Dictionnaire de théologie catholique/MACAIRE D'ALEXANDRIE

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Dictionnaire de théologie catholique
Letouzey et Ané (Tome 9.2 : MABILLON - MARLETTAp. 15-16).

Floss, qui donne p. 242 sq. quelques renseignements sur les mss. du Λόγος, se trompe en faisant de Tollius le premier éditeur.

É. Amann.

2. MACAIRE D’ANCYRE, controversiste grec du début du xve siècle, qui mérite plus que la simple mention dont il est l’objet de la part de A. Ehrhard dans K. Krumbacher, Geschichte der byzant. Litt., Munich, 1897, p. 113.

Commençons d’abord par recueillir les quelques données chronologiques qui le concernent. Au c. xcix de son ouvrage, Macaire nous rappelle dans une curieuse énumération les principales villes de L’Europe qu’il a parcourues : Venise, Padoue, Vérone, Pavie, Milan, Gênes, Paris, le fameux Paris, écrit-il, Boulogne, Calais, Londres (Λοῦντρες, suivant l’orthographe qu’il emploie). Comme cet itinéraire correspond exactement à celui que suivit l’empereur Manuel II Paléologue dans sa visite aux cours principales de l’Europe, il est évident que Macaire a fait partie du cortège impérial : et comme le séjour en Europe de l’empereur se place entre le 10 décembre 1399, jour où il quitta sa capitale, et les premières semaines de 1403, époque où il y rentra avec une brillante escorte de chevaliers français, ces dates extrêmes fixent une période importante de la vie de notre auteur. Ceci posé, il devient hors de doute que le Macaire d’Ancyre, qui accompagna à travers l’Europe Manuel Paléologue, doit s’identifier avec le Macaire d’Ancyre dont il est longuement question dans un tomos encore inédit, mais que nous espérons publier bientôt. Il est daté du mois d’août 1409 et conservé dans le Vatic. græcus 1152, p. 185-203. Cette pièce, qui est une vigoureuse condamnation de Macaire ct de son collègue Matthieu de Média, nous apprend que notre auteur n’étant encore que simple prêtre, avait encouru une suspense a divinis sous le patriarche Antoine (1391-1397). Relevé ensuite de cette censure, il avait été promu au siège d’Ancyre sous le patriarche Calliste, qui ne régna que trois mois, par conséquent entre la fin mai et la fin août 1397. Lors de l’élévation au patriarcat de Matthieu de Cyzique, en décembre 1397, Macaire avait en plein synode soulevé contre le nouvel élu une grave objection, celle d’avoir occupé trois sièges épiscopaux, ce qui constituait une irrégularité flagrante. On lui répondit que Matthieu avait bien été, il est vrai, nommé à Chalcédoine, mais qu’il avait été sacré pour Cyzique, ct que Par suite son transfert au siège de Constantinople ne constituait pas, comme on disait dans la langue de l’époque, un fris épiscopat. Macaire n’avait pas insisté, mais durant son absence en Europe, l’un de ses ennemis, Matthieu de Média, avait repris l’argument et manœuvré tant et si bien qu’il avait renversé de son siège le nouveau patriarche. À son retour d’Italie, l’empereur dut réunir sous sa présidence un synode de trente-trois évêques pour établir l’inanité des griefs articulés contre Matthieu, et le replacer sur son trône en vertu d’un tomos synodal signé par tous les évêques présents, y compris les deux opposants. On aurait pu croire l’incident définitivement clos. Or, une année ne s’était pas écoulée qu’à l’instigation des deux prélats la lutte reprit contre le patriarche, toujours accusé du même crime, celui d’avoir occupé trois sièges de suite, car, à les entendre, un évêque nommé (ὑποψήφιος) étant réellement évêque, le patriarche Matthieu était bien τρισεπίσκοπος. Il fallut convoquer un nouveau synode qui condamna les deux opposants à la déposition. Trois ans se passèrent durant lesquels les condamnés se tinrent dans une tranquillité apparente : mais au fond ils n’avaient pas désarmé, et leur temps s’était passé à écrire et à répandre sournoisement des libelles injurieux et contre le patriarche et contre l’empereur. C’en était trop. Un dernier synode, réuni au cours de l’été 1409 et composé de tout le sénat, des fonctionnaires du patriarcat et de quatorze évêques, condamna les deux prélats, nan plus à la déposition, dont ils n’avaient pas été relevés, mais à l’excommunication suivie de la réclusion dans un monastère ou de la déportation dans une île, au gré de l’empereur. L’acte synodal est du mois d’août, deuxième indiction, de l’an 6917, c’est-à-dire de 1409. À partir de ce moment l’histoire se tait, à notre connaissance du moins, sur le turbulent métropolitain d’Ancyre.

C’est sans doute dans sa retraite forcée que Macaire composa contre les Latins un des plus mauvais pan phlets qu’ait produit la littérature byzantine, pourtant si féconde en élucubrations de ce genre. En voici le titre tel que nous le donnent les manuscrits : Μακαρίου μητροπολίτου Ἀγκύρας πόνημα, τὸ μὲν καθόλου κατὰ τῆς τῶν Λατίνων κακοκοξίας, περὶ δὲ που τὰ τέλη κατὰ Βαρλαὰμ καὶ Ἀκινδύνου καὶ τῶν κατ' αὐτοὺς ἀθέων· ὅπερ καὶ διακέκριται εἰς κεφάλαια ἑκατὸν εἴκοσι. Inc. Πολλὰ μὲν καὶ πανταχόθεν τὰ δίχα πάσης ἀντιλογίας. Il n’a vu le jour qu’une seule fois, dans le rarissime recueil du patriarche Dosithée de Jérusalem intitulé : Τόμος καταλλαγῆς, in-fol., Jassy en Moldavie, 1692. p. 1-205. Comme les c. XIX et XX manquaient dans le ms. utilisé par Dosithée, cet extraordinaire éditeur les a remplacés, p. 22-41, par une tirade de son cru, où, sans le moindre souci de l’anachronisme, on voit figurer les noms de Bellarmin, de Cusa, de Binius, du concile de Pise, dans un écrit composé au début du xve siècle. De l’œuvre même de Macaire, le mieux que l’on en puisse dire est qu’elle donne l’impression d’un salmigondis de textes, où les mêmes arguments sont ressassés cent fois ct finissent par dégager pour le lecteur moderne un ennui dense et intolérable. Dans une courte introduction, Macaire déclare s’être proposé un double but : jo montrer la complète autonomie des quatre sièges patriarcaux de l’Orient et leur totale indépendance du pontife de Rome ; 20 revendiquer la pureté de la foi orthodoxe contre les innovations dogmatiques des Latins. La première partie comprend les c. I-XL, p. 1-69 de l’édit. de Dosithée. La seconde se compose des c. x11-Xcvi, p. 69-168, avec une digression quasiobligée pour l’époque sur la lumière du Thabor et sur la doctrine de Barlaam et d’Acindynus touchant la nature et les opérations divines. Ce hors-d’œuxrTe remplit les c. LXXX-XC, P— 139-159. Le c.cx vi, p. 168-172, défend contre les accusations des Latins l’usage de l’eau chaude à la messe, et les chapitres suivants reprochent à ces mêmes Latins d’avoir causé le schisme. Dans une dernière partie, qui paraît avoir été ajoutée après coup Pour arrondir le volume, l’auteur attaque à son tour certains usages latins, en particulier les azymes, et prétend prouvèr que la convocation et la présidence des conciles appartiennent exclusivement à l’empereur, qui reste libre de s’y faire représenter Par qui bon lui semble, enfin, dans les c. cxm-cxx, les plus violents peut-être de tout l’ouvrage, il accuse les Latins d’avoir violé à peu près tous les canons par une série de crimes, qui se trouvent être précisément les péchés mignons des Grecs. Disons-le pourtant à la décharge de Macaire, le baptême latin a trouvé grâce à ses yeux, ct il reconnaît qu’une simple onction suflit pour admettre un papiste au sein de l’orthodoxie. Tel est l’ensemble de cet ouvrage, l’un de ceux où ont puisé à pleines mains les polémistes postérieurs, à commencer par Marc d’Éphèse ; c’est que Sur chaque point Macaire accumule les textes à tort et à travers, et il ne reste plus, à qui veut faire montre d’érudition, qu’à trier dans le tas. À en croire A. Démétracopoulos, Ὀρθόδοξος Ἑλλάς, Leipzig, 1872, p. 89, suivi par A. Palmieri, Dositeo patriarca greco di Gerusalemme, Florence, 1909,