Dictionnaire de théologie catholique/PROTESTANTISME .IV. L'Anglicanisme actuel

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Dictionnaire de théologie catholique
Letouzey et Ané (Tome 13.1 : PRÉEXISTENCE — PUY (ARCHANGE DU)p. 450-457).

de L’heure présente est l’érastianlsme <>u mainmise de l’État sur l’Église.

l. En Angleterre. —

Il y a en Angleterre et au pays de (.ailes deux provinces ecclésiastiques : celle <le Cantorbéry, dont l’archevêque, primat de l’Église anglicane, a sous sa dépendance trente évêques, et celle d’York, dont l’archevêque en a treize. Six autres diocèses appartiennent à l’Église désétablie du pays de Galles. Certains diocèses, plus peuplés ou plus étendus, sont dotés d’évêques suïfragants, dont l’institution remonte à l’année 1870, sous le ministère Gladstone. Le roi nomme directement par lettres patentes ces suffragants, sur la proposition de l’évêque diocésain ; ils sont actuellement une trentaine. Ils ne sont ni titulaires ni autonomes et ils peuvent être congédiés par un nouvel Ordinaire. On propose aujourd’hui de soumettre leur nomination à la conférence diocésaine et de les faire siéger à la Chambre haute, sans toutefois qu’ils prennent part au vote.

Du point de vue de la hiérarchie ecclésiastique, certains défauts constitutionnels affaiblissent cette organisation. Premièrement, les doyens des cathédrales et les chapitres forment un collège électoral, qui se regarde comme à peu près indépendant. Les évêques assurent la surveillance de leurs diocèses par les archidiacres et les doyens des districts ruraux. Ce droit d’inspection se borne à constater si le desservant conserve la résidence, n’est pas l’objet de plaintes, observe la liturgie officielle et se conforme au Prayer book. En tout cela, les liens de subordination se révèlent fort lâches.

D’autre part, la nomination des évêques remet l’Église aux mains du pouvoir séculier. Par VAct in reslraint of annals de 1534, quand un siège épiscopal devient vacant, le roi envoie au chapitre du diocèse un « congé d’élire » with ail speed (sans délai), congé qui s’accompagne d’une lettre missive contenant le nom de la personne à élire. Ne pas élire le candidat du roi serait considéré comme un acte de rébellion. Les chapitres s’inclinent donc docilement. Dans le cas contraire, ou s’ils tardent plus de douze jours à faire l’élection, le souverain peut nommer lui-même l’évêque par lettres patentes, et le chapitre encourt les peines prévues dans les Statutes of provisors. L’archevêque ou les évêques qui refuseraient de consacrer le candidat du roi peuvent encourir les mêmes pénalités : amende pouvant aller jusqu’à la confiscation des biens, emprisonnement, privation des droits civils. Comme c’est en réalité le premier ministre qui remplit ce rôle de la royauté, il peut arriver qu’un baptiste (comme l’était Lloyd George) ou un presbytérien (comme M. Mac Donald) fasse prévaloir ses candidats.

Quant aux chapitres, rarement essaient-ils de regimber, et leurs protestations restent individuelles et platoniques. Aussi bien sont-ils organisés pour la soumission. C’est en effet le pouvoir civil qui désigne les doyens des chapitres sur une liste de deux candidats présentés par les chapitres. Le doyen entraîne ses collègues.

En ce qui concerne les diocèses des colonies, la nomination des évêques n’appartient pas au roi, mais aux fidèles.

L’évêque est-il indépendant à l’égard du pouvoir séculier pour la nomination aux cures ? L’Église anglicane, fidèle aux habitudes médiévales, reconnaît encore l’usage du « patronat », par lequel certaines familles, détentrices de bénéfices ecclésiastiques (revenus, dîmes terres, etc.), qu’elles tiennent ou par héritage ou par acquisitions récentes, ont le droit de présenter leurs candidats à ces bénéfices. Quand le patron présente le nom d’un clerc à l’évêque, les marguilliers sont requis de l’afficher pendant un mois à la porte de l’église, et ils ont vingt-huit jours pour présenter leurs objections.

L’évêque accueille celles-ci, mais ne peut refuser l’institution canonique que pour l’un des cinq motifs suivants : âge (2 I ans) et mauvaise santé, mauvaise moralité, impiété, dettes, invalidité des ordres déjà reçus et simonie. Encore le candidat écarté peut-il recourir an tribunal ecclésiastique de sa province, puis au King"t bench, enfin au comité judiciaire du conseil privé. Si l’évêque refuse d’agréer la présentation du candidat, le patron peut le traduire au tribunal du Kiny’s bench. L’évêque peut avoir à discuter les titres d’un candidat avec un patron dissident, juif, libre penseur, et des conflits délicats surgissent parfois. Aussi se sont créés des trusts qui rachètent les patronats, afin de s’assurer de la nomination des pasteurs. Plusieurs de ces trusts ont une tendance antiromaine et veillent à écarter les candidatures de clercs anglo-catholiques. Depuis 1898, plusieurs acts ont essayé de réglementer l’usage des patronats : act de 1898, qui s’attaque à la simonie et fixe le droit des évêques de refuser l’institution canonique ; act de 1924, qui règle la vente des advowsons ; act de 192.3. qui règle l’usage de la pluralité des bénéfices (complété par un act de 1930) ; projet de loi de février 1933 pour autoriser les conseils paroissiaux à racheter les advowsons ayant changé de mains depuis 1923. En somme, actuellement, sur 13 775 bénéfices, 7 000 appartiennent à des particuliers, 850 à des collèges ou à des universités, 900 à la couronne, 3 000 aux archevêques et évêques, 760 aux chapitres, 1 265 à des curés, soit 5 025 bénéfices appartenant à l’Église. Les desservants nommés par des patrons sont des incumbent.

Quelle est la condition ecclésiastique du clergyman ? Il doit déclarer qu’il accepte les trente-neuf articles et le Prayer book, qu’il n’a pas usé de simonie, et prêter le serment d’allégeance au roi et d’obéissance canonique à l’évêque. Des tentatives, jusqu’ici peu heureuses, ont été amorcées pour interdire au clergyman de recourir à une juridiction autre que celle de son évêque. Mais cette extension de la juridiction ecclésiastique a paru attentatoire aux droits du pouvoir laïque qui admet l’appel à des tribunaux étrangers à l’officialité.

Le clergyman bénéficier est considéré comme propriétaire réel de son bénéfice, dont il ne rend compte à personne et dont personne ne peut le déposséder, sauf pour faute grave prouvée devant les tribunaux ; aussi, son indépendance est très grande vis-à-vis de son évêque et de ses paroissiens. Cependant, quelques procès récents ont montré que, dans des conflits d’ordre théologique survenus entre parsons et paroissiens, l’évêque a déplacé le desservant. Depuis 1932, chaque diocèse doit être pourvu d’un Board of patronage, chargé de se substituer aux patrons privés.

En attendant qu’elle soit délivrée de ce patronat laïque, l’Église anglicane subit une emprise civile qui lui est, somme toute, dommageable.

D’autant plus que le conseil judiciaire du conseil privé, tribunal suprême ecclésiastique, comprend quatre laïques, assistés des archevêques de Cantorbéry et d’York et de l’évêque de Londres, qui y figurent comme membres consultants, sans voix délibérative.

Il y a cependant une justice ecclésiastique, organisée comme il suit :

a) L’évêque peut faire comparaître, pour délit en matière de doctrine et de rituel, l’un de ses subordonnés devant la cour provinciale, selon une procédure fixée par le Church discipline act de 1840.

b) Contre les innovations des ritualistes, il peut invoquer la procédure fixée par le Public worship régulation act de 1874.

c) Contre toutes sortes de fautes contre la morale.il peut engager, indépendamment de la sentence du tribunal séculier, une action en consistoire diocésain, suivant le Clergy discipline act de 1892.

L’évêque peut même faire appel d’une sentence renduc par lis trois sorte* de procédure, devant une juridiction supérieure. Il peut ainsi évoquer une affaire, d’abord Jugée a son tribunal appelé consistory court, par un juge laïque appelé chancelier, devant les cours nciales. Ce sont celles des deux archevêques : celle ili Cantorbér) s’appelle la cour des arches ; celle d’York ancery court. Chaque archevêque j est assisté d’un fonctionnaire laïque, le vicaire général « le la province, qui est Inamovible. Au dessus de ces deux cours, est l.i cour suprême d’appel ou comité fttdlciaire du conseil . tribunal pratiquement composé de seuls laïques, Institué par Henri VIII.

Il faut ajouter que l’Église anglicane est soumise au régime des assemblées ou convocations, instituées en l>nur renforcer son autonomie, mais qui n’ont plus aujourd’hui que l’apparence de l’indépendance.

l.i n constitue le s) node de la province, et

l.i loi reconnaît al’épiscopal anglican toute liberté pour organiser ces réunions. Mais, pratiquement, la eonw>cation est douée de privilèges illusoires : depuis l’acte de soumission du clergé de 1533, elle ne peut édieter de canons sans une permission royale préalable et l’assen tintent du roi ensuite. Les évêques ne peuvent d’ailleurs ni modifier les articles de la doctrine, ni la liturgie, ni le droit coutumier, en ce qui concerne le clergé. Tout au plus, leur a-t-on concédé la faculté d’admettre des vœux qui seront portés devant la l.hambre des lords et la Chambre des communes, qui en discuteront en dernier ressort. Ces décisions législatives deviendront alors lois de l’Église, eu sorte qu’une Chambre, en majorité composée de non anglicans, légifère sur la doctrine et la constitution de l’Église anglicane !

LesC sont composées de deux chambres :

la chambre haute (upper house I, composée des é êques lOUS la présidence de l’archevêque, et la chambre basse fhwer house), comprenant des membres d’office et des membres élus appelés proctors. En 1932, la c nvocation de Cantorbéry, comprenait 82 membres d’office et l Ci élus, soit 225 ; celle d’York, 31 membres d’office I élus, soit 95.

Au-dessous du synode de la province, il y a les synodes diocésains, réservés à l’évêque et à son clergé, qui avaient a peu près disparu et que l’on essaie aujourd’hui <le restaurer. Au-dessous, les assemblées des, où, sous la direction d’un doyen rural, les i urts forment le chapitre du doyen, et les laïques une conférence ruri-décanale.

Pour la gérance des biens temporels du diocèse, ou même afin d’envisager les mesures utiles au bien général. mais sans compétence sur les matières de doctrine, chaqui diocèse possède une conférence diocésaine, depuis VEnabling act de 1919. Elle est composée de que, de la chambre du clergé et d’une chambre de laïques. Elle se réunit au moins une fois par an.

Sur ce même modèle, chaque paroisse possède une nblée appelée Parochial Church council, composée du curé et du vicaire, des marguilliers et d’un certain nombre de laïques, élus parmi les communiants

inseil paroissial administre les affaires de l’Église,

distribue les fonds île secours, établit le budget, fait

oŒctes. H représente l’élément laïque que les

reformateurs avaient introduit dans la constitution de

leur P.

Depuis 1867, l’Église anglicane a superp’institutionnels un nouveau mode d’assemblée plénière de tous les évêques d’Angleterre et des colorons les dix ans, CeUX-Ci Se réU lissent a Londres.

au palais de Lambeth, résidence du primat de Cantor que toutes ces conférences ont marqué une

importante dans le développement de la pensée

ne. Pour nous en tenir aux plus récentes, celle

ui réunit 194 évêques, étudia les problèmes

de l’exégèse de l’Écriture sainte, du Prayer book, à.c

limite de 11 -lise. Celle de 1908, ou assistèrent 242

évêques, s’occupa du modernisme, du Prayer book, du mariage et de l’intercommunion, Celle de 1920, ou

furent présents 252 évêques, lança un appel retentis s.mt en fæur de la réunion des Églises. Celle de 1930,

avec 260 évêques, après avoir discuté sur l’autorité des Écritures, commit l’impardonnable erreur de décider sur le />/r//i control, admettant, par une lamentable

abdication de 193 VOlX contre 67, les procèdes nialllui

siens et recevant.1 la communion les dh orcés remariés. Pieu que les décisions des conférences de I.ainbelh n’aient pas forée de loi. elles sont considérées connue

l’expression la plus haute des dirigeants de l’anglicanisme, et. a ce t itre. engagent la responsabilité de cette Église tout entière. On l’a bien VU à l’émotion que

souleva dans tout le monde anglican, la résolution de l’assemblée de L930 sur le birth control. Mais on a vu aussi comment ces décisions poux aient être regardées comme non avenues lorsque les conférences de IH’.ii et de 101 ni condamnèrent les innovations des Titualistes romanisants, usage de l’encens, des cierges et de la résere cucharist [que, qui, toutes, subsistèrent en dépit de ces condamnât ions.

Depuis 1919, l’Église anglicane fait un effort dises péré pour échapper au principe de la mainmise de l’État sur l’Église et obtenir enfin la liberté de se gouverner elle-même. A la suite d’une agitation causée par des mesures vexatoires prises contre le clergé romanisanl de la High Church et le clergé moderniste de la Low Church. le docteur Temple, devenu archevêque d’York en 1928, organisa une campagne : Life and libcrtij movement, qui aboutit à faire voter VEnabling act de 1919, autorisant la création de la Church assembly.

Celle-ci est composée de trois chambres, la chambre des évêques, la chambre du clergé, la chambre des laïques, dont le nombre oscille entre 320 et 360. Elle se réunit une fois par an. sous la présidence d’un des deux archevêques. Elle étudie toutes les propositions qui ont trait aux intérêts de l’Église d’Angleterre, mais est incompétente pour donner à ses décisions force de loi. Cela est l’affaire du pouvoir législatif civil, et, malgré ses efforts, l’Église anglicane reste toujours sous la dépendance du pouvoir séculier. Aussi, beaucoup d’anglicans désirent-ils la séparation des Églises et de l’État, qui libérerait leur Église, même privée de certains avantages matériels et honorifiques.

Telle est l’armature de l’Église d’Angleterre. Il nous reste à voir quels en sont les effectifs.

Il y a en Angleterre (Ecosse et Irlande non comprises), 35 389 993 habitants, qui se répartissent ainsi : catholiques : environs 3 millions ; congrégationalistes, environ 500 000 ; baplisles, de même ; méthodistes, environ 900 000 ; quakers, environ 20 000 ; méthodistes des (ialles du Nord, environ 300000 ; /reeC/iurc/(esoumème indifférents, environ 20 millions ; anglicans, environ 7 millions. On compte en outre 3 millions d’anglicans aux États-Unis et 8 millions en d’autres pays.

Le clergé anglican compte près de 12 800 bénéficiers et 1 22 1 vicaires, soit environ 17 000 clergymen.

Depuis le mouvement d’Oxford, le réveil de la vie religieuse et monastique a donné naissance a de véritables congrégations religieuses. En 1810, Maric-Rébecca Hughes fonde la Société de la Sainte-Trinité, lai 181°). Pusej fonde ? une communauté à Park Village West ; en 1848, miss Sellon crée à Devonport les S02UTS de la Merci ; en 1849, Thomas Chamberlain fonde à Oxford la communauté de Saint-Thomas le Martyr ;

de 1850.i 1860, ou compte cinq fondations ; de 1860 à 1870, sept ; de 1X7° a 1880, ïix, et, à l’heure présente, l’anglicanisme comprend 58 congrégations de femmes, sans compter les diaconesses, ei une dizaine’hcongrenations d’hommes : Société de Saint Jean l’Évangé liste. Fondée par Benson en i « )."> ; Society </ the sacretl mission, (ondée en 1891 ; communauté <l<- la Résurrection, fondée en 1892, par Charles Gore ; Socié lé de la Divine-Compassion, créée en 1894. On obtien drail ainsi de I 500 à 2 000 religieuses et environ 500 religieux. Cependant, l’Église Ignore offlciellemenl ces congrégations, qui parfois se déclarent absolument

exemptes de toute juridiction épiscopale et parfois acceptent que l’évêque du diocèse soit leur visiteur canonique.

Quant à l’ordre des diaconesses, il date de 1920, où la conférence de Lambeth l’autorisa. La diaconesse s’occupe d’oeuvres charitables, remplit l’office de catéchiste, a l’autorisation de réciter a l’église les prières du matin et du soir et parfois d’y prêcher. Répandues aujourd’hui à travers toute l’Angleterre, les diaconesses ne sont pas étrangères au mouvement qui se dessine afin de leur accorder des pouvoirs plus étendus, la prêtrise, le droit de célébrer l’eucharistie et d’entendre les confessions. Quelques évêques soutiennent ces étrangetés contre la majorité de l’épiscopat anglican.

2. L’anglicanisme hors d’Angleterre.

Au pays de Galles, l’Église anglicane comptait quatre diocèses, rattachés à la province de Cantorbéry. Depuis le Welsh Church art de 1914, ces diocèses sont séparés, désétablis, et forment, depuis 1920, une nouvelle province indépendante, qui compte aujourd’hui six diocèses, sous l’autorité de l’archevêque de Saint-Asaph, pour une population de 2 650 000 âmes environ. Une assemblée, Governing budy, composée du haut, du bas clergé et de laïques, se réunit une fois par an et décide des questions doctrinales et temporelles.

En Irlande, l’anglicanisme compte deux archevêques et onze évêques, pour environ (>00 000 anglicans « communiants ». Un synode général composé des trois ordres exerce un pouvoir législatif et administratif, édicté des canons et élit les membres du Représentative bodij. Celui-ci, composé des deux archevêques, des onze évêques, de treize clergymen, élus un par diocèse, de vingt-six laïques et de treize personnes choisies parle Représentative bodij lui-même, s’occupe des questions financières et administratives.

En Ecosse, l’Église anglicane ou Scoltish episcopal Church, comprend sept évêchés pour 00 000 pratiquants, et est administrée par le Représentative Church council.

Aux États-Unis, l’Église épiscopale comprend soixante-treize diocèses pour environ 5 millions d’adhérents que dirigent environ 6 300 clergymen. Les évêques américains ont à leur tête un président, qui, avant 1925, était le doyen d’âge, mais depuis cette date est élu.

Aux Indes, l’Église anglicane, fondée en 1805 et restée jusqu’en 1927 district missionnaire, est devenue indépendante en vertu de l’Indian Church act. Église autonome, elle élit elle-même ses quatorze évêques, et l’État ne les paie plus. Cet anglicanisme indien présente aujourd’hui un intérêt extrême, depuis la tentative du South India scheme (1929). C’est un essai d’union entre les anglicans de l’Inde (cinq diocèses et 400 000 fidèles) et les presbytériens, congrégationalistes et méthodistes de ces pays. Commencé en 1919, l’accord fut conclu à Madras en 1929. Les conditions dogmatiques de l’accord sont très larges. On accepte la forme épiscopale, mais cette autorité est limitée par la coopération du clergé et des laïques. La confirmation est facultative, les wesleyens ne l’acceptant pas. La liturgie est bigarrée, chaque groupe conservant ses usages particuliers. L’ordination ne paraît plus un sacrement nécessaire, puisque les pasteurs non conformistes, qui n’ont reçu aucun ordre, sont cependant regardés comme vraiment ordonnés et peuvent officier dans d’autres groupes. Ce régime, qui assimile aux « piètres anglicans des ministres non conformistes, « loit durer trente ans. Ces polémiques que provoqua

cet accord dans toute l’Église anglicane sont loin d calmer. Ces évêques, assemblés a Lambeth en 1930, se tinrent peureusement dans l’équivoque, mais le groupe anglo catholique, ou est réfugié en ce moment,

il ne faut pas l’oublier, la véritable spiritualité de L’âme anglaise, protesta contre l’abdication de la foi traditionnelle devant les exigences de confessions, dont quelques-unes sont a peine chrétiennes. Les conflits prirent une acuité soudaine quand on entendit des évêques anglais concéder que les ministres des m non épiscopales, qui ne sont même pas ordonnés, n’en consacrent pas moins l’eucharistie et qu’ainsi l’intercommunion, telle qu’on la propose aux Indes, est tout a fait légitime. A l’heure actuelle, lesthèses s’affrontent, et les anglicans sincères de l’Inde répugnent, de plus en plus, a consommer l’union et l’inlercoininuiiion avec des sectes congrégat ionalistes qui répudient avec horreur le sacerdoce. La situation est rendue tragique du fait que, sur cette question où se joue la foi même de l’Église anglicane, les évêques de l’Angleterre se divisent à la suite des modernistes, ou des timorés, ou des politiques. Il est incontestable que l’anglicanisme est à une heure grave de sa destinée.

En Afrique du Sud, l’anglicanisme comprend quatorze diocèses, pour environ 312 000 Européens et 120 (toi) indigènes.

L’Afrique orientale comprend douze diocèses, avec environ 570 000 chrétiens ; et l’Afrique occidentale, quatre diocèses avec environ 150 000 chrétiens.

Au Canada, l’Eglise anglicane comprend vingt-quatre diocèses, formant quatre provinces unifiées en 1863, dont le primat est élu par la chambre des évêques.

En Australie, on compte vingt-deux diocèses, formant quatre provinces, dont le primat est élu parmi les archevêques, et un synode général s’occupe des questions administratives de cette Église.

3. L’effort missionnaire de l’anglicanisme représente encore aujourd’hui une grande chose. Il date de 1799 seulement, et, bien qu’il demande ses ressources aux seules contributions volontaires, il dispose d’un budget annuel de 500 000 livres sterling. La société ou Church missionary society, compte, d’après le rapport de 1930. un million d’adhérents. A côté de cette œuvre essentiellement anglicane, un certain nombre d’autres sociétés se sont formées, en Angleterre, en Ecosse et en Irlande, qui relèvent de sectes différentes et se réservent l’évangélisation d’une contrée particulière. En 1933, on en compte près de quatre-vingts. L’ensemble de leurs budgets formait, en 1927, le total de 2 349 502 livres sterling ; à cette somme, les anglicans doivent contribuer pour environ 1 600 000 livres sterling. On peut dire que l’effort d’évangélisation des anglicans représente le septième de la propagande protestante mondiale. Les territoires ainsi évangélisés forment douze provinces et cent trente-sept diocèses. Les évêques n’y sont pas nommés par la couronne et restent indépendants de Cantorbéry. Ils élisent dans chaque province un métropolitain. Les statistique-* établissent cependant que l’anglicanisme en pays de mission est en régression notable, et dans telle province, comme dans le Chantung, on compte 40% de baptistes, 30 % de presbytériens, 10 % de méthodistes et 3 % d’anglicans.

Doctrine et liturgie.

A côté des deux cents sectes

qui composent les protestantismes de l’Angleterre, l’Église anglicane apparaît comme une institution ferme, fortement traditionnelle. Ce sont là simples apparences. En réalité, elle-même est livrée à de multiples causes de ruine et. en premier lieu, à l’instabilité des formules dogmatiques.

1. Événements caractéristiques récents.

Nous renvoyons a l’article Réforme pour toutes les » variatlons>qui ont successivement transformé la reforme de Henri VIII. I"n décembre t">17. bitt sur hsacrement, qui sera donné sous les deux espèces En 1549, pre nier i’riii/rr book de Cranmer, où, sous l’influence du calvinisme, la liturgie de la messe t « ’n « l.1 exdure l’Idée de sacrifice. I n 1552, nouveau formulaire <lu Prayer . oit Cranmer jette enfin le masque en adoptant nettement la théorie de Calvin sur l’eucharistie <t la messe. On transforme aussi l’ordinal, d’où sont exclus les passages exprimant l’intention <l>' taire « les prêtres rifleateurs En 1551°, organisation d’un éplscopat nouveau, .1 la suite du sacre de Parker. Bref, le formulaire de la f « >i et de la prière oscille entre des courants contraires celui du catholicisme généralement main tenu dans l’anglicanisme primitif, et celui du plus étroit calvinisme jusqu’à ce qu’il trouve son texte définitif en 1662. De cette phase « le la croyance anglaise, nous ne dirons rien Ici, mais, en 1927, une

nouvelle s’est ouverte, qui est elle-même l’aboutissement d’une longue période de tâtonnements.

I mou veinent d’Oxford axait eu pour résultai de tourner les esprits vers le romanisme. et d’accélérer le retour a certaines pr.it iques rit uelles, olre à cert ains

es de l’Église catholique : culte pour le saint

neut. croyance à la présence réelle et toute la suite logique « les cérémonies en l’honneur d’un Dieu présent dans l’eucharistie. L’anglicanisme réintégrait en lui-même, sous l’action de plus en plus vive des

eatholiques.la substance de la foi catholique, que Cranmer avait rejetée de son Prayer book. Le texte de _ ne pouvait doue plus suffire ni aux anglo-catholiqiies. de plus en plus impatients de se libérer du vieux calvinisme inocule a l’Église anglicane, ni aux parti ;./ Church, dont le modernisme n’acceptait plus les formules du Prayer book jugé inadéquat à l’esprit moderne, et seuls quelques groupes d’anglicans, paresseusement installes dans leur antique croyance,

indalisaient des coups portes parla HighChurch Church. Dans ces conditions, une revision du Prayer book s’imposait et elle eut lieu, en janvier 1927, au palais de Lambeth.

projet mis sur pied est de toute première Importance : il témoigne de ce que devait être l’anglicanisme modifié, adapté, allégé de ses vieilleries, rajeuni.

1 1 préfæe du nouveau Prayer book est symptomatique. Les évéques reconnaissent que la vérité est soumise à l’évolution de s, m expression verbale, que di ï conceptions peuvent être encloses dans les

mêmes mots selon les temps et que l’influence de la

— divers âges peut modifier ces concepts en

idaptant à une manière de penser différente, (’.'est.

ment la thèse que soutenaient Tyrrell et

s, initier. Malgré ce ton assez dégagé à l’égard « le l’immuable vérité religieuse, les évoques anglicans

taient les innovations suivantes : le culte « les

saints s’enrichit de plusieurs fêtes ; on célébrera, le

2 novembre, la Commémoration of ail s<>tils. ou prière pour tous les défunts, ce qui implique la croyance au

lu Sauveur « lans la messe, à la doctrine du itoire, au mérite de nos actes, à la réversibilité des méri » ’ommunion des saints, toutes idées dont

le protestantisme avait fait une véritable hécatombe.

ues déclarent encore facultatif le symbole

>’nt Athanase. que les anglo catholiques récitent. a l’instar des catholiques romains. Ils permettent toud’oraisons pour les besoins les plus divers. comme « lans le rituel romain. Ils permettent, avecquelque hésitation, l’usage « les vêtements liturgiques, du rite romain. Mais la pièce maîtresse >n de la messe et. « lans celui-ci, la f « >rmiile de la consécration. Le Prayer book de 1662

présence réelle, que

holiques proclament « le nouveau. Les

évéques, pris dans l’impasse, ont recouru.1 un expédient. A côté « lu « .mon de 1662, ils ont propose mi texte nouveau, en laissant aux paroisses le choix entre les lieux ht urgies, ce qui était se désintéresser du dogme « le l’eucharistie à un moment particulièrement grave. Il convient de rappeler que, à l’heure actuelle, on

compte sept cents églises OU chapelles ou l’on a élevé un tabernacle qui contient l’hostie consacrée, que les fidèles viennent adorer. Dans sou propre diocèse (Birmingham), l’évoque Haines, ayant traité d’idolâtrie ces

pratiques, provoqua la rébellion « le la moitié de ses

fidèles.

Le problème de la consécration entraînai ! celui de la croyance à la présence réelle et celui de la réserva lion (réserve). L’anglicanisme n’admettait pas la

réserve, l’eucharistie avant pour unique raison d’être

la communion. Les anglo-catholiques obtinrent cependant que la réservation pouvait être pratiquée, en vue de communier des malades. Quant aux autres conséquences (visites au saint sacrement, culte du saint sacrement), les évéques laissèrent aux chefs des diocèses le soin d’agir comme l’intérêt le demanderait.

Voila l’expression suprême de la doctrine anglicane tiraillée entre deux partis contraires. Cette manière bien anglaise de résoudre les difficultés dogmatiques trouva d’ailleurs son juste salaire, (’.outre ces décisions s’affirma l’unanimité il « ’s protestants, les uns irrités, les autres scandalisés. L’évêque l leadlam, de Glocester, lit entendre « les menaces contre les romanisants et exprima l’espoir que l’anglicanisme allait opérer une vigoureuse concentration. Ce qui se réalisa, ce fui d’abord l’hostilité de la Chambre « les communes, qui. en décembre 1927, écarta le projet des évéques. e1 ensuite un conflit aigu sur l’opportunité de la sépara lion des Églises et de l’État. Il parut utile d’édulcoier les formules que les députés des Communes avaienl

rejetées : certaines concessions faites aux anglo-catho

liques disparurent ; la rubrique noire (qui déclare

l’adoration des saintes espèces une idolâtrie) fut l’es taurée ; la réservation, strictement limitée à certains cas. Néanmoins, le Chambre des communes écarta encore, le 1 I juin 1( « 28. ce second texte ; mais l’épis copat, blessé, regimba, et le nouveau primat d’Angle terre, le docteur Cosmo Lang, déclara : « Dans L’état actuel des choses et jusqu’à nouvel ordre, les évéques sont d’avis que le nouveau Prayer book est compatible avec le loyalisme aux principes de l’Église anglicane. Ainsi répondait-il aux députés qui accusaient l’épiscopat d’être « infidèle à la doctrine protestante », d’être » incapable de rétablir la discipline dans l’Église qu’il préside », de « favoriser le romanisme et de viser à l’autonomie. Mais, à l’heure actuelle, l’Église anglicane a fait la preuve « pie sa doctrine était aussi insl able que sa politique et qu’à vrai dire il n’y a pas plus d’unité de vues et « le croyances dans le corps des évéques que parmi les fidèles. Cet anglicanisme n’est plus qu’un protestantisme sans vigueur qui, en grande partie, tend à l’agnosticisme.

Ce caractère apparaît encore fort bien dans l’attitude que l’Église anglicane a adoptée, ces dernières années, a l’égard de confessions différentes, même de celles qui se sont affranchies « b’s dogmes chrétiens. C’est surtout depuis 1 ! » 2 « » que les anglicans s’elïorceiit de réaliser l’union avec les orthoiloxes. In premier formulaire indiqua sur quelles bases l’union pouvait être établie.

Anglicans, orthodoxes et même vieux-catholiques, déclaraient accepter la foi traditionnelle, les sacrements et le culte de l’Église historique, l’autorité des Écritures canoniques, le Credo de Nicée, les décrets rendus par les conciles oecuméniques. Mais, à serrer de plus près ces déclarations, les orthodoxes s’aperçurent que « les divergences essentielles n’étaient point réduites, et que si les lli>ih Church pouvaient, a la rigueur, signer bien « les articles <l<’leur roi orthodoxe, ni les Low Church ni surtout les Broad Church ne pourraient le faire sans équivoque.

De leur côté, ils n’osaient encore contredire les décisions « le la vieille orthodoxie, <|ni avait Jusqu’alors constamment refusé de reconnaître aux anglicans la validité de leurs ordinations et, par conséquent, la .succession apostolique. Depuis 1921, les anglicans essaient de rassurer les orthodoxes par des confessions de foi confuses : ainsi les Suggesled ienns oj intrreommunion, de J.-A. Douglas, en 1921, et The genuine leaching of the English (’.lunch (Enseignement authentique de l’Église anglaise), rédigé en 1922 par V English Church union. Ce document allirmait la foi des anglicans à l’Écriture, à la tradition, aux conciles œcuméniques, aux écrits des Pères, où est exposée la foi de l’Église chrétienne. Il admettait les sept sacrements généralement revus ; la foi à l’eucharistie, sacrifice non sanglant, que l’on offre pour les vivants et pour les morts ; la loi à la présence réelle par la consécration, en sorte que par la communion les fidèles reçoivent le vrai corps et le vrai sang du Christ ; il déclarait que par la pénitence le prêtre remet les péchés ; que le culte de la Vierge, des saints et de leurs images est digne de respect. C’étaient là des concessions très importantes, mais le document n’était signé que par un petit nombre (3 715) de pasteurs High Church auxquels on opposa bientôt un document tout différent, signé par des pasteurs Broad Church et Evangclicals.

Néanmoins, les orthodoxes tinrent la promesse qu’ils avaient faite de reconnaître la validité des ordinations anglicanes. Ce fut un échange de bons procédés mais où se révéla, de la part des insulaires, une plus grande hâte à gagner les orthodoxes qu’à exprimer la pensée générale de l’Église anglicane, et, de la part des orthodoxes, une légèreté véritable à contredire toute la tradition de leur Eglise, que ne parvenait pas à justifier le calcul politique qui les avait incités à cette abdication. Bref, de 1022 à 1930, les divers patriarches orthodoxes se résolurent, avec plus ou moins de bonne grâce, à reconnaître la validité des ordinations anglicanes, et aujourd’hui, ce point étant définitivement réglé, la question de l’union et de l’intercommunion doit pouvoir être réglée avec moins de difficultés. Mais, si les orthodoxes consentent à discuter les professions de foi édulcorées des anglo-catholiques ou de la conférence de Lambeth de 1030, que vont-ils faire, en trouvant en face d’eux la fraction des Evangelicals, des Low Church, des Broad Church, qui tous refusent de souscrire à des professions qui n’expriment rien de leurs croyances et qui adhèrent à des doctrines nettement opposées à celles des orthodoxes ?

Cette attitude des anglicans, incertaine et louvoyante, apparaît encore fort bien dans la tentative d’union avec les vieux-catholiques. L’affaire traîne depuis 1874-1875, où Dollinger réunit à Bonn deux congrès, auxquels les anglicans envoyèrent quelques représentants. Après de nombreux incidents qui opposèrent un moment les évêques anglicans à l’archevêque des vieux-catholiques, domicilié à Utrecht, les symptômes de rapprochement se multiplièrent. En 1025, l’archevêque d’Utrecht écrit à celui de Cantorbéry qu’il reconnaît la validité des ordinations anglicanes, et, en 1930, à la conférence de Lambeth, les évêques vieux-catholiques vont jusqu’à proposer d’admettre les anglicans à leur communion, jusqu’à permettre aux vieux-catholiques de participer à la communion des anglicans, et offrent de faire de concert les ordinations. Les évêques anglicans concèdent en 1031 que cette intercommunion peut être réalisée sans se préoccuper d’obtenir l’identité de doctrine. Aujourd’hui même, des clergymen sont consacrés évêques, avec la participation d’évêques vieux-catholiques, espérant ainsi que,

par ces ordinations incontestées et valides, l’anglicanisme retrouverait cette succession apostolique que

Home lui a solennellement déniée..Mais a quel prix l’obtiendrait-elle ? Et quel problème nouveau est en traill d’aggraver les problèmes anciens :

Il est vrai que l’Église anglicane avait déjà donné un exemple remarquable de cette comprehensiveness dont se glorifient les protestants libéraux, mais qui inquiète les anglicans fidèles à leur foi traditionnelle. En 1920, la conférence de Lambeth avait déclaré admettre à la communion les luthériens de l’Église de Suède et permis à leurs pasteurs de prêcher dans les églises anglicanes. Même deux évêques anglicans avaient pris part, à Upsal, à la consécration de deux évêques luthériens. En 1032, l’archevêque de Cantorbéry a enfin délégué un de ses évêques subordonnés à la consécration, a Upsal, du docteur Erling Eidem, successeur de Nathan Sœderblom, comme archevêque d’Upsal. Les différences dogmatiques des deux Églises n’ont paru compter pour rien. Il est vrai que cette intercommunion n’a pas encore été ratifiée par les convocations, qui reculent devant l’audacieuse entreprise.

C’est par une semblable indifférence au contenu de la confession de foi que l’Église anglicane a poursuivi, ces dernières années, la réunion avec toutes les sectes dissidentes, sans en excepter celles qui ont abandonné toute croyance surnaturelle et qui refusent d’admettre la divinité de Jésus-Christ. En vain prétend-on que cette union n’est pas preuve d’uniformité, mais seulement un signe de coopération dans l’œuvre de l’évangélisation ; ce subterfuge n’efface pas l’essentielle contradiction de cette attitude, qui prétend faire avancer la croyance au Sauveur du monde à l’aide de ceux qui sapent cette même croyance. Pour en venir à cette extrémité, l’anglicanisme à dû renoncer à ce qui était jusqu’ici sa force : le maintien têtu des propositions du Prayer book de Cranmer, infecté de calvinisme étroit et origine de l’intolérance brutale de l’Église anglicane à l’égard de tous les dissidents. Le spectacle est aujourd’hui singulier d’une Eglise qui renonce à sa propre croyance — ou agit comme si elle y renonçait — pour collaborer avec des sectes qu’elle n’a pas renoncé officiellement à combattre. Ce mouvement est connu sous le nom de Rome reunion. Commencé en 1013 dans les pays de mission par des missionnaires de sectes différentes qui s’entendirent, sous la présidence d’évêques anglicans, pour élaborer une constitution commune et réaliser entre eux l’intercommunion, ce mouvement s’est développé en Angleterre, surtout depuis 1919. Une réunion d’anglicans et de dissidents se tint à Oxford ; on y décida que le ministère des différentes sectes était d’égale valeur, ce qui entraînait la possibilité de l’intercommunion et de l’échange réciproque des ministres sans ordination préalable. Au total, toutes les formes de la vie religieuse chrétienne mises sur le même plan, et toutes déclarées dépositaires de la vérité. Les manifestes, les pétitions, se succédèrent en ce sens, et si les anglo-catholiques n’avaient fait entendre leur protestation, l’Église anglicane subissait, sans réaction, cette humiliation inouïe de déclarer, sous la pression des non-conformistes, inutiles ses ministres, ses ordinations, sa liturgie.

Depuis 1920, le conflit a rebondi, car, à l’occasion de i timides réserves faites par la conférence de Lambeth sur l’échange des ministres, les non conformistes ont riposté par une fin de non-recevoir. Qui cédera, en fin de compte, des évêques anglicans, qui s’efïorcent de sauver les apparences, en maintenant la nécessité d’une vague délégation par l’Ordinaire de pouvoirs sacerdotaux, ou des non-conformistes, qui rappellent le principe spécifiquement protestant du sacerdoce universel. par quoi l’ordination de l’évêque est parfaitement inutile ? La question divise profondément aujourd’hui -. anglicane De iiMi|^.1 autre, sous la poussée d’an leader / iivClwi A ou Broad Chureh, libéral et moderniste, une proposition est lancée dans le public ou soumise aux eonoocati ris, à l’effet d’admettre A la communion Us non conformistes, s.ms se soucier des questions de dogme ou de l’épineuse difficulté de l’ordination Ces propositions, jusqu’ici rejetées ei remises à plus tard, n’ont pas vaincu l’opposition ; mais, dans la mesure où l’Église anglicane se laissera envahir par l’élément moderniste, la résistance s’affaiblira, et l’on n’entendra plus parler de différences essentielles entre licanisme dépouillé de sa foi traditionnelle et les s non conformistes, dont le protestantisme se confond le plus souvent avec l’agnosticisme. Or. ce danger est-il une realite présente et quelle m intensité’.' (’.'est ce qui va ressortir de l’analyse des positions des diverses branches anglicanes devant le dogme chrétien. Ce que nous venons de dire siitlit déjà a montrer combien la foi anglicane est aujourd’hui vacillante, instable, soumise aux caprices des modes et sensible aux intérêts d’une politique variable, enfin, combien ses dirigeants et protecteurs semblent avoir perdu la direction assurée de leur propre doctrine. on peut tenter de découvrir les causes internes de tes mouvements giratoires qui ne s’expliquent pas tous par la succession d’événements capables d’entraîner une Église qui n’a pas su les prévoir et les _’.ier.

Etat d’esprit actuel. — L’Église anglicane est aujourd’hui dissociée en trois partis : a droite, la High Chureh ; a gauche, la Loir Chureh ; à l’extrême icbe, la Broad Chureh.

High Chureh. — Au premier groupe appartiennent les anglo-catholiques ritualistes, eux-mêmes diviisfaits de vivifier l’anglicanisme par le retour à certaines pratiques rituelles ou à certains lu « romanisme », mais foncièrement hostiles à un retour à Rome même : les autres, les renj high Chureh, sympathisant ouvertement avec Rome et préoccupés de réaliser soit individuellement, soit en >. la réunion de leurs fidèles avec Home. On y disle les successeurs des traclariens, tel leu lord Halidont on connaît le rôle pour le succès du retour à Home, et les libéraux, tel le docteur (.h. Gore, ancien [ue d’Oxford, qui voudraient concilier le moderavec les principes de Pusey et de Keble. Quelle est la position dogmatique de cette fraction cane ? On peut voir qu’elle diffère selon les nuanaièmes, extrêmement diverses, de la tendance High Chureh. Les plus hardis ritualistes ne sont séparés de Rome que par des dissidences peu graves ou peu nombreuses. Ils croient à la présence réelle, à la transitantiation, au sacrifice de la messe, au purgatoire, . auriculaire, à tous les sacrements catholiques, au culte de la Vierge et des saints, et pratiquent un cérémonial de tout point semblable à celui de itholique. D’autres choisissent dans le bloc - catholiques, selon leur fantaisie. Quelquesuris -catholiques, qui sont touchés par

l’incrédulité moderniste, mais ils sont rares, et leur mo timide et miti(

b) La Low Chureh est foncièrement protestante, antiromaine et généralement Adèle au J’iai/rr book

ni a prêter une

oreille complaisante aux nouveautés modernistes. I. I

confession de fol comprenait généralement la croyance

ilé du Christ, a une rédemption étriquée et

ion, à l’inutilité des ou rcs, à

calviniste, incorpo

par Cranmer. La ! réduisait à

nu : souvent pas d’autel

une croix sans

L’office commence

HOL

par un chant ou une psalmodie de matines, se continue par la lecture d’un chapitre de la I llble que le prédicant

commente ou paraphrase ; puis a Heu le service de la

communion administrée sous les deux espèces.

c ; La Broad Chureh, non moins antiromaine, apparaît comme le refuge de tous les modernistes qui suivent sans répit les théologiens formes par la science

allemande ou française. Leur position dogmatique correspond assez, bien a ce qu’était en France la position d’Auguste Sabatier : négation du Surnaturel dans

l’origine du fait religieux, négation du miracle, du dogme et de l’institution ecclésiastique. En présence

du Christ, explication rationnelle de son rôle, de son

Influence, de ^a morale, et négation de tout le caractère divin que les évangiles prêtent a Jésus : point de naissance miraculeuse, poinl de résurrection, point de personnalité divine, niais une conscience de plus en plus atfiuéc de sa filiation mystique a l’égard du l’ère. considéré comme le Père commun des hommes. Aux

théories de Sabatier. ces anglicans ajoutent celles de William James, qui réduisent la vérité à l’utilité passagère, et celles de la science évolutionnisle. qui leur apparaît comme un dogme nouveau et incontestable. Ces modernistes ont aujourd’hui pour chef de file le docteur 1 larnes, c êque de 1 lirmingham, espèce étrange du « SClentlste » qui affirme avec candeur ce que les vrais savants proposent douteusement. « Il est, dit-il, absolument impossible d’harmoniser la conclusion des sciences avec la théologie traditionnelle », ne se doutant pas qu’il appelle « conclusion » ce que les sciences proposent comme hypothèses, et théologie traditionnelle les ieux commentaires de l’Écriture, fort différents des dogmes. Avec Haines, il faut citer le docteur Inge, doyen de Saint-Paul à Londres, le Hev. Campbell et le docteur Norwood, dont on connaît les intempérances de langage contre les évêques coupables « d’ignorer les découvertes de la science ». Kux assurent que l’on peut tout détruire des dogmes de la création, de la chute originelle, de la rédemption « sans endommager le gros des croyances chrétiennes ».

Quelle est la force de chacune de ces fractions ? On évalue à environ trois millions les anglicans pratiquants ; sur ce nombre, les anglo-catholiques compteraient de cinq cent mille à sept cent mille adhérents ; les modernistes seraient donc une petite minorité, mais extrêmement agissante. L’opinion publique, quoique de plus en plus gagnée par rindiflérentisme, suit avec inquiétude les manifestations tapageuses des modernistes, et avec réserve les hardiesses des ritualistes. Cependant, on a pu voir, en juillet 1930, en plein Londres, à l’occasion d’un congrès, l’action du groupe anglo-catholique. La messe fut célébrée en plein air, à Stramford Hridge, et, dans onze églises, on fit vingt-quatre heures d’intercessions continuelles. La menace de la séparation des Églises et de l’État, un instant imminente, fut écartée quand on comprit que la mesure profiterait aux anglo catholiques, qui la réclamaient afin de se libérer. Ceux-ci ont contraint les évoques anglicans à réviser le Prauer book, où ils ont fait pénétrer plusieurs de leurs revendications en matière de dogme et de liturgie, car on craignait, en refusant leurs doléances, de les voir passer à l’Église romaine. Ce sont la des signes de force.

Quant à croire que l’anglo-catholique est ipso facto tourné vers Rome et désireux de la réunion », c’est une méconnaissance profonde de l’état actuel des esprits. Les conversions Individuelles ont été nombreuses : aujourd’hui encore, ce mouvement, bien qu’affaibli, reste important. On évalue à environ dix mille par an le nombre des conversions ; mais quand on a envisagé les conditions d’une corporate réunion, d’une conversion en corps de toul l’anglo catholicisme, les divergences <>m apparu profondes. Elles onl

T. — Xlll — 29. la mort des conoertatioru de M ilines où s’affrontaient les thèses anglo-catholiques et les thèses romaines. L’incident est d’importance : il a contraint les anglocatholiques les plus intelligents, les plus zélés, les mieux au courant île la pensée théologique, à définir les positions extrêmes qu’ils pourraient occuper. Nous n’avons pas à raconter ce long épisode, déclenché par lord Halifax depuis 1889, mauvemïnté jusqu’en 1895, arrêté en 1896 par la bulle Aposlolicee corsa, remis en mouvement en 1921 par lord Halifax et son ami l’abbc Portai, avec la sympathie de lord Davidson, archevêque de Cantorbéry, et celle du cardinal Mercier. Mais voici à quelles différentes expressions s’arrêta la pensée religieuse des anglicans : en décembre 1921 par l’organe d’A. Robinson, doyen du chapitre de Wells, et du docteur Frère, qui devint quelques mois plus tard évêque de Truro, on convint que les trente-neuf articles pourraient être rendus susceptibles d’une interprétation catholique, que l’on admettait le caractère sacrificiel de la misse et la confession, que l’on ne répugnait pas à la réordination, mais que l’on n’acceptait pas l’œcuménicité des conciles de Trente et du Vatican. Quant au Vatican, on convenait de la primauté du pape, la plus haute autorité, infaillible en ce qui concerne l’enseignement de l’Église, mais on limitait sa juridiction sur le clergé anglais, l’archevêque de Cantorbéry devant être regardé comme une sorte de patriarche. On demandait encore l’usage de la langue vulgaire dans la liturgie, la communion sous les deux espèces et le mariage du clergé. En 1923, lord Halifax lança une brochure retentissante, Furlher considérations on bzhalf of reunion, afin de gagner ses coreligionnaires à la notion de la primauté de Pierre, de droit divin. El novembre 1923, les conférences prirent une allure décidés de controverse religieuse, chargée d’examiner à fond les raisons de la dissidence anglicane. Les anglicans avaient délégué l’évêque Gore et le docteur Kidd, d’Oxford, qui se rencontrèrent avec Mgr Batiffol et l’abbé H. Hemmer. Le point vif de la controverse apparut avec le problème de la primauté de Pierre. Los anglicans admirent que l’Écriture et la tradition sont en faveur de cette primauté, mais ils la définirent une primauté d’honneur et de responsabilité, non de juridiction, à la grande rigueur un « pouvoir de direction spirituelle », a spiritual leadership. D’ailleurs, en 1924 et 1925, des voix anglicanes exprimèrent le regret de toutes ces concessions aux catholiques. L’année 1925 se passa à discuter des mémoires pour et contre la papauté et, en janvier 1926, la mort du cardinal Mercier arrêta les conversations.

Comme l’écrivit l’évêque de Darham, Henson (sympathisant aux madernistes) : « L’Église d’Angleterre est malvenue de négocier avec d’autres Églises, tant qu’elle n’aura pas précisé sa propre doctrine et fixé loyalemant quel idéal de christianisme elle entend préconiser. » La remarque était hargneuse, mais vraie. On a pu voir, par l’exposé des querelles intestines qui dévorent aujourd’hui ce qui fut l’anglicanisme, que l’on ne sait quel credo est celui de l’Angleterre, ni quelle Église est aujourd’hui l’Église d’Angleterre.

La poussée moderniste.


Ce qui aggrave chaque jour cette situation, c’est l’infiltration de la pensée moderniste non seulement parmi les broad clergymen, mais jusque parmi les anglo-catholiques.

On a pu voir, en 1932 et 1933, avec quelle rapidité cette infiltration se continuait. C’était à l’occasion de la réunion des anglicans avec toutes les sectes non conformistes dans l’Inde méridionale. Quand parvint à Londres la décision prise en mars 1932 de réaliser l’intercommunion, quelques anglo-catholiques, assez peu romanisants mais éloignés des thèses modernistes, protestèrent contre cette démarche ; mais l’évêque Headlam, de Glocester, leur répondit dans la presse,

les accusant d’étroitesse de vues et d’être de mauvais théologiens ! L’évêque d’Oxford, le doyen d’Exetcr et le professeur Watson, d’Oxford, prirent parti pour le docteur Headlam et engagèrent la polémique. Il se trouva vingt évoques d’Angleterre pour signer avec le fameux liâmes, évêque de Birmingham, un manifeste favorable à la tentative des ministres de l’Inde. Un nombre important de chefs de public schools, de doyens de chapitre, d’archidiacres, d’ecclésiastiques et même de laïques influents s’exprimèrent de même, allant jusqu’à écrire que le sacerdoce n’est pas d’institution divine.

En 1931, à l’occasion d’une conférence traitant de la doctrine eucharistique, on avait pu constater que l’accord était impossible sur l’acceptation de formules précises. Les modernistes refusèrent de rien abandonner de leurs thèses destructrices de la foi.

A la suite de Harnes, évêque de Birmingham, de Headlam, évêque de Glocester, de Henson, évêque de Durham, et du docteur Inge, doyen de Saint-Paul de Londres, les anglo-catholiques ont laissé s’orienter vers le modernisme quelques-uns de leurs meilleurs sujets : N.-P. Williams, D. D. de Christ Church, le Bév. Goudge, professeur de théologie au même collège, le Bév. Wilfred L. Knox, supérieur de l’Oratoire, le Bév. Milncr White, fellow de King’s collège. Lui-même, l’évêque CharlesGore, si vénéré parmi les anglocatholiques, ne manquait aucune occasion d’opposer aux thèses catholiques des affirmations, dont l’origine devait être recherchée chez les écrivains de l’école moderniste. L’un de ses discours les plus écoutés sur la primauté du pape, qu’il prononça à la chapelle de Grosvenor, n’était qu’un tissu de propositions prétendues historiques, pleines de la pensée d’Auguste Sabatier. Cette attitude explique qu’il ait pu écrire, en 1920, son livre intitulé Roman catholic daims, où il note et excite l’aversion à l’égard de Borne du groupe anglo-catholique.

C’est pourquoi la principale difficulté qu’aiment à soulever les historiens anglo-catholiques d’aujourd’hui est l’infaillibilité pontificale. Harnack lui-même est plus près des thèses catholiques qu’un historien comme Puller ou un théologien comme Charles Gore ! C’est sur cette question de l’Église et de la papauté que se jouent, à l’heure actuelle, les divergences entre catholiques et anglicans de toutes nuances, et principalement modernistes. Pour ne citer que les derniers traités parus, nous rappellerons Wakeman, Introduction to the liislory of the Church of England, 1927 ; Spencer Jones, Calholic reunion, 1930 (très antipapal) ; Bév. G.-F. Pollard, Ecclesia anglicana, 1930 ; Langford. lames, The bridge Church, 1930 (défense passionnée de l’indépendance del’Église d’Angleterre), et The Church undthe Church of England, 1930 ; Bishop Headlam, The Church of England, 1924 ; F.-W. Puller, The primitive saints and the see of Rome, 1893 ; nouv. éd., 1914 : William-Ernest Bect, The rise of the papacꝟ. 1910 ; G. Edmunson, The Church in Rome in the firsl cenlury, 1913 ; C.-F. Bogers, Rome and the earlij Church, 1925. Si l’anglicanisme désorienté de l’heure présente divisé contre lui-même, de moins en moins attaché à sa doctrine traditionnelle qu’il laisse s’effriter ou qu’il abandonne aux attaques des non-conformistes et des modernistes, se laisse envahir par le flot moderniste, il ira, par une voie rapide et fatale, à l’agnosticisme et à la libre pensée. Ce que le luthéranisme et le calvinisme sont devenus, sur le continent, sous l’incessante action des théologiens libéraux et modernistes, et contre quoi l’on commence, un peu partout, à réagir, l’anglicanisme le deviendra à son tour : un chaos de systèmes philosophico-religieux, d’où la foi s’évanouira et où régnera la pensée anarchique d’esprits étrangers à la vie du Christ.