Dictionnaire de théologie catholique/GLOIRE DES ÉLUS IV. Degrés de la gloire

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Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant et Eugène MangenotLetouzey et Ané (Tome 6.2 : GÉORGIE - HIZLERp. 90-92).

IV. Degrés de la gloire. —

Le mot fin dernière peut être pris dans deux acceptions différentes : lin dernière objective, ou souverain bien dont la possession assure aux élus la gloire ou béatitude ; fin dernière subjective formelle, ou relative, c’est-à-dire la possession elle-même du souverain bien par les élus. Voir Fin dernière, t. v, col. 2496. Sous le premier aspect, tous les élus ont la même fin dernière, et, par conséquent, participent à la même gloire ; sous le second aspect, la possession de la fin dernière comporte différents degrés proportionnés aux moyens de chacun des élus. S. Thomas, Sum. theol., P II* q. v, a. 2. Les théologiens envisagent les degrés de la gloire à un double point" de vue : 1° dogmatique, existence même de ces degrés, et c’est la question qui rentre dans l’objet de cet article ; 2° théologique, explication de la différence qui existe au ciel entre les élus et qu’on rapporte à la vision intuitive et à la lumière de la gloire qui accompagne nécessairement cette vision, considérées soit seules, soit par rapport à l’intelligence qu’elles perfectionnent. Cette deuxième question sera traitée à Intuitive (Vision).

L’existence de différents degrés dans la gloire des élus, niée directement par Jovinien, au ive siècle, indirectement par Luther au xvie, a été authentiquement définie par le concile de Florence, dans le décret d’union, Denzinger-Bannwart, n. 693 ; elle est supposée par le concile de Trente, De juslificatione, can. 32, n. 842. Elle est affirmée : 1° par l’Écriture ; 2° par la tradition ; 3° par la raison théologique. Mais cette affirmation a été exagérée par certains auteurs dans le sens d’une inégalité nécessaire entre chacun des élus.

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IDÉMONSTRATION HE LA DOCTRINE CATHOLIQUE. —

î ° L’Écriture. — On trouve l’inégalité des degrés de la gloire des élus : 1. explicitement enseignée par Joa., xiv, 2 ; I Cor., xv, 41, rappelant qu’il y a « plusieurs demeures dans la maison du Père céleste » et que les différences de gloire des élus ressucités sont comparables aux différences d’éclat du soleil, de la lune, des étoiles ; 2. expressément supposée, chaque fois qu’il est question de rendre à chacun, au dernier jour, dans la proportion de ses bonnes œuvres, Matth., xvi, 27 ; I Cor., ni, 8 ; II Cor., ix, 6 ; la gloire au ciel est, en effet, un véritable salaire, Matth., v, 12 ; x 42 ; xix, 17 ; xx, 8 ; II Tim., iv, 8 ; II Joa., 8 ; Apoc., xxii, 12 ; 3. indiquée sous forme d’analogie dans certaines comparaisons et paraboles, Dan., xii, 3 ; Is., lvi, 5 ; Matth., vii, 1, 2 ; x, 41 ; xiii, 3-9, cf. col. 1405 ; Marc, iv 24 ; Luc, , vi, 38 ; xix, 16-20 4. implicitement affirmée dans l’inégalité des peines de l’enfer. Luc, xii, 47, 48 Apoc, xvii, 7 ; cf. Enfer, t. v, col. 113

Jovinien, au dire de saint Jérôme, Adversus Jovinianum, 1. II, n. 3, P. /, ., t. xxiii, col. 285, 286, enseigna l’égalité de la récompense pour tous les élus, en prétendant s’appuyer sur l’autorité de Matth., xx, 1-16. Il s’agit de la parabole où les ouvriers, venus dans la vigne du père de famille à différentes heures de la journée, reçoivent indistinctement le même salaire pour des durées fort inégales de travail. On n’a pas à faire ici l’exégèse de cette parabole : il suffit d’expliquer le sens allégorique du denier, salaire dé tous les ouvriers sans exception. Sans s’arrêter à l’interprétation singulière de Vasquez, In I" 1 Sum. S. Thomie, disp. XLVII, c. ni, lequel n’admet la récompense que pour les derniers venus, et veut que les premiers « appelés » n’aient pas été « élus » , c’est-à-dire sauvés, on peut dire avec l’unanimité morale des Pères et des théologiens que le denier représente la béatitude objective, égale pour tous, et non la béatitude subjective, formelle ou relative, dans laquelle seule les inégalités peuvent se produire. Cf. S. Thomas, Sum. theol. I 1, II’1’, q. v, a. 2, ad 1’"" ; Bellarmin, De sanctorum bcoliludine, c. v. Voir l’explication de la parabole, à ce point de vue théologique, dans Suarez, De Deo uno, 1. II, c. xx, n. 8-20 ; cet auteur trouve même dans la différence de traitement indiquée par les termes primi et novissimi une preuve directe de l’inégalité de la gloire chez les élus, n. 20. D’ailleurs, dans l’explication d’une parabole, il n’est pas nécessaire que chacune des phrases de la parabole trouve son application particulière ; il suffit que l’enseignement général soit donné. S. Jean Chrysostome, In Maith., homil. lxiv, n. 3, P. G., t. lvii-lviii, col. 612. Or, dans la parabole des ouvriers, il n’entre pas dans la pensée de Jésus d’enseigner la répartition des récompenses proportionnellement aux mérites de chacun, mais de rappeler que la gloire du ciel ne doit pas se mesurer à l’ancienneté de la vocation, ni à la durée du travail, mais à la fidélité à cette vocation et à la ferveur avec laquelle on remplit son devoir. Suarez, loc. cit. ; cf. Salmanticenses, De visione Dci, disp. V, n. 4 ; Becan, Theologiæ scholaslicæ, part. I, tr. I, c. ix, q. ix, n. 3 ; Petau, De Deo Deique propriclalibus, I. VII, c. xi, n. 5. Les murmures des ouvriers, la réponse du père de famille expliquant l’égalité du salaire par son seul bon plaisir, ne s’opposent pas à cette interprétation générale du denier, Maldonat, In h. I. ; Suarez, loc. cit., et n’ont été introduits dans la parabole que pour provoquer la réponse du père de famille. Knabenbauer, In Evangelium Malthsei, Paris, 1892, p. 176-177. Ces murmures n’indiquent donc pas une tristesse ou une envie quelconque chez les élus. S. Jean Chysostome, loc. cit. Cf., pour l’interprétation de la parabole, Jean de Saint-Thomas, Cursus théologiens, disp. XV, a. 6, n. 39 ; Hurter, Theologise dogmaticx compendium, t. iii, n. 840 ; Petau, op. cit., c. xi, en entier ; Knabenbauer, op. t/7., p. 171 sq. Il faut se rappeler que la leçon, avec la menace qu’elle renferme, est donnée directement aux juifs, les appelés de la première heure ; voir, dans leurs commentaires, Corneille de la Pierre ; dom Calmet, Van Steenkiste, Schegg ; mais elle doit s’appliquer également à tous les hommes, S. Jean Chrysostome, loc. cit., n. 4, et aux apôtres eux-mêmes. Cf. Fillion, Évangile selon S. Matthieu, Paris, 1898, p. 390.

La tradition.

L’erreur de Jovinien fut, dès

son apparition, notée comme telle. Quelques scolastiques, et, en particulier, les Salmanticenses, loc. cit., n. 1, affirment que cette erreur fut condamnée au concile de Télepte. C’est une erreur. Voir Hefele, Histoire des conciles, trad. Leclercq, t. ii, p. 73. Il s’agit d’une lettre synodale du concile de Milan, en 390, lettre très probablement écrite par saint Ambroise et adressée au pape Sirice. Hefele, loc. cit., p. 78 ; Mansi, Concil., t. iii, col. 689. Cette lettre décrit ainsi l’hérésie de Jovinien, en ce qui concerne la gloire des élus : Agreslis ululatus est… diversorum gradus, abrogare meritorum et pauperlalem qu.amd.am cœlestium remuneralionum inducere, quasi Christo una sit palma, quam tribuit, ac non plurimi abundent tituli præmiorum, n. 2, P. L., t. xvi, col. 1124. Cette lettre est, du moins, un témoignage authentique de la tradition catholique. Jovinien d’ailleurs avait été condamné pour cette erreur au

concile de Rome de la même année et le concile de Milan ne faisait que renouveler la condamnation portée à Rome. Voir Hefele, loc. cit. Le témoignage de saint Jérôme, Adversus Jovinianum, 1. II, n. 34, P. L., t. xxiii, col. 333, est tout aussi concluant. L’argumentation du saint docteur est fondée, non seulement sur la raison théologique ; mais sur l’autorité de l’Écriture. Matth., xx, 25, 26 ; Joa., xiv, 2 ; I Cor., xv, 41.

C’est surtout en commentant Joa., xiv, 2, et I Cor., xv, 41, que les Pères ont proposé la doctrine authentique sur ce point. — 1. Sur Joa., xiv, 2, voir S. Augustin, In Joanncm, tr. LXVIII, n. 2, P. L., t. xxxv, col. 1812 ; cf. De sancta virginitate, c. xxvi, P. L., t. xl, col. 410 ; S. Cyrille d’Alexandrie, In Joannis Evangelium, P. G., t. lxxiv, col. 181 sq. ; Tertullien, Adversus gnosticos scorpiace, c. vi, P. L., t. ii, col. 134 ; De monogamia, c. x, P. L., t. ii, col. 942 ; S. Cyprien, De habilu virginum. n. 23, P. L., t. iv, col. 463, qui ajoute à son commentaire cette remarque, que si le Christ a dit qu’il y a plusieurs demeures dans la maison de son Père, c’est pour nous exciter à mériter les meilleures ; cf. De exhortatione marlyrii, c. xii, xiii, P. L., t. iv, col. 673 sq. ; S. Hilaire, Tract, in ps. lxi v, n. 5, P. L., t. ix, col. 415 ; S. Ambroise, De bono mortis, c. xii, n. 53, P. L., t. xiv, col. 564 ; cf. In Lucam, 1. V, n. 62, P. L., t. xv, col. 1653 ; S. Prosper, Sententiarum, 364, P. L., t. li, col. 846 ; S. Grégoire le Grand, Moral., 1. IV, c. xxxvi, P. L., t. lxxv, col. 677 ; 1. XXXV, c. xix ; cf. In Ezechielem, 1. II, homil. iv, n. 6, P. L., t. lxxvi, col. 777, 977. — 2. Sur I Cor., xiv, 41, voir S. Basile, De Spirilu Sanclo, c. xvi, P. G., t. xxxii, col. 133 sq. ; S. Cyrille d’Alexandrie, In Episl. I ad Cor., P. G., t. lxxiv, col. 905 ; S. Jean Chrysostome, In I" m ad Cor., homil. xli, n. 2, 3, P. G., t. lxi, col. 358 sq. ; Théodoret, Interpretatio Episl. Ie ad Cor., P. G., t. lxxxii, col. 365 ; Tertullien, Adversus gnosticos scorpiace, loc, cit. ; De resurreclione carnis, c. lii, P. L., t. ii, col. 872 ; S. Hilaire, Tract, in ps. lxiv, P. L., t. ix, col. 416 ; S. Augustin, De sancta virginitatc, loc. cit. ; In Joannem, tr. LXVTI, n. 1, P. L., X. xxxv, col. 181 ; S. Jérôme, Adversus Jovinianum, loc. cit. ; S. Fulgence, Ad Trasimundum, 1. III, c. iv, De Trinitate, c. xiii, P. L., t. lxv, col. 271, 508 ; S. Grégoire le Grand, Moral., l.XXXV.c.xix, P. L., t. lxxvi, col. 778 ; S. Bernard, Apologia ad Gullielmum, c. iv, n. 9, P. L.. t. clxxxii, col. 904. S. Thomas explique le texte île saint Paul des différences des seuls corps glorifiés. In 7°" ad Cor., c. xv, lect. vi.

Le -P. Petau, De Deo Deique proprietalibus, 1. VII, c. x, se demande si Origène ne serait pas tombé dans l’erreur de Jovinien. Voici la traduction latine du texte incriminé : Ego exislimo in ipso statim initio bcatitudinis, qua jruuntur ii qui salvi fiunt, quoniam nondum purgali sunt gui taies non sunl, inde oriri illam luminis bealorum diflcrcntiam ; sed postquam a loto Christi regno omnia collecta jueriid scandala, quemadmodum supra a nobis traditum est, parientesque iniquilatem cogilaliones in fornacem ignis fuerinl conjectie delerioraque absorpta et intérim ad se redierinl hi qui sermones mali filios admiserant, tune fulurum est ut in Palris sui regno fulgeanl justi, unum solare facti. In Matth., tom. x, n. 3, P. G., t. xiii, col. 841. Ce texte semble plutôt, et c’est aussi la remarque de Petau, loc. cit., refléter l’erreur de’apocalastase. Voir Enfer, t. v, col. 58. Entre les élus et les damnés, qui taies non sunt, il y a au début du bonheur des élus, une différence ; mais après la purification des damnés, la même lumière resplendira en tous. Il s’agit de la gloire objective et non de la gloire formelle. Entre les élus eux-mêmes, parce qu’ils sont tous soumis à une purification au jugement, il y a au début une différence. Voir Feu du jugement, t. v, col. 2241. Cf. A. Michel, Origène et le dogme du purgatoire, dans les Questions ecclésiastiques, 1913, t. il, p. 407.

3° La raison théologique s’appuie sur cette vérité que la gloire correspond à la grâce et que grâce et gloire sont l’objet du mérite. A des mérites égaux, à des degrés de grâce différents correspondront par conséquent des degrés de gloire différents. Cf. S. Thomas, Sum. theol.. V IV, q. exiv, a. 3, ad 3°" ; In IV Sent., 1. II, dist. XXVII, q. i, a. 3 ; a. 5, ad 1

Cette raison théologique n’a aucune valeur pour Luther et ses disciples, à cause du système protestant touchant le principe de la justification. Voir ce mot. En résumé, pour Luther, il n’y a pas de véritable justice en nous-mêmes ; nous ne méritons d’être appelés justes que par l’imputation des mérites du Christ. Or la justice du Christ est égale pour tous. La conclusion d’un tel principe est que les élus, ne devant rien à leur propre mérite, mais tout au Christ, jouiront tous et chacun du même degré de gloire dans le ciel. On exposera et réfutera à Justification le faux principe adopté par Luther.

Jean de Saint-Thomas, loc. cit., n. 2, ajoute à la raison théologique générale, une raison particulière tirée de la liturgie : « L’Église, dit-il, rend des honneurs très différents aux différents saints ; elle vénère la bienheureuse Vierge par-dessus les anges et les saints ; elle accorde aux apôtres un honneur plus élevé, et elle en agit de même à l’égard de quelques élus qu’elle paraît mettre à part. » Il y a là une simple indication, non un argument véritable.

I. EXAGÉRATION DE LA DOCTRINE CATHOLIQUE.

Quelques théologiens, notamment Pierre de la Palu, cité par Suarez, De allribulis negalivis Dei, c. xx, n. 2, prétendent que l’inégalité des degrés de gloire chez les élus est telle que le même degré de gloire ne pourra pas être commun à plusieurs élus. Une telle opinion, en soi plausible, paraît cependant devoir être rejetée comme exagérée et trop absolue. En ce qui concerne les adultes en effet, nous ne pouvons rien affirmer de précis ; mais rien ne s’oppose à ce que deux âmes se présentent au tribunal de Dieu avec les mêmes mérites et le même degré de grâce et, par conséquent, reçoivent le même degré de gloire. Quant aux enfants morts avec le baptême ou martyrisés avant l’âge de raison, on ne voit pas quel pourrait être, entre eux, le principe d’une inégalité de gloire.

L’argument de Pierre de la Palu repose sur Luc, xx, 36 : Si les hommes sont égaux dans le ciel aux anges, les anges différant entre eux spécifiquement, il doit en être de même des hommes. Tout d’abord, il n’est pas certain que les anges soient tous inégaux en gloire, Suarez, loc. cit., n. 7 ; la différence spécifique des anges entre eux n’est qu’une opinion et ne concerne que l’ordre naturel. Voir Angélologie, t. i, col. 1230. Ensuite, la prédestination des hommes à la gloire peut être indépendante du fait de la chute des anges ; si les hommes tiennent dans le ciel la place des anges déchus et sont par là les égaux des bons anges, c’est peut-être simplement per accidens ; d’où il suit que, même en admettant comme vérité certaine l’inégalité des anges entre eux, aussi bien dans l’ordre surnaturel que dans l’ordre naturel, la même conclusion ne s’imposerait pas pour les hommes.

D’autres théologiens s’emparent de I Cor., xv, 41, et prétendent qu’aucune égalité n’existant entre le soleil, la lune et les étoiles, il ne peut en exister dans les degrés de la gloire céleste, dont l’éclat de ces astres est l’image. C’est trop presser la comparaison de saint Paul ; la grandeur mathématique et l’éclat respectif des astres n’ont rien de commun avec les degrés de gloire des élus. Suarez, loc. cit.

S. Thomas, In Evangelium Joannis, c. xiv, lect. i ; Sum. theol., la II-, q. v, a. 2 ; q. exiv, a. 3 ; In IV Sent., 1. II,

dist. XXVII, q. i, a. 3, 5 ; et surtout 1. IV, dist. XLIV, q. i, a. 4, q. ii, iii, iv ; Suarez, De Deo uno, 1. II, De atlributis negalivis Dei, c. xx ; Jean de Saint-Thomas, Cursus tlieologicus, q. xii, part. I, disp. XV, a. 6 ; Salmanticenses, Cursus tlieologicus. De visione Dei, tr. II, disp. V, dub. i ; Pctau, Theologica dogmata, De Deo Deique proprictatibus, I. VII, c. x, xi ; C. Pesch, Prwlectiones dogmaticiv, t. iii, n. 517-520 ; Hurter, Theologùv dogmaticæ compendium, t. iii, tlies. ccLxxvi, n. 838 ; Jungmann, De novissimis, Ratisbonne, 1871, n. 140, 141, 142, 154,

V. Gloire et grâce, et questions connexes.

Nous ne donnerons ici que quelques brèves indications, toutes les questions touchées devant être exposées aux art. Grâce, Mérite et Prédestination.

1° Gloire et grâce. —

1. Existence d’un rappoil entre la gloire et la grâce. — Rappelons les principes, qui seront développés à l’art. Grâce. La grâce est la vie éternelle dans son principe, Rom., vi, 23 ; la participation à la nature même de Dieu, II Pet., i, 3-11, et, par conséquent, le principe d’une activité, d’une vie nouvelle d’un ordre surnaturel, créé en nous à l’image même du Christ Homme-Dieu, Rom., vi, 4 : II Cor., v, 17 ; Col., ni, 3, et qui doit aboutir à l’état de gloire dans la société des élus. Rom., vi, 22 ; I Cor., i, 9 ; cf. I Joa., i, 3 ; Terrien, La grâce et la gloire, t. i, 1. II, c. n. La grâce est donc le principe de la gloire, puisqu’elle est le principe des opérations d’ordre surnaturel, vision, jouissance, amour, qui constituent voir col. 1395 sq., la gloire essentielle des élus et c’est pourquoi dès ici-bas la pratique des vertus est déjà en quelque sorte une gloire. Eccli., i, 11 ; xxiii, 38. Plus le principe sera puissant, plus les opérations seront intenses : plus la grâce sera abondante, plus la gloire sera parfaite. Il y a donc correspondance entre l’une et l’autre ; grâce et gloire « se rapportent [donc] au même genre, la grâce n’étant en nous que le commencement de la gloire, » S. Thomas, Sum. theol., II" 1P’, q. xxiv, a. 3, ad 2°’" ; la gloire < étant une grâce à son état d’achèvement et de perfection, » Catechismus concil. Trid., De oral, dom., p. iv, le degré de gloire sera proportionné au degré de grâce, et tout accroissement de grâce comportera un accroissement de gloire. Concile de Trente, De justificatione, can. 32, Denzinger-Bannwart, n. 842.

2. Nature de ce rapport.

a) Dans cette vie. — a. Ce n’est évidemment pas un rapport d’identité ; dans cette vie, en effet, il n’y a pas de gloire, parce que c’est la demeure qui passe, le voyage vers la patrie, II Cor., v, 1-3 ; cf. I Cor., xiii, 9, 12 ; Rom., viii, 18, 23 ; Heb., xiii, 14 ; le temps du labeur et du combat, que doit suivre l’éternité de récompense dans la gloire. I Pet., i, 3 sq. ; II Tim., ii, 1 sq. ; cf. I Cor., xv, 19 ; vu, 27 sq. La gloire n’est ici-bas le partage de personne, du moins d’une façon permanente ; l’erreur des béghards sur ce point a été condamnée au concile de Vienne, Denzinger-Bannwart, n. 474 ; voir lh’; r, HARDs, t. ii, col. 532 ; ce n’est qu’au ciel, après la mort, que la gloire pourra être possédée dans la vision béatifique.Denzinger-Bannwart, n.530 ; voirBENOiTXII, t. ii, col. 657 sq. Sur les exceptions possibles de la sainte Vierge, de Moïse, de saint Paul, de saint Benoit, et sur la gloire dont le Christ jouissait nonobstant sa condition mortelle, voir Intuitive (Vision). D’ailleurs la théologie de la gloire et celle de la grâce nous montrent l’identification de la gloire et de la grâce comme impossible. L’ordre de la grâce est constitué par l’habilus qu’on appelle substanlivus (non qu’il soit ontologiquement une substance, mais parce qu’il réside dans l’essence même de l’âme) de la grâce habituelle, d’où découlent, perfectionnant les puissances de l’âme, les habitas operativi des vertus infuses, lesquels disposent l’âme aux actes surnaturels, et les dons du Saint-Esprit. Or, la gloire est formellement constituée,