Dictionnaire de théologie catholique/ORIENTALE (MESSE) V. Conclusion

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Dictionnaire de théologie catholique
Letouzey et Ané (Tome 11.2 : ORDÉRIC VITAL - PAUL (Saint)p. 175-177).

V. Conclusion. —

La liturgie romaine est sobre dans son expression et dans son développement ; la liturgie orientale, par contre, est très expansive, parce qu’elle est plus populaire et par conséquent plus primitive ; témoin les litanies diaconales qui peuvent être appelées : les invocations orientales. C’est un thème ordinaire de toute liturgie orientale. Le diacre interprète de l’assemblée, fait la demande, précise l’intention, et l’assemblée répond : Kyrie eleison. Le célébrant paraît être oublié, alors qu’il est uni aux fidèles, il intercède pour eux à voix basse et présente leurs requêtes. Les prières Iitaniques reviennent à plusieurs reprises dans la messe et presque toujours sous la même forme. Quant aux demandes et aux intentions, elles sont répétées plusieurs fois dans la même litanie et, presque toujours, dans les mêmes termes.

Dans toutes les liturgies orientales, on remarque la grande prodigalité d'épithètes, de synonymes et d’adverbes. Ils se pressent et s’entassent pour n’exprimer qu’une idée ; c’est encore un signe d’antiquité ; et c’est franchement populaire. En Orient, la piété est plus affective que raisonnée. En quelques mots l’oraison romaine formule la demande et précise les motifs de cette demande, alors qu’en Orient les mêmes idées, ou presque, sont répétées à satiété.

Par conséquent, le peuple oriental est conscient que

le sacrifice est offert pour lui et qu’il est de son devoir d’y prendre part. C’est pourquoi on l’entend répondre souvent, aux prières du prêtre et du diacre. Par les acclamations, les réponses et les doxologies, il rappelle les premiers chrétiens entourant leur évêque, à la fraction du pain.

Pendant la consécration même, il confesse sa foi en la présence réelle. C’est donc qu’il prend une part très active à la liturgie. Cette activité même dégénère en bruit et en désordre — il n’y a aucun mal en cela, c’est un signe de vie et d’intérêt. — Cela oblige le diacre à intervenir fréquemment, surtout avant chaque action un peu importante, pour réclamer le silence et l’attention. Il dit aux fidèles de se lever, de prier, d’incliner la tête, d’adorer, de se pardonner mutuellement, de se donner le baiser de paix. Il invite à la communion comme il renvoie les indignes et donne ses recommandations de veiller sur les portes.

L’allure populaire n’empêche pas la pompe et la solennité, ni les chants ; qu’on se rappelle la petite et la grande entrée avec leur magnificence byzantine. Tout se déroule et se développe normalement.

Cependant les tendances romanisantes regrettables tronquent chez les uniates ces belles liturgies. On se demande quelquefois ce que vient faire telle oraison romaine et telle formule de consécration. On a déformé ces liturgies, en voulant les abréger, à l’usage de la messe quotidienne. Les correcteurs des livres des uniates étaient trop zélés. Ils voyaient poindre partout l’hérésie, alors qu’il s’agissait d’expressions propres à la liturgie orientale. Ils ont exercé à satiété leur talent de correcteur, en remplaçant les belles expressions par d’autres moins heureuses. En modifiant, résumant, substituant, ils ont créé un nouveau type de liturgie tout à fait amorphe. Mais ces influences n’ont pas atteint tous les rits. Bien entendu, des diptyques de tous les rits à l’usage des uniates, on a supprimé les noms des hérétiques, en y substituant les noms des docteurs catholiques, du pape et de la hiérarchie unie à Rome.

Une seconde note caractéristique des liturgies orientales est l’influence de la théologie orientale. Celle-ci est, en elîet, trinitaire et christologique. Les luttes qui ont préoccupé si longtemps l’Orient à ce sujet ont déterminé ce courant d’idées et une plus grande précision de la pensée. Tout cela s’est fait sentir dans le domaine liturgique. Encore un indice en faveur de l’antiquité de la liturgie orientale : c’est le besoin de concrétiser. On ne s’adresse pas à Dieu en général ; mais à chacune des personnes de la Trinité. Si l’on prie l’une, on ne manquera pas d’adresser une prière aux deux autres. Ce qui explique l’existence de l'épiclèse. Et toujours après avoir nommé Dieu, on nomme les personnes divines. La liturgie romaine s’adresse plus volontiers à Dieu. Elle considère plus l’unité de nature que la trinité des personnes.

Mais malgré ces divergences, on a pu remarquer, et surtout dans le tableau comparatif, que toutes les liturgies ont un même cadre : des lectures, le Credo, le baiser de paix, la consécration, le Pater, la fraction et la communion.

Orientale ou occidentale, la liturgie doit être vénérée et respectée, puisque partout se rencontre l’unité liturgique, dans l’unité et l’identité du sacrifice.

I. Textes.

Liturgia sanctorum Apostolorum Ada

cl Maris (texte chaldéen, à l’usage des nestoriens), Ourniiali, 1890 ; Missale chaldaicum ex decreto sanctee congregationis de Propaganda Fide (texte chaldéen à l’usage des uniates) Rome 1767 ; Liber liturgies et lectionwn juxla ritum chaldaicum-malabar (texte chaldéen à l’usage des uniates), Rome, 1844 ; Missale juxla ritum EcclesilS Syrarum Orientalium id est Chaldaiorum, Mossoul, 1901. Missale chaldaicum juxta ritum Ecclesiai naiionis Maronitarum, Rome, 1594 (on trouve sous le titre syriaque la date de 1592), (texte syriaque-arabe ainsi que dans les cinq références suivantes) ; Missale syriacum juxta ritum Ecclesiai Antiochense nationis Maronitarum, Rome, 1716 ; Liber oblationis ad usum Ecclesiic Antiochenos Maronitarum, 2e édit., Beyrouth, 1908.

Missale syriacum juxta ritum Ecclesiæ Antiochenæ

Syrorum, Rome, 1813 ; Missale juxta ritum Ecclesiæ

apostolicæ Antiochense Syrorum, Sciarfe (Mont-Liban) 1922.

J. Goar, ËOyoXÔYtov siveriluate grxcorum, editio secunda,

Venise, 1730. "

Eucologe ou livre des trois anaphores de saint Basile le Grand, de saint Grégoire le Théologien et de saint Cyrille, publié par R. Tuki, Rome, 1736. Eucologe de l’Église d’Alexandrie, Le Caire, 1901 (texte copte et arabe A l’usage des coptes catholiques). Texte éthiopien imprimé, voir Brigthman, op. cit., p. lxxii sq.

IL Traductions. — M. Lapostolest, Liturgie de la messe arménienne (traduction française), Venise, 1851 ; E. Dulaurier, Histoire de l’Église arménienne orientale, 3e édition, Paris, 1859 (avec traduction française de la liturgie) ; C. Charon (C. Korolevskij), Les saintes et divines liturgies en image dans l’Église grecque catholique orientale, Beyrouth, 1904 ; Dom Moreau, Les anaphores des liturgies de saint Jean Chrysoslome et de saint Basile (texte grec et traduction française) Paris, 1927.

F. E. Brightman, Liturgies Eastern and Western, t. i, Eastern liturgies, Oxford, 1896 (texte de la liturgie grecque ; traduction anglaise des autres) ; E. Renaudot, Lilurgiaurm orientalium collectio en 2 vol., 2e édition, Paris, 1847 (traduction latine de nombreuses anaphores) ; P. Le Brun, Explication de la messe, contenant les dissertations historiques et dogmatiques sur les liturgies de toutes les Églises du monde chrétien, t. ii, m et iv, Paris, 1778 (traduction latine et française de plusieurs liturgies) ; J.-A. Assémani, Codex liturgicus, t. v, vu (anaphores des Églises de Jérusalem, d’Antioche et d’Alexandrie, texte original, syriaque, grec, arabe ou copte avec une traduction latine), Rome, 1752-1754, reproduit par procédé anastatique, Paris-Leipzig, 1902.

H. A. Daniel, Codex liturgicus Ecclesiæ universæ, in epitomen redaclus, t. iv, Codex liturgicus Ecclesiæ orientalis, Leipzig, 1853 (texte de la liturgie grecque et traduction atine des autres liturgies). Ces quatre derniers ouvrages donnent des dissertations sur les différentes liturgies.

III. Travaux.

Mgr Rahmani, Les liturgies orientales et occidentales, Beyrouth, 1929 ; R. Janin, LesÉglises orientales et les rites orientaux, Paris, 1929 ; R. Janin, Les Églises séparées d’Orient, Paris ; Duchesne, Origines du culte chrétien, 5e édit., Paris, 1925 ; P. Dib, Étude sur la liturgie maronite, Paris, 1919 ; M. Andrieu, Immixlio et consecratio. La consécration par contact dans les documents liturgiques du Moyen Age, Paris, 1924 ; dom Moreau, Les liturgies eucharistiques, Paris, 1927 ; J.-M. Hansens, Instilutiones lilurgicæ de ritibus orienlalibus, t. ii, De missa riluum orientalium, Rome, 1930 ; Orsi, Dissertalio theologica de liturgica Spirilus invocatione, Milan, 1731 ; Prince Max. de Saxe, Pralationes de ritibus orient., t. i et ir, Fribourg, 1913. — Dictionnaire d’archéologie chrétienne et de liturgie, art. Antioche (liturgie) ; Alexandrie (liturgie) ; Anaphore, Anamnèse ; Épiclèse ; Bénédiction ; Communion, Fraction ; Litanies ; Grecque (liturgie) ; Saint Jacques (liturgie de) ; Addée et Maris ; Caucase. — Dictionnaire d’histoire et de géographie ecclésiastiques, art. Antioche ; Alexandrie ; Arménie.

Voir en outre dans ce dictionnaire : art. Alexandrie Antioche, Arménie, Liturgie, Maronite (Église), Mozarabe, Messe, Monophysisme, Nestorienne {Église),

I. Ziadé.