claude, loin des lieux que Claude habita ; il ne tait reposer son accusation que sur une relation qu’il croit o véridique et sur un fertur, et. pour l’appuyer, il ne trouve rien à prendre dans les ouvrages de Claude. Bien plus, ces ouvrages contiennent des affirmation riées et 1res explicites en faveur de la divinité de, b Christ et de son égalité avec le l’ère. l » ans la belle étude qu’il a faite du commentaire inédit de l’Évangile de saint .Matthieu, (i. Boffito recueille. Atti délia >-. ai cademia délie scienze di Torino, l. xxxiii. p toute une

série de textes aussi clairs que possible. Il constate, p.’279, que Claude iuiora les homélies authentiques de saint Jean Chrysostome sur saint Matthieu et qu’en revanche il lui attribua, avec tous ses contemporains, la paternité’de VOpus imperfectuni in Matth.runi, qui, en réalité, on l’a démontré dans la suite, est l’oeuvre d’un arien ; or à cet écrit Claude n’emprunte (lue b irréprochables, si l’on excepte un mot qui pourrait être suspect à la condition de ne pas le prêter à saint Chrysostome, Dans l’Écriture, Claude préfère au littéral, qu’il assimile a l’humanité visible du Christ, le s-ns spirituel qu’il assimile à sa divinité invisible. Cf. les prologues des commentaires sur le Lévitique et sur saint Matthieu, /’. L.. t. civ, col. 617. 896. l’e ceux qui ont cru le Père supérieur au Fils, il dit. In Epistolam a<l EphestOS, pial., /’. L.. t. civ. col. S1I-S42 : I , mnia, élut nwrtale præcipitium aut lethale vi catholicis auribus denuntio fugienda. Voir encore des fragments de ses commentaires sur saint Paul. P. L.,

t. civ, col. 925-926, sa Chronique (si tant est qu’elle soit de lui), P. L., t. civ, col. 917. — 2. Dungal, P. L., t. cv, col. 466, et Jonas, P. L., t. cvi, col. 309-310, disent que Claude fut le disciple de Félix d’Urgel, et Jonas ajoute même, en s’emparant d’un mot de saint Jérôme, que Félix revit dans son disciple comme Euphorbe dans Pythagore. Mais ni l’un ni l’autre ne disent que Claude a enseigné l’adoptianisme de Félix d’Urgel ; il semble plutôt, à les lire de près, qu’ils tiennent que Félix a mis en Claude des tendances hétérodoxes, peut-être qu’il lui a inculqué le principe de ses erreurs sur les images et le culte des saints. Toutefois, des historiens, tel Bossuet, Hist. des variations, 1. XI, n. 1, édit. Lâchât, Paris, 1803, t. xiv, p. 458, ont soutenu que « Claude de Turin était arien et disciple de Félix d’Urgel, c’est-à-dire aestorien de plus » . Il est possible que Félix ait été le maître de Claude, quoique le passage cité plus haut, où Claude se déclare peu expert à écrire parce qu’il n’a pas étudié la science séculière et qu’il n’a jamais eu de maître, invite à en clouter ; mais il est très possible également que Dungal et Jonas aient rattaché Claude à Félix parce qu’ils étaient Espagnols l’un et l’autre, ou peutêtre sur la foi d’un de ces « on dit » qui circulent si aisément et si vite, alin de mieux attirer la condamnation sur l'évêque de Turin. Foss, dans la Realencyklopâdie, 3e édit., Leipzig, 1898, t. iv, p. 137, est d’avis que quelques expressions du commentaire des Rois ont une teinte de nestorianisme, et il signale ce mot qui, en effet, pris tel qu’il sonne, est nestorien, P. L., t. civ, col. 738 : Thronus eburneus œternam judicis potestatem aura divinitatis fulgentem, quam Dominicus homo a Paire accepit, jiguram gestasse non dubhmi est. Mais il importe de remarquer que, selon son procédé habituel, Claude ne parle pas ici de lui-même ; cette fois il reproduit un passage du pseudo-Eucher, Comment, in libres Région, 1. III, c. xxxiii, P. L., t. l, col. 1161, tenu pour un auteur orthodoxe. Il n’y a donc pas lieu de s’arrêter beaucoup à cette expression, surtout si on la met en présence de tant d’autres expressions irréprochables qui se rencontrent dans l'œuvre claudienne. Et il paraît légitime de conclure, avec E. Dummler, Monum. Germanise lnst. Epis/., t. iv, p. 586, que, si Claude fut le disciple de Félix d’Urgel, il ne suivit pas ses idées.— 3. Les protestants ont fait figurer Claude dans la liste de leurs précurseurs, de ceux qu’ils ont appelés « les témoins de la vérité » . Ils imaginèrent d’abord une théorie, aujourd’hui tombée dans un discrédit absolu, d’après laquelle le protestantisme se rattachait auxvaudois et ceux-ci à l'âge apostolique. Claude de Turin aurait formé un des anneaux de la chaîne ; il aurait laissé des partisans qui se seraient reliés aux vaudois du Piémont. Cf., par exemple, Monastier, Histoire de l'Église raudoise, Paris, 1847, t. i, p. 31. On sait que Bossuet a démoli la fable de l’origine apostolique des vaudois, et que ses conclusions ont lini par s’iui[ aux historiens. La connexion entre les vaudois du xiie siècle et Claude de Turin est une supposition absolument gratuite dont il n’y a pas à tenir compte. Ct. C. Schmidt, Histoire et doctrine de la secte des cathare* ou albigeois, Paris, 1849, t. ii, p. 288. Sur le sy Même adopté par Basnage, cf. Bergier, Dictionnaire de théologie, Lille, 1844, t. i, col. 545-546. — 4. Pour N. Peyrat, Les réformateurs de In France et <lr l’Italie au m siècle, Paris, 1860, p. 01-62, Claude « est un disciple attardé d’Augustin, un devancier lointain de Luther, un ancêtre des réformateurs du xvie siècle. Né sous Charlemagne, non loin de Roncevaux, Claude ible avoir trouvé dans les ravins des Pyrénées, avec la plume de Vigilance, l'épée et le cor d’ivoire de Boland » . Ceci est de la très mauvaise poésie, c’est le contraire de l’histoire. Mais il a a retenir ce mot : « un disciple d’Augustin, qui résume l’opinion de nombreux historiens protestants et précise le point de vue où ils

se placent pour voir en Claude un protestant avant le protestantisme. C’est ainsi que E. Dummler, dans Sitzungsberichte der K. preus. Akademie der Wissenschaften, Berlin, 1895, p. 443, soutient que Claude avait entrevu la contradiction que les prolestants considèrent comme établie entre les idées de saint Paul et de saint Augustin, d’une part, et, d’autre part, les idées qui dès longtemps ont prévalu dans l'Église. Cf. A. Ebert, Histoire générale de la littérature du moyen âge en Occident, trad. Aymeric et Condamin, Paris, 1884, t. il, p. 249 ; E. Comba, I nostri protestanli, t. i, p. 135, 144, 151 ; IL Reuter, Geschichte der religiôsen Aufklârung im Mittclalter, Berlin, 1875, t. i, p. 16-17. Ce dernier va plus loin ; il voit en Claude, p. 20, « un réformateur biblique et un Aufklarer critique, » et, dans sa doctrine, le germe non seulement du protestantisme, mais encore du rationalisme. Cf. F. Tocco, L’eresia nel medio evo, Florence, 1884, p. 154. Ce n’est pas le moment d’examiner si la doctrine officielle de l'Église catholique est en désaccord avec les doctrines de saint Paul et de saint Augustin et si l’augustinisme a préludé à la Réforme. Voir, pour ce dernier point, t. I, col. 23232325. Ce qui est vrai, c’est que Claude de Turin a été un précurseur du protestantisme, comme l’ont été les iconoclastes, Vigilance, Eustathe, en ce sens qu’il a rejeté quelques-uns des enseignements de l'Église qui furent plus tard rejetés par le protestantisme. S’il avait nié « même que la puissance de saint Pierre survive et qu’elle se rattache à un siège spécial » , Ebert, op. cit., t. ii, p. 249, il aurait été un des écrivains hétérodoxes du moyen âge qui sont arrivés le plus près de la doctrine protestante ; irai ; il semble que la parole de Claude sur le « seigneur apostolique » n’est qu’une parole de mauvaise humeur du condamné contre son juge. Sur son commentaire du Tu es Peints et sur sa doctrine eucharistique, cf. Boffito, Atti délia r. accademia délie scienze di Torino, t. xxxiii, p. 284. Quant à faire de lui un « réformateur biblique » , la prétention est insoutenable. Ses travaux sur l'Écriture n’ont rien qui les distingue de la littérature scripturaire contemporaine. Ce sont des calenec Patruni, comme il en parut alors en assez grand nombre, cf. Boffito, p. 261262 ; G. Heinrici, dans Realencyklop&die, 3e édit., Leipzig, 1897, t. iii, p. 766 ; à l’instar des autres, ni plus mal ni mieux, Claude, en s’attachant de façon presque exclusive au sens spirituel, recueillit des textes des Pères et des écrivains ecclésiastiques. Saint Augustin était de beaucoup l’auteur universellement préféré ; Claude, à son tour, le préféra à tous. Voir l'éloge qu’il en fait, P. L., t. civ, col. C » ;  ;."), 835, 841, 927. Plus encore que de considérer Claude de Turin comme un réformateur biblique, il est impossible île voir en lui un précurseur de ['Aufklârung, tel que le définissent Troltsch, dans Realencyklopûdie, 3° ('dit.. Leipzig, 1897, t. ii, p. 225-226, et Reuter lui-même, op. cit., t. i, p. v. Claude est bien un homme du moyen âge. — 5. Mentionnons, pour mémoire, l’attribution à Claude par A. de Castro, Adversus lt ; en>ses, 1. III, Debaptismo, Paris, 1534, fol. liv, de l’opinion que le baptême est invalide si l’on ne fait pas le signe de la croix sur le front du baptisé ; le bon frère mineur montre, par là, qu’il a eu raison d’avouer plus haut, 1. II, De adoratione, fol. XXXI, qu’il connaît mal Claude de Turin.

I. Sources.

Dans /'. L., t. ctv, col. 615-928, en a les commentaires de Claude sur tes Itois et les lettres aux Galates et a Philémon, la préface et la fin du commentaire du Lévitiqui préfaces des commentaires de saint Matthieu et des lettres aux Corinthiens et aux bphésiens, de courts fragments des commentaires sur saint Paul, ainsi qu’une brève ei Insignifiante chronique d’une authenticité douteuse. Les Important extraits do ['Apologeticum atque rescriptum Claudii e, versus

Theutmirum abbatem si ni dans /'. /… t. cv. col. 459-464. Ils onl i té réédités avec lei réraces i u lettres d’envoi des commentaires déjà connue li pn faces inédites des commentaires de la

, . I l ;.’)

inir di mandant i laudi di a nui.’i DUoun 1er, Vonum.GermaniX hitt.Epitt, t.l Un, 1806, i

/’/, t CIV, col 028 634. Ni

mil qui provoqua I [pologeticum di Qaudi Mablli a, Annalet

<n, i. S, Benedicti, Lucqui, 1780, I. II, 1 d pai dom

llquei,

> 6 H). I’i, 1802, i I ikon,

trail. i li chler, Pal, 1864, t. iv, ] Théodemir ré l" miit a cette d deux

parties, el ijue la deuxii me partie a été i d’Or dana le I. ni du » il y a la une méprise.

mi ni du I III. /’./.. t. i vi. roi. 31*),

qu’il va répondre à chacune dei ail aude et pro

nobis et pr de » i venerabill abbate (Théodemir), imo pro

defentione sanctm matris 1. uls, quand il arrive à la

partie de l’apologie qui vise personnellement Théodemir, il lait parler Théodemir lui-même pour réfuter Claude, col. 869 : Hit itti se habentibus, voce ejusdem venerabilis abbatie retpondemus fdeo, o Claudi… C’est là un procédé littéraire ; mal réalité, ce qui Buil est de Jonas, el dans le même ton et du même style que le reste du traité. Ce traité de Jonas est dans P. /.., t. cvi, col. 805-888 ; cf. Serval Loup de Ferrières, Epist., xxvii. P. /… i. cxrx, col. 476. Les Responsa contra perversas Claudii Taurinensis episcopi sententius do Dungal Le reclus sont dans P. /.., t. cv, col. 465-530. Voir encore Walafi id Strabon, De rebut ccclesiast., c. viii, P. /.., t. cxix, col. 928-929 ; Paschase Radbert, Expositio m Matthxum, I. XI, c. xxiv, P. /.., t. cx.x, col. 834-835 ; Hugues de Fleury, Hittoria eeclesiast., l. VI, P. L., t. ci..Mil, col. KYi.

II. Travaux.

Richard Simon, Histoire critique des principaux commentateurs du Nouveau Testament, Rotterdam,

1003, p. 353-365 ; Id., Critique de la Bibliothèque des auteurs ecclésiastiques et îles prolégomènes île la Bible publiés par E. Du Pin, Paris, 1730, t. [, p. 284-290 ; N. Antonio, Bibliut. llispana velus, Madrid, 17KS, t, i, p. 458, 461, reproduit dans P. /.., t. civ, col. 609-616 ; C. Schmidt, Claudius von Turin, dans Zeitachrifl fur historische Théologie, 1843, p. 39 sq. ; C. U. Halin, Geschichte der Ketzer im Mittelalter, Stuttgart, 1847, t. ii, p. 47-58 ; Th. Fbrster, Drei Erbischôfe vor tau Jahren (Claude, Agobard, Hincmar), Gùtersloh, 1873 ; H. Reuter, Geschichte der religiôsen Aufkldrung im Mittelalter, Berlin, 1875, t. i, p. lt>-24, 267-269 ; H. Simson, Jahrbucher des frànkisclien Heiclis unter Ludwig dem Frommen, Leipzig, 1876, t. ii, p. 247-251 ; M. Menéndez Pelayo, Historia de lus lieterodoxos espanoles, Madrid, 188U, t. I, p. 341 ; L. Laville, Claude de Turin (thèse de théologie protestante), Montauban, 18-9 ; F. Savio, Gli anticlii vescovi di l’orino, Turin, 1889, p. 31-56 ; E. Comba, Claudia di Torino ossia la protesta di un vescovo, Florence, 1895 ; Id., / nostri protestanti, t. I, Avanti la informa, Florence, 1895, p, 117-155 ; E. Dummler, Ueber Leben und Lehre des Bischofs Claudius von Turin, duns Sitzungsberichte der K. preus. Aleademie der Wissenschaften, Berlin. 1895, p. 427-443, et dans Monum. Germanise hist., lue. cit., p. 5so-58’J ; G. Boflito, Il codice Vallicelliano c III, Contributo allô studio délie dottrine religiose di Claudio, vescovo di Torino (il s’agit du commentaire de l’Évangile de saint Matthieu), dans Atti délia r. accademia délie scienze di Torino, Turin, 1898. t. xxxiii, p. 250285 ; Foss, dans Realencyklopàdie, 3’(’dit., Leipzig, 1898, t. iv, p. 136-138 ; A. Fisch, Fidèles jusqu’à la mort ou précurseurs et martyrs, Paris, 1904, Voir encore les autres travaux indiqués au cours de cet article, et Ul.Chevalier, Répertoire des sources historiques. Bio-bibliographie, 2 édit., t. î. col. 941.

F. Vernet.