Dictionnaire de théologie catholique/PIERRE DE LUNA

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Dictionnaire de théologie catholique
Letouzey et Ané (Tome 12.2 : PHILOSOPHIE - PREDESTINATIONp. 292-294).
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45. PIERRE DE LUNA (13287-1422), qui fut, durant le Grand Schisme, le pape d’Avignon Benoît XIII.

Il ne saurait être question de traiter à son propos toute l’histoire du Grand Schisme, à laquelle sera consacré un article spécial. On indiquera simplement ici, à très grandes lignes, le curriculum vitæ de ce personnage, en signalant aussi les productions canoniques et théologiques sorties de sa plume.

I. Vie.

1° Jusqu'à son élection. — Pierre Martinez de Luna est né dans la ville d’Illueca (province actuelle de Saragosse) vers l’année 1328. Cette date se déduit du fait que, lors de son élection au Siège apostolique, en 1394, il avait soixante-six ans. Voir N. Valois, La France et le Grand Schisme, t. ii, p. 16, n. 4. Sa famille était l’une des plus considérables du royaume d’Aragon ; son père, Jean Martinez de Luna, était de très ancienne noblesse, sa mère, dona Maria Perez de Gotôr et Alagon, une des plus riches héritières, apparentée, d’ailleurs, à nombre de familles distinguées. Pierre fut envoyé de bonne heure à l’université de Montpellier, où il s’adonna à l'étude de l’un et l’autre droits, et devint finalement professeur de droit canonique. Entre temps, il était entré dans l'état ecclésiastique, avait reçu divers bénéfices et, finalement, la prévôté de la cathédrale de Valence ; c’est à Valence que le pape Grégoire XI alla le chercher pour le faire cardinal-diacre de Sainte-Marie in Cosmedin, le 20 décembre 1375. Électeur de Barthélémy Prignano, qui devenait le pape Urbain VI (9 avril 1378), le cardinal d’Aragon (c’est ainsi que l’on appelait d’ordinaire Pierre de Luna) paraît avoir résisté d’abord à. la tendance qui allait pousser les cardinaux à contester l'élection d’Urbain. Il fut l’un des derniers à quitter Rome pour se joindre aux opposants réunis à Anagni. Finalement, il partagea néanmoins le point de vue des adversaires d’Urbain VI et fut l’un des électeurs, à Fondi, de Robert' de Genève, qui devenait le pape Clément VII (20 septembre 1378). Dès lors, il va se mettre entièrement au service du pape avignonnais.

Dès le 18 décembre 1378, il reçoit de celui-ci les pouvoirs de légat dans la péninsule ibérique, et c’est grâce à son action, secondée par celle de saint Vincent Ferrier, qu’il rallie finalement la péninsule à l’obédience du pape d’Avignon. C’est en Aragon qu’il réussit le plus vite. En Castille, après la grande réunion de Médina del Campo, dont le cardinal d’Aragon est l’animateur (novembre 1380), on se rallie à l’obédience clémentiste (19 mai 1381). Le succès est un ]feu plus difficile à remporter au Portugal ; il ne laisse pas d'être acquis par les efforts de Pierre de Luna à la réunion de Santarem. La Navarre ne se ralliera que plus tard (6 février 1390), après une assemblée tenue à Pampelune, où Pierre joua un rôle non moins actif qu'à Médina et à Santarem.

Le 1 er février 1393, Pierre, qui dans l’entre-temps était rentré en Avignon, est nommé légat a latere non seulement en France, Hainaut, Brabant, Flandre. Ecosse, tous pays de l’obédience d’Avignon, mais en Irlande et en Angleterre qu’il s’agit de gagner, mais où il échoua complètement. En résidence habituelle à Paris, il travaillait activement pour la cause de Clé ment VII, tout en déclarant, à l’occasion, que la meilleure voie pour mettre fin au schisme était la cession volontaire des deux concurrents. Il était loin de désapprouver le mouvement universitaire, qui se prononçait avec une énergie croissante dans le même sens. Aussi, quand il reparut en Avignon, le l" r sep lemhre 139 I. ses rapports avec Clément Y 1 1 étaient-ils assez tendus ; quinze jours plus tard, le pape mourail (16 septembre). Tout ce qu’avait dit jusque-là Pierre de Luna pouvait luire espérer qu’il serait en cette conjoncture l’artisan de l’union. Son influence était grande dans le Sacré Collège ; elle eût pu tout au moins décider ses collègues à surseoir à une élection que le gouvernement français déconseillait. Pierre semble au contraire avoir empêché que la communication de Charles VI, arrivée en Avignon après que les cardinaux étaient déjà entrés en conclave, fût connue de ceux-ci. Il apparaissait d’ailleurs comme le candidat désigné. Partisan connu de la < voie de cession » il allait rallier les suffrages de ceux qui voulaient mettre un terme à un schisme qui avait trop duré. Comme ses collègues, d’ailleurs, il avait juré une promesse, suivant laquelle, au cas où il serait élu, il rechercherait par tous les moyens, y compris la voie de cession, à pacifier l'Église. Le 28 septembre, à l’unanimité des voix, moins une seule, il était élu et prenait le nom de Benoît XIII ; le 3 octobre, il était ordonné prêtre et, le 1 1 du même mois, consacré évêque et couronné pape.

Le pontificat.

Son histoire est désormais l’histoire du Grand Schisme et nous ne l’esquisserons qu'à

très grands traits.

1. Jusqu'à lu convocation du concile de Pise. — Dès le printemps de 1395, Benoît XIII voit arriver une grande ambassade française qui vient sol iciter le pape d’entrer dans la voie de cession. Mais, dès ce moment, il devient évident que Benoît XIII n’a guère l’intention d’exécuter les promesses antérieurement données. Tout au plus se prêterait-il à la « voie de compromis » et, de fait, en août 1396, il envoie à son rival, Boniface IX (élu le 2 novembre 1389 à la place d’Urbain VI) une ambassade destinée à préparer les voies à une entente mutuelle des deux concurrents. Ces atermoiements de Benoît XIII irritent le gouvernement français ; l’idée de contraindre le pape à l’abdication, en refusant de lui obéir, fait son chemin. Finalement, la « soustraction d’obédience » est prescrite par un édit de juillet 1398, qui supprime en France l’exercice de toute juridiction apostolique. L’ensemble du Sacré Collège entre en lutte ouverte avec Benoît XIII, se retire en territoire français et s’associe aux hostilités que le peuple d’Avignon poursuit contre le pape. Assiégé pendant plusieurs années dans le palais des Doms, Benoît résiste héroïquement, tout en se prêtant à diverses négociations. Puis, soudain, en mars 1403, on apprend que le pape, , trompant la surveillance des assiégeants, s’est enfui d’Avignon et s’est réfugié à Château-Renard, dans le royaume de Provence (Il mars). Force est bien de traiter avec lui. Le Sacré Collège, puis la Castille et la France, proclament la « restitution d’obédience » ; le pape rentre ainsi en possession de tous ses droits. Évitant de retourner en Avignon, il s'établit à Saint-Victor de Marseille en 1404, et c’est de là qu’il entame avec le pape de Rome, Boniface IX, de nouvelles négociations dans lesquelles l’obstination de son rival semble lui donner le beau rôle. Celui-ci meurt le 1 er octobre 1404 ; l’ambassade de Benoît essaie vainement d’empêcher une nouvelle élection. Non moins vaines sont les négociations poursuivies avec le nouvel élu, Côme Megliorato (Innocent VII), qui traînent jusqu’en février 1405.

C’est alors que Benoît XIII, qui a réussi à étendre son obédience en Italie, s’engage à nouveau dans cette « voie de fait » qui avait si mal réussi à son prédécesseur. Installé à Gênes, au printemps de 1405, il s’efforce de conquérir par les armes le nord de l’Italie ; il arrive jusqu'à Pise, mais est forcé de rétrograder à l’automne. On le trouvera désormais sur la côte provençale à Nice, à Toulon, à Marseille.

Mais cette attitude de Benoît XIII lui aliène à nouveau la sympathie de ses fidèles. En France, on recommence à parler de soustraction d’obédience. On en

parle de plus en plus quand, la mort d’Innocent Vil (6 novembre 1 106) ayant amené sur le trône de Rome Ange Correr (Grégoire XII ». l’on apprend que le rival île Benoit XIII est absolument décidé à entrer dans la » voie de cession. Le pape avignonnais est dès lors obligé, à son corps défendant, d’entrer en conférence avec Grégoire XII. En janvier 1407, il se déclare prêt à se rencontrer, lui et son collège, avec son rival assisté lui-même de ses cardinaux. Il résignerait ses droite pourvu que l’autre pape en fît autant, et les deux collèges réunis procéderaient de concert à l'élection du nouveau pape.

Toute l’année 1407 et les premiers mois de 1408 seront remplis par des vaines tentatives de rencontre. A voir les choses de l’extérieur, Benoît XIII a maintenant le beau rôle, se portant à la rencontre de son concurrent, arrivant à l’avance aux lieux dont on est convenu, acceptant à plusieurs reprises les changements que propose Grégoire XII. Celui-ci, au contraire, , multiplie les atermoiements, invoque sans cesse de nouveaux prétextes pour retarder l’entrevue, jusqu'à ce qu’enfin la prise de Rome par le roi de Naples Ladislas, 25 avril 1408, lui fournit l’occasion, sans doute cherchée, de se soustraire à ses promesses.

A ce moment, la situation de Benoît XIII apparaît plus forte que jamais, d’autant que l’obédience de Grégoire XII, irritée des manques de parole de son pape, menace de se dérober. Mais un acte inconsidéré de Benoît va le perdre définitivement, au temps même où il pouvait tout espérer. Inquiet de quelques remous qui se manifestent au sein du gouvernement français depuis l’assassinat du duc d’Orléans (22 novembre 1407), il publie, le 18 avril 1408, une bulle, préparée longtemps à l’avance, et qui menace des plus graves peines les souverains qui tenteraient de lui désobéir. Les princes qui gouvernent la France au nom du pauvre Charles VI sont exaspérés ; le 25 mai 1408 paraît, signée par le roi, une « déclaration de neutralité » entre les deux papes rivaux.

2. Du concile de Pise au concile de Constance. — Puisque l’on ne peut rien obtenir des deux papes, il faudrabien que l’on rétablisse l’union sans eux. Les. événements, désormais, vont se précipiter. Les cardinaux de Grégoire XII ont abandonné leur maître, et tentent d’obtenir d’abord de conquérir Benoît XIII à leurs desseins. S’ils n’arrivent pas à le convaincre, du moins parviennent-ils à détacher de lui la plupart de ses cardinaux. Le 29 juin 1408, le Sacré Collège, formé par la réunion des « clémentistes » et des- « urbanistes », convoque à Pise, pour le 25 mars 14119. un concile général chargé de rétablir l’unité dans l'Église.

Benoît XIII, demeuré jusqu’en juin 1408 sur la Rivière de Gênes, essaie de parer le coup en convoquant à Perpignan, pour la Toussaint de- 1408, un concile général. En toute célérité, au cours de juin, il regagne l' Aragon en suivant les côtes de la Méditerranée. Le 1 er juillet il est à Port-Vendres et c’est de là qu’il prépare le concile qui s’ouvre, de fait, à Perpignan, le 21 novembre 1408. Benoît essaie d’y regrouper les débris de son obédience, laquelle reste constituée par l’Ecosse et une grande partie de la péninsule ibérique. Mais il se trompait s’il croyait trouver un appui dans ce concile contre les entreprises du Sacré Collège qui avait définitivement scellé son unité. Son concile se sépare au cours de février 1409. en rédigeant une adresse qui recommande la « cession ». Or, moins que jamais. Benoît XIII était, à ce moment, disposé à l’abdication : « Il en venait à croire que, s’il quittait son poste, l'Église, pour toujours privée de chef légitime, perdrait le pouvoir des clefs, sans espoir de le recouvrer, à moins que Dieu ne consentît à s’incarner une seconde fois. » X. Valois, op. cit., t. iv. p. 52.

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PIERRE DE LUNA. VIE

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Le concile de Pise. lui. réuni le 26 mars 1 109, entendait bien sauver l’Église sans Benoît XIII et sans Grégoire XII. Le procès des deux papes était aussitôt commencé ; le."> juin, la sentence était rendue. Pierre de Luna et Ange Correr, déclares tous deux hérétiques, étaient proclamés déchus ipso facto de toutes leurs dignités. L’ambassade, que Benoit XIII s’était décidé, au début de mai, à faire partir pour le concile, arrivait juste à temps, le 1 1 juin, pour s’entendre signifier, et sans aucune aménité, la sentence qui avait frappé son maître. Elle s’esquiva dès le lendemain, sans même attendre le résultat du conclave qui, le 26 juin, donnait la tiare à Pierre de Candie (Alexandre Y).

Quoi qu’il en fût de la légalité de ces actes de Pise, ils ne laissaient pas de porter un coup sensible à l’autorité de Benoît XIII. Le fait surtout que la France avait reconnu Alexandre Y, puis son successeur Jean XXIII (Balthazar Cozza), élu en mai 1410, devait être fatal à Pierre de Luna. Sans doute, au lendemain de Pise, celui-ci conservait-il encore en son obédience l’Ecosse, la Sicile insulaire, l’Aragon, la Castille, la Navarre et, au midi de la France, les états du comte d’Armagnac. Sans doute encore, réfugié dans la forteresse imprenable de Peniscola, pouvait-il braver indéfiniment toutes les agressions..Mais l’action de la France se chargeait d’émietter peu à peu le bloc de ses fidèles. En mai 1410, la ville d’Avignon, que Benoît se flattait de conserver ainsi que le Comtat, se déclarait pour le pape de Pise ; le château des Doms, de nouveau assiégé, était obligé de capituler le 22 novembre 1411. Pour être de peu de conséquence en soi, l’événement était au moins un symbole de la déchéance de la papauté avignonnaise. Il ne tenait pas qu’à la France que les souverains d’Espagne ne se retirassent à leur tour de l’obédience de Benoît XIII (ambassade du printemps de 1414).

3. Le concile de Constance et ses suites.

Mais beaucoup plus grave encore pour Pierre de Luna était la réunion à Constance, le 5 novembre de cette même année 1414, du grand concile auquel la présence du pape de Pise, Jean XXIII, semblait donner une sorte de légitimité. On sait comment l’idée de la « triple cession » y fit une fortune rapide. Cela devait avoir pour conséquence et l’abdication « volontaire » de Jean XXIII (29 mai 1415) et le noble geste de Grégoire XII donnant spontanément sa démission ( 1 juillet). Pour que fût pacifiée définitivement l’Église, déchirée depuis près de quarante ans, il ne manquait plus que la renonciation de Benoît XIII. Tout fut mis en œuvre pour l’obtenir. Le roi des Romains, Sigismond, se transporta de sa personne à Perpignan, où s’était aussi rendu le roi d’Aragon, pour s’y rencontrer avec Benoît XIII et obtenir de lui une abdication pure et simple (septembre-novembre 1415). Or, bien loin de fléchir l’opiniâtreté de Pierre de Luna, les événements récents n’avaient fait que l’ancrer davantage en ses résolutions : la disparition de ses deux concurrents ne le laissait-elle pas seul pape en droit comme en fait ? Le 13 novembre, Benoît XIII, après de longs pourparlers, quittait Perpignan, sans avoir rien conclu, et par Collioure regagnait son aire de Peniscola. Cette obstination eut au moins l’avantage de détacher de lui la plupart de ses derniers partisans. Le 13 décembre, les représentants de l’Aragon, de la Castille, de la Navarre et du comté de Foix signaient, sous la poussée de Sigismond, la « capitulation de Narbonne > qui ne laissait à Benoît XIII que deux alternatives, l’abdication pure et simple, ou la déposition par le concile. La réponse de Benoît n’ayant pas été satisfaisante, l’Aragon prononçait, le 6 janvier 1416, la soustraction d’obédience, avec l’approbation de saint Vincent Ferrier, toujours convaincu pourtant de la légitimité de Pierre de Luna : la Castille

suivait, le 15 janvier, malgré l’opposition des archevêques de Tolède et de Séville ; la Navarre et le comte de Foix en faisaient autant à l’été (16 juillet et 3 août). En dehors de l’Ecosse, il ne restait plus au pape de Peniscola qu’un certain nombre de fidèles dans les possessions du comte d’Armagnac.

A l’automne de 1416, les envoyés de toutes les puissances, qui venaient ainsi de rompre avec Benoît XIII. arrivaient à Constance, où le concile continuait à siéger. Le procès de Pierre de Luna fut commencé sur nouveaux frais, sans que l’on tînt compte ainsi l’avait décidé la capitulation de Narbonne des

informations de Pise. Il traîna neuf mois. C’est seule ment le 26 juillet 1417, à la xxxvii session, que Pierre de Luna fut condamné et déposé comme parjure, schismatique incorrigible et hérétique. Le 1 1 novembre Othon Colonna, élu par un conclave recruté de manière toute spéciale, devenait le pape Martin Y. Les amis de Pierre de Luna lui conseillèrent alors de pacifier définitivement les consciences, qui pouvaient demeurer inquiètes, en usant du procédé suivant : il lèverait les censures qu’il venait de fulminer contre Othon Colonna, rendrait celui-ci, de la sorte, apte à exercer la papauté, démissionnerait lui-même, et laisserait ses cardinaux porter leurs suffrages sur l’élu de Constance. Benoît XIII s’y refusa derechef. Alors, les quelques cardinaux qui demeuraient encore autour de lui l’abandonnèrent ; il n’eut plus que la ressource de lancer, chaque jeudi saint, l’anathème contre ces déserteurs ; l’on possède ainsi les bulles In cœnaDomini des années 1419-1422. L’Ecosse, cependant, l’avait aussi abandonné dès 1418, bien que certains y soient encore demeurés fidèles jusqu’en 1420. A partir de ce moment, son obédience se réduit aux états de Jean IY d’Armagnac, qui, malgré les efforts des légats de Martin Y, continuait à reconnaître le pape de Peniscola.

Seule la mort de celui-ci dénouerait une situation si embrouillée. En juillet 1418, Pierre de Luna avait été victime d’une tentative d’empoisonnement, dont il accusa le légat de Martin Y d’être l’auteur. L’accusation est impossible à prouver. La robuste constitution du vieux pontife lui permit de se rétablir. Ce nonagénaire vécut encore quatre ans, car il semble bien qu’il faille, avec N. Valois, op. cit., t. iv, p. 450 sq., fixer au 29 novembre 1422 la date de sa mort (plusieurs dates ont été proposées : 23 mai, septembre, 17 novembre de l’année 1424 et même 29 novembre 1425). Avant de mourir, le 27 novembre, plus persuadé que jamais qu’il était le seul pape, anxieux que la lignée des pontifes légitimes ne s’éteignît avec lui, il avait nommé, quatre cardinaux — depuis la défectipn de l’année 1418 il n’en avait plus dans son obédience. Ceci donne la mesure de la robustesse de ses convictions. Des quatre nouveaux élus, l’un, Jean Carrier, était absent de Peniscola, assiégé qu’il était en son repaire du château de Tourène. Les trois autres, après avoir laissé longtemps secrète la mort de Pierre de Luna, entrèrent en conclave le 23 mai 1423, et, finalement, élurent, en dehors de leur collège, le 10 juin 1423. Gilles Munos (Clément VIII) lequel d’ailleurs ne se fit couronner qu’en mai 1426, pour abdiquer le. 26 juillet 1429. C’est après la soumission de Clément VIII que le corps de Pierre de Luna fut transporté, par les soins de sa famille, de Peniscola à Illueca, lieu de sa naissance (1430). Entre temps. Jean Carrier, échappé de Tourène, était survenu à Peniscola le 12 décembre 1423, avait découvert que l’élection de Gilles Munos était entachée de simonie, l’avait finale ment annulée, puis, le 12 novembre 1425, avait élu. lui tout seul, comme pape Benoît XIV, un sacriste de Rodez, Bernard Garnier, dont il se réservait, d’ailleurs, de ne communiquer le nom que plus tard. Le